samedi, septembre 20, 2014

Le gouvernement mondial selon le lamaïste français Matthieu Ricard



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Le 7 novembre 2011, invité à l'émission Service Public de France Inter, Matthieu Ricard, VRP du lamaïsme et apôtre de la méditation, déclare : « On doit en arriver à une gouvernance mondiale ». Dans son livre Plaidoyer pour l'altruisme, Matthieu Ricard développe sa vision politique.

Une démocratie informée et une méritocratie responsable

Comment faire en sorte que les peuples se donnent le meilleur gouvernement possible ? Comme l'a dit le Dalaï-lama après avoir « librement, joyeusement et fièrement » mis fin à quatre siècles de collusion entre pouvoir spirituel et pouvoir temporel au sein de l'administration tibétaine en exil : « Le temps de la mainmise des dictateurs et des chefs religieux sur les gouvernements est révolu. Le monde appartient à 7 milliards d'êtres humains, et c'est eux et seulement eux qui doivent décider démocratiquement du sort de l'humanité. » Tels sont les propos qu'il a prononcés à maintes reprises depuis 2011, lorsqu'il abandonna les dernières prérogatives politiques qui étaient jusqu'alors associées à sa fonction, au terme d'un processus de démocratisation des institutions tibétaines qu'il entreprit dis son arrivé en exil sur le sol de l'Inde. « La démocratie, plaisantait Churchill, est le pire système de gouvernement, à l'exception de tous les autres qui ont été expérimentés. » Comment faire, en effet, pour que les décisions les meilleures pour l'ensemble de la population puissent émerger d'une immense masse d'individus qui n'ont pas toujours accès à un savoir leur permettant de décider en toute connaissance de cause ? Les dictateurs ont résolu la question en décidant pour tout le monde, et les chefs religieux en décidant selon les dogmes de leur religion respective. À de rares exceptions près, les premiers comme les seconds ont causé, et causent encore, d'incommensurables souffrances.

La plupart des tribus primitives [...] étaient de nature fondamentalement égalitaires. Lorsqu'elles se sont sédentarisées, ce sont généralement les individus considérés comme les plus sages, ceux qui avaient le plus d'expérience et qui avaient fait leurs preuves, qui étaient pris pour chefs. Le choix des dirigeants conciliait ainsi consensus et méritocratie. À mesure que ces communautés ont grandi, ont accumulé des richesses et se sont hiérarchisées, d'autres systèmes sont apparus, notamment la conquête brutale du pouvoir et la soumission des populations a l'autorité de potentats. L'histoire humaine a fini par montrer que la démocratie était la seule forme de gouvernement susceptible de respecter les aspirations d'une majorité de citoyens.

Mais comment éviter les dérives du populisme, des décisions hâtives prises en vue de satisfaire les demandes de ceux qui ne jugent les politiques qu'en fonction des avantages et des inconvénients à court terme ? Les politiciens assurent leur réélection en accédant à ces demandes et n'osent pas s'engager dans des réformes en profondeur dont les fruits ne seront pas récoltés immédiatement, et qui impliquent parfois des décisions impopulaires.

Les risques de la démagogie sont aujourd'hui particulièrement évidents dans le cas du déni du réchauffement global, très en vogue aux États-Unis, déni dont les arguments fondraient cent fois plus vite que les glaces de l'Arctique si la majorité de la population, des médias et des hommes politiques étaient mieux au fait des connaissances acquises par la science, et si ceux qui sont correctement informés étaient en mesure de prendre les décisions nécessaires à la prospérité à long terme de l'humanité. Il faut aussi que la science se plie moins aux exigences des marchés financiers qui l'éloignent de la production de connaissances au profit d'une valorisation économique de la recherche. La marchandisation de la science et de la médecine fait souvent passer les intérêts des laboratoires pharmaceutiques devant ceux des malades, et les intérêts des firmes agroalimentaires devant ceux des agriculteurs et des consommateurs.

