« Un
document supposé être confidentiel, élaboré par le Centre de
recherche politique du ministère israélien des Affaires étrangères,
a fait l'objet de fuites, en octobre 2004. Son contenu était
explosif et remettait profondément en cause la poursuite de
l'occupation des territoires palestiniens ou d'une partie d'entre eux
en comptant sur le soutien américain.
D'après
le rapport en question, cette stratégie conduit Israël dans une
impasse. Les auteurs estiment, en effet, que l'État
hébreu pourrait à terme entrer en confrontation avec l'Union
européenne et devenir un véritable « État paria »,
comme le fut l'Afrique du Sud de l'Apartheid si le conflit avec les
Palestiniens n'est pas résolu de façon satisfaisante et juste. Les
analystes du ministère israélien appuyaient leur raisonnement sur
l'hypothèse d'une montée en puissance, dans le concert
international, de l'Europe alors que, simultanément, les États-Unis
verraient leur influence internationale décroître. Acceptons-en
l'augure. Si les vingt-sept pays membres de l'Union dépassent leurs
divisions internes, et parlent d'une seule voix, leur influence
globale pourrait s'accroître considérablement et se proportionner à
leur puissance économique.
Les
spécialistes israéliens en question ont paradoxalement une
conscience plus fine et avisée des capacités d'intervention de
l'Union européenne que de nombreux responsables européens
eux-mêmes. Jusqu'ici, l'Europe s'est divisée sur les sujets de
politique étrangère, comme, par exemple, la guerre d'Irak. Les
chercheurs du ministère israélien des Affaires étrangères
prédisent que, si elle fait entendre sa voix de façon plus
accordée, elle pourra sans doute demander à Israël un plus grand
respect des conventions internationales et limiter sa liberté
d'action dans le conflit avec les Palestiniens.
Israël
pourrait également payer le prix d'une compétition plus serrée
entre les États-Unis et l'Union européenne. Si cette dernière et
Israël ont des relations profondes et étroites dans le domaine du
commerce et de la recherche scientifique, elles ont des opinions très
différentes concernant les Palestiniens. Jusqu'ici, Israël a réussi
à tenir l'Europe en dehors du volet stratégique et a préféré
construire une alliance unique avec les États-Unis. Mais mettre tous
ses œufs dans le panier américain pourrait conduire à son
isolement. L'Europe ne peut plus être seulement considérée, au
Proche-Orient et ailleurs, comme un grand marché avec lequel on fait
des affaires. Et, même si l'Europe est le principal partenaire
commercial d'Israël (40 % des importations d'Israël viennent de
l'Union européenne, qui absorbe 30 % de ses exportations), les pays
de l'Union n'accepteront plus longtemps d'être cantonnés dans un
rôle de soutien financier ou technique. Ils ont un rôle à jouer
dans la stabilisation du Proche-Orient et veulent le jouer. »
Pascal
Boniface, Vers la 4e
guerre mondiale.
Quelques
années après la fuite de 2004, la crise financière et économique
a terrassé l'Europe. L'Union
européenne ne risque pas de s'opposer à l'État hébreu qui
poursuit en toute impunité sa guerre contre la population de Gaza.
Quatre ans après, le recadrage proposé par Pascal Boniface a montré toute sa pertinence et justifie qu'on s'y intéresse à nouveau dans cette édition mise à jour.
Le Proche-Orient est plus dangereux et instable que jamais. Le fossé entre le monde occidental et le monde musulman s'est creusé.
L'avenir de la sécurité internationale se joue toujours dans le conflit israélo-palestinien, dans cette zone devenue l'épicentre d'un éventuel choc des civilisations. Or rien n'est inéluctable. Il est encore temps d'arrêter l'engrenage qui menace de conduire le monde à la ruine.
Un temps, l'élection de Barack Obama a redonné espoir au monde entier. Mais le nouveau président américain pourra-t-il résister au choc de la guerre de Gaza et réussir là où tous ses prédécesseurs ont échoué ?
Vers la 4e guerre mondiale
En
2005, Pascal Boniface s'interrogeait sur cette 4e Guerre
mondiale. Véritable
guerre à mort contre le terrorisme planétaire que les
néoconservateurs américains entendaient mener, au nom du monde
civilisé, réuni sous leur bannière.
Quatre ans après, le recadrage proposé par Pascal Boniface a montré toute sa pertinence et justifie qu'on s'y intéresse à nouveau dans cette édition mise à jour.
Le Proche-Orient est plus dangereux et instable que jamais. Le fossé entre le monde occidental et le monde musulman s'est creusé.
L'avenir de la sécurité internationale se joue toujours dans le conflit israélo-palestinien, dans cette zone devenue l'épicentre d'un éventuel choc des civilisations. Or rien n'est inéluctable. Il est encore temps d'arrêter l'engrenage qui menace de conduire le monde à la ruine.
Un temps, l'élection de Barack Obama a redonné espoir au monde entier. Mais le nouveau président américain pourra-t-il résister au choc de la guerre de Gaza et réussir là où tous ses prédécesseurs ont échoué ?
Pascal
BONIFACE est directeur de l'Institut des relations internationales et
stratégiques (Iris, iris-france.org) et enseignant à l'institut d'études européennes (Université Paris 8).