samedi, mai 14, 2011

Aperçus de typologie religieuse




Par Frithjof Schuon

Comme René Guénon et quelques autres penseurs contemporains, Frithjof Schuon voit dans les grandes religions de l'humanité autant d'expressions de la même tradition métaphysique, une et universelle, mais incarnant cette tradition dans des formes diverses, liées aux grandes civilisations de l'Histoire.

L’Absolu peut être approché par deux voies (1), l'une fondée sur « Dieu en soi », et l'autre sur «Dieu fait homme » ; c'est ce qui fait la distinction entre, d'une part l'Abrahamisme, le Mosaïsme, l'Islam, le Platonisme, le Védantisme, et d'autre part le Christianisme, le Râmâïsme, le Krishnaïsme, l'Amidisme, et d'une certaine manière même le Bouddhisme tout court.

La deuxième de ces voies - celle du Logos – est comparable à une barque qui nous mène à l'autre rive : la terre lointaine se fait terre proche, sous la forme de la barque ; Dieu se fait homme parce que nous sommes hommes. Il nous tend la main en assumant notre propre forme. Ce qui implique, premièrement que l'homme ne puisse se sauver autrement que moyennant cette main tendue de Dieu, et deuxièmement, que l'image du « Dieu en soi» s'estompe dans la mythologie et l'économie salvatrice du « Dieu fait homme ».

La première de ces deux voies se fonde au contraire sur l'idée que l'homme, par sa nature même – déchue ou non -, a accès à Dieu, et que c'est la foi en «Dieu en soi» qui sauve; mais cette foi doit être intégrale, elle doit englober tout ce que nous sommes, à savoir la pensée, la volonté, l'activité, le sentiment; c'est ce qu'entendent réaliser les Lois Sacrées, pour la collectivité aussi bien que pour l'individu (2). L'homme se sauve en se conformant parfaitement à sa nature théomorphe ; la Loi sacrée, c'est ce que nous sommes, essentiellement et partant primordialement.

Il est dans la nature des choses qu'aucune des deux voies fondamentales ne puisse exclure tout à fait la vérité de l'autre voie ; la voie du Logos doit trouver sa place secondaire - ne serait-ce qu'à titre symbolique -, dans le cadre de la voie du « Dieu en soi », et inversement. Le Shiisme, avec sa quasi-divinisation d'Alî et de Fâtimah et son imamolâtrie subséquente, projette pour ainsi dire la perspective chrétienne dans l'Islam ; l'Amidisme, avec sa confiance salvatrice en la Miséricorde du Bouddha-Dieu Amida, semble introduire cette même perspective fondamentale dans le Bouddhisme (3). L’Hindouisme - comme il fallait s'y attendre -, contient les deux perspectives, l'une à côté de l'autre, il est krishnaïte aussi bien que védantin.

Mais les exemples extrêmes du Shiisme et de l'Amidisme sont insuffisants, car il s'agit de retrouver la perspective étrangère non seulement dans telle cristallisation particulariste, mais aussi et même avant tout dans la religion générale : ainsi, le culte du Logos se retrouve dans l'Islam général sous la forme atténuée et pour ainsi dire neutralisée du culte mystique de Mohammed, dont l'expression canonique est la « Bénédiction du Prophète » ; le culte du Logos se retrouve également dans le Bouddhisme général, sous la forme de la quasi-adoration du Bouddha, ce dont l'image classique et universelle du Bouddha est la trace la plus notoire.

De toute évidence, la réverbération inverse existe également, et elle se manifeste, fort paradoxalement, dans le fait que les religions du Logos « fait homme » envisagent, dans une certaine mesure, cet homme comme s'il était le « Dieu en soi » : ils entendent eux aussi réaliser l'humain intégral et primordial moyennant le recours à une Loi, mais toujours en partant de l'idée d'un « Verbe fait chair » et de l'incapacité foncière de l'homme marqué par la chute ; donc sans sortir de leur optique générale et déterminante.

La confrontation entre les deux types de religion, axés l'un sur le Dieu-en-soi et l'autre sur le Dieu-fait-homme, évoque le principe d'un double rapport, non seulement de l'homme à Dieu, mais aussi de l'épouse à l'époux, du peuple au monarque, et autres complémentarités de ce genre. Si notre confrontation des religions nous a montré qu'il y a vers Dieu un accès qui est direct et un autre qui est indirect, nous pourrons en dire autant des situations purement humaines : l'épouse ne peut être subordonnée à l'époux qu'à condition d'être, sur un autre plan, son amie, à savoir sur le plan de leur commune humanité ; de même, c'est une règle élémentaire de la monarchie que le monarque, si d'une part il domine ses sujets, d'autre part doit toujours sauvegarder envers eux un rapport d'homme à homme, comme nous le montrent les exemples des grands rois du passé.