L'Institut Berggruen pour la gouvernance, fondé par le philanthrope d'origine allemande Nicolas Berggruen, qui a décidé de consacrer sa fortune à l'amélioration des systèmes de gouvernance dans le monde, définit la « gouvernance intelligente » comme la réalisation d'un équilibre entre une méritocratie construite grâce à une série de choix effectués à différents niveaux de la société (des autorités locales aux responsables nationaux) et un processus démocratique qui permet aux citoyens d'empêcher les dérives potentielles du pouvoir vers la corruption, le népotisme, les abus et le totalitarismes.

Selon Nicolas Berggruen et l'éditorialiste politique Nathan Gardels, une démocratie informée implique une décentralisation maximale du pouvoir décisionnel, confiée à des communautés citoyennes actives dans les domaines relevant de leur compétence. Afin de gérer et d'intégrer ces pouvoirs interdépendants mais délocalisés, il faudrait, selon ces auteurs, mettre en place une instance politique fondée sur les compétences et sur l'expérience, qui dispose d'une vue d'ensemble sur le système et prenne les décisions sur les questions qui concernent le bien commun des citoyens. Cette instance constitue une méritocratie éclairée, protégée des pressions correspondant aux intérêts immédiats de certains groupes d'influence. Toutefois, pour rester légitime, cette instance doit être transparente, tenue de rendre des comptes, et son fonctionnement doit être surveillé par des représentants des citoyens, démocratiquement élus.

Berggruen et Gardels conçoivent une structure pyramidale qui encouragerait l'émergence, à chaque niveau de représentation, de communautés à taille humaine d'élus qui se connaissent et sont capables de juger de l'expérience et des capacités de leurs paire. Imaginons que ce système soit appliqué à un pays de 80 millions d'habitants. Le pays est divisé en 100 districts de 800 000 habitants. Chaque communauté de 2 000 habitants, constituant un «arrondissement» élit 10 délégués. Ceux-ci se rencontrent, délibèrent et élisent l'un des leurs, appelé à siéger dans un conseil de «secteur» composé de 20 membres représentant au total 40 000 habitants. Ceux-ci élisent à leur tour 1 représentant régional et 20 représentants régionaux élisent un député qui représente un district de 800 000 habitants et siège au Parlement national composé ainsi de 100 députés.

Les élus représentent ainsi des groupes qui, à différents niveaux, reflètent l'ensemble du corps électoral. Ce système est notamment utilisé en Australie et en Irlande. La différence avec l'élection directe de 1 député représentant 800 000 habitants est qu'à chaque niveau les personnes qui élisent celui qui les représentera au niveau supérieur se connaissent et sont à même d'apprécier de première main l'expérience, la sagesse et les capacités de la personne qu'ils élisent. À chaque niveau, les candidats doivent prouver qu'ils disposent de capacités (connaissances et expérience) proportionnelles au degré de responsabilité visé. Cette solution consiste donc à fragmenter le système politique en petites unités gérables, à taille humaine, chacune élisant celle qui lui est immédiatement supérieure.

Vers une fédération mondiale ?

De son côté, dans Demain qui gouvernera le monde ? Jacques Attali estime que le fédéralisme est la forme d'administration du monde qui a le plus de chances d'être efficace. Une gouvernante mondiale doit en effet posséder une dimension de supranationalité sans pour autant être centralisée. D'où le fédéralisme. «Le fédéralisme, précise Attali, obéit à trois principes : la séparation, qui consiste à répartir les compétences législatives entre gouvernement fédéral et gouvernements fédérés; l'autonomie, qui permet à chaque niveau de gouvernement d'être seul responsable dans son domaine de compétence; l'appropriation, grâce à laquelle les entités fédérées, représentées au sein des institutions fédérales et participant à l'adoption des lois fédérales, éprouvent un sentiment d'appartenance à la communauté et à ses règles, et ont la certitude de la capacité du centre de maintenir la diversité et le compromis. » En bref, conclut Attali :

Pour survivre, l'humanité doit même aller beaucoup plus loin que l'actuelle prise de conscience d'une vague «communauté internationale». Elle doit prendre conscience de l'unité de son destin, et d'abord de son existence en tant que telle. Elle doit comprendre que, rassemblée, elle peut faire beaucoup plus que divisée.

Matthieu Ricard, Plaidoyer pour l'altruisme.

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