samedi, novembre 05, 2011

La Chine, le bouddhisme et le Tibet





Comme si nous manquions de Gurdjiefs et de Fakirs Birmans, de yogis et d’Ouspenskis, de Fathers Divine et de Christs de Montfavet, de Miss Tick et autres « mystiques » qui, en effet, ne méritent pas les quatre maravédis de considération que leur refusait Jean de la Croix, voici depuis quelque temps que le Zen relaie la gnose et le Tao Tö King mal entendu, bref tout ce qui invite l'homme d’aujourd’hui à résigner le peu qui le distingue encore des lombrics et des méduses : le courage lucide et la sagesse raisonnable.

Qu’on m’entende bien : je pratique volontiers Hallaj, Toukaram, Jean de la Croix, et les compte, s’ils daignent, au nombre de mes amis chers. L’écrivain et le philosophe Tchouang-tseu ont évidemment plus de génie que Confucius. Mais, pour qu’une société puisse impunément faire aux Hallaj et aux Tchouang-tseu toute la place qu’ils méritent, encore faut-il qu’elle fonctionne bien, selon une morale et une politique avisées, qui réservent à la folie sa juste place ; en revanche, toute société me paraît méprisable, pour qui « mystique » signifie simplement tout le pouvoir à la déraison, à la démence, à l'anarchie, voire à la bestialité. Ce qui m’agace, ce n’est donc pas l'existence d'un Zen. Ce qui m'irrite, me révulse et m'effraie, c’est l'usage que font ici, du Zen, comme de Lao-tseu ou du Yi-King, des gens qui ne pensent qu’à nous livrer, apathiques et anesthésiés, aux différents tyrans qui prétendent à nous séduire.

Ainsi, peu de temps après que M. Demiéville a répété une fois de plus que malheureusement nous ne comprenons pas encore le Yi-King, ce traité de divination par l'achillée sternutatoire et le plus ancien des ouvrages auxquels remonte l'histoire de la pensée chinoise, en voici chez nous paraître une édition nouvelle, dans la vieille traduction de Harlez. Pour ceux qui savent qu’au XVIIIe siècle déjà les jésuites s'entichèrent si habilement de ce Canon des Mutations que d’y retrouver toute l'arithmétique binaire de Leibniz, et que Leibniz en personne tomba dans le panneau que lui tendait le jésuite Bouvet, rien d'étonnant si, au XXe siècle, un homme intelligent découvre que les hexagrammes manifestent les archétypes de Jung, et que la psychologie des profondeurs était familière aux Chinois dès avant Confucius. Aucun sinologue n’oserait aujourd'hui proposer à ses collègues une traduction commentée du Yi-King, mais les familiers de la Librairie Véga auront la leur.

Lorsque Jean Grenier publie un essai sur l'esprit du taoïsme, les sinologues font la petite bouche, et d’autant plus petite que Jean Grenier ne peut évidemment citer que des traductions périmées du P. Wieger. En tant que sinologue, assurément ils ont raison. J'accepte pourtant, avec joie, ces pages de Grenier, parce que, s’il est un homme aujourd’hui qui pense et vive un peu en taoïste, aucun doute, c’est lui. Quelles que soient les différences qui, du quiétisme taoïste, séparent celui de Fénelon et de Mme Guyon, Grenier prouve qu’un Français du XXe siècle peut assimiler une part non négligeable de Tchouang-tseu, et que le taoïsme est un des modes universels de vivre et de penser.

Mais il faut dire non, un non catégorique, à tous ceux pour qui le quiétisme du Zen est une fin de non recevoir opposée à tous les hommes qui posent aujourd’hui des questions précises et atroces : le chômage ? le racisme ? le viol des consciences ? la surpopulation de la planète ? les techniques chimiques ou chirurgicales employées par les policiers ? Zut à ce Zen-là, et zut au Zen de Suzuki, car Suzuki est au Zen ce qu’à Confucius Lin Yu-tang, et Maurois aux pensées d’Alain. N’importe, ils ont tous lu le Zen de Suzuki. Qu’ils l'aient lu, passe encore ; qu’ils ne lisent que ça, voilà le mal, ou le péril. Lorsque Jean Paulhan, dans le Clair et l'Obscur, une fois de plus nous raconte l'initiation
à coups de bâton, malgré la référence de rigueur à Suzuki, il n’y a que quart de mal, car il conclut en pirouette : « Il n’était pas besoin d’aller chercher les Japonais. » En effet. Étant donné l'usage qu’ils font du Zen, nos contemporains pourraient aussi bien « étudier la mystique » dans Nous deux, ou dans le Pèlerin, qui les abrutiraient à moins de frais et, de plus, à la française.

Quand le premier numéro de Bief, le nouveau bulletin mensuel des surréalistes, publie un articulet de M. Guy Cabanel pour exalter le caractère « hautement irrationnel » du coup de bâton des Maîtres Zen, quand il compare ces coups de bâton aux appels surréalistes à la violence, ou encore quand il ose rapprocher la méditation bouddhiste de l'automatisme psychologique, comme on regrette que la prose de Breton se mêle à ces inepties. Il est vrai qu’au second cahier M. Cabanel se fait rappeler à l'ordre par un correspondant qui écrit du Japon et raille les Parisiens tout rassotés de Zen. Par malheur, cet anonyme dénigre le Zen avec autant de démesure que l’autre lascar en mettait à l'exalter. Pour lui, zen = bushido = nationalisme = terreur policière. Tout cela, trop simpliste, démontre une fois de plus que nos zénistes feraient bien d'aller à l'école chez un vrai maître de Zen, et par conséquent de lire quelques-uns de ceux aujourd’hui qui parlent du bouddhisme Dhyâna, Tch’an ou Zen avec un peu de compétence : Demiéville, ou Gernet.

Ils ne découvriraient ni la pierre philosophale, ni la drogue d'immortalité, mais ils serraient puissamment armés pour mieux comprendre ce qui vient de se passer au Tibet, et la politique de Pékin à l'égard des minorités religieuses.