Pour l'Occidental, l'accès à la personnalité du Prophète est comme bloqué par les facteurs suivants: le langage à première vue étrangement « homme moyen », voire « terre à terre » et quelque peu « discontinu » du Prophète ; une certaine complication et quasi-accidentalité de sa vie privée ; et surtout, la prétention canonique de le placer au-dessus du Christ. Aussi l'accès à la personnalité de Mohammed n'est-elle possible - hormis le cas d'une conversion pure et simple, dont le résultat sera l'oubli ou l'incompréhension de la personnalité de Jésus - cet accès, disons-nous, n'est possible que par un détour métaphysique ou ésotérique qui saisit le phénomène à partir de l'intérieur et va de la synthèse à l'analyse, de l'essence à la forme ou de la substance à l'accident. Nous en avons traité en d'autres occasions et nous nous bornerons ici à la constatation suivante, laquelle apparaîtra a priori comme une pétition de principe, mais peu importe puisque les conséquences spirituelles, religieuses, culturelles et historiques du phénomène mohammédien en prouvent la légitimité, l'efficacité et la grandeur : contrairement à ce qui a lieu pour le Christ, qui ne fait que passer comme à contre-cœur par l'état humain et qui s'y trouve presque comme un étranger, le Prophète, délibérément retranché de l'Ordre divin - ,car la raison d'être de l'Islam veut que l'Envoyé soit « l'homme, tout l'homme, rien que l'homme » -, le Prophète donc se situe de plein-pied dans la condition humaine et par là accepte et réalise à la perfection tout ce qui est positivement humain et naturel ; ce qui, pour les Chrétiens, brouille la piste de sa sainteté. Il a essentiellement le sens de la société, alors que le Christ n'envisage que l'homme en soi ; aussi saint Paul, pourtant conscient de l'utilité sociale du mariage, semble-t-il vouloir faire de celui-ci une sorte de punition, comme pour se venger sur l'homme qui n'a pas choisi le célibat en vue du Saint-Esprit, et cela en dépit de ce biais qu'est la sacramentalisation du mariage, laquelle se réfère à l'Esprit Saint et en sollicite la participation. Quoi qu'il en soit, les formulations dogmatiques et les stipulations éthiques ont forcément quelque chose de brutal, si l'on peut dire ; on n'édifie pas une religion avec des nuances.

Quelque étrange que puisse sembler une telle assertion - qui, dans le cas du Christ, n'aurait aucun sens - Mohammed est le Prophète du « raisonnable » ; d'un raisonnable non médiocre, bien entendu, mais fait de réalisme psychologique et social, et susceptible par conséquent de véhiculer la voie ascendante. Incidemment, mais non rarement, le Prophète savait être aussi « pieusement déraisonnable » que les ascètes chrétiens, et c'est à ces exemples « en marge » que se réfère l'ascétisme ésotérique dont nous avons parlé plus haut ; « en marge » parce qu'étrangers - sinon contraires - au principe de mesure et d'équilibre de la religion commune.

Le Prophète, disent les soufis, réalise la synthèse de toutes les possibilités spirituelles, tandis que chacun des autres « Envoyés » ne représente qu'une seule de ces possibilités, ou du moins n'en accentue qu'une seule. Alors que le message d'« intériorité » ou d'« essentialité » de Jésus - opposé au culte des « observances extérieures » - est univoque et percutant, c'est précisément le caractère de synthèse ou d'équilibre du message mohammédien qui rend plus ou moins « imprécis » le portrait spirituel du Prophète, du moins vu du dehors et en l'absence des clefs nécessaires ; mais pour les Musulmans, ce même portrait est parfaitement intelligible, car ils le conçoivent a priori comme l'éventail déployé de toutes les grandeurs et de toutes les beautés, et cela non sur la base d'une abstraction, bien entendu, mais en suivant l'itinéraire complexe des incidents grands et petits qui jalonnent la vie du héros. On pourrait dire qu'en un certain sens la perspective islamique, en ce qui concerne le Messager et la vie spirituelle, va de l'analyse à la synthèse, tandis que la perspective chrétienne, au contraire procède de la synthèse à l'analyse, sous les deux mêmes rapports.

