samedi, avril 11, 2009

Emerson et Lin-chi


Dans son livre "L’âge d’or du Zen", John Wu écrit :

Il existe une curieuse coïncidence entre l’idée de l’"homme véritable" de Lin-chi et celle du "Soi primitif" d’Emerson. Comme Lin-chi, Emerson préconisait l’appui sur soi ou la confiance en soi, et il insistait sur le fait que le soi en lequel il faut placer sa confiance n’est pas l’ego individuel, mais un soi fondamental. Que l’on me permette de citer ici un passage de "La Confiance en soi" d’Emerson, peut-être trop familier pour être compris dans sa véritable lumière, mais qui révélera, je l’espère, son éternelle fraîcheur si on le lit dans le contexte étranger du tch’an :

Le magnétisme qu’exerce toute action originale s’explique quand on recherche la raison de la foi en soi. Qu’est-ce que le Soi primitif sur lequel peut se fonder une confiance universelle ? Quelles sont la nature et la puissance de cette étoile qui, dépourvue de parallaxe et d’éléments calculables, déroute la science, et qui émet une radiation de beauté jusque dans les actions banales et impures dès qu’apparaît le moindre signe d’indépendance ? La recherche nous mène à cette source, essence en même temps du génie, de la vertu et de la vie, que nous appelons Spontanéité ou Instinct. Nous voyons dans cette sagesse primordiale l’Intuition, tandis que toutes les actions ultérieurs sont des enseignements. C’est dans cette force profonde, dernier fait au-delà duquel l’analyse ne peut pénétrer, que toutes choses trouvent leur origine commune. Car le sentiment d’être qui s’élève, on ne sait comment, dans l’âme aux heures calmes, n’est pas étranger aux choses, à l’espace, à la lumière, au temps, à l’homme, mais ne fait qu’un avec eux et procède finalement de la même source que la vie et l’être.

Ce "Soi primitif", cette "étoile qui, dépourvue de parallaxe et d’éléments calculables déroute la science", correspond exactement, selon moi, à l’"Homme Véritable sans aucun titre" de Lin-chi, qu’il appelle aussi parfois "l’homme indépendant du tao" (wu-i tao-jen) ou simplement "cet homme-ci". Partout, dans ce qui a été consigné de ses écrits et de ses actes, il indiquait cette "étoile dépourvue de parallaxe", parfois directement, à d’autres moments de façon plus détournée. Il était toujours aux aguets, à tout propos et sans propos, du "moindre signe d’indépendance" chez ses moines, bien que la plupart du temps il fût déçu. Il voyait en chacun et en tous le "Soi primitif" attendant avec une ardente patience toute occasion de briser la coquille du petit ego de façon à avoir, libéré lui-même, les mains libres pour libérer l’ego de ses liens d’ignorance et de désirs auto-imposés. Mais quelle vision pathétique ce devait être pour Lin-chi que celle de la plupart de ses élèves résistant à leur état originel d’êtres nés libres pour rester confortablement dans l’esclavage. Tournant le dos à l’Intuition, ils préféraient recevoir de l’enseignement pour des "enseignements" sans valeur. Portant en eux la "mère même de Bouddha", ils tournaient leurs regards en dehors à la recherche d’un Bouddha extérieur. Pourquoi ces chercheurs avaient-ils quitté leur maison pour n’appartenir qu’à une autre maisonnée, se demandait souvent Lin-chi. Derrière toute sa rudesse se cachait une ardente compassion, d’autant plus inévitable qu’elle n’était pas aveugle mais résultait d’une illumination. Sous ce jour, on voit aisément que tous ses cris et ses coups jaillissaient en réalité d’un cœur plein de compassion.
John Wu "L'âge d'or du Zen", traduit de l'anglais par F. Ledoux, éditons Marchal.

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