Soit l'affaire tibétaine. J’ai lu là-dessus, dans la presse, des choses bien belles : le mystère tibétain, la spiritualité tibétaine, aujourd’hui menacés par le matérialisme sordide qui, etc. Et comme on s'apitoie sur le Dalaï-lama, un saint homme de lama, un ascète pour lequel on a prévu des caisses de provisions à la douzaine, et quelques kilos d'aïcecrimes, afin de rafraîchir le Saint qui descend du Toit du Monde. Autant je réprouve la brutalité avec laquelle les Chinois ont récupéré Lhassa (que les savants écrivent Lhasa), autant je refuse de pleurnicher sur la « spiritualité » des moines et la vertu des féodaux. Non, je ne m’afflige point sur une théocratie où, complices de grands propriétaires, lamas de tout poil entassent leurs trésors, dérobés à des serfs abrutis de superstition. Si j’ai gardé un peu de ma tête à moi en cette histoire tibétaine, c'est surtout parce que je connaissais le premier tome du Concile de Lhasa, où M. Demiéville étudie une controverse sur le quiétisme entre bouddhistes de l’Inde et de la Chine au VIIIe siècle de l'ère chrétienne. Je ne conseillerais pas ce livre aux paresseux ; à tous les autres, comment donc ! Ne serait-ce que pour le secours qu’ils en recevront s’ils veulent se désintoxiquer du Zen de nos zones. Car Demiéville montre assez bien ce qu’il y a derrière le Dhyâna, cette mystique passive, quiétiste, nihiliste, qui n’aspire qu’à la « connaissance sans différenciation ». Je surprendrai sans doute quelques personnes en disant, le moins surnaturellement du monde, que j'ai quelque expérience d’un état pourrait doctement s'appeler quelque chose comme nirvikalpa-jñâna, mais je n’en fais pas une histoire ni ne convoque les journalistes pour qu’ils assistent à mes « moments ». Je sais donc, et d'expérience, que si des états pareils peuvent illuminer en effet une vie, en aucune façon ils ne la justifient. D’abord, parce qu’ils sont très rares, ensuite parce que la terrible usure nerveuse qui s’ensuit nous impose de penser que, moins rares, ils deviendraient meurtriers ; enfin parce que ces états illuminatifs ne constituent nullement des états de connaissance. Demiéville le dit fort bien : la prajñâ-pâramitâ est une « connaissance » si étrangère au concept à la, distinction du sujet et de l'objet que, pour lui maintenir sa qualité de connaissance, il faut recourir « à toutes sortes d'échappatoires et de faux-fuyants ». Du reste, au Concile de Lhasa, le Maître de Dhyâna se targue d’être incapable de tout effort conceptuel ; sur quoi Demiéville : « Rien de plus embarrassant pour un adepte du Dhyâna que de se voir soumis à un interrogatoires discursif. Lorsqu'il s’agit de discipline, on s’en tire par le mutisme, une boutade ou une énigme, un grognement, un soufflet, un coup de poing. Mais les non-initiés ont de détestables exigences. Lorsque l'administration des T’ang institua pour le clergé des examens trisannuels portant sur les textes de sutras, il fut bien entendu qu’il serait interdit aux candidats de répondre aux questions des examinateurs en s'asseyant pour entrer en dhyâna. » Pas bêtes, les Chinois: ils refusent le grognement ou le coup de bâton ; ils posaient des questions, et demandaient des réponses. Assurément c'était un fameux Zéniste, mon premier maître de chinois, l'honnête Vissière, demanda mon expulsion de l'École des Langues orientales avec le motif suivant : « me pose des questions ». Boyer par chance était une brute rationaliste, et je pus continuer mes études. Qu'ont, fait depuis dix ans nos grands chefs, sinon de refuser tout interrogatoire discursif, et de nous répondre à coups de grognements et de bâton. Un Voltaire, ça exige des réponses ou sur l'affaire Calas ou sur l'affaire Audin. Un Zéniste, lui, entre aussitôt en Zen : comme certains animaux qui, apeurés, entrent en catalepsie, il choisit cet heureux état où la vie ne se distingue plus de la mort, ni du mensonge la vérité. La belle chose que le Zen ! Presque tous nos premiers ministres, depuis la Libération, furent des maîtres de Dhyâna, de Tch'an et de Zen. Le Zen est aujourd’hui chose si bien française que je propose à l'Académie, sitôt qu'elle en sera au début de la lettre Z, d’ici deux ou trois siècles, de naturaliser le Zen, et d’en faire le Zaine.

Le Concile de Lhasa nous éclaire autre chose encore : le conflit actuel entre le Dalaï-lama et le gouvernement de la Chine communiste. Voici de nouveau souffler sur les hauts plateaux d’Asie centrale ce « vent de l'erreur » que répandait jadis, au VIIIe siècle, « l'éventail de la mondanité profane » ; voici que les maîtres de la dialectique marxiste – qui serait heureusement toute proche de la taoïste, et par conséquent de la sensibilité bouddhique – s’efforcent de montrer aux Tibétains que le vent « de l'erreur » est celui de la vérité, et réciproquement ; et voici que tous les alliés de Pékin nous annoncent que, dans cette guerre de mille ans et plus entre la Chine et le Tibet, pour une fois enfin on entrevoit la paix car Sa Sainteté le Dalaï-lama « se montre favorable à l'union avec la Chine » cependant que le Panchen-lama se réjouit de penser que le Tibet tout entier « avec ses montagnes et ses fleuves fait partie de la République populaire de Chine ». Ces vérités, que souffle le « vent de l'erreur », vous les lirez dans Visa pour le Tibet, de M. Alan Winnington. Quand on vient de lire les dernières déclarations du Dalaï-lama, depuis son exil dans l'Inde, on se demande à qui faire confiance. Parbleu, à Mao Tse-toung qui, familier de l'histoire chinoise, mettait les choses au point au sixième paragraphe du célèbre Rapport qui secoua la Chine en 1957 : « Les conditions au Tibet ne sont point encore mûres pour que nous y puissions réaliser des réformes démocratiques [...] Nous venons de décider de ne tenter au Tibet aucune réforme démocratique durant le second plan quinquennal. Ce n’est qu’à la lumière de ce que sera la situation au début du troisième plan que nous pourrons décider que faire alors à cet égard. »

Que s’est-il passé depuis lors ? Les Chinois ont-ils commis l'invraisemblable imprudence de revenir sur cette sage décision ? Ou si les Tibétains sabotent les accords conclus ? Ou si les puissances étrangères ont essayé de voir d’un peu près, d’un peu trop près, le Toit du Monde ? Comme ni le Dalaï-lama, ni non plus Mao Tse-toung ne m’ont fait leurs confidences, je ne sais rien, ou presque, et suspends mon jugement. Si, pourtant ; M. Paul Demiéville m’a fourni deux ou trois événements qui advinrent au VIIIe siècle pour m'éclairer la situation présente : lors du mariage d’une princesse chinoise avec un roi du Tibet, les Tibétains extorquèrent à titre de donation le territoire de K’ieou-K’iu, que les Chinois mirent plus de quarante ans à récupérer ; lorsque les Tibétains conquirent et occupèrent la région de Touen-houang, ils trouvèrent sans peine chez les moines plus d’un collaborateur ; en 714, les Tibétains scandalisèrent l'empereur chinois Hiuan-tsong en réclamant « les rites d’États égaux », et l'empereur en fut si outré que, quinze ans plus tard, il refusa encore des propositions de paix ; en 781, le souverain du Tibet s'égarait jusqu’à écrire à l'empereur de Chine une lettre ainsi libellée : « Notre grand Tibet et les T’ang », insinuant ainsi, et même insolemment, qu’il exigeait des « rites inégaux » mais au préjudice de la Chine ; je n'oublie pas non plus ces poèmes désespérés que nous traduit Paul Demiéville, et que composèrent au Tibet des Chinois emmenés en âpre captivité. Entre la Chine et le Tibet, les relations furent donc toujours extrêmement difficiles.

