samedi, juin 24, 2017

Salim Laïbi critique le livre de Stéphane Blet




On l’attendait avec impatience l’extraordinaire livre de Monsieur Stéphane Blet. Ce dernier annonçait depuis un long moment déjà la sortie imminente d’un livre sur la franc-maçonnerie qu’il affirmait être révolutionnaire et riche de secrets jamais révélés à ce jour. On allait voir ce que l’on allait voir. Le livre a enfin été publié aux éditions Kontre-Kulture, avec plus ou moins de retard, mais enfin édité. L’objet en lui-même est raté, couleur bleu foncé très sombre, quatrième de couverture illisible, le texte est parsemé de coquilles avec une utilisation très régulière de petites majuscules dans le corps du texte ce qui rend la lecture pénible. Ce qui est encore plus choquant, c’est la petitesse du livre, moins de 120 pages pour un format de 19 par 13 cm. Le tout à 15 € ! Ce livre ne contient pas 150 000 caractères et ils ont eu le culot de le mettre en vente à 15 €. Pour cela, ils ont dû recourir à un titre très racoleur, "Franc-maçonnerie, l’effroyable vérité". Ma foi pourquoi pas, à condition toutefois d’apprendre au moins quelque chose de nouveau.

Disons d’emblée que le livre de Stéphane Blet est nul, on ne compte plus les erreurs… L’une d’elles, venant d’un prof de musique au Conservatoire de Paris, compositeur renommé et interprète internationalement reconnu, nous a fait sursauter : l’histoire bidonnée de l’enterrement, soi-disant « spécial », réservé à Mozart ! En fait, Mozart a eu un enterrement dit de « troisième classe », comme c’était le cas pour tout moyen-bourgeois de son époque. Il a eu une messe d’enterrement puis a été enseveli dans une fosse anonyme contenant 16 corps, En parfaite conformité avec la loi promulguée par l’empereur Joseph II (son ami : Mozart avait le titre de « musicien impérial ») par mesure de salubrité : une épidémie de choléra sévissait alors et il fallait éviter qu’il y ait, dans le cimetière, une affluence qui pouvait être une source de dissémination d’agents pathogènes en ville. Même chose pour le peu de gens qui ont suivi le cortège : l’empereur avait limité les déplacements de foule dans les cimetières. Las but not least, il y eut bien au moins un franc-maçon parmi ceux qui suivirent le convoi funèbre ! Certes, Mozart aurait pu bénéficier d’un grand enterrement, mais il habitait alors à Vienne, une ville où il était détesté pour ses idées, pour ses dettes de jeu, etc. En effet, Mozart était accablé par de très importantes dettes de jeu qui lui valurent l’aversion et l’hostilité de nombre de ses amis. Rappelons qu’il n’était pas autrichien, mais sujet du Saint Empire germanique ! Ses amis y organisèrent néanmoins une semaine après sa mort un grand office religieux où on interpréta son Requiem et il y en eut un autre à Prague, réunissant des milliers d’admirateurs.


Autre fake news plus grave, car portant sur la doctrine maçonnique qu’il est censée connaître par cœur ! Stéphane Blet croit savoir que LPD a comme signification ultime la formule anti-royaliste « Foule aux pieds les lis ». Ce serait un des grands mystères inconnus de la maçonnerie, un truc totalement caché au public. Manque de bol, si « LPD » existe bien (liberté de passer, liberté de penser, etc.), la traduction qu’en donne Blet ne provient pas des archives maçonniques largement fouillées par Bernard Faÿ sous Vichy et ailleurs, mais d’un roman à succès d’Alexandre Dumas consacré à Cagliostro, « Joseph Balsamo », décliné plus tard sous la forme de téléfilm ! C’est Dumas qui l’a inventée de toutes pièces pour les besoins de son intrigue ! Tu parles d’un « secret ultime » : c’est une invention de romancier, connue de tous les amateurs sérieux depuis le XIXe siècle !


Disons-le tout de go, Blet est vraiment mauvais : tout au long du XVIIIe siècle, la maçonnerie a fonctionné sans les rites de perfection qu’a apportés le REAA (rite écossais ancien et accepté) de Ramsay : il n’y avait alors que les grades d’apprentis, de compagnons, de maître, point final. Ce sont ces grades limités que l’on retrouve aujourd’hui dans le rite français, très pratiqué notamment dans la GLNF (c’est en outre le rite de son grand maître J-P Servel) mais surtout, d’une autre manière, beaucoup plus laïciste, au GODF dont il représente aujourd’hui le rite officiel ! Ce n’est donc pas le REAA qui est le rite officiel du GODF, mais le rite français ! Or dans ce rite on ne trouve pas de Kaddosh, etc., c’est un retour à la période de l’avant-écossisme, quand les loges dites bleues constituaient l’essentiel de la maçonnerie, avec une limitation stricte des loges de perfection (limitées à quatre, en général, et non pas à 30 comme dans le REAA). Comment Blet explique-t-il, si le REAA est « plus épouvantablement juif et menaçant », qu’il ne soit pas celui que met en avant le GODF et qu’au contraire, le retour vers la période pré-écossiste soit en ce moment en vogue ?


