mercredi, janvier 28, 2009

Des moines châtelains disciples d’un pauvre SDF nommé Bouddha

L'humble Vihâra de Segrais


Email de Léa :
"Eh, oui, dans le bouddhisme aussi (surtout la Nouvelle Tradition Kadampa) il y a des dérapages. Le bouddhisme vous enseigne que "le bien matériel n'est pas important", ce qui est vrai ; quand vous regardez de très près ce que certaines traditions font, c'est très choquant."

"Le bouddhisme NTK par exemple a acheté le magnifique château de Segrais près du Mans (72), possède des hôtels, des restaurants, des World Speace café, de très nombreux centres dans le monde et cherche toujours à se développer. Les élèves sincères se font piéger. Ils travaillent bénévolement à plein temps (35 à 60 h/semaine) pour entretenir et rénover tous les centres, cotisent, paient les enseignements, achètent les livres, statuettes et autres objets."
" Allez sur leur site vous trouverez une demande : "les séjours d'entraide : venez découvrir le séjour d'entraide 35 h de bénévolat par semaine. Des repas végétariens vous seront servis, vous serez logés en dortoir et vous pourrez assister librement aux poujas et aux enseignements ...". NE TROUVEZ VOUS PAS CELA CHOQUANT ?"

Certains gourous considèrent que la vie de château rend le Samsara plus agréable, chère Léa.

Le professeur Jacques Marseille, Historien économiste, professeur à l'université Paris I-Sorbonne, auteur du livre "L’argent des Français", évoque la vieille utopie de Thomas More concernant la redistribution équitable des richesses. Sans l’avidité des exploiteurs, chaque citoyen français a droit à une rente mensuelle de 750 €, qu’il travaille ou pas.
Cette manne permettrait de mener la vie contemplative de vos rêves sans trimer pour un gourou. En guise de la " bible " du dernier charlatan à la mode, vous trouverez dans les écrits de Tchouang-tseu (4ème siècle av. J.-C.), par exemple, tout ce qu’il ne faut pas savoir pour réintégrer l’état primordial.

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Une bonne nouvelle :

Geneviève informe Bouddhanar que le cancer de sa mère a régressé grâce au traitement du docteur Scohy, grand prescripteur de vitamine C. Il est important de faire connaître les thérapies différentes, moins mercantiles et plus efficaces :
http://bouddhanar-6.blogspot.com/2009/01/la-vitamine-c.html
Le cancer selon le docteur Gernez
http://bouddhanar-9.blogspot.com/2009/01/le-cancer-selon-le-dr-gernez.html



dimanche, janvier 25, 2009

Semaine du Tibet, 27 janvier au 15 février 2009, Nantes

L’arrivée du communisme au Tibet provoqua de profonds bouleversements dans la société féodale des lamas. L'événement le plus important n'était pas la fuite du Dalaï-lama, c'était la libération des serfs...

Des hiérarques, qui avaient profité du système esclavagiste des lamas, furent incarcérés et maltraités par les communistes. Mais les maîtres spirituels ne furent pas tous inquiétés. Ceux qui n’exploitaient pas leurs élèves, comme le Nyingmapa Chang Chub Dorjé, le maître du célèbre Namkaï Norbu, restèrent à la tête de leur communauté. Il faut dire que la communauté de Chang Chub Dorjé pratiquait une forme d’autogestion. L’autogestion ne devrait-elle pas être appliquée par tous les mouvements spiritualistes ?


La police vient d’arrêter deux prêtres de l'église catholique de Saint Vincent Ferrer, à Delray Beach, en Floride (USA), qui détournaient les dons de leurs ouailles pour vivre en grands seigneurs (casino, jeunes femmes...). Les prisons seraient rapidement encombrées par les prédicateurs et les gourous si les législateurs étaient plus attentifs aux réalités du spiritualisme contemporain. Les dirigeants de sectes puissantes sont rarement inquiétés par le pouvoir politique. Au contraire, ils bénéficient souvent de soutiens et de financements des services secrets.

Jacques a contacté Bouddhanar pour signaler que la propagande lamaïste s’obstine à vouloir nous faire gober le mythe hollywoodien du Tibet heureux d’avant Mao :

En effet, l’association "Culture en exil" organisera du 27 janvier au 15 février 2009 un festival culturel tibétain à Nantes. Le député-maire de cette ville, le socialiste Jean-Marc Ayrault, à remis la médaille d’or de la ville au Dalaï-lama au mois d’août 2008.

Durant une semaine se succèderont conférences, expositions, débats, témoignages, dégustations, activités artistiques, concerts et bien d’autres évènements, qui permettront aux Nantais de découvrir la culture tibétaine.

Cette semaine s’inscrira dans le cadre de la commémoration du 50ème anniversaire du soulèvement du peuple tibétain à Lhassa de mars 1959 et de la fuite du Dalaï-lama.

Avec la participation de :

Tashi Wangdi, représentant en Amérique du Dalaï-lama ;
Thupten Gyasto, président de la communauté tibétaine de France ;
Marie Holzman, sinologue ;
Marcelle Roux, présidente de France Tibet ;
Frédéric Lemalet, photographe.


L’exposition photographique de Frédéric Lemalet ne procurera pas le même malaise que cette photo prise par le célèbre tibétologue Giuseppe Tucci :




Le professeur Tucci a photographié une partie de l’autre face du lamaïsme d’avant Mao.
http://bouddhanar-7.blogspot.com/2007/10/tucci-au-tibet.html

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Email d’AQUARI :

Merci d'avoir publié le texte, " Les origines du bouddhisme tibétain ", sur votre blog. Cela fait de nombreuses années que j'essaye d'informer les milieux Bouddhistes sur l'imposture des Lamaïstes. Après les avoir côtoyé, j'ai eu de nombreuses NDE qui m'ont ouvert les yeux de l'âme depuis les mondes spirituels. J'ai réalisé avec stupeur qu'il y a beaucoup de travail à effectuer pour que la vérité se manifeste sur terre afin de chasser les mensonges qui ont infesté toutes les religions et les sectes

jeudi, janvier 22, 2009

La journée de l'émancipation des serfs

Catherine, fidèle lectrice du blog, nous informe que les Tibétains vont désormais commémorer l’émancipation des serfs le 28 mars de chaque année.

Les législateurs tibétains ont proposé cette commémoration, peu glorieuse pour la diaspora lamaïste, lors de la deuxième session annuelle de la 9ème Assemblée Populaire Régionale du Tibet.

Issu d’une famille de serfs, Monsieur Legqog est le président du Comité Permanent de l'Assemblée Populaire Régionale du Tibet. Il a estimé que la "Journée de l'émancipation des serfs" renforcera le patriotisme des Tibétains et dénoncera la clique du dalaï-lama. "Pendant ces cinq dernières décennies, la politique, l'économie et la culture du Tibet ont connu de grands changements… Les anciens serfs sont devenus maîtres du nouveau Tibet socialiste", a déclaré Monsieur Legqog.

Parmi les législateurs figure un homme sous le nom de Gaisang, 62 ans, PDG de la Yamei Ethnic Handicraft Ltd. Corp.

"La Journée de l’émancipation des serfs’ aurait dû être créée plus tôt", a-t-il déclaré, ajoutant : "Il faut nous souvenir de ce jour en mémoire de nos ancêtres, qui ont été serfs, et pour enseigner aux jeunes cette partie de l’histoire."

"Mes parents, qui étaient serfs, sont morts il y a quelques années", a-t-il ajouté.
Cet entrepreneur est né dans une famille de tralpa (serfs tibétains) dans le district de Bilang de Xigaze. De son enfance, il ne se rappelle que de ses pieds nus, de ses vêtements rapiécés et d’un fouet en cuir.