D’autant plus ambiguës, ces relations, que, dès l'époque des Tcheou, les Chinois étaient « travaillés par ce que nous appellerions aujourd’hui la problématique du colonialisme » (Demiéville), et qu’ils ont toujours essayé de masquer, par des ruses diplomatiques ou rhétoriciennes, leurs ambitions impériales. Puisque vous croyez à la sainte religion du Bouddha, disent-ils ingénument, ingénieusement, aux Tibétains, vous vous devez d’être pacifiques, et même pacifistes : au nom du bouddhisme, il vous convient donc d’ôter votre cuirasse et de mettre bas les armes, bref de nous laisser faire. Sous les T’ang, il arriva même qu’un ministre astucieux camouflât de confucianisme les ambitions chinoises sur le Tibet. En proposant aux Tibétains des relations que nous appellerions exactement culturelles et techniques, le président du département de la Chancellerie, P’ei Kouang-t'ing, entendait bien, et il l’avoua au prince chinois son maître, que « l'unification des essieux de chars et de l’écriture » devait former les Tibétains « au moule de la glorieuse doctrine » (celle de Confucius), et les agréger ainsi, sans trop de douleur, à « la grande union ». Croyez-vous que les choses aient tellement changé ? L'article premier de l'accord sino-tibétain signé à Pékin le 23 mai 1951 stipule que « le peuple tibétain rentrera au sein de la grande famille de la mère patrie : la, République populaire de Chine », mais chacun des seize autres articles a pour fin d’apaiser l'orgueil et les craintes de Lhassa. L'article 7 n’hésite pas à garantir que Pékin « s'abstiendra de toute ingérence dans les revenus des monastères » ! Faut-il que les Chinois aient besoin de contrôler politiquement cette partie du monde, pour qu'au nom ou au mépris a de leur idéologie, ils acceptent de livrer un million environ de serfs, pasteurs et laboureurs, à la discrétion, ou plutôt à l'indiscrétion de cent cinquante mille moines appuyés sur cent cinquante familles nobles. Il s’agit donc toujours de préparer « la grande union », sans donner prise au grief de colonialisme mais tout en contrôlant le Tibet. Cercle carré.

Supposons maintenant que les Chinois quittent le Tibet. Qu'adviendrait-il ? Le lendemain matin, les agents de l'impérialisme occidental auraient imposé au Dalaï-lama un traité plus dur encore que, celui qui, le 1er septembre 1904, fit du Tibet un protectorat britannique. Article 9 : « Aucun territoire tibétain ne pourra être vendu, loué, ou hypothéqué à quelque puissance étrangère que ce soit, sans l'autorisation de la Grande-Bretagne; aucune puissance étrangère n'a le droit de se mêler à l'administration du gouvernement tibétain, ni à la gestion de ses affaires intérieures », etc. Regardez l'Asie centrale : quiconque installerait au Tibet des rampes de lancement prendrait à revers, d'un seul coup, l'Union Soviétique et la Chine, et vous imaginez que, si les Chinois quittaient Lhassa, les
Russes permettraient aux Américains d’y organiser leurs bases d'opérations contre le monde communiste ? Ne faites pas les naïfs, et laissez-nous tranquilles avec la « spiritualité » tibétaine. Si les Chinois veulent que les lamas de Lhassa défilent en robe jaune à Pékin sous la bannière du marxisme, c’est parce que la géopolitique, dès le VIIIe siècle, commandait à un ministre chinois de mettre au pas les Tibétains sous la non moins glorieuse bannière du confucianisme. Le Chinois et le Tibétain sont deux frères ennemis sont aussi frères siamois.

Si vous avez lu le Concile de Lhasa, vous aurez compris, une fois pour toutes, la politique tibétaine de la Chine : « la grande union, la paix universelle, mais à la condition d’y jouer le premier rôle, de présider à l'embrassade générale. La paix universelle devait être une paix chinoise. » Ah ! que M. Demiéville ne regrette pas toutes les digressions, toutes les notes prodigieusement savantes, mais non moins vivantes, dont il enrichit sa traduction des dossiers relatifs à la controverse sur le quiétisme Dhyâna, c'est-à-dire Tch’an ou Zen ! L'actualité de certains des documents qu’il étudie le frappait durant la dernière guerre ; elle nous frappe en ce moment d’un coup plus vif encore, et plus illuminant : d’un coup qui vaut bien le coup de bâton d’un Maître Zen. Car les « rites égaux », il s’agit de savoir aujourd'hui si cela s’appellera indépendance, autonomie, ou statut semi-colonial. Sur le principe des « rites égaux », la Chine et le Tibet,feindront volontiers de se mettre d’accord ; ils ne se déchireront que pour définir, au nom de la doctrine confucéenne des dénominations correctes, le sens du mot chinois qui veut dire autonomie, ou peut-être protectorat.

Sous prétexte que les nazis ont dévié en leur faveur la géopolitique, nous aurions tort de croire que la géographie n'oriente pas la politique et qu’un bon politique ignore la géographie autant à. Peu près que l'histoire.

René Etiemble, Connaissons-nous la Chine ?, Éditions Gallimard,1963.








Miss Tick



Photo :

vendredi, novembre 04, 2011

La conspiration du Verseau





En 1980, Marilyn Ferguson publie, chez Tarcher, The Aquarian Conspiracy.

L'ouvrage est impossible à résumer. Tout au plus peut-on en dégager les idées force.

- Une conspiration douce, sans doctrine politique, sans manifeste, est à l'œuvre à tous les niveaux de la société. Encore souvent inconsciente de sa propre existence, elle forme un puissant réseau dépourvu de dirigeants mais dont les membres sont persuadés que tout peut être autrement. Cette certitude est d’abord spirituelle. Elle est le fruit d’une expérience transformative qui a permis un élargissement de la conscience du sujet. Ces expériences peuvent être provoquées par des moyens d'entrée extrêmement divers : accidents, deuils, rencontres, lectures, psychotechniques diverses, et l'auteur reconnaît aussi l’importance des expériences psychédéliques dans l'origine du mouvement. Les conspirateurs ont donc d’abord expérimenté la transformation de l'intérieur comme un changement personnel avant de s'impliquer dans la mise en œuvre de projets sociaux alternatifs. Cette nouvelle vision du monde est une révolution, un changement de paradigme au sens où l'entend Thomas Khun. Mais cette révolution doit se faire en chacun avant de pouvoir transformer le monde lorsqu’une certaine masse critique sera atteinte. Elle est donc un gigantesque espoir, le seul peut-être avant l'inévitable catastrophe « écologique, totalitaire ou nucléaire ».

- Cette conspiration a eu des précurseurs qui, « à la frange de la science et de la religion », crurent, en se basant sur leur propre expérience, que « l'homme pouvait transcender sa propre conscience et changer l'humanité. Maître Eckardt, Jakob Boehme, Emanuel Swedenborg, William Blake, les transcendantalistes et, plus près de nous, Jung, Teilhard de Chardin, Huxley, Maslow, ainsi que tout un panel de physiciens, philosophes et psychologues sont convoqués pour en arriver, à la fin des années soixante-dix, à la prise de conscience que quelque chose de plus grande ampleur que ces intuitions individuelles est en train de se produire.

