jeudi, septembre 30, 2010

I Have a Dream


Je fais le rêve qu'un jour la jeunesse prendra son destin en main.

La société offrira une activité rémunératrice à tous les jeunes au terme de leur formation. Ils débuteront leur carrière avec un salaire élevé afin de disposer des conditions matérielles optimales pour fonder une famille. Après 20 ou 30 années de travail, quand leurs enfants entreront à leur tour dans la vie active, les travailleurs changeront leurs habitudes. Ainsi, vers l’âge de quarante ou cinquante ans, ils pourront s’ouvrir pleinement à l’intériorité (art, poésie, contemplation, etc.). Ils disposeront d’un revenu, égal pour tous. Ceux qui auront exercé les plus hautes responsabilités bénéficieront du même revenu d’existence que les simples employés. Bien entendu, la culture et la santé seront gratuites pour toutes les personnes qui céderont leur place aux jeunes.

C’est le renouveau de la société par la jeunesse, pourvoyeuse d’idéalisme et de générosité, qui mettra fin aux anomalies financières et spéculatives des vieux rentiers avides et aux manipulations des politiciens séniles et égoïstes.

Réduction du temps de travail

« Il s’agit bien d’une révolution, écrit Serge Latouche. Précisons toutefois que pour nous, comme pour Cornelius Castoriadis, « révolution » ne signifie ni guerre civile ni effusion de sang ». Cette violence-là semble d’autant moins inéluctable, à en croire André Gorz (Castoriadis à la fin de sa vie ne l’aurait pas contredit sur ce point), que « la civilisation capitaliste […] va inexorablement vers son effondrement catastrophique ; il n’est plus besoin d’une classe révolutionnaire pour abattre le capitalisme, il creuse sa propre tombe et celle de la civilisation industrielle dans son ensemble ». C’est heureux, parce que l’on voit, avec le triomphe du capitalisme, que la lutte des classes s’est épuisée. Les vaincus de cet affrontement pluriséculaire, plus nombreux que jamais sont pourtant divisés, déstructurés, déculturés et ne constituent pas (ou plus) une classe révolutionnaire. Cet effondrement souhaitable du capitalisme ne garantit pas pour autant des lendemains qui chantent, et c’est là que la révolution retrouve ses droits. « La révolution, poursuit Castoriadis, est un changement de certaines institutions centrales de la société par l’activité de la société elle-même : l’autotransformation explicite de la société condensée dans un temps bref. […] La révolution signifie l’entrée de l’essentiel de la communauté dans une phase d’activité politique, c’est-à-dire instituante. L’imaginaire social se met au travail et s’attaque explicitement à la transformation des institutions existantes (1). » […]

La réduction drastique du temps de travail constitue une première protection contre la flexibilité et la précarité. Le droit du travail, dans le collimateur des libéraux parce que source de rigidité, doit pour cette raison être maintenu et renforcé. Il ne peut que faciliter la nécessaire décroissance. Il faut défendre les seuils minimaux de salaires décents contre la théorie des économistes du chômage volontaire, cette imposture. Le retour à la « démarchandisation » du travail est un impératif. L’actuel jeu du « moins-disant social » est aussi inacceptable que celui du moins-disant écologique. En 1946, un salarié de vingt ans devait s’attendre à travailler un tiers de sa vie éveillée ; en 1975, un quart seulement ; aujourd’hui, moins d’un cinquième. A-t-on pour autant le sentiment d’être libéré du travail ? Probablement moins que jamais. « Pour les salariés, note Bernard Maris, ce n’est pas la fin du travail, comme semblerait le montrer la baisse tendancielle des heures ouvrées, mais plutôt le travail sans fin, la précarité, l’isolement, le stress, la peur, et la certitude de devoir quitter leur lieu de travail assez vite (2). »

Réduction du temps de travail et changement de son contenu sont donc avant tout des choix de société, conséquence de la révolution culturelle appelée par la décroissance. Accroître le temps non contraint pour permettre l’épanouissement des citoyens dans la vie politique, privée et artistique, mais aussi dans le jeu ou la contemplation, est la condition d’une nouvelle richesse. »

Extrait du livre de Serge Latouche « Petit traité de la décroissance sereine ».



(1) Cornelius Castoriadis, « Une société à la dérive », Le Seuil.
(2) Bernard Maris, « Antimanuel d’économie ».


Illustration : Surfer's Dream http://www.josephinewall.co.uk/surfer.html

***


Le plan dirigé contre l’Esprit

La lutte pour la supériorité et les spéculations continuelles dans le monde des affaires créera une société démoralisée, égoïste et sans cœu...