LIRE LA SUITE :

http://bellaciao.org/fr/spip.php?article78553


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Obama, la Chine et la Russie

L’historien Webster G. Tarpley est persuadé qu’Obama, la nouvelle marionnette de l’empire anglo-américain, recherchera la confrontation avec la Russie et la Chine.

Voir la vidéo de l’interview :
http://bouddhanar-9.blogspot.com/2009/01/obama-la-chine-et-la-russie.html

mardi, janvier 20, 2009

LES ORIGINES DE BOUDDHISME TIBÉTAIN


LES ORIGINES DE BOUDDHISME TIBÉTAIN ou LA FACE CACHÉE DU DALAÏ-LAMA

Aquari, lecteur de Bouddhanar, nous fait découvrir le livre de Marie Gallaud " LA VIE DU BOUDDHA et les doctrines Bouddhiques ", paru en 1931.

" Au VIIe siècle, alors que le Bouddhisme commençait à décliner sensiblement dans l’Inde, il pénétra au Tibet ; et là, ce fut encore grâce à la protection d’un roi, Sron-bçan-sgam-po (stimulé par ses épouses, deux princesses, l’une népalaise, l’autre chinoise), qu’il prit, rapidement, de fortes racines. Mais il dut subir une large incorporation de Chamanisme ; aussi les esprits démoniaques tiennent-ils une considérable place dans le Bouddhisme tibétain. Aux Asura et Rakshasa, hérités du Brahmanisme, ont été ajoutés les groupes infernaux locaux de l’ancien culte " Bon ". Pour apaiser ces mauvais esprits, s’en concilier de bienfaisants et atteindre au salut, les lamas (moines) et les fidèles s’adonnent aux pratiques d’une magie compliquée dont le rituel remplit presque vingt-deux volumes du Canon tibétain, groupés sous le nom de Rgyud (Tantra).

Dans les grandes salles des monastères, chaque matin, à l’aube, des textes sacrés sont psalmodiés, des hymnes sont chantés à la gloire des Bouddhas et des Bodhisattvas. On y récite aussi, pour neutraliser les mauvaises influences et en susciter de favorables, des Dhâranî canoniques, sortes de courts Sûtra où sont insérés des Mantra tibétains, formules magiques qui, le plus souvent, paraissent dépourvues de sens et ne pouvoir être traduites en aucune langue.Les Dhârani se récitent partout, à toute occasion. Il en est qui sont dites particulièrement efficaces pour chasser la maladie, procurer la richesse, obtenir la faculté de se rendre invisible, etc. Certaines effacent même " les cinq crimes inexpiables" : le parricide, le matricide, le meurtre d’un Arhat, celui d’un Tathâgata, et la division jetée dans la Communauté. Il en est de longues et de courtes; il en est que l’on ne prononce qu’une fois, d’autres vingt-et-une, d’autres huit mille, d’autres trois cent mille; certaines doivent être accompagnées de menues cérémonies confectionner un disque de bois de santal qui représente le monde, faire l’offrande d’une lampe de beurre fondu, etc...
Voici quelques fragments d’hymnes, et des Dhârani qui appartiennent au Canon tibétain :

"Le Tathâgata, pour le bien des êtres, est venu ici, du sein de la demeure incomparable des dieux du Tusita, où il jouissait de la bénédiction d’être entouré des dieux. Puisse-t-il, par cette bénédiction, apporter le calme à tous les êtres !"
" Celui qui, sur le bord de l’eau, entouré d’une guirlande d’herbe Kuça a fait apparaître des manifestations de prodiges extraordinaires, et a eu la bénédiction d’être vénéré par le roi des Nâgas, puisse-t-il, par cette bénédiction, apporter le calme à tous les êtres !"
" Celui dont le corps, par les signes de ses qualités étendues, a un éclat d’or semblable à celui de la lune, qui tient dans la main le livre, l’épée éternelle de la science ; le noble Manjuçri-kûmâra-bhûta est une cause de bénédiction. Puisse, par cette excellente bénédiction, la prospérité venir ici en ce moment !"
" Celui dont le corps, par les signes de la magnanimité, fait par son éclat envie à la lune, qui tient le lotus dans sa main, dont les signes ne présentent aucun défaut, le noble Avalokiteçvara est une cause de bénédiction. Puisse, par cette excellente bénédiction, la prospérité venir ici en ce moment".

Dhâranî pour calmer toutes les maladies :

Adoration à tous les Bouddhas et Bodhisâttvas. Voici le discours que j’ai entendu une fois : Bhagavat résidait à Crâvasti au Jetavana, dans le jardin d’Anâthapindika. Bhagavat dit aux Bhiksus :

" Bhiksus, saisissez bien cette énumération de la loi, répétez-la souvent, pénétrez-vous-en bien, enseignez-la largement aux autres"
" Caleme, Caleme, panakokila, Crimati, Kundale, dundabha, indrani, mukke, Svâhâ."
" Voilà la base du Mantra employé par ceux qui souffrent d’indigestion, de goître, de mélange du sang et de la bile, d’hémorroïdes, de maladies de l’anus, de gonorrhée, de toux, de fièvre, de maux de tête, de point de côté ; et par les Pretas (Esprits errants, malheureux à cause de leur Karma, et toujours affamés de besoins terrestres). Cette base de Mantra a été proclamée par le Tathâgata, Arhat parfait et accompli Buddha. Or, le Buddha est le premier de tous les êtres, l’absence de passion est la première de toutes les lois, la Confrérie est la première de toutes les troupes. Par cette parole de vérité, puisse tout ce que j’ai mangé, bu, apprêté, goûté, être bien et heureusement digéré ! Svâhâ !" Quand Bhagavat eut prononcé ces paroles, les Bhiksus réjouis louèrent hautement le discours de Bhagavat " Fin de la Dhârani sublime qui calme toutes les maladies."

Dhâranî-Amulette :

" Adoration aux trois joyaux ! Adoration à Amitâbha !" llimitimele, hanesahane - un tel - jvara bandha me, eka hekana, hrihikam, caturcakana, snitya jvarana Svâhâ. " "On n’a qu’à écrire ce rite et l’attacher à son cou pour être exempt de fièvre."
" Dhârani qui purifie des cinq crimes inexpiables : Adoration au noble Manjuçri."
" Om bakyam téjâla. Om bâhya se se svâ. Om bâkya manjaye. Om bhâlkya nilthaya. Om bakye yanama. Om bâkya de noms." " Si on lit vingt-et-une fois ce nom de Manjuçri, toutes les obscurités provenant de la perpétration des cinq actes, inexpiables sont purifiées."
Dans le Lotus de la Bonne Loi, les stances suivantes sont attribuées à Ca-kyamourli.
"Souvenez-vous, souvenez-vous d’Avalokiteçvara, de cet être pur, ne concevez à ce sujet aucune incertitude; au temps de la mort, au temps où la misère accable l’homme, il est son protecteur, son refuge, son asile... Si un homme vient à être précipité dans une fosse pleine de feu par un être méchant qui voudrait le détruire, il n’a qu’à se souvenir d’Avalokiteçvara, et le feu s’éteindra de lui-même comme s’il était arrosé d’eau".