Le nouveau savoir scientifique change la perception que nous avons de nous-mêmes. Or la science et les scientifiques expriment de plus en plus le « besoin impérieux de changer, de vivre avec la nature et non pas contre elle ». C’est tout le courant « science et conscience », illustré en France parle travail du Groupe des Dix, l'œuvre d’Edgar Morin, Ïouvrage d’Ilya Prigogine et Isabelle Stengers, La Nouvelle alliance... La nouvelle science, basée sur le principe d'incertitude et la complexité, a renoncé à sa vision morcelante du monde au profit d'une vision systémique où « l'essentiel c’est la relation ». Des notions comme la non-séparativité, les structures dissipatives, l'interdépendance, la théorie holographique... sont susceptibles de nous éclairer sur la structure de l'univers mais aussi sur notre propre fonctionnement, puisqu'il n’y a pas de solution de continuité entre les différents éléments du système et que nous sommes partie de l'univers. Nos potentialités et nos capacités d’agir sur le réel pourraient s’en trouver radicalement modifiées, venant ainsi confirmer ce que les phénomènes psi laissent présager à certains. Dans le même temps, les scientifiques les plus théoriques (les physiciens en particulier) se réfèrent de plus en plus à des conceptions philosophiques ou mystiques.

- La conspiration semble annoncer l'émergence d’une forme nouvelle de pouvoir : un pouvoir juste puisqu’il prend sa source dans les changements intérieurs des individus qui forment la société. Mais, pour favoriser le changement, il faudra trouver moyen d’échapper à la « tyrannie » quantitative de la majorité au profit d’une vision plus qualitative, sur le modèle de la Satyagraha, « force de l'âme » ou « force de la vérité », introduit par Gandhi. Les réseaux constituent l'outil privilégié de mise en œuvre de ce nouveau pouvoir qui, politiquement, prendrait la forme d’un « centre radical », « une synthèse des traditions conservatrice et libérale, dépassant les polarités et les querelles anciennes » et qui donnerait toute sa place à une vision féminine du monde, favorisant l'intégration, l'empathie, et la conciliation.

- Ce nouveau paradigme a des effets immédiats sur les façons de considérer la médecine et l'éducation, deux domaines où une vision holiste de l’homme trouve directement ses applications, ouvrant la voie à une infinité d'alternatives. Il transforme aussi profondément les valeurs sociales, entraînant un nouveau rapport au travail, à l’esprit d’entreprise, à la technologie, dans une société où « l'intelligence créative » des citoyens devient la principale richesse.

- Il bouleverse aussi les relations aux autres, entre les sexes, au sein de la famille, entre les peuples. Il faut faire l'inventaire de la terre entière puisqu'elle est un pays sans frontières où il y a place pour tous les hommes, « tous les modes de savoir humain, tous les mystères et toutes les cultures ». La conspiration est celle de la terre entière, pour la paix, contre la misère et la faim.

- La transformation ouvre la voie à la quête spirituelle qui est comme une image en miroir de la science. Celle-ci cherchant à atteindre de l'extérieur la vérité que celle-là cherche à l'intérieur. La quête spirituelle est une quête de sens que les religions traditionnelles occidentales ne parviennent pas à satisfaire. C’est la recherche d’un savoir direct qui passe par l'expérience mystique, un savoir sans doctrine, une fusion.

- Trois pages, sur les quatre-cent-quarante et une du livre, sont consacrées aux implications plus directement religieuses : l'expérience transformative amène souvent à l’idée que Dieu est en soi, ce qui est « la plus vieille hérésie du monde », et qu’un certain aspect de la conscience est impérissable. Par ailleurs, les expériences mystiques de nombreux individus en diverses parties du globe semblent, dit l'auteur, converger ces dernières années en une « vision collective qui va s'intensifiant », celle d’une « transition imminente de l’histoire humaine : une évolution de conscience aussi significative que chacune des étapes de la longue chaîne de notre évolution biologique ». Cette vision reprend la métaphore la plus ancienne et la plus répandue de l'expérience spirituelle : celle d’une évolution vers la lumière.

Si nous terminons sur cet aspect religieux, ce qui n’est pas le cas dans le livre, c’est pour mieux en souligner à la fois le caractère marginal et la distance sociologique prise par fauteur à l’égard de ce matériau. Tandis que l’on sent chez elle un véritable enthousiasme quand elle évoque les transformations sociales en cours ou la grande réconciliation de l’esprit et de la matière au sein des sciences, tandis que sa sympathie est patente quand elle parle de la quête de sens de ses contemporains et de leur curiosité pour toutes les formes de spiritualité, elle semble se tenir à l’écart de ce qui est le cœur proprement religieux et apocalyptique du New Age : cette idée d’une transition prochaine de l'humanité vers un plan de conscience plus élevé dont elle nous explique qu’elle est un « rêve de lumière et de libération » présent dans les plus anciennes traditions.

Le livre de Marilyn Ferguson n’est donc pas, comme sa réputation de « bible du New Age » pourrait nous le laisser entendre, l'exposé d’un ensemble de doctrines auxquelles il serait demandé au lecteur d’adhérer. Il est bien plutôt le constat d’une nouvelle sensibilité qui émerge dans les années 1980 et qui, partant du besoin de trouver un sens à la vie individuelle, débouche sur une transformation des valeurs sociales dont l'auteur dresse le patient inventaire dans tous les domaines de la société. Que ce constat prenne la forme d’une apologie, c’est indéniable, qu’il cherche à conforter le phénomène qu’il décrit est non seulement évident mais très clairement expliqué. Mais ce n’est en aucun cas l'œuvre d’une croyante. C’est celle d’une observatrice enthousiaste, parfois naïve, inquiète cependant des dérives ou des récupérations possibles ; partagée en tout cas entre la conscience de la fragilité du phénomène qu’elle décrit et l'exaltation provoquée par la convergence et la force de ce qui lui semble être une avancée irrésistible. Il est certain qu'entre action et observation sa posture n’est pas dénuée d'ambiguïté, mais dans la classification plus ou moins explicite qui est toujours faite entre la littérature produite par le Nouvel Âge et la littérature sur le Nouvel Âge, cette ambiguïté même est occultée: l'œuvre de M. Ferguson est considérée comme celle d’une sympathisante active. L'édition de 1987 tentera bien d’accentuer la posture sociologique et de mieux afficher le contenu du livre en en précisant le titre: The Aquarian Conspiracy, Personal
and Social Transformation in the 80's. Peine perdue.

