mercredi, avril 21, 2010

L’âge des résidus


Selon le lama Matthieu Ricard, « l’âge décadent, ou « âge des résidus » (snyigs dus) : se caractérise par les cinq dégradations ou dégénérescences suivantes :
1) une durée de vie plus courte (tshe),
2) une dégradation du karma général (las),
3) des vue métaphysiques erronées (lta ba),
4) le déclin des facultés des êtres (sems can),
5) un accroissement des émotions négatives (nyon mongs).

L’humanité se trouverait dans la dernière phase de l’âge des résidus, du Kali Yuga. Matthieu Ricard ne cache pas au philosophe Jean-François Revel l’intérêt qu’il porte à l’œuvre de René Guénon (Le moine et le philosophe). René Guénon explique le sens de l’expression « l'âge des résidus » :
« Ce qui, suivant la tradition, caractérise l’ultime phase du cycle, c’est, pourrait-on dire, l’exploitation de tout ce qui a été négligé ou rejeté au cours des phases précédentes ; et, effectivement, c’est bien là ce que nous pouvons constater dans la civilisation moderne, qui ne vit en quelque sorte que de ce dont les civilisations antérieures n’avaient pas voulu. Il n’y a, pour s’en rendre compte, qu’à voir comment les représentants de celles de ces civilisations qui se sont maintenues jusqu’ici dans le monde oriental apprécient les sciences occidentales et leurs applications industrielles (1). Ces connaissances inférieures, si vaines au regard de qui possède une connaissance d’un autre ordre, devaient pourtant être « réalisées », et elles ne pouvaient l’être qu’à un stade où la véritable intellectualité aurait disparu ; ces recherches d’une portée exclusivement pratique, au sens le plus étroit de ce mot, devaient être accomplies, mais elles ne pouvaient l’être qu’à l’extrême opposé de la spiritualité primordiale, par des hommes enfoncés dans la matière au point de ne plus rien concevoir au-delà, et devenant d’autant plus esclaves de cette matière qu’ils voudraient s’en servir davantage, ce qui les conduit à une agitation croissante, sans règle et sans but, à la dispersion dans la pure multiplicité, jusqu’à la dissolution finale. » (La crise du monde moderne)

Extraits du Kalki Purâna

Le Kalki Purâna est le Livre de l’Apocalypse des écritures hindoues. Il annonce ce qui se passera à la fin des temps et durant l’âge noir.

12-13. Parmi les histoires sacrées, celles qui ont trait à l’avenir vont vous être racontées. Ecoutez-les attentivement. Le Kali Yuga (l’âge noir) commença lorsque le Seigneur Krishna regagna le séjour céleste.
"D’après la tradition rapportée par Alain Daniélou, le Kali Yuga commence en 3 606 av. J.-C.. La dernière période du cycle aurait débuté en 1939 de notre ère. « La catastrophe finale, écrit Daniélou, aura lieu durant ce crépuscule."

14. A la fin du cycle, Brahmâ, le créateur de l’univers, laissa tomber de son dos les péchés qu’il avait engendrés.
Le démiurge retient le mal qui est le déchet à la création, mais à la fin d’un cycle ce karma cosmique retombe sur la terre et sur l’homme. (*)

15. Ainsi naquit Adharma ; on dit que tous les péchés sont absous par le simple fait d’en entendre parler, de les confesser ou même d’y penser.
Adharma est la privation d’ordre, le chaos. Dans l’âge noir, le mal remonte à la surface. Il doit être démasqué au grand jour, en conscience, pour être transmuté. (*)

16. L’épouse d’Adharma, la belle Mithyâ (le mensonge) aux yeux de chatte, donna le jour à Shamba (la tromperie) son horrible fils ;

17. sa sœur Mâyâ (l’illusion) donna le jour à Lobha (la convoitise), et sa fille Vikriti (la maladie) donna le jour à Krodha (la colère),

18. dont la sœur Himsâ (la violence) donna le jour au Kali Yuga.
La progression des fléaux qui vont se déchaîner dans l’âge noir. La mère du Mensonge Mithyâ aux yeux verts (la beauté luciférienne) amorce le cycle des perversions. Voir l’Evangile où Jésus fustige la caste sacerdotale d’Israël : « votre père le Diable est menteur depuis l’origine ». (*)

19. Ce terrible Kali Yuga s’appuie sur la puissance des aromates sacrés, du mensonge, du vin des femmes et de l’or.
Les « aromates sacrés » symbolisent le détournement des forces spirituelles. Le sexe et l’argent sont les deux tentations dominantes dans l’âge noir, les agents actifs de la décadence de l’exploitation sous toutes ses formes. (*)

20-21. Sa sœur Durkriti (le méfait) donna le jour à un garçon appelé Bhaya (la peur) et à une fille appelée Mrityu (la mort), lesquels créèrent Niraya (l’enfer).
Au stade final, l’âge noir produit l’enfer sur la terre, la civilisation fondée sur la peur.

22. Le sacrifice, la mansuétude, l’étude des Véda et des Tantra disparurent, tandis que des infirmités mentales et physiques, vieillesse, misère, désespoir et peur, devinrent les caractéristiques de la vie humaine.
La déchéance découle de l’oubli des lois sacrées concernant le cosmos, l’ordre social et la vie. (*)

23. Le Kali Yuga engendra des hommes à la vie courte, pratiquant l’adultère et adeptes de la décadence généralisée.

24. Les brahmanes devinrent pervers, méchants, homicides, tuant même leurs parents, ignorants des Véda et des écritures, obséquieux et se firent même les serviteurs des shûdra !
Ceux qui sont supposés montrer l’exemple de la sagesse et de la droiture, et guider les âmes, s’abaissent aux activités dégradantes – autrement dit détournent leurs dons innés vers des activités inférieures. (*)

26. tueurs, cruels, avides, débauchés, trompeurs, provoquant la confusion des castes par les mariages mixtes.
Jadis, on considérait que les mariages entre familles étrangères amenaient la perte des pouvoirs ataviques du clan. La clairvoyance s’éteignant par les mélanges sanguins, le clan n’était plus dirigé par les ancêtres et les êtres étaient alors abandonnés à eux-mêmes et aux démons. (*)


25. Ainsi devinrent-ils perfides, inconstants, dégénérés, confondant les dharma, falsifiant le Dharma et les Véda,
Confusion des principes qui fondent l’ordre universel. Inversion volontaire de la vérité. Cela dure déjà depuis plusieurs milliers d’années, et ce n’est que le début ! (*)

27. à courte vie, pratiquant le mal, avilis, se regroupant dans des Matha (monastère, ashram) en compagnie de gens méprisables,

28-29. connaissant le désespoir, ils se querellent et se battent. Ils élaborent des parures pour attirer les riches. Ascètes prônant les dharma du confort, ils calomnient les guru et feignent de prêcher le Dharma pour tromper les innocents.
Les faux prophètes de la « voie large ». (*)

30. Les shûdra (prolétaires)se lancent dans les affaires afin de s’approprier la richesse des autres, ils marient leurs fils et leurs filles selon les envies des uns et des autres, ils préfèrent la fréquentation des pervers plutôt que des vertueux.

31. Ils ignorent l’acte généreux, sont incapables de détachement, se rengorgent de paroles vaniteuses sur le Dharma.

32. Ils considèrent la richesse comme le seul signe de l’intégrité…

34. Deviennent des exploiteurs…

35. Les nuages d’orage grondent et éclatent d’étranges façons, ce qui ne permet pas à la terre de donner de bonnes récoltes. Les percepteurs d’impôts écrasent et maltraitent tous,

36. ceux-ci chargés d’enfants, se réfugient dans les montagnes et les forêts.

37. C’est ainsi qu’à la première époque du Kali Yuga, les calomniateurs du Seigneur Krishna se livrent à la boisson et à la consommation de viande.

38. A la deuxième époque, l’on abandonne la prière. A la troisième époque, la confusion des castes est provoquée par les mariages mixtes, et à la quatrième – tournant le dos aux dieux infaillibles et à l’action juste – l’on se livre à une foi unique, en raison du mélange informe ainsi crée.
On se livre à une foi unique ? De l’abandon des véritables principes spirituels, naît une religion globale, l’inversion de la vérité. Curieuse anticipation de la religion mondiale. (*)

39. L’étude des écritures sacrées, l’offrande de sacrifices et la récitation du Om ayant disparu, toutes les divinités délaissées se rendirent humblement auprès de Brahmâ.

40-44. Les divinités accablées de tristesse, conduites par la Terre-Mère, récitant les Véda…se prosternèrent devant la porte de Brahma, Dieu des trois mondes, qui, trônant au milieu des sages, leur accorda une audience pour exprimer leurs doléances.

Il est alors décidé d’envoyer l’avatar Kalki (avatar de Vishnu) pour restaurer l’âge d’or à la fin du Kali Yuga.
Kalki correspond au Christ glorieux de l’Apocalypse qui revient à la fin de l’âge noir pour transférer la nature entière sur la dimension divine. […] Pendant que l’âge noir suit son cours inexorablement, un âge d’or émerge sur une dimension spirituelle de l’univers interne.
Les « élus » du livre de l’Apocalypse sont les êtres qui, au cœur de l’âge noir, on inversé le cours de la descente pour aller à contre-courant du temps. Ils créent ainsi un espace sacré, un cosmos spirituel qui est réintégré dans l’univers originel interne. (*)

(1) La curiosité pour la technologie et la science modernes de Tenzin Gyatso, le quatorzième Dalaï-lama, est bien connue. Indique-t-elle que le lamaïsme ne possède pas la connaissance d’un autre ordre et la véritable spiritualité ou la véritable intellectualité évoquée par Guénon ?

(*) Commentaires de Joël Labruyère.



Photo : Black Planet de Robert Longo

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