Parmi les incantations en usage au Tibet, la plus fréquemment répétée est celle-ci ; " Om ! mani padme, hum ", que l’on appelle :" la science en six syllabes", et qui se traduit pas Om ! (Syllabe sacrée brahmanique). Le joyau dans le lotus, Hum (syllabe magique tibétaine). Ce mantra aurait été enseigné aux hommes par Amitâbhâ et est récommandé par Câkyamouni dans le Karanda Vyûna sûtra. Pour ceux qui n’ont pas le temps, le courage ou la science de réciter les Dhârani et les Mantra comme il faut, les lamas tibétains ont créé le " Moulin à prière", petit cylindre de cuivre ou de bois, tournant sur un axe dont le prolongement sert de manche. Chaque mouvement de rotation imprimé à cet objet du culte équivaut à la bonne récitation des textes sacrés qu’il renferme. On a construit aussi de grands moulins que le vent ou l’eau des rivières actionnent et dans lesquels roulent sans cesse les mots magiques.

Cent ans à peine après son introduction au Tibet ; le Bouddhisme y eut un brillant et mauvais génie dans la personne du moine érudit Padmasambhava. De Nâlandâ où il enseignait, il vint à Lhasa, appelé par le roi d’alors pour lutter "bouddhiquement" contre les pratiques de grossier occultisme auxquelles les prêtres du culte "Bön" avaient accoutumé les Tibétains et que la foi nouvelle n’avait guère entamées.
Padmasâmbhava combattit en effet, et assez victorieusement, la sorcellerie indigène; mais ce fut par la magie des Tantra, qu’il importa de l’Inde et développa fougueusement. L’étrange religieux fonda à Sangyé un monastère dont les moines dits Ourzien-pa, furent vêtus et coiffés de rouge grenat. Selon les conceptions de son initiateur, la nouvelle secte rejeta, pour tous, les lois d’abstinence et, pour la majorité des religieux, le célibat. Padmasambhava prêcha, comme le Bouddha Gautama, l’indifférence absolue, mais, à l’encontre du très moral fondateur du Bouddhisme, il alla jusqu’à proclamer la non-distinction entre le bien et le mal, la vertu et le vice. Aussi les nombreux alcooliques et autres pécheurs du Tibet se réclament-ils encore de ce maître indulgent qui lui-même, prétendent-ils, n’était pas sobre. De plus, le novateur recommandait aux coupables de ne point regretter leurs fautes et de s’en remettre au Véhicule magique, le Tantrayâna, pour assurer leur salut par les mantra et les mandala (cercles, magiques sur lesquels on dispose, suivant des règles compliquées, des figures de divinités, des ornements et des emblèmes).

Le résultat fut désastreux et, au IXe siècle, un souverain du Tibet crut devoir ramener ses sujets au culte des dieux autochtones; il chassa les moines, des monastères devenus nombreux et opulents. Mais il fut assassiné par un lama rouge et ses successeurs revinrent au Bouddhisme sophistiqué de Padmasambhava. Au onzième siècle, il y eut des tentatives de réforme : la première, celle du savant moine Atîça qui avait étudié à Crîvijaya (Sumatra), marqua peu; la seconde, celle du lama Marpa, qui fut le rude Maître du grand poète ermite Milarepa, tendit à donner aux religieux le goût de l’ascétisme et de la méditation. Mais la sorcellerie Bon et la magie tantrique qui s’étaient interpénétrées, demeurèrent vivaces. Au Xllle siècle, le Bouddhisme tibétain fit néanmoins de l’apostolat et gagna aux doctrines hétéroclites du lamaïsme le petit-fils de Gengis Khan, Kubilaï, et ses Mongols, qui devaient bientôt conquérir la Chine et faire trembler tout l’Extrême-Orient. Vers la fin du XIV° siècle, surgit un pieux et puissant réformateur : Tsong-Kha-pa. Il fonda le monastère Galdan à Lha-sa, où les moines durent, pour leurs bonnets, revenir à la couleur bouddhique : le jaune, et dont la règle rétablit les anciennes austérités jeûne, abstinence d’alcool, célibat, mais non le voeu de pauvreté. La nouvelle secte dite des Gelug-pa (les Vertueux), prima bientôt par le nombre la secte des Ourzien-pa, fondée par Pamasambhava, mais ne la convertit point, et même en subit peu à peu la pernicieuse influence. Actuellement, si les Gelug-pa demeurent, par leur discipline, supérieurs aux Ourzien-pa, ils ne s’en distinguent guère au point de vue des pratiques de sorcellerie.

Tsong-Kha-pa, sans le vouloir, avait instauré une quasi-divinité de plus, sa sainteté l’ayant fait considérer comme une incarnation du Bodhisattva Padmapani-Avalokiteçvara (Chenrési, en tibétain), incarnation qui devait être le lot de chacun de ses successeurs, portant après lui le titre de Grand-lama du Tibet. L’influence toujours croissante du chef suprême des Congrégations lamaïques, aboutit, vers 1640, à la déposition du prince régnant alors à Lha-sa, et à la fusion des pouvoirs spirituel et temporel dans les mains vénérées du Grand-Lama qui devint à cette occasion: le Dalaï-Lama (Lama Océan. ou universel). Un roi mongol avait puissamment aidé à ce coup d’État qui fut ratifié par le suzerain du Tibet, l’empereur de Chine.

Depuis bientôt trois cents ans, le Bouddhisme tibétain a donc été complètement libre de donner la mesure de ce que ses méthodes peuvent réaliser pour le bien ou le malheur des hommes.

Plusieurs voyageurs, orientalistes ou missionnaires, nous avaient apporté déjà de précises indications sur le Tibet. Mais les notes de route et de long séjour récemment publiées par Mme Alexandra David Neel ont une particulière valeur ; nul ne pouvant soupçonner leur auteur de manquer d’information, ni de bienveillance envers son sujet d’étude, car elle se dit bouddhiste, dame-lama, et mère adoptive d’un lama authentique. Elle a interviewé le Dalaï-Lama, le Tachi-Lama, des lettrés, des philosophes, de grands mystiques et des magiciens; elle a vécu parmi le peuple. Elle a porté la robe, la toge et le bonnet des lamas jaunes, le collier de cent huit rondelles découpées dans cent huit crânes humains, et le poignard magique; elle a soufflé dans le kangling, trompette rituelle faite d’un fémur humain. Elle a recherché toutes les initiations accessibles, tous les entraînements aux pouvoirs "supernormaux" ; elle est même parvenue à créer un fantôme, dont un témoin constata l’existence, et qu’elle eut, après six mois de vie commune, grand peine à faire rentrer dans le néant. Nul voyageur occidental n’avait jamais, au " Pays des Neiges " accompli rien d’équivalent.
Et malgré toute l’indulgence dont les livres de cette intrépide bouddhiste sont pénétrés, l’image du Tibet qu’elle livre au public est profondément attristante et pauvrement spirituelle !

L’ignorance, la malpropreté, l’insondable superstition, la noire misère des sujets du Moine-roi, et l’exploitation éhontée de la crédulité de ces pauvres montagnards par leurs soi-disant instructeurs, les lamas, constituent l’un des plus navrants mélanges qui soient encore en ce monde.

On comprend que le souverain d’un tel Etat le cache derrière des barrières qu’il tente de rendre infranchissables. Mme David Neel les a héroïquement franchies et nous nous en rapportons à son témoignage. Elle ne parle pas d’hôpitaux, de crèches ou d’asiles de vieillards, mais de maîtres, presque illettrés, qui n’enseignent aux jeunes tibétains, à eux confiés, que des textes liturgiques dont eux-mêmes ignorent le sens. Dans les monastères, le programme de l’instruction des novices est au contraire assez chargé : avec des éléments de philosophie et de métaphysique, les Écritures sacrées, les règles monastiques et le rituel, ils étudient la magie et l’astrologie, principales sources de leurs futurs revenus. Mais, même pendant les offices, les novices enfants et aussi les moines sont pour la moindre dissipation exposés aux coups de fouet qu’ils reçoivent prosternés, le front touchant le col. Et c’est aussi avec de rudes lanières que ceux que Mme David Neel appelle " les frères fouetteurs " font circuler la foule pour dégager le chemin des processions. Au Tibet, la peine de mort n’est pas abolie mais appliquée parfois de terrible façon. Le Dalaï-Lama, depuis quelques années, mobilise l’or et l’argent pour acheter des armes; il permet qu’on lui dise que son royaume " est au-dessus de tous les pays du monde et que lui-même est le plus grand des monarques ", tandis qu’il laisse croire à ses sujets que le roi d’Angleterre n’est que son vassal. Presque toutes les terres sont aux mains des communautés monastiques et ceux qui les cultivent demeurent réduits à l’état de véritables serfs et d’esclaves. En s’emparant de toutes les récoltes, la polyandrie règne et le brigandage sévit, forçément. Il n’y a pas de compassion envers les humains, encore moins envers les animaux que l’on exploite, envers et contre les paroles du Bouddha. Les mourants qui appellent les lamas à leur chevet sont pieusement tourmentés jusqu’à leur dernier souffle. Elle dit aussi que les Dalaï-lamas du Tibet sont des dictateurs cruelles et sans pitié, qu’ils écrasent et broient le petit-peuple dans la misère et la souffrance par des superstitions savamment entretenues, qu’ils se préparent un mauvais Karma...

Les pratiques qu’il enseignent n’ont rien à voir avec le véritable bouddhisme. Ce sont de grossières parodies qui détournent l’attention et induissent les chercheurs de vérité dans une fausse direction. On devrait parler de Chamanisme ou de Lamaïsme Tibétain mais pas de "Bouddhisme Tibétain". C’est une usurpation de nom, car le Bouddhisme autentique n’a rien à voir avec la sorcellerie, avec des pratiques magiques manipulatoires qui cherchent a violer les Lois naturelles et spirituelles (comme celle de la réincarnation). Il n’a rien à voir avec le culte de la personnalité démesuré dont bénéficie les autorités religieuses. Ce culte abrutissant a pour but de garder les masses dans la crainte et l’ignorance pour satisfaire la soif de pouvoir et de possession. Le Bouddha est justement venu pour nous libérer de tout intermédiaires inutiles qui pourrait s’interposer en tant que maître, gourou, démon ou divinité quelconque. Ce modèle de chemin, soi-disant spirituel, exporté en occident, masque le véritable Bouddhisme et déroute les vrais chercheurs.

Ici, nous voulons reproduire deux croquis de Mme Neel :

" Le premier coin du lama assistant un mourant est de l’empêcher de s’endormir, de sombrer dans le coma. Il lui signale la perte graduelle de la vue, de l’odorat, du goût, du toucher, de l’ouïe... Dans le corps maintenant insensible, la pensée doit demeurer active et attentive au phénomène qui s’accomplit. Il s’agit de faire jaillir l’esprit de son enveloppe par le commet du crâne, car s’il s’évadait par une autre voie, son bien futur se trouverait gravement compromis. Cette extraction de l’esprit est opérée par les cris rituels : Hik ! et Pet ! (difficiles à lancer comme il faut). Avant de les proférer, le lama doit se recueillir profondément, s’identifier avec celui qui vient d’expirer et faire l’effort qu’aurait dû faire ce dernier pour provoquer l’ascension de l’esprit au sommet du crâne, avec une force telle qu’il produise la fissure nécessaire pour lui livrer passage (1)".

" Dans les villages, le mort ficelé de manière à lui donner l’attitude des Bouddhas assis, est généralement posé dans un chaudron. Dès que le cadavre a été enlevé, ce chaudron contaminé par les liquides provenant de la putréfaction est sommairement lavé et l’on y prépare la soupe ou le thé offert à ceux qui assistent aux funérailles. Les cadavres conservés huit jours et même davantape répandent une odeur infecte. Ce détail ne coupe pas le moins du monde l’appétit aux trapas (religieux), qui continuent à prodiguer leurs conseils au défunt, lui signalant les chemins à suivre et ceux à éviter dans l’audelà. Ils prennent leurs repas en face du mort (2)".
(1) et (2) A. David Neel. Mystiques et Magiciens du Tibet, p. 27 et 30.

Dans la crainte de déformer quoi que ce soit en résumant les notes de Mme Neel, nous nous bornerons encore à citer textuellement les précisions suivantes :
"L’éducation cléricale tibétaine produit une petite élite de lettrés, un grand nombre de fainéants, plus quelques mystiques... De nos jours, mystiques et magiciens doivent être cherchés hors des monastères. Pour fuir leur atmosphère trop imprégnée de préoccupations matérielles, ils ont émigré vers des lieux plus difficilement accessibles... A très peu d’exceptions près, tous les anachorètes ont pourtant commencé leur vie comme novices dans l’ordre religieux... L’école de rituel magique est presque partout la plus somptueusement logée des instituions scolastiques du monastère et ses membres gradués, dénommés Gyud’pas, sont tenus en haute estime. C’est à eux qu’est confié le soin de protéger la gompa (monastère) à laquelle ils appartiennent, d’en assurer la prospérité et d’en écarter les calamités. Les membres des deux grandes écoles de Gyud qui existent à Lhassa remplissent le même office en faveur de l’Etat et de son souverain le Dalaï-Lama. Les Gyud’pas sont aussi chargés d’honorer et de servir les dieux autochtones et les démons dont l’amitié ou la neutralité ont été acquises par la promesse de leur rendre un culte perpétuel".

Les sujets d’élite, les jeunes moines désireux de conquérir par le plus court chemin l’état spirituel le plus élevé et les pouvoirs supernormaux des mystiques, vont trouver ces ermites dans leur retraite et, tout en leur rendant quelques services matériels, s’exercent sous leur direction à franchir ce que ces maîtres appellent : " le sentier direct ". Ce sentier est rude et ceux qui n’ont pas l’esprit fortement trempé y font des chutes lamentables dans la mort, la folie ou l’indéracinable superstition ; il comporte, même pour les mieux doués, des étapes de longue durée. Les procédés de formation varient selon les maîtres et les dispositions des disciples. Mme David Neel décrit les plus classiques. Au début de cette culture spéciale se trouvent des séances d’isolement dans des sites où la nature se montre particulièrement dramatique et auxquels lés plus terrifiantes légendes sont attachées. Le novice doit s’y rendre seul, s’y lier à un arbre ou à un rocher et là, sans dormir ni manger durant soit une nuit, soit trois jours consécutifs, soit plus, y appeler les déités sanguinaires les plus féroces, celles qui " sucent la cervelle des hommes et dévident leurs entrailles ". Au cours de cet exercice préliminaire, il arrive que des novices soient dévorés par des panthères ou des léopards ; d’autres, ainsi autosuggestionnés, ont de terribles hallucinations, des visions d’épouvante; les rares esprits forts constatent l’inefficacité de leurs appels.
Mme David Neel signale d’autres exercices mystiques en usage dans les thébaïdes bouddhiques de l’Himalaya: la méditation nocturne dans l’attitude des images du Bouddha assis, mais avec une petite lampe posée sur la tête de l’étudiant et que le moindre mouvement ferait choir; la récitation d’un même Mantra, répétée cent mille fois et accompagnée d’un nombre égal de prosternations en heurtant le sol avec le front qui bientôt se tuméfie et forme une plaie ; la méditation dans la solitude et l’obscurité, durant des mois et sur un même sujet au point de s’identifier à lui. Exemple: méditer sur un yak et arriver à être persuadé, à sentir qu’on a des cornes. D’autres disciples sont entraînés, pendant des années, à essayer de se représenter leur Yidam (dieu tutélaire) avec une telle concentration de pensée qu’ils doivent en arriver à le voir, à l’animer, à le toucher, à lui parler, à l’entendre et à se mouvoir avec lui. Au cours des étapes de cet exercice, certains de ceux qui parviennent à le réussir, s’arrêtent, ravis de posséder ainsi leur dieu tutélaire, et retournent avec lui aux occupations ordinaires des lamas. Leur maître, paraît-il, les laisse aller sans chercher à les détromper. Mais ceux qui vont jusqu’au bout de l’expérience et découvrent enfin que le Yidam est un produit de leur imagination, sont approuvés par le même maître qui poursuit, par d’autres épreuves, l’initiation de ces disciples plus avisés. Parmi ces épreuves est le Tcheud, " rite fantastique si savamment combiné pour terrifier les novices qui s’y exercent que certains sont frappés de folie ou de mort pendant sa célébration ", dit Mme Neel, qui a elle-même pratiqué ce rite et en a observé les phases sur de jeunes sujets dont elle évoque ainsi l’aspect: " amaigris par les austérités, vêtus de guenilles, le visage sale, éclaré par des yeux extatiques, volontaires et durs".

Nous n’entreprendrons pas de décrire entièrement, à la suite de l’auteur, le Tcheud, longue scène à un seul personnage qui se joue dans des cadres sauvages et nécessite une initiation. Il faut savoir réciter des mantra, danser en mesure "des pas dessinant des figures géométriques, virevolter sur un pied, brandir; suivant les règles divers instruments rituels, jouer du tambourin et souffler dans la trompette faite d’un fémur humain". Nous citerons seulement cette description d’une phase d’un Tcheud, célébré près d’un cadavre en putréfaction et auquel Mme David Neel assista, dissimulée dans une fissure de montagne :

" Je paie mes dettes ! Repaissez-vous de moi, hurlait le trapa. Venez, démons affamés ! Dans ce banquet; ma chair se transformera en l’objet quelconque de votre désir.
" Le jeune exalté souffla furieusement dans son kangling, poussa un cri horrible et sauta sur ses pieds si brusquement que sa tête heurta le toit de la tente qui s’effondra sur lui. Il s’agita pendant quelques instants sous la toile puis en émergea avec la face grimaçante, effroyable d’un aliéné, hurlant convulsivement et gesticulant comme en proie à d’atroces douleurs... Sans aucun doute ce malheureux sentait la morsure des goules qui le dévoraient vivant. (A. David Nell, Mystiques et magiciens du Tibet, p. 142.)

L’exploratrice apitoyée quitta sa cachette et vint au pauvre égaré pour essayer de le calmer; mais son apparition redoubla les transports de l’halluciné qui vit en elle une furie de plus. Alors elle s’en fut demander secours au maître de ce disciple éperdu. Le grand mystique ne s’émut point et refusa d’intervenir en rappelant à l’initiée occidentale que l’illumination spirituelle, délivrance suprême, vaut les souffrances qui conduisent à l’acquérir et que celui qui la recherche s’engage à en accepter les risques : "maladie, folie ou mort". Sur ce, le maître reprit le cours de sa méditation transcendante.

La méditation transcendante des mystiques tibétains, et les exercices affolants de leurs disciples, conduisent les mieux doués à Tharpa, l’illumination spirituelle. Celle-ci paraît consister à penser que "dieux, démons, l’univers tout entier, est un mirage" ; à reconnaître le vide universel et l’absence d’Ego. Cet état d’esprit, est-il dit, livre, à ces gâcheurs de pouvoirs normaux, des pouvoirs "supernormaux". Mais ils ne s’en servent pas pour tenter d’améliorer le lamentable état matériel - et moral de leurs compatriotes, ils préfèrent créer des fantômes de ce rien que, pour eux, est l’homme; asservir les démons dont ils ont nié l’existence; produire des doubles d’eux-mêmes et toutes sortes d’actions qui, même si elles n’étaient pas seulement rêvées, ne sembleraient guère enviables... Depuis l’origine du Bouddhisme, les bouddhistes de partout ont subï la hantise des pouvoirs occultes dont il est si souvent question dans les Sûtras canoniques du Nord et du Sud.

En réponse à l’une des questions que lui a posées Mme David Néel, le Dalaï Lama a écrit: "Un Bodhisattva est la base d’où peuvent surgir d’innombrables formes magiques. La force, qu’il engendre par une parfaite concentration de pensée lui permet d’exhiber simultanément, un fantôme semblable à lui dans des milliers de millions de mondes. Il peut, non seulement créer des formes humaines, mais n’importe quelle autre, même des objets inanimés tels que maisons, enclos, forêts, routes, ponts, etc... Il peut produire des phénomènes atmosphériques aussi bien que le breuvage d’immortalité qui étanche toute soif. En fait, son pouvoir de créer des formes magiques est illimité (1)". Cela, c’est une note de théorie mahâyâniste orthodoxe. Voici maintenant un aperçu des pratiques du Dalaï-Lama : " la plus haute autorité religieuse du Tibet " : Le Moine roi, au cours du premier mois de chaque année, " fait interroger le sort, afin d’en déduire ce que celui-ci réserve à l’État et surtout à son Chef. Trois tentes sont plantées, dans chacune est enfermé un animal - une chèvre, un coq et un lièvre - qui portent, attachées au cou, de amulettes consacrées par le Dalaï-Lama. Des hommes tirent à balle sur les tentes. S’il arrive que l’une des bêtes soit tuée ou blessée, cela signifie que le pays est menacé de calamités et que la santé ou même la vie du souverain sont en danger (2) ". Aussitôt de nombreuses cérémonies sont organisées pour neutraliser les redoutables influences.(1), (2) A. David Neel. Mystiques et Magiciens du Tibet, p. 115.

" Lorsque je me trouvais à Lhassa, écrit Mme Neel, les hommes tirèrent une vingtaine de coups sur les tentes. Aucun des animaux ne fut touché, ce qui parut du plus heureux augure. Par contre, l’un des fusils tibétains éclata, blessant grièvement le tireur qui mourut le lendemain. Au lieu d’être déploré, ce malheur ajouta à la valeur de l’oracle qui fut considéré comme tout à fait favorable au Dalaï-Lama. Un danger qui le menaçait venait d’être conjuré. Le démon ennemi avait satisfait sa férocité sur l’infortuné sujet du souverain et, maintenant repu, n’était plus à craindre." (A. David Neel. "Voyage d’une Parisienne à Lhassa", p. 304.)

De toute façon, le Dalaï-Lama n’a pourtant rien à redouter, car il est assuré de retrouver sa situation religieuse et politique à travers ses renaissances successives... En effet, après la mort de tout Dalaï-Lama, les grands voyants officiels de l’État tibétain recherchent soigneusement et toujours découvrent l’enfant en lequel le récemment disparu s’est réincarné, et s’empressent de rendre à cette nouvelle forme humaine du Dhyâni Bodhisattva Avalekiteçvara son trône de Lhassa et toutes ses prérogatives.Il en est d’ailleurs de même à propos de la succession du second lama du Tibet, celui de Tachilhumpo, qui est dit incarner Amitâbha (Odpagmed en tibétain), et encore pour celle des supérieurs des principaux monastères du royaume qui tous sont aussi des "tulkous" (émanations ou corps magiques de personnages semi-divins).
Mme David Neel a eu la fortune d’assister, dans un monastère de Koum-Boum, à l’installation d’un Tul-kou-lama qui était un enfant de huit ans, reconnu après enquête comme incarnant l’esprit du dernier supérieur défunt, le Tulkou-lama Agnai-Tsang. Elle a vu et entendu le jeune moine réclamer, avec de minutieuses précisions, touchant sa forme, ses couleurs, et sa place, un bol à thé ayant appartenu à celui auquel il succédait et qui, seul, disait-on, connaissait son existence, ou, tout au moins, l’endroit anormal où il se trouvait alors. La voyageuse constata, avec les lamas enthousiasmés, que le merveilleux petit supérieur ne se trompait point, que le bol était bien là, où il l’avait dit, et tel qu’il l’avait décrit. Il est vrai que le contrôle de cette expérience et de toutes celles qui semblent avoir fortement impressionné Mme Neel, n’était peut-être pas aussi scientifique que celui qu’on pratique à l’Institut métapsychique, dont les dirigeants, néanmoins, furent tant de fois victimes d’habiles mystificateurs et de fins manipulateurs...

Les lecteurs écrivent

Victocha recommande la lecture du texte de Domenico Losurdo, intitulé " La Chine, le Tibet et le Dalaï Lama ", publié dans " L’Ernesto. Rivista Comunista ", n° 5, p. 54-57. Ce texte, traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio, se trouve dans le blog de Michel Collon sous le titre "Le curieux "paradis" du Dalaï Lama et comment il s’est transformé en mythe hollywoodien" http://www.michelcollon.info/articles.php?dateaccess=2008-03-27%2016:23:0 1&log=lautrehistoire

Le curieux "paradis" du Dalaï Lama et comment il s'est transformé en mythe hollywoodien
Domenico Losurdo


Célébré et transfiguré par la cinématographie hollywoodienne, le Dalaï Lama continue sans aucun doute à jouir d’une vaste popularité : son dernier voyage en Italie s’est terminé solennellement par une photo de groupe avec les dirigeants des partis de centre-gauche, qui ont ainsi voulu témoigner estime et révérence à l’égard du champion de la lutte de " libération du peuple tibétain".

Mais qui est réellement le Dalaï Lama ? Disons déjà, pour commencer, qu’il n’est pas né dans le Tibet historique, mais dans un territoire incontestablement chinois, très exactement dans la province de Amdo qui, en 1935, année de sa naissance, était administrée par le Kuomintang. En famille, on parlait un dialecte régional chinois, si bien que notre héros apprend le tibétain comme une langue étrangère, et est obligé de l’apprendre à partir de l’âge de trois ans, c’est-à-dire à partir du moment où, reconnu comme l’incarnation du 13ème Dalaï Lama, il est enlevé à sa famille et enfermé dans un couvent, pour être soumis à l’influence exclusive des moines qui lui enseignent à se sentir, à penser, à écrire, à parler et à se comporter comme le Dieu-roi des Tibétains, c’est-à-dire comme Sa Sainteté.


1. Un " paradis " terrifiant

Je tire ces informations d’un livre (Heinrich Harrer, Sept ans au Tibet, diverses éditions en français autour du film de J-J. Annaud, je reprends ici la notation des pages de l’auteur de l’article dans la version italienne du livre, chez Mondadori, NdT) qui a même un caractère semi-officiel (il se conclut sur un " Message " dans lequel le Dalaï Lama exprime sa gratitude à l’auteur) et qui a énormément contribué à la construction du mythe hollywoodien. Il s’agit d’un texte, à sa façon, extraordinaire, qui réussit à transformer même les détails les plus inquiétants en chapitres d’histoire sacrée.

En 1946, Harrer rencontre à Lhassa les parents du Dalaï Lama, qui s’y sont transférés désormais depuis de nombreuses années, abandonnant leur Amdo natal. Cependant, ceux-ci ne sont toujours pas devenus tibétains : ils boivent du thé à la chinoise, continuent à parler un dialecte chinois et, pour se comprendre avec Harrer qui s’exprime en tibétain, ils ont recours à un " interprète ". Certes leur vie a changé radicalement : " C’était un grand pas qu’ils avaient réalisé en passant de leur petite maison de paysans d’une province chinoise reculée au palais qu’ils habitaient à présent et aux vastes domaines qui étaient maintenant leur propriétés ". Ils avaient cédé aux moines un enfant d’âge tendre, qui reconnaît ensuite dans on autobiographie avoir beaucoup souffert de cette séparation. En échange, les parents avaient pu jouir d’une prodigieuse ascension sociale. Sommes-nous en présence d’un comportement discutable ? Que non. Harrer se dépêche immédiatement de souligner la " noblesse innée " de ce couple (p. 133) : Comment pourrait-il en être autrement puisqu’il s’agit du père et de la mère du Dieu-roi ?

Mais quelle société est donc celle sur laquelle le Dalaï Lama est appelé à gouverner ? Un peu à contrecœur, l’auteur du livre finit par le reconnaître : " La suprématie de l’ordre monastique au Tibet est absolue, et ne peut se comparer qu’avec une dictature. Les moines se méfient de tout courant qui pourrait mettre en péril leur domination ". Ce n’est pas seulement ceux qui agissent contre le " pouvoir " qui sont punis mais aussi " quiconque le met en question " (p. 76). Voyons les rapports sociaux. On dira que la marchandise la meilleure marché est celle que constituent les serfs (il s’agit, en dernière analyse d’esclaves).

Harrer décrit gaiement sa rencontre avec un haut- fonctionnaire : bien que n’étant pas un personnage particulièrement important, celui-ci peut cependant avoir à sa disposition " une suite de trente serfs et servantes " (p.56). Ils sont soumis à des labeurs non seulement bestiaux mais même inutiles : " Environ vingt hommes étaient attachés à la ceinture par une corde et traînaient un immense tronc, en chantant en cœur leurs lentes mélopées, et avançant du même pas. En nage, et haletants, ils ne pouvaient pas s’arrêter pour reprendre leur souffle, car le chef de file ne l’autorisait pas. Ce travail terrible fait partie de leur impôt, un tribut de type féodal ". Ç’aurait été facile d’avoir recours à la roue, mais " le gouvernement ne voulait pas la roue " ; et, comme nous le savons, s’opposer ou même seulement discuter le pouvoir de la classe dominante pouvait être assez dangereux. Mais, selon Harrer, il serait insensé de vouloir verser des larmes sur le peuple tibétain de ces années-là : " peut-être était-il plus heureux ainsi " (p.159-160).

Un abîme incommensurable séparait les serfs des patrons. Pour les gens ordinaires, on ne devait adresser ni une parole ni un regard au Dieu-roi. Voici par exemple ce qu’il advient au cours d’une procession :

" Les portes de la cathédrale s’ouvrirent et le Dalaï Lama sortit lentement (…) La foule dévote s’inclina immédiatement. Le cérémonial religieux aurait exigé que l’on se jetât par terre, mais il était impossible de le faire à cause du manque de place. Des milliers de gens se courbèrent donc, comme un champ de blé sous le vent. Personne n’osait lever les yeux. Lent et compassé, le Dalaï Lama commença sa ronde autour du Barkhor (…) Les femmes n’osaient pas respirer ".