La précision était d’autant plus utile que la sortie de l'ouvrage, en 1980, avait déclenché une intense polémique aux États-Unis, sur deux fronts, politique et religieux. Très favorablement accueilli au sein des réseaux dont son auteur nous décrit l'existence, ceux des conspirateurs, le livre fait l’objet de comptes rendus enthousiastes dans le Yoga Journal ou le Noetic Sciences. Mais parallèlement, et dès le mois de février 1980, un historien marxiste de la Stanford University, Paul Robinson, publie dans une revue bien connue, Psychology Today, une critique virulente. Selon lui, M. Ferguson révèle « l'immaturité psychologique » des gens qu’elle décrit, des membres de la classe moyenne qui « contemplent leur nombril ». Il insiste sur le fait que l'optimisme de leur vision de la condition humaine représente une dangereuse « abdication de l’esprit critique » et qu’elle est à même de faire « plus de tort que de bien à l'humanité ». L'attaque, on le voit, est moins axée sur l'auteur que sur le phénomène social qu’elle décrit. Paul Robinson ne se trompe pas de cible. Mais la critique est très vite relayée par un petit groupe d'activistes qui publie un « manuel de combat » intitulé Écraser la Conspiration du Verseau et entreprend d'entraver la promotion du livre en harcelant Marilyn Ferguson dans ses déplacements et ses conférences.

Plus décisive pour notre propos sera la violente réaction de Constance Cumbey, une juriste du Michigan, chrétienne fondamentaliste. Prenant au pied de la lettre l’idée de l'existence d’une conspiration, elle cesse en 1981 ses activités professionnelles pour se consacrer à la rédaction d’un livre dénonçant ce qu’elle nomme le New Age Movement (NAM). The Hidden Dangers of the Rainbow : tbe New Age Movement and our Coming Age of Barbarism est publié en 1983.

Elle y explique que selon les sources même du Nouvel Âge, le NAM est un réseau international regroupant des dizaines de milliers d'organisations qui coopèrent pour mettre en place un « Nouvel Ordre Mondial » et qui aurait déjà infiltré non seulement le gouvernement mais le monde des affaires et la plupart des institutions américaines. Ce mouvement, « que Marylin Ferguson appelle La Conspiration du Verseau, et qui tire son nom du prétendu Âge du Verseau, englobe des groupes ou des sous-mouvements tels que : le Mouvement holistique, la Psychologie humaniste, la Psychologie transpersonnelle, le Mouvement humaniste, le New Thought, le Third Wave, la Third Force, la Nouvelle spiritualité, le Mouvement pour le potentiel humain, l'Humanisme séculier et l’Humanisme ». Viennent s’y ajouter les groupes écologistes, pacifistes, ceux qui luttent pour les droits de l'homme ou contre la faim dans le monde. Selon Cumbey, tous, qu’ils en soient ou non conscients, sont partie prenante d’un programme occulte préparant le retour de l'antéchrist, ce Christ dont, en 1948, l'ésotériste et ancienne théosophe Alice Bailey annonçait la venue sous le nom de Maitreya, l'instructeur mondial annonçant la transition dans un nouvel âge. Contrairement à ce qu'annoncent les New Agers lorsqu’ils prétendent ne pas avoir de doctrine, le mouvement serait au contraire très cohérent puisqu’il reposerait depuis son origine sur les enseignements de l'École Arcane d’A. Bailey qui professe la croyance en la toute-puissance de la pensée et l’idée que l'homme est son propre dieu. Il s’agit la, assène Cumbey, d’une illusion proprement satanique, de même nature que celle que le serpent faisait miroiter à Adam et Ève dans le jardin d’Eden. Elle ajoute que tous ceux que le NAM désigne comme des guides spirituels et religieux sont aussi les chantres de la « déité de l'homme » : Pierre Teilhard de Chardin, Herman Hesse, Eric Fromm, Abraham Maslow, Carl Rogers et « pire que tout, Ram Dass, un ennemi avoué de la tradition religieuse judéo-chrétienne orthodoxe, et prosélyte de la conversion de masse à l'hindouisme et aux autres formes de mysticisme oriental ». Selon elle, la pratique de la méditation, des psychotechniques et l'usage des drogues psychédéliques sont des techniques de manipulation mentale qui ouvrent la voie à la « transformation », un « euphémisme » pour désigner une emprise grandissante de l'influence démoniaque. Dans ce contexte, le livre de Marylin Ferguson, qualifié de manifeste du Nouvel Âge, fait bien entendu partie d’un plan d’ensemble dont le but est d’« annoncer et de populariser ce que les New Agers choisissent d’exposer publiquement dans leur mouvement ». Ce plan, secret jusqu’en 1975, serait, depuis, affiché ouvertement. Pour Cumbey, l'existence de ce plan satanique, destiné à détruire le christianisme et à instaurer un gouvernement mondial totalitaire qui serait une reviviscence du nazisme, ne fait aucun doute. Il est d’abord annoncé, nous dit-elle, par la Bible elle-même, dans l’Apocalypse de Jean par exemple, prophétisant l'arrivée de la bête immonde qui imposera son autorité à la terre entière et fera adorer Satan. Elle en voit la signature dans l’œuvre d’Alice Bailey et les organisations qu’elle a créées (Lucis Trust et l'association pour la Bonne volonté mondiale), mais aussi dans les ouvrages de H.-G. Wells, l’auteur de science-fiction bien connu, qui est aussi le défenseur de l’idée d’une édification d’un État mondial et qui, en 1928, publie The Open Conspiracy. Blue Print for a Word Revolution (La conspiration ouverte. Plan pour une révolution mondiale) (Cumbey, p. 55). Selon Cumbey, la meilleure preuve que les deux idéologies sont liées est un article publié en 1977 dans la revue des Presses de la Lucis Trust (The Beacon, mai-juin, p. 310) et intitulé « H. G. Wells, a Forerunner » (« H. G. Wells, un précurseur ») ainsi que le fait que Wells soit mentionné à trois reprises dans The Aquarian Conspiracy. Et Constance Cumbey d'énumérer les signes de l'infiltration satanique dans tous les milieux : depuis les créateurs de Findhorn qui ne comprennent pas que les êtres spirituels avec lesquels ils communiquent sont en fait des êtres démoniaques, en passant par la méthode Montessori, la méditation transcendantale, la carte de crédit, le symbole de l'arc-en-ciel (cher aux New Agers et qui serait le pont jeté entre l'homme et Lucifer), et le 666 qui serait figuré sur la couverture du livre de Marylin Ferguson.