Une vérité symbolique n'est pas toujours littérale, mais une vérité littérale est forcément toujours symbolique. Les diverses traditions islamiques concernant le Christ, la Vierge et les Chrétiens, ne sont certes pas à prendre à la lettre ce qui n'infirme en rien leur intention ou leur symbolisme, précisément – mais quand l'Islam enseigne qu'il y a, et qu'il y a toujours eu, la possibilité du salut en dehors de la personne du Christ, et que celle-ci est une manifestation salvatrice parmi d'autres - ce qui ne signifie pas qu'elle soit comme les autres - la vérité littérale se trouve de son côté, du moins sous ce rapport particulier (4). Jésus est exclusivement « la Porte » et « la Voie », certes, mais la Porte, ou la Voie, n'est pas exclusivement Jésus ; le Logos est Dieu, mais Dieu n'est pas le Logos. Toute la question est de savoir à quel degré nous acceptons cet axiome et quelles, conséquences nous en tirons.

A un tout autre point de vue, il n'y a pas de religion qui ne comporte des éléments pratiquement comparables à ce qu'on appelle, en langage zéniste, un koan : à savoir une formule logiquement irritante, destinée à faire éclater l'écorce du mental, non vers le bas, bien entendu, mais vers le haut; et en ce sens toute religion, par tel aspect ou par tel détail, est une « divine folie », ce que compense d'ailleurs a priori l'évidence éblouissante et quasi existentielle de son message global. Le sceptique ou le pédant a beau se heurter à d'inévitables contresens, il y aura toujours dans la religion un élément fondamental qui ne lui laisse pas d'excuse; mais qui, au contraire, fournit une excuse largement suffisante pour les dissonances du symbolisme religieux.

Occident chrétien et Orient musulman

Après toutes ces considérations sur une question de typologie religieuse, et en fin de compte sur les énigmes du langage dogmatique en général, nous croyons pouvoir changer de sujet dans le cadre de ce chapitre même, et aborder un problème connexe, celui du rapport - ou de certains rapports - entre l'Occident chrétien et l'Orient musulman ; nous disons « aborder », car n'est pas question de traiter le problème à fond. Tout d'abord, nous devons signaler le phénomène suivant : il arrive trop souvent que des Occidentaux plus ou moins proches de l'Islam accusent les autres Occidentaux de méconnaître et de n'entretenir à son égard que des préjugés impardonnables, au lieu de l'étudier avec amour ; ce qui est parfaitement injuste et même proprement absurde, car même en faisant abstraction de tous préjugés possibles - et les Occidentaux ne sont certes pas seuls à en avoir - c'est un fait que l'Islam rejette les dogmes du Christianisme, met le Coran à la place de l’Évangile, le Prophète à la place du Christ et estime que la religion chrétienne devrait céder sa place à la religion musulmane ; or ces opinions suffisent largement pour rendre l'Islam inacceptable et même odieux aux yeux des Chrétiens. Ce qui importe au point de vue de la vérité totale - nous l'avons dit et nous le répétons - c'est de savoir que les thèses antichrétiennes de l'Islam n'ont fondamentalement qu'une signification symbolique, extrinsèque et « stratégique », et cela en fonction d'une intention spirituelle positive qui est évidemment sans rapport avec des phénomènes historiques. La même remarque s'applique, mutatis mutandis, aux thèses chrétiennes cherchant à invalider toutes les autres religions, et ainsi de suite. Dieu a voulu - nous ne pouvons en douter - que des mondes religieux différents et divergents coexistent sur une même planète ; à l'intérieur de l'un de ces mondes, Il ne demande pas de compte sur les autres ; et c'est d'ailleurs avec la même « logique existentielle » que chaque individu croit être « moi ». Si Dieu veut qu'il y ait diverses religions, Il ne peut pas vouloir que telle religion soit telle autre religion, chacune doit donc avoir des barrières solides.

