mardi, avril 09, 2024

Le travail est-il une malédiction ?

Auto-construction : le B.E.L.L. (Biogenic Ecodesic Living Lighthouse) de Bordeaux Szekely, une habitation sans crédit .


"Les gens travaillent généralement trop dur pour être eux-mêmes. Le travail est une malédiction. L'homme a fait de cette malédiction une volupté. Se donner de toutes ses forces uniquement pour le travail, trouver de la joie dans un effort qui ne mène qu'à des réalisations sans intérêt, concevoir que l'on ne peut se réaliser que par un travail incessant, voilà ce qui est révoltant et inintelligible.

Le travail soutenu et incessant rend idiot, trivialise et dépersonnalise. Il déplace le centre de préoccupation et d'intérêt de la zone subjective à une zone objective des choses, sur un plan fade. L'homme ne s'intéresse pas alors à son destin personnel, à son éducation intérieure, à l'intensité de quelque phosphorescence interne et à l'accomplissement d'une présence iridiscente mais aux faits, aux choses.

Le vrai travail, qui serait une activité de transfiguration continue, est devenu une activité d'extériorisation, de sortie du centre de l'être. Il est caractéristique que, dans le monde moderne, le travail désigne une activité exclusivement extérieure. C'est pourquoi, à travers lui, l'homme ne se réalise pas, mais il réalise. Le fait que chacun doive faire carrière, entrer dans une forme de vie qui ne lui convient presque jamais, est l'expression de cette tendance à l'abêtissement par le travail. Travailler pour vivre, voilà une fatalité plus douloureuse chez l'homme que chez l'animal."

Emil Cioran


Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l'amour du travail, la passion moribonde du travail poussée jusqu'à l'épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture. Au lieu de réagir contre cette aberration mentale, les prêtres, les économistes, les moralistes, ont sacro-sanctifié le travail. Hommes aveugles et bornés, ils ont voulu être plus sages que leur Dieu ; hommes faibles et méprisables, ils ont voulu réhabiliter ce que leur Dieu avait maudit. Moi, qui ne professe d'être chrétien, économe et moral, j'en appelle de leur jugement à celui de leur Dieu ; des prédications de leur morale religieuse, économique, libre-penseuse, aux épouvantables conséquences du travail dans la société capitaliste.

Dans la société capitaliste, le travail est la cause de toute dégénérescence intellectuelle, de toute déformation organique.[...]

Si, déracinant de son cœur le vice qui la domine et avilit sa nature, la classe ouvrière se levait dans sa force terrible, non pour réclamer les Droits de l'homme, qui ne sont que les droits de l'exploitation capitaliste, non pour réclamer le Droit au travail, qui n'est que le droit à la misère, mais pour forger une loi d'airain, défendant à tout homme de travailler plus de trois heures par jour, la Terre. La vieille Terre, frémissant d'allégresse, sentirait bondir en elle un nouvel univers... Mais comment demander à un prolétariat corrompu par la morale capitaliste une résolution virile ?

Paul Lafargue


PDF gratuit : « Le Droit à la paresse » (1880)



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