De fait, le livre de Constance Cumbey apparaît comme une inversion de celui de Marilyn Ferguson. Une sorte de lecture énantiodromique. Mais l'intéressant est que cette inversion ait pu s'opérer au prix d'une opération intellectuelle particulière : un amalgame, sous le nom de New Age Movement, d'un certain nombre de croyances religieuses issues de la dissidence de la Société théosophique et des nouvelles formes de sensibilité décrites par Ferguson qui trouvent, en grande partie, leur origine dans la contre-culture des années soixante et soixante-dix. À sa manière, et en réponse à la synthèse de Ferguson, Cumbey opère sa propre synthèse, faisant sienne l'idée de l'existence d'une conspiration mais qu'elle considère comme bien réelle et non plus métaphorique. D'une certaine façon, et tout comme Ferguson d'ailleurs, elle aussi contribue à donner une existence au phénomène qu'elle décrit. Comme l'écrit un de ses lecteurs dans un compte rendu publié sur Amazon.com : « Tenter de comprendre les recherches sur le NAM sans se référer à Constance Cumbey, c'est essayer de comprendre l'égyptologie sans mentionner la pierre de Rosette. Cumbey raccorde les différents points. Elle relie les principaux segments du New Age Movement avec les groupes qui leur sont associés et en fait un tout systématique » (c'est moi qui traduis). Dès lors, le New Age prenait la forme que nous lui connaissons aujourd’hui, celle mouvement tentaculaire, aux sulfureuses racines religieuses, dont il est impossible de donner même une définition tant il semble regrouper de courants de pensée qui paraissent tout à la fois différents les uns des autres mais étrangement proches, et dont on n’arrive pas à déterminer s’il est un mouvement social ou un mouvement religieux ou les deux, s’il est vraiment mouvement ou même s’il existe réellement. Et dès lors aussi, les spécialistes trouveront tout naturel de se demander pourquoi Marilyn Fergus avait omis de citer les sources théosophiques de sa conspiration (On trouve par exemple chez VERNETTE (Jean), Le Nouvel Âge : « La première à avoir énoncé de manière construite le concept de Nouvel Âge fut une disciple de la Société théosophique, Alice Ann Bailey (1880-1949). Chose curieuse, là aussi, Marilyn Ferguson ne cite ni l'une ni l'autre dans l’index des Enfants du Verseau. Or les emprunts du Nouvel Âge à madame Blavatsky et à Alice Bailey sont multiples ».).

Claudie Voisenat et Pierre Lagrange, L'ésotérisme contemporain et ses lecteurs.


L'ésotérisme contemporain et ses lecteurs

Comment l’ésotérisme a-t-il recomposé ses héritages? Quel rapport existe-t-il entre les soucoupes volantes, le Nouvel Âge, les enfants indigo et l’intérêt grandissant pour les techniques de développement personnel? Pourquoi la fiction – de Coehlo à Dan Brown – semble-t-elle aujourd’hui devenue le mode privilégié de communication d’une vérité cachée? Que font les lecteurs de ce qui leur est ainsi transmis? Autant de questions abordées dans ce livre qui permet de prendre la mesure de l’inscription de la pensée ésotérique au cœur de notre modernité.

Sans céder à la tentation d’un travail ouvertement démystificateur, les auteurs ont cherché à faire entendre le « point de vue indigène » des ésotérismes contemporains. D’abord en dessinant leur généalogie complexe, ensuite en décryptant le contenu de quelques discours actuellement dominants, enfin en entrant, grâce aux forums en ligne, dans la communauté virtuelle de leurs lecteurs. Le tableau qu’ils donnent à lire remplace avantageusement l’ignorance volontaire dans laquelle les intellectuels se sont généralement réfugiés. Avec prudence et modestie, Claudie Voisenat et Pierre Lagrange nous aident à dépasser cette censure et par la voie de la connaissance de « l’autre », nous ramènent aux vertus cardinales de la raison.

Claudie Voisenat, chargée de mission pour la recherche au ministère de la Culture, mène ses travaux au sein du LAHIC (Laboratoire d’anthropologie et d’histoire de l’institution de la culture, UMR 2550). Elle travaille sur les pratiques sociales du patrimoine et les liens entre l’émergence d’une conscience patrimoniale et les premiers développements d’une ethnographie de l’Europe.

Sociologue des sciences, spécialiste de l’étude des controverses sur les « parasciences », Pierre Lagrange est chercheur associé au LAHIC et enseigne la sociologie des controverses scientifiques à l’École des mines de Paris.



jeudi, novembre 03, 2011

Le Dalaï-lama et d'autres représentants religieux demandent l'interdiction du blasphème



L'incendie criminel qui a détruit les locaux du journal satirique Charlie Hebdo est lié au numéro spécial Charia Hebdo. Pour les musulmans, l'édito de Mahomet intitulé L’apéro Halal, une double page de dessins pour expliquer la charia molle ou encore un supplément Charia Madame et un dessin représentant Mahomet avec un nez rouge de clown sont blasphématoires. 

Des religieux, dont le Dalaï-lama, veulent que l’interdiction du blasphème soit inscrite parmi les droits de l’Homme.

Catherine Segurane écrit :

« La deuxième conférence mondiale sur les religions après le 11 septembre s'est tenue à Montréal dans une grande discrétion. Dommage. Elle aurait mérité plus d'attention, car il y a été très sérieusement question de s'adresser à l'ONU pour faire inscrire l'interdiction du blasphème au nombre des droits de l'homme.

Et toutes les religions étaient là, y compris le bouddhisme, représenté par le Dalaï-lama.

L'évènement s'est tenu le 7 septembre 2011 au Palais des Congrès de Montréal.

Y participaient des représentants de toutes les religions, dont le Dalaï-lama et Tariq Ramadan, celui qui demande un simple moratoire sur la lapidation.

Il en est résulté principalement une Déclaration universelle des droits de la personne par les religions du monde un peu spéciale, puisqu'on peut y lire ceci (article 12 alinéas 4 et 5) :

« (4) Chacun a le droit que sa religion ne soit pas dénigrée dans les médias ou dans les maisons d'enseignement

(5) Il est du devoir de l'adepte de chaque religion de s'assurer qu'aucune religion n'est dénigrée dans les médias ou dans les maisons d'enseignement. »

Oui, vous avez bien lu : il est demandé que l'interdiction du blasphème, et même la simple interdiction de critiquer les religions, soit inscrite au rang des Droits de l'Homme.

Tout en ayant approuvé, comme les autres participants, cet appel à la censure, le Dalaï-lama critiqua cependant la censure en Chine. Allez comprendre ... Ou plutôt, on comprend très bien : les religions veulent pouvoir censurer les autres sans être censurées par le pouvoir politique. En fait, elles veulent la théocratie.

Et ce n'est pas tout : cette "Déclaration des droits de l'homme" à la sauce religieuse a l'ambition de remplacer la vraie, celle qui a été adoptée à l'ONU. On peut y lire en effet :

« Ce document vise à reformuler la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'Assemblée générale des Nations-Unies le 10 décembre 1948 (...) C'est un fait connu, la Déclaration des Nations-Unis a été largement critiquée, d'« occidentale », critique qui tire son origine de l'impression que, lorsque de tels efforts viennent de l'Occident, ils sont une prolongation de l'impérialisme, c'est-à-dire, un effort continu de la part de l'hémisphère occidental d'imposer ses propres valeurs au reste du monde en vue de déguiser l'universalisme. »

Le document de travail originel a été proposé par le Département des affaires religieuses de l'Université Mc Gill de Montréal.