La procession finie, l’atmosphère change radicalement :

" Comme réveillée soudain d’un sommeil hypnotique, la foule passa à ce moment-là de l’ordre au chaos (…) Les moines soldats entrèrent immédiatement en action (…) A l’aveuglette, ils faisaient tourner leurs bâtons sur la foule (…) mais malgré la pluie de coups, les gens y revenaient comme s’ils étaient possédés par des démons (…) Ils acceptaient maintenant les coups et les fouets comme une bénédiction. Des récipients de poix bouillante tombaient sur eux, ils hurlaient de douleur, ici le visage brûlé, là les gémissements d’un homme roué de coups ! " (p.157-8).

Il faut noter que ce spectacle est suivi par notre auteur avec admiration et dévotion. Le tout, ce n’est pas un hasard, est compris dans un paragraphe au titre éloquent : " Un dieu lève la main, en bénissant ". Le seul moment où Harrer a une attitude critique se trouve quand il décrit les conditions d’hygiène et de santé dans le Tibet de l’époque. La mortalité infantile fait rage, l’espérance de vie est incroyablement basse, les médicaments sont inconnus, par contre des médications assez particulières ont cours : " souvent les lamas font des onctions à leurs patients avec leur salive sainte ; ou bien tsampa ( ? NdT) et beurre sont mélangés avec l’urine des saints hommes pour obtenir une sorte d’émulsion qui est administrée aux malades ". (p.194).

Ici, même notre auteur dévot et tartuffe a un mouvement de perplexité : même s’il a été " convaincu de la réincarnation du Dieu Enfant " (p. 248), il n’arrive cependant pas à " justifier le fait qu’on boive l’urine du Buddha vivant ", c’est-à-dire du Dalaï Lama. Il soulève la question avec celui-ci, mais sans trop de résultats : le Dieu-roi " ne pouvait pas combattre seul de tels us et coutumes, et dans le fond, il ne s’en préoccupait pas trop ". Malgré cela, notre auteur, qui se contente de peu, met de côté ses réserves, et conclut imperturbable : " En Inde, du reste, c’était un spectacle quotidien de voir les gens boire l’urine des vaches sacrées ". (p.294).

A ce point, Harrer peut continuer sans plus d’embarras son œuvre de transfiguration du Tibet prérévolutionnaire. En réalité, celui-ci est lourd de violence, et ne connaît même pas le principe de responsabilité individuelle : les punitions peuvent aussi être transversales, et frapper les parents du responsable d’un délit même assez léger voire imaginaire (p. 79). Qu’en est-il des crimes considérés comme plus graves ? " On me rapporta l’exemple d’un homme qui avait volé une lampe dorée dans un ces temples de Kyirong. Il fut déclaré coupable, et ce que nous aurions nous considéré comme une sentence inhumaine fut exécutée. On lui coupa les mains en public, et son corps mutilé mais encore vivant fut entouré d’une peau de yak mouillée. Quand il arrêta de saigner, il fut jeté dans un précipice " (p. 75).

Pour des délits mineurs aussi, par exemple, " jeu de hasard " on peut être puni de façon impitoyable s’ils sont commis les jours de festivité solennelle : " les moines sont à ce sujet inexorables et inspirent une grande crainte, parce que plus d’une fois il est arrivé que quelqu’un soit mort sous la flagellation de rigueur, la peine habituelle " (p. 153). La violence la plus sauvage caractérise les rapports non seulement entre " demi-dieux " et " êtres inférieurs " mais aussi entre les différentes fractions de la caste dominante : on " crève les yeux avec une épée " aux responsables des fréquentes " révolutions militaires " et " guerres civiles " qui caractérisent l’histoire du Tibet prérévolutionnaire (la dernière a lieu en 1947) (p.224-5). Et pourtant, notre zélé converti au lamaïsme ne se contente pas de déclarer que " les punitions sont plutôt drastiques, mais semblent être à la mesure de la mentalité de la population " (p.75). Non, le Tibet prérévolutionnaire est à ses yeux une oasis enchantée de non-violence : " Quand on est depuis quelques temps dans le pays, personne n’ose plus écraser une mouche sans y réfléchir. Moi-même, en présence d’un tibétain, je n’aurais jamais osé écraser un insecte seulement parce qu’il m’importunait " (p.183). Pour conclure, nous sommes face à un " paradis " (p.77). Outre Harrer, cette opinion est aussi celle du Dalaï Lama qui dans son " Message " final se laisse aller à une poignante nostalgie des années qu’il a vécues comme Dieu-roi : " nous nous souvenons de ces jours heureux que nous passâmes ensemble dans un pays heureux " (happy) soit, selon la traduction italienne, dans " un pays libre ".

2. Invasion du Tibet et tentative de démembrement de la Chine

Ce pays " heureux " et " libre ", ce " paradis " est transformé en enfer par l’ " invasion " chinoise. Les mystifications n’ont pas de fin. Peut-on réellement parler d’ " invasion " ? Quel pays avait donc reconnu l’indépendance du Tibet et entretenait avec lui des relations diplomatiques ? En réalité, en 1949, dans un livre qu’il publie sur les relations Usa-Chine, le Département d’Etat américain publiait une carte éloquente en elle-même : en toute clarté, aussi bien le Tibet que Taiwan y figuraient comme parties intégrantes du grand pays asiatique, qui s’employait une fois pour toutes à mettre fin aux amputations territoriales imposées par un siècle d’agression colonialistes et impérialistes. Bien sûr, avec l’avènement des communistes au pouvoir, tout change, y compris les cartes géographiques : toute falsification historique et géographique est licite quand elle permet de relancer la politique commencée à l’époque avec la guerre de l’opium et, donc, d’aller vers le démantèlement de la Chine communiste.

C’est un objectif qui semble sur le point de se réaliser en 1959. Par un changement radical en regard de la politique suivie jusque là, de collaboration avec le nouveau pouvoir installé à Pékin, le Dalaï Lama choisit la voie de l’exil et commence à brandir le drapeau de l’indépendance du Tibet. S’agit-il réellement d’une revendication nationale ? Nous avons vu que le Dalaï Lama lui-même n’est pas d’origine tibétaine et qu’il a été obligé d’apprendre une langue qui n’est pas sa langue paternelle. Mais portons plutôt notre attention sur la caste dominante autochtone.

D’une part, celle-ci, malgré la misère générale et extrême du peuple, peut cultiver ses goûts de raffinement cosmopolite : à ses banquets on déguste " des choses exquises provenant de tous les coins du monde " (p.174-5). Ce sont de raffinés parasites qui les apprécient, et qui, en faisant montre de leur magnificence, ne font assurément pas preuve d’étroitesse provinciale : " les renards bleu viennent de Hambourg, les perles de culture du Japon, les turquoises de Perse via Bombay, les coraux d’Italie et l’ambre de Berlin et du Königsberg " (p.166). Mais tandis qu’on se sent en syntonie avec l’aristocratie parasite de tous les coins du monde, la caste dominante tibétaine considère ses serviteurs comme une race différente et inférieure ; oui, " la noblesse a ses lois sévères : il n’est permis d’épouser que quelqu’un de son rang " (p. 191). Quel sens cela a-t-il alors de parler de lutte d’indépendance nationale ? Comment peut-il y avoir une nation et une communauté nationale si, d’après le chantre même du Tibet prérévolutionnaire, les " demi-dieux " nobles, loin de considérer leurs serviteurs comme leurs concitoyens, les taxent et les traitent d’ " êtres inférieurs " (p. 170 et 168) ?

D’autre part, à quel Tibet pense le Dalaï Lama quand il commence à brandir le drapeau de l’indépendance ? C’est le Grand Tibet, qui aurait du rassembler de vastes zones hors du Tibet proprement dit, en annexant aussi les populations d’origine tibétaine résidant dans des régions comme le Yunnan et le Sichuan, qui faisaient partie depuis des siècles du territoire de la Chine et qui furent parfois le berceau historique de cette civilisation multiséculaire et multinationale. C’est clair, le Grand Tibet représentait et représente un élément essentiel du projet de démantèlement d’un pays qui, depuis sa renaissance en 1949, ne cesse de déranger les rêves de domination mondiale caressés par Washington.

Mais que serait-il arrivé au Tibet proprement dit si les ambitions du Dalaï Lama s’étaient réalisées ? Laissons pour le moment de côté les serfs et les " êtres inférieurs " à qui, bien entendu, les disciples et les dévots de Sa Sainteté ne prêtent pas beaucoup d’attention. Dans tous les cas, le Tibet révolutionnaire est une " théocratie " (p.169) : " un européen est difficilement en mesure de comprendre quelle importance on attribue au plus petit caprice du Dieu-roi ". Oui, " le pouvoir de la hiérarchie était illimité " (p.148), et il s’exerçait sur n’importe quel aspect de l’existence : " la vie des gens est réglée par la volonté divine, dont les interprètes sont les lamas " (p.182). Evidemment, il n’y a pas de distinction entre sphère politique et sphère religieuse : les moines permettaient " aux tibétaines les noces avec un musulman à la seule condition de ne pas abjurer " (p.169) ; il n’était pas permis de se convertir du lamaïsme à l’Islam. Comme la vie matrimoniale, la vie sexuelle aussi connaît sa réglementation circonspecte : " pour les adultères, des peines très drastiques sont en vigueur, on leur coupait le nez " (p. 191). C’est clair : pour démanteler la Chine, Washington n’hésitait pas à enfourcher le cheval fondamentaliste du lamaïsme intégriste et du Dalaï Lama.

A présent, même Sa Sainteté est obligé d’en prendre acte : le projet sécessionniste a largement échoué. Et voilà apparaître des déclarations par lesquelles on se contenterait de l’ " autonomie ". En réalité, le Tibet est depuis pas mal de temps une région autonome. Et il ne s’agit pas que de mots. En 1988 déjà, tout en formulant des critiques, Foreign Office, la revue étasunienne proche du Département d’Etat, dans un article de Melvyn C. Goldstein, avait laissé passer quelques reconnaissances importantes : dans la Région Autonome Tibétaine, 60 à 70 % des fonctionnaires sont d’ethnie tibétaine et la pratique du bilinguisme est courante. Bien sur, on peut toujours faire mieux ; il n’en demeure pas moins que du fait de la diffusion de l’instruction, la langue tibétaine est aujourd’hui parlée et écrite par un nombre de personnes bien plus élevé que dans le Tibet prérévolutionnaire. Il faut ajouter que seule la destruction de l’ordre des castes et des barrières qui séparaient les " demi-dieux " des " êtres inférieurs " a rendu possible l’émergence à grande échelle d’une identité culturelle et nationale tibétaine. La propagande courante est l’envers de la vérité.

Tandis qu’il jouit d’une ample autonomie, le Tibet, grâce aussi aux efforts massifs du gouvernement central, connaît une période d’extraordinaire développement économique et social. Parallèlement au niveau d’instruction, au niveau de vie et à l’espérance moyenne de vie, s’accroît aussi la cohésion entre les différents groupes ethniques, comme confirmé entre autres par l’augmentation des mariages mixtes entre hans (chinois) et tibétains. Mais c’est justement ce qui va devenir le nouveau cheval de bataille de la campagne anti-chinoise. L’article de B. Valli sur La Repubblica du 29 novembre 2003 en est un exemple éclatant. Je me bornerai ici à citer le sommaire : " L’intégration entre ces deux peuples est la dernière arme pour annuler la culture millénaire du pays du toit du monde ". C’est clair, le journaliste s’est laissé aveugler par l’image d’un Tibet à l’enseigne de la pureté ethnique et religieuse, qui est le rêve des groupes fondamentalistes et sécessionnistes.

Pour en comprendre le caractère réactionnaire, il suffit de redonner la parole au chroniqueur qui a inspiré Hollywood. Dans le Tibet prérévolutionnaire, en plus des tibétains, et des chinois, " on peut rencontrer aussi des ladaks, des boutans (orthographe non garantie, NdT), des mongols, des sikkimais, des kazakhs, etc ". Les népalais sont aussi largement présents : " Leurs familles demeurent presque toujours au Népal, où eux-mêmes rentrent de temps en temps. En cela ils se différencient des chinois qui épousent volontiers des femmes tibétaines, et mènent une vie conjugale exemplaire ". (p. 168-9). La plus grande " autonomie " qu’on revendique, on ne sait d’ailleurs pas très bien si pour le Tibet à proprement parler ou pour le Grand Tibet, devrait-elle comporter aussi la possibilité pour le gouvernement régional d’interdire les mariages mixtes et de réaliser une pureté ethnique et culturelle qui n’existait même pas avant 1949 ?

3. La cooptation du Dalaï Lama en Occident et dans la race blanche et la dénonciation du péril jaune

L’article de Repubblica est précieux car il nous permet de cueillir la subtile veine raciste qui traverse la campagne anti-chinoise actuelle. Comme il est notoire, dans sa recherche des origines de la race " aryenne " ou " nordique " ou " blanche ", la mythologie raciste et le Troisième Reich ont souvent regardé avec intérêt l’Inde et le Tibet : c’est de là qu’allait partir la marche triomphale de la race supérieure. En 1939, à la suite d’une expédition de SS, l’autrichien Harrer arrive en Inde du Nord (aujourd’hui Pakistan) et, de là, pénètre au Tibet. Lorsqu’il rencontre le Dalaï Lama, il le reconnaît immédiatement, et le célèbre, comme membre de la race supérieure blanche : " Sa carnation était beaucoup plus claire que celle du tibétain moyen, et par certaines nuances plus blanche même que celle de l’aristocratie tibétaine " (p. 280). Par contre, les chinois sont tout à fait étrangers à la race blanche. Voilà pourquoi la première conversation que Sa Sainteté a avec Harrer est un événement extraordinaire : celui-ci se trouve " pour la première fois seul avec un homme blanc " (p. 277). En tant que substantiellement blanc le Dalaï Lama n’était certes pas inférieur aux " européens " et était de toutes façons " ouvert aux idées occidentales " (p. 292 et 294). Les Chinois, ennemis mortels de l’Occident, se comportent bien autrement. C’est ce que confirme à Harrer un " ministre–moine " du Tibet sacré : " dans les écritures anciennes, nous dit-il, on lisait une prophétie : une grande puissance du Nord fera la guerre au Tibet, détruira la religion et imposera son hégémonie au monde " (p.114). Pas de doute : la dénonciation du péril jaune est le fil conducteur du livre qui a inspiré la légende hollywoodienne du Dalaï Lama.

Revenons à la photo de groupe qui a mis un terme à son voyage en Italie. On peut considérer comme physiquement absents mais bien présents du point de vue des idées Richard Gere et les autres divas de Hollywood, inondés de dollars pour la célébration de la légende du Dieu-roi, venu du mystérieux Orient. Il est désagréable de l’admettre mais il faut en prendre acte : tournant le dos depuis quelques temps à l’histoire et à la géographie, une certaine gauche se révèle désormais capable de ne plus s’alimenter que de mythes théosophiques et cinématographiques, sans plus prendre de distances même avec les mythes cinématographiques les plus troubles.

La guerre contre l’Islam est-elle une phase de la guerre ultime : la Guerre contre le Christ ?

La doctrine de la « démocratie libérale et des droits de l’homme » est une crypto-religion, une forme extrême, hérétique de judaïsme christ...