Ce que dit Blet est d’ailleurs en totale contradiction avec ce que disait Papus, dont il se réclame avec ferveur, car Papus estimait dans "Ce que doit savoir un maître maçon", que l’écossisme était la vraie base spirituelle de la maçonnerie, tandis que tout le reste ne serait que du maçonnisme de bas étage pour matérialistes, athées et laïcistes, en particulier le rite français !

Le très antisémite Stéphane Blet qui passe son temps sur sa page Facebook à insulter les juifs a pour objectif, dans ce livre, d’ « enjuiver » totalement la franc-maçonnerie, afin de rendre les juifs seuls responsables de toutes les magouilles de cette mafia, dédouanant au passage toutes les autres catégories de maçons. Pourtant, Dieu seul sait que l’on peut citer ici des centaines de francs-maçons catholiques ou musulmans qui n’ont strictement rien à voir avec le judaïsme et qui ont pourtant magouillé et continuent de le faire. Sa stratégie ridicule, son grand secret, son arcane royal, est en fait celui de remplacer les illuminati, la secte d’Adam Weishaupt, tout simplement par le B’naï B’rith ! Il ne s’en cache même pas, le chapitre huit porte bien son nom à la page 55 : "Vous cherchez les illuminati ? Oubliez-les, voici les B’naï B’rith !"

Le reste du livre n’est que remplissage et broderie grossière afin d’essayer d’en faire dépasser les 100 pages et pouvoir le vendre à plus de 12 €. Prenons pour exemple le chapitre "Le terrible jeu des citations" à la page 111. C’est un copier-coller d’un nombre connu de citations que l’on peut retrouver sur Internet très facilement. Quant au chapitre concernant les mots de passe et autres secrets dévoilés, ils sont connus des curieux depuis plusieurs siècles déjà. On le voit également à la fin de cet ouvrage, juste après la table des matières, photographié avec son tablier de maçon en train de faire quelques gestes ridicules. Nous déplorons seulement l’absence de tous ses diplômes occultistes accrochés chez lui sur ses murs et qui prouvent son appartenance aux pires sectes ésotéristes satanistes comme la Golden Dawn, l’OTO… D'ailleurs, il évitera soigneusement de parler de satanisme et de son expertise concernant Aleister Crowley qui se faisait lui-même appeler "The beast", bisexuel, amateur de sorcellerie, de drogues en tous genres, de sacrifices rituels d’enfants et dépravé sexuel notoire assumé ! Par contre, il ose citer Aleister Crowley comme étant un grand penseur de la tradition au même titre que René Guénon ou Julius Evola ! Ce qui est en soi une insulte inqualifiable surtout lorsque l’on sait ce que ces deux grands traditionalistes pensaient de cet escroc et agent double de la couronne britannique qu’est Aleister Crowley (lire le courrier de René Guénon à Julius Evola écrit au Caire le 29 octobre 1949. Cf. nos 4 articles sur la question ici) !

On trouve ici et là dans ce livre quelques preuves de l’appartenance de Monsieur Stéphane Blet à ce monde interlope de l’occultisme maçonnique parisien, notamment quant au fait de différencier Satan de Lucifer ! Concept qu’aucun croyant orthodoxe ne peut comprendre, lui qui se dit catholique (sic).

Bref, tout ceci pour en arriver à cette conclusion. Ne pas tomber dans ce piège grossier fomenté par Soral et ses nouveaux amis. D’autant que Monsieur Stéphane Blet a comme amis un grand nombre de juifs comme Jean-François Kahn… Lui l’ami intime de Pierre Bergé qui nous la joue dissident ! Il est fort probable qu’il joue un rôle, un jeu d’acteur fort médiocre au demeurant et ce livre indigent en est encore une fois une preuve supplémentaire. Rappelons également que son ami Alain Soral a tenté une initiation maçonnique en 2006 selon sa sœur (lire son dernier livre Frangin). Si vous voulez vous instruire sur le sujet de la franc-maçonnerie, nous vous invitons à lire le dernier ouvrage, autrement plus sérieux, de Johan Livernette par exemple, "La franc-maçonnerie, 300 ans d’imposture", un gros pavé, offrant dix fois plus d’informations précieuses. Nous vous invitons également à lire les livres de Monsieur Olivier Roney concernant Gustave Flaubert et la franc-maçonnerie, le GODF en particulier… Surtout ne pas perdre votre temps à lire ce Que sais-je ? médiocre et sans intérêt.

Source : http://www.lelibrepenseur.org/lecture-a-eviter-franc-maconnerie-leffroyable-verite-de-stephane-blet/

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