En réalité, les religions réclament le droit d'opprimer les individus. Le théologien Grégory Baum, de l'Université Mc Gill, déclara en conférence de presse que l'Occident ne doit pas imposer ses valeurs de séparation de l’Église et de l’État. Il ajouta :

« Dans certains pays, la religion fait partie de la culture. Se convertir, c'est renier la culture, se couper du reste de la société.L'ONU reconnaît le droit des peuples de défendre leur culture. On peut considérer que ça peut amener à interdire les conversions. Il existe aussi des droits collectifs, un peu comme le Québec qui réglemente la langue. »

Patrice Brodeur, professeur de théologie à l'université de Montréal, expliqua que « La Déclaration fait abstraction de l'importance de la religion ... Après la fin de la guerre froide, on a redécouvert son importance. »

Ces changements rendraient-ils inacceptables les caricatures danoises sur l'islam et la violence ? « Seulement celle où on voit Mahomet avec un turban en forme de bombe, estime M. Brodeur. Le monde musulman vivra éventuellement une modernisation comme celle de la chrétienté, qui a appris à tolérer ce genre de critique. »

Cette revendication d'interdiction du blasphème rejoint une revendication de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI) réitérée depuis de nombreuses années dans toutes les enceintes possibles.

Elle met en grave danger de nombreuses personnes, dont des chrétiens persécutés au Pakistan sous de fausses accusations de blasphème, ce qui explique le refus du Saint-Siège de soutenir à l'ONU les résolutions anti-blasphème qui y sont votées de façon continue. »

Source :

http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/des-religieux-dalai-lama-compris-100802

mardi, novembre 01, 2011

Amma distribue gratuitement des câlins





Après Paris, de nombreuses personnes, qui ressentent le besoin d'un peu de tendresse dans un monde où règne un « ordre cannibale » (selon l'expression de Jean Ziegler), sont à Toulon pour se faire câliner.

Au Zénith Oméga de Toulon, du 31 Octobre au 2 Novembre, Amma, une Indienne de 58 ans considérée comme une sainte dans son pays, fait dans le darshan, l'étreinte censée apporter un grand réconfort. Une bénévole française explique : « Amma n’est pas là pour créer une nouvelle religion, elle insuffle juste un esprit d’amour par son étreinte maternelle ».

Pendant 3 jours, 18 000 personnes se blottiront dans les bras d'Amma. Auparavant, à Cergy Pontoise, du 23 au 25 octobre 2011, 20 000 personnes s'étaient déplacées pour se faire câliner par la Mahatma, la Grande âme.

Alexandra Gonzalez écrit dans le journal France Soir :

« Ces câlins gratuits et désintéressés ne sont pas sans rappeler le mouvement des Free Hugs (« Câlins gratuits »), né en 2004 en Australie. Il s’agit de gens, munis d’une pancarte où il est écrit « Free Hugs », qui proposent aux passants dans un lieu public de les étreindre. Le mouvement s’est rapidement étendu sur tous les continents, et notamment en France, où de nombreux ados se sont mis à proposer des câlins dans les rues des grandes villes. Mais selon François de Singly, sociologue spécialiste du lien social, ces deux démarches sont diamétralement opposées.

« Les câlins d’Amma servent à se retrouver soi-même, on est dans une forme de thérapie où l’on descend à l’intérieur de soi. Il y a une dimension de psychologie religieuse. Il y a une attente mise en scène avant l’acte, puis une émotion primale ressentie dans les bras d’Amma. Cela ne fait pas avancer le lien social, c’est au contraire une démarche presque narcissique. Les gens qui attendent d’être étreint par Amma ne parlent pas forcément entre eux, c’est une foule solitaire. Les Free Hugs en revanche sont plus sympathiques, ils permettent de recréer du lien dans l’espace public. Pour moi, c’est de l’ordre des apéros géants organisés par les jeunes, de la Fête des voisins, ou des amis que l’on cumule sur Facebook. Les gens ne sont pas à la recherche de liens amicaux profonds, car ils souhaitent garder leur liberté, mais ils en ont assez de la vie collective anonyme et veulent nouer des liens légers, qui font du bien mais ne demandent pas trop d’investissement personnel. Ce mouvement des Free Hugs rétablit le fait que nous sommes tous des humains sur la même planète. Cela redonne de l’humanité à notre société. Les étreintes d’Amma sont aussi très positives, mais dans un sens très différent. »


Pour le sociologue, cet engouement pour les câlins, que ce soit à Amma ou à un anonyme dans la rue, n’est pas symptomatique d’un manque d’affection quelconque dans nos sociétés modernes.
« Ce sont juste des manières de se retrouver soi-même et de créer du lien, mais ces valeurs auraient pu s’exprimer autrement que par des câlins. Quand cela passera de mode, on réinventera de nouvelles formes. Tous les types de liens, même les plus légers, comme un sourire dans le métro, font qu’une société reste humaine. »




Si les câlins d'Amma sont gratuits et ne génèrent pas directement des bénéfices, les caisses de l'organisation, qui planifie les tournées d'Amma, sont pleines et permettent de financer des orphelinats, des hôpitaux gratuits, des maisons de retraite... L'argent provient des dons et des ventes de DVD, livres, CD, etc...



Darsham, film consacré à Amma, est réalisé par Jan Kounen, le réalisateur des films Blueberry, l’expérience secrète et de Dobermann qui a une démarche spirituelle.







Même des lamas tibétains viennent chercher un peu de réconfort dans les bras d'Amma. (Il faut reconnaître que le lamaïsme n'est pas toujours très zen.)





samedi, octobre 29, 2011

La révolution qui vient





La crise économique se traduit par un refus de la culture politique dominante. On découvre que les lois de l'économie et des gouvernants ne peuvent construire une société fondée sur l'égalité et la justice. A partir de ce constat, une pensée de la rupture entre les politiques et les citoyens ne cesse de progresser. Il y a aussi la rupture avec matérialisme destructeur de la Terre perçue comme une véritable entité spirituelle (Gaïa) ou une création divine. Cette autre rupture favorise l'émergence d'un spiritualisme écologique et totalitaire.

L'histoire est un éternel recommencement

Type idéal d’une idéologie de rupture, le fascisme ne se définit pas que négativement. Assurément, le fascisme se lève contre les systèmes en place : le libéralisme et le marxisme, le positivisme et la démocratie. Il en est toujours ainsi : une idéologie nouvelle, un mouvement politique qui vient de percer se dressent d’abord contre les systèmes de pensée et les forces politiques qui occupent déjà le terrain. Le marxisme, avant de présenter sa propre vision du monde, s'oppose d’abord au libéralisme qui, un siècle auparavant, montait à l'assaut de l’absolutisme. Il en est de même avec le fascisme, qui entre en conflit avec le libéralisme et le marxisme avant de fournir tous les éléments d’une option de remplacement globale - politique, morale et intellectuelle.

