mercredi, juin 09, 2010

Expérience de mort imminente & Dharma


Jean Morzelle a vécu une EMI (Expérience de Mort Imminente) à l’âge de 20 ans. Dans son livre « Témoignages d’éternité », il raconte l’extraordinaire voyage de sa conscience et sa rencontre avec une lumière qu’il identifie à une puissance spirituelle. « Il a également collecté, précise son éditeur, les récits de quinze autres témoins de NDE, qui tous ont vu cette lumière et ont parfois « fusionné » avec elle. Ils en tirent une force, une certitude, celle qu’il existe bien un ailleurs, un après, une vie après la vie. »



L’expérience de mort imminente vue par le bouddhisme

Jean Morzelle relève une importante discordance entre les témoignages d’EMI où se manifestent des personnes décédées depuis plusieurs décennies et la doctrine du bouddhisme tibétain. En effet, d'après les lamas, l’esprit d’un défunt ne séjourne pas dans l’au-delà (bardo) plus de 49 jours. Au terme de ce délai et selon le karma individuel, la réincarnation a lieu dans l’un des six mondes suivants : le monde des dieux ou des êtres célestes (deva) ; le monde des ennemis des dieux (asura) ; le monde des être humains (purusha) ; le monde des animaux (jantu) ; le monde des esprits faméliques (préta) ; les enfers, le monde des êtres damnés (naraka).

Très présents en France compte tenu du succès du Dharma, la voie du milieu (1), écrit Jean Morzelle, certains lamas tibétains ont été pressés de questions quant à leur interprétation de l’EMI, si spectaculaire aux yeux des Occidentaux. Il faut de nouveau mentionner leur insistance à ne pas se laisser abuser par la forme, qui n’est qu’apparence. Ils citent un exemple en particulier : au cours de cette phase lumineuse, les expérienceurs relatent souvent leur rencontre avec un ou plusieurs proches défunts, lesquels se présentent à eux sous des âges divers, mais sont toujours identifiés par le témoin. Selon le bouddhisme, les défunts disparus depuis longtemps devraient être réincarnés, donc ils ne peuvent pas être là ! Le Bardo Thödrol décrit les « niveaux » que doit traverser l’âme du défunt jusqu’au sans-forme, en identifiant clairement le premier niveau suivant la dimension physique (plan astral des ésotéristes) comme le lieu de la projection des pensées, des tourments et des interrogations. Un témoin parle de « palier des affinités » pour évoquer le bilan psychologique et émotionnel du sujet au moment de l’expérience. Ces pensées prennent forme, elles se matérialisent pour être littéralement affrontées par la conscience, c’est pourquoi la peur extrême peut engendrer une expérience très négative. Difficile alors de dire si l’expérienceur rencontre réellement des proches, s’il « projette » la scène, ou encore s’il rencontre comme une trace ou un « corps subtil » du parent décédé, éternellement présent dans cette dimension-là. D’autant que le bouddhisme situe tout de même cette dimension hors espace-temps. On se heurte ici aux limites de nos conceptions et de nos modèles : si le temps ne s’écoule pas dans cette dimension, comment peut-on y être puis ne plus y être, à un moment donné… ? Pour compliquer le tout, plusieurs témoignages d’EMI font état de rencontre avec des proches décédés, mais dont l’expérienceur ignorait l’existence, pour cause de secret familial…

Constatons pour finir que l’action du poil-à-gratter bouddhiste est ici d’autant plus singulière que la notion de réincarnation est une aberration dans notre culture, et de surcroît l’objet d’un profond malentendu. Elle est vue chez nous comme une chance et une bénédiction, celle de pouvoir revenir, revivre ; or pour le bouddhisme elle est un échec et une condamnation car le but de la vie est de parvenir à l’éveil, afin justement de briser le cycle des réincarnations, lui-même alimenté par la loi du karma. Intéressants regards croisés de deux cultures sur ce qui serait une bénédiction selon l’une, à laquelle elle ne croit cependant pas, et une malédiction selon l’autre, à laquelle elle croit depuis toujours.

Jean Morzelle







Le livre de Jean Morzelle, « Témoignages d’éternité », est édité par les Editions Aquarius : aquari75@aol.com

(1) Jean Morzelle ne fait pas la différence entre la Voie du Milieu (Mâdhyamika), école du bouddhisme Mahâyâna fondée par Nâgârjuna, et le Dharma, la Doctrine attribuée au Bouddha.

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