Dans les conditions normales, le Musulman n'a qu'une seule religion, qui l'enveloppe et le pénètre au point qu'il lui est impossible d'en sortir, sauf par apostasie ; on s'étonnera de ce truisme, mais on verra immédiatement sa fonction si nous ajoutons que le Chrétien moyen, au contraire, semble avoir pratiquement trois religions à la fois, d'abord le Christianisme, ensuite « la civilisation », et enfin la « patrie », ou la « nation », ou la « société ››, ou une autre idéologie politique quelconque, suivant les fluctuations de la mode ou suivant le milieu ; la religion proprement dite est mise dans un coin, les réflexes humains sont compartimentés (5). Une des causes de ce phénomène est un goût invétéré de la nouveauté notoire déjà chez les Grecs dès l'époque dite classique, et non moins chez les Celtes et les Germains ; donc la tendance au changement et par là à l'infidélité, voire à l'aventure luciférienne ; tendance neutralisée, il est vrai, par plus d'un millénaire de Christianisme. Mais il y a aussi – fort paradoxalement - une cause à cette incohérence culturelle dans la religion elle-même - cause indirecte sans doute mais se combinant à la longue avec la cause que nous avons signalée - , à savoir le fait que la doctrine et les moyens du Christianisme dépassent les possibilités psychologiques de la majorité ; d'où une scission séculaire entre le domaine religieux, qui tend à retenir les hommes dans une sorte de ghetto sacré, et le « monde » avec ses invitations séductrices - irrésistibles pour des Occidentaux - à l'aventure philosophique, scientifique, artistique et autre; aventure de plus en plus détachée de la religion, et en fin de compte se tournant contre elle.

L’Islam, dira-t-on, est stérile, et il écrase toute initiative créatrice ; peut-être, mais il le « fait exprès » et en connaissance de cause; car c'est ainsi qu'il a pu maintenir un monde biblique pendant un millénaire et demi en face d'un Occident de plus en plus prométhéen et dangereusement « civilisé ». Sans doute, l'Islam n'a pas pu échapper à la décadence qui a envahi tout l'Orient, à de rares exceptions près - décadence pour ainsi dire passive que n'a pas subi l'Occident, lui qui était entièrement occupé par sa déviation active et créative - mais il n'en a pas moins protégé l'Orient pendant quelques siècles contre le virus civilisationniste ; il en a considérablement retardé l'expansion, et même plus ou moins amorti les effets d'une façon préventive (6). L'0ccident, de son côté, a pu garder, dans le cadre même de sa déviation et indépendamment d'elle, des qualités humaines qui, en Orient, ont été sérieusement entamées, non partout mais dans trop de secteurs, et au point que certains jugements occidentaux bénéficient pour le moins de circonstances atténuantes ; les sentiments de supériorité des colonisateurs n'étaient pas toujours entièrement gratuits (7), comme des défenseurs aussi enthousiastes qu'abstraits de l'Orient aiment à le penser.

Sans doute, l'abus luciférien de l'intelligence qui se retourne contre la vérité, et finalement contre l'homme, est pire que le simple affaissement moral ; mais la surprenante facilité avec laquelle l'Orient décadent s'est solidarisé avec le modernisme occidental, dès qu'il le pouvait, prouve néanmoins qu'il y a entre les deux excès comme une complémentarité providentielle, et que l'affaissement moral, à partir d'un certain degré, est beaucoup moins innocent au point de vue spirituel, et partant au point de vue vérité, qu'on ne l'aurait cru au premier abord ; ou qu'on n'aimerait le croire par amour de la tradition (8). Au demeurant, adhérer réellement à la tradition c'est y adhérer avec discernement et non par simple routine ; manquer de discernement au point de déserter la tradition dès que les conditions politiques le permettent ou y invitent - ou de subir cette désertion sans protester (9) -, ce n'est pas réellement avoir l'esprit traditionnel, et cela ne témoigne pas d'une mentalité digne d'être citée en exemple ou d'être admirée sans réserves.

D'une manière générale, une des découvertes les plus décevantes de notre siècle est le fait que la moyenne des croyants sous tous les cieux, ne sont plus tout à fait des croyants ; qu'ils n'ont plus véritablement la sensibilité conforme à leur religion et qu'on peut leur raconter n'importe quoi. L'humanité, se trouve plongée dans le kali-yuga, l'« âge de fer », et la plupart des hommes sont au-dessous de leur religion - s'ils en ont encore une - au point de ne pas pouvoir la représenter consciemment et solidement ; il serait donc naïf de croire qu'ils incarnent tel monde traditionnel, c'est-à-dire qu'ils sont ce qu'est celui-ci. A la question de savoir si l'Orient routinier c'est la tradition, on doit répondre oui et non ; on ne saurait, en connaissance de cause, répondre simplement oui, mais il serait sans doute plus inadéquat encore de répondre simplement non, étant donné la complexité du problème. Tout ceci est sans rapport avec la typologie religieuse, dont nous avons parlé au début de ce chapitre, mais comme le mal procède par excès aussi bien que par privation - et la falsification du bien tient des deux tares (10) - , les caractères formels d'une religion influent forcément, bien que très indirectement et par subversion, sur la genèse de telle dégénérescence particulière ; ce qui se constate dans la décadence orientale aussi bien que dans la déviation occidentale.