Telle qu’elle se forge au tournant du siècle et telle qu’elle se développe dans les années 20 et 30, l’idéologie fasciste est le produit d’une synthèse du nationalisme organique et de la révision antimatérialiste du marxisme, elle exprime une velléité révolutionnaire fondée sur le refus de l'individualisme, à facette libérale ou marxiste, et elle met en place les grandes composantes d’une culture a politique nouvelle et originale. Une culture politique communautaire, anti-individualiste et antirationaliste, fondée dans un premier temps sur le refus de l’héritage des Lumières et de la Révolution française, et, dans un deuxième temps, sur la construction d’une solution de rechange totale, d’un cadre intellectuel, moral et politique, seul capable d’assurer la pérennité d’une collectivité humaine où seraient parfaitement intégrées toutes les couches et toutes les classes de la société. Le fascisme prétend effacer les effets les plus désastreux de la modernisation du continent européen, il veut remédier à l’éclatement de la communauté en groupes antagonistes, à l'atomisation de la société, à l'aliénation de l'individu, devenu simple marchandise lancée sur le marché. Le fascisme se lève contre la déshumanisation introduite par la modernisation dans les rapports humains, mais il entend préserver jalousement les bénéfices du progrès, et jamais il ne prône le retour à un « âge d’or » hypothétique. Ni réactionnaire, ni contre-révolutionnaire dans le sens maurrassien du terme, le fascisme se présente au contraire comme une révolution d’un autre type: une révolution qui déclare vouloir tirer le meilleur du capitalisme, du développement de la technologie moderne et du progrès industriel. La révolution fasciste entend changer la nature des rapports entre l’individu et la collectivité sans pour autant briser le moteur de l’activité économique – la recherche du profit –, ni abolir son fondement – la propriété privée – ou détruire son cadre nécessaire – l'économie de marché. C’est là un élément de la nouveauté du fascisme : la révolution fasciste est supportée par une économie régie par les lois du marché.

Quand le régime fasciste en Italie pratiquera un corporatisme fondé sur une économie libérale, quand le mouvement fasciste, bien avant la prise du pouvoir, réclamera, par la bouche de Mussolini, que la révolution décharge l’État de ses fonctions économiques, ce ne sera pas le fruit d’un simple opportunisme. Au contraire : Mussolini ne fera que reprendre les leçons d’économie politique données tout au long de la première décennie du siècle par les intellectuels du syndicalisme révolutionnaire.

Mais, si le fascisme entend recueillir tous les avantages de la modernité, tous les succès technologiques du capitalisme, s’il ne met jamais en cause les lois du marché ni la propriété privée conçus comme appartenant à l'ordre naturel des choses, il a en revanche en horreur les valeurs dites bourgeoises : libéralisme, démocratie, universalisme, individualisme. Le système de pensée fasciste repose non seulement sur la négation de la praxis libérale et démocratique, mais aussi sur le rejet de ses principes philosophiques. De même, ce n’est pas tant la praxis marxiste qui est en cause en premier lieu – certainement pas pour tout ce qui touche le rôle de la violence dans l’histoire –, mais bien le contenu rationaliste, hégélien du marxisme, son déterminisme. Ce n'est pas la révolte qui, pour lui, est mauvaise, mais le matérialisme historique.

La synthèse fasciste est d’abord un mouvement de révolte. Et on ne saurait mésestimer l’importance de cette dimension. Il s’agit de l'aspect moderniste, avant-gardiste du fascisme, de sa véritable esthétique révolutionnaire. Alors que s’établit en France et en Italie la jonction entre les théoriciens du syndicalisme révolutionnaire et les nationalistes intégraux, Marinetti, auteur en 1909 du fameux Manifeste futuriste, apporte l’appui le plus complet de l'avant-gardisme culturel à ce non-conformisme politique :

1. Nous voulons chanter l’amour du danger, l’habitude de l'énergie et de la témérité.

2. Les éléments essentiels de notre poésie seront le courage, l'audace et la révolte.

3. La littérature ayant jusqu'ici magnifié l'immobilité pensive, l'extase et le sommeil, nous voulons exalter le mouvement agressif, l'insomnie fiévreuse, le pas gymnastique, le saut périlleux, la gifle et le coup de poing.

4. Nous déclarons que la splendeur du monde s’est enrichie d’une beauté nouvelle : la beauté de la vitesse. Une automobile de course avec son coffre orné de gros tuyaux tels des serpents à l’haleine explosive..., une automobile rugissante, qui a l’air de courir sous la mitraille, est plus belle que la Victoire de Samothrace.

5. Nous voulons chanter l’homme qui tient le volant dont la tige idéale traverse la Terre, lancée elle-même sur le circuit de son orbite.

6. Il faut que le poète se dépense avec chaleur, éclat et prodigalité, pour augmenter la ferveur enthousiaste des éléments primordiaux.

7. Il n’y a plus de beauté que dans la lutte. Pas de chef-d’œuvre sans un caractère agressif. La poésie doit être un assaut violent contre les forces inconnues, pour les sommer de se coucher devant l'homme.

8. Nous sommes sur le promontoire extrême des siècles !... A quoi bon regarder derrière nous, du moment qu’il nous faut défoncer les vantaux mystérieux de l'impossible ? Le Temps et l’Espace sont morts hier. Nous vivons déjà dans l'absolu, puisque nous avons déjà créé l'éternelle vitesse omniprésente.

9. Nous voulons glorifier la guerre – seule hygiène du monde –, le militarisme, le patriotisme, le geste destructeur des anarchistes, les belles Idées qui tuent et le mépris de la femme.

10. Nous voulons démolir les musées, les bibliothèques, combattre le moralisme, le féminisme et toutes les lâchetés opportunistes et utilitaires.

11. Nous chanterons les grandes foules agitées par le travail, le plaisir ou la révolte; les ressacs multicolores et polyphoniques des révolutions dans les capitales modernes ; la vibration nocturne des arsenaux et des chantiers sous leurs violentes lunes électriques; les gares gloutonnes avaleuses de serpents qui fument ; les usines suspendues aux nuages parles ficelles de leurs fumées ; les ponts aux bonds de gymnastes lancés sur la coutellerie diabolique des fleuves ensoleillés; les paquebots aventureux flairant l'horizon ; les locomotives au grand poitrail, qui piaffent sur les rails, tels d’énormes chevaux d’acier bridés de longs tuyaux, et le vol glissant des aéroplanes dont l'hélice a des claquements de drapeau et des applaudissements de foule enthousiaste. [...]

Debout sur la cime du monde, nous lançons encore une fois le défi aux étoiles ! » (F. Marinetti, Enquête internationale sur le vers libre et Manifeste du Futurisme, Milan, Editions de « Poesia », 1909.)

Zeev Sternhell, Naissance de l'idéologie fasciste.


Naissance de l'idéologie fasciste


Illustration :

vendredi, octobre 28, 2011

Assise 2011





Jeudi 27 Octobre 2011 à Assise (Italie), les dignitaires religieux, musulmans et hindouistes, bouddhistes et juifs, protestants et orthodoxes, ont exprimé solennellement leur engagement pour la paix et dénoncé les guerres livrées au nom de leur foi, alors que le monde est confronté à la montée du fanatisme religieux.

Mais quand les religieux se retrouvent entre eux de quoi parlent-ils ?

Quand on prétend que les lois divines régissent la vie quotidienne, les sujets de conversation ne manquent pas. Un célèbre ecclésiastique iranien prodