jeudi, août 25, 2011

On ira tous au Paradis





On ira tous au paradis mêm' moi
Qu'on soit béni ou qu'on soit maudit, on ira
Tout' les bonn' sœurs et tous les voleurs
Tout' les brebis et tous les bandits
On ira tous au paradis...
(Michel Polnareff)

D'après l'eschatologie de l'Iran ancien, trois millénaires après Zoroastre doit avoir lieu la victoire finale contre le mal. On estime que Zoroastre est né en 630 av. J-C et mort en 550 av. J-C.

Le sperme de Zoroastre est gardé au fond du lac Kansaoya, et de ce sperme naîtront les Sauveurs futurs, ses fils posthumes. Une jeune fille de quinze ans, qui ira se baigner dans le lac en question, sera fécondée ; vierge, elle donnera naissance à un Sauveur dont la carrière sera en gros analogue à celle de Zoroastre et qui complétera son œuvre. Au bout du premier millénaire apparaîtra Uxsyat-arata qui détruira la druj (dommage, mensonge) des quadrupèdes, notamment celle des loups, animal démoniaque par excellence. Au bout du second millénaire, ce sera le tour d’Uxsyat-namah qui détruira la druj des serpents ; au bout du troisième, celui d'Astvat-arata, appelé plus souvent simplement Saosyant qui accomplira la rénovation en faisant disparaître la druj des hommes.

Les textes pehlevis donnent des descriptions plus ou moins divergentes des événements qui doivent avoir lieu pendant les trois millénaires. Celui de Zoroastre est en grande partie passé à l'époque où ils ont été composés, et les événements apocalyptiques décrits correspondent plus où moins à des événements historiques connus : le développement rapide de la religion mazdéenne sous Vistâspa et ses successeurs, identifiés aux derniers Achéménides ; le coup d'arrêt, porté, au bout de trois cents ans, par l'invasion d'Alexandre ; le rétablissement de la religion et de la royauté aryenne par Tosar et Ardasêr-i Pâpakân ; Mani et le grand hérésiarque Mazdak ; l’invasion arabe et l'effondrement de l'empire aryen. C’est alors le IXe et le Xe siècles qui durent encore. L'oppression continuera jusqu'à ce qu’apparaisse Pesyotan, le fils immortel de Vistâspa qui vit actuellement dans la forteresse de Kang-diz, construite par Syâvaxs, le père de Kai Khusrav et cachée ensuite sous terre. A la tête d'une armée victorieuse, il conquerra l'Iran et « rattachera la force et la victoire à la religion d'Ohrmazd », exterminant les trois races d'adorateurs des dêv (démons) : les Turcs, les Romains et les Arabes.

Le second millénaire, celui d'Usyatar, est rempli par des événements qui ne peuvent aucunement être qualifiés d’historiques. Au Ve siècle de ce millénaire aura lieu l'hiver Markûsân qui fera périr la plus grande partie des hommes et des bestiaux. La terre sera alors repeuplée à partir du var de Yam, construit par ce dernier à la fin de son règne et caché sous terre, pour préserver une partie des hommes de la destruction.

C'est sous le signe du bonheur retrouvé que se place le dernier millénaire, celui d’Usyatarmâh. Les hommes se rassasieront en mangeant beaucoup moins ; la concupiscence diminuant en eux, ils abandonneront progressivement l'usage de la viande ; puis celui du lait ; celui de l'eau et des plantes ; et ils finiront par se nourrir du mênok (élément céleste). Vers la fin du millénaire, Dahâk brisera ses liens ; réveillé, Kai Khusrav ira réveiller Karsâsp qui tuera Dahâk. Sosans naîtra, s'entretiendra avec Ohrmazd et célébrera le sacrifice eschatologique.

Ce dernier aura lieu les cinq derniers jours du mois de Spandarmat. Chaque jour, à chacun des cinq gâh du jour, un sacrifice sera célébré. Sosans, fonctionnant comme zaotar, se placera sur le continent central, le Xvaniras ; six autres rénovateurs occupant chacun la place d'un prêtre du sacrifice du Yasna, se placeront dans les continents extérieurs. Chaque jour, un cinquième des décédés sera ressuscité, recevra la vie, se réjouira et ira à l'assemblée des Satvastran au milieu de la terre. Le sixième jour est le premier des cinq épagomènes qui portent le nom des cinq Gâthâ. Ce sixième jour, la résurrection sera terminée. Ohrmazd descendra du ciel, s'assiéra sur son trône et un jugement général aura lieu. Les justes monteront au paradis, les damnés tomberont en enfer. Ils y resteront trois jours. Les assassins de Yam et d'autres grands pécheurs seront ensuite condamnés au châtiment de 9000 ans, toute la durée du temps entre la première attaque d'Ahriman et la rénovation. Ils y resteront trois jours et trois nuits. C'est que le temps en question est un temps liturgique. Les derniers jours de l'année, le temps empirique est aboli, la création et la rénovation rejoignent le moment présent. Déjà, dans un texte du Yasna, l'officiant déclare avoir aperçu Ahura Mazdâ au premier début de l'existence et à son dernier tournant. Tout prêtre, en fin d'année, réalise en lui l'unité des trois moments.

Pendant que les damnés sont en enfer - ou, selon d’autres textes, pendant le jugement, a lieu la grande bataille eschatologique. Les démons sont vaincus, chacun par son adversaire spécifique, chassés du monde du bien ou tués.

Après les cinq jours gâthiques, c'est le jour d’Ohrmazd du mois de Fravartin, le premier jour du printemps et de l'année. Spandarmat intercède alors auprès d'Ohrmazd en faveur des pécheurs qui sont encore en enfer. Ils sont alors ramenés sur terre, et les justes y redescendent. La terre s'élève jusqu'à la sphère des étoiles, le Garôtmân y descend : et le Garôtmân sera partout. Tout le monde sera transfiguré, les hommes auront un corps brillant, l'eau sera exempte de ténèbres, le feu sans fumée. Les hommes et les femmes pourront s'unir, mais ne procréeront pas, la saveur de la viande constamment dans leur bouche et ils n'auront pas besoin de manger. Ce sera un bonheur sans fin et illimité. Non un retour simple à l'état ayant existé avant la création, mais plutôt l'explicitation de toutes ses virtualités, l'établissement définitif de l'empire d'Ohrmazd. Définitivement éliminé, le mal sera à jamais incapable d'agir. Le Temps limité sera clos, le Temps infini restauré. La faute de Zurvân sera définitivement réparée.

Marian Molé

L'Iran ancien
Marian Molé



Dessin :

Le plan dirigé contre l’Esprit

La lutte pour la supériorité et les spéculations continuelles dans le monde des affaires créera une société démoralisée, égoïste et sans cœu...