Ce qui caractérise fondamentalement cette déviation, que le simple mot « matérialisme » ne saurait définir, c'est un triple abus de l'intelligence : philosophique, artistique et scientifique ; c'est de ce luciférisme - inauguré par la Grèce « classique » puis neutralisé par un millénaire de Christianisme et enfin réédité par la Renaissance - qu'est né le monde moderne, lequel du reste a cessé d'être uniquement occidental, ce qui ne saurait être la faute des seuls Occidentaux.

Il y a, de toute évidence, partout une différence décisive de qualité entre les hommes spirituels et les hommes mondains, ou entre les traditionnels et les antitraditionnels, les orthodoxes et les hétérodoxes ; mais il n'y en a pas, au point de vue de la valeur humaine globale, entre l'Orient et l'Occident. Si a priori l'Occident a besoin de l'Orient traditionnel, celui-ci a besoin a posteriori de
l'Occident qui a été à son école.

Frithjof Schuon, « Sur les traces de la religion pérenne ».

Sur les traces de la religion pérenne



1. Fût-ce un « Absolu relatif », mais là n'est maintenant pas la question, car tout l'0rdre divin est absolu par rapport à la relativité humaine ; mais non par rapport au pur Intellect, qui dépasse toute relativité - effectivement ou potentiellement - sans quoi nous n'aurions même pas la notion de l'Absolu.

2. Au point de vue de la Loi, est conforme à la vertu, non seulement ce qui sert l'intérêt spirituel et éventuellement aussi matériel de l'individu et de son prochain immédiat, - l'intérêt spirituel étant inconditionnel et le matériel, conditionnel, - mais aussi ce qui sert l'équilibre de la société ; tandis qu'au point de vue de la simple nature des choses, est conforme à la vertu ce qui, sans égard aux besoins de la collectivité, est juste en soi et par là sert tel intérêt spirituel, à condition de ne nuire aux intérêts légitimes de personne.

3. Alors que dans les deux cas, des influences chrétiennes sont totalement exclues. Il s'agit d'archétypes spirituels, non de phénomènes historiques.

4. Non sous celui de la modalité caractéristique, et réellement unique, que réalise le « Verbe fait chair » ; bien que le Coran reconnaisse que le Christ est « Esprit de Dieu ›› et qu'il est né d'une Vierge.

5. En ceci, l'Orient a finalement rejoint l'Occident, parfois avec un zèle d'« apprenti sorcier ». En ce qui concerne la dégénérescence générale de l'humanité, elle a été prévue par toutes les traditions, et il serait pour le moins paradoxal de la nier pour l'Orient par souci de traditionalisme.

6. Un phénomène qu'il faut signaler ici afin de prévenir les confusions les plus fâcheuses, est le faux traditionalisme qui fait de l'Islam le drapeau d'un nationalisme ultra-moderne et subversif, en introduisant dans le formalisme religieux des idées et des tendances qui sont à l'antipode de la doctrine islamique et de la mentalité musulmane. Des entreprises analogues ont vu le jour dans d'autres mondes traditionnels.
7. Les modernistes orientaux le reconnaissent plus ou moins, mais ils en rendent responsable la tradition, et c'est d'ailleurs en vertu de leur modernisme qu'ils ont intérêt à le reconnaître ; ils vont même jusqu'à reprocher au colonialisme d'avoir maintenu les institutions traditionnelles.

8. On a beau accuser l'0ccident de répandre ses erreurs dans le monde entier, encore faut-il quelqu'un qui les accepte. La théologie n'a jamais disculpé Adam parce que c'est Ève qui a commencé.

9. Dans certains, cas, on doit tenir compte du fait que ce sont forcément les hommes antitraditonnels qui disposent des moyens techniques et avant tout de l'armement, en sorte que les hommes traditionnels sont sans défense ; mais dans la plupart des cas cette situation générale n'empêcherait pas que les partisans de la tradition manifestent leur résistance. On nous a dit plus d'une fois, en Orient, que tout ce qui arrive est « voulu de Dieu » ; or on aurait pu, dans des situations analogues,
faire ce raisonnement dès le Moyen Age et même dès l'Antiquité, et on n'a pas songé à le faire avant cette seconde moitié du XXe siècle.

10. La falsification résulte du péché d'orgueil: falsifier un bien, c'est l'accaparer pour soi, le subordonner à une fin qui lui est contraire, donc le vicier par une intention inférieure. L'orgueil, comme l'hypocrisie qui l'accompagne, ne saurait produire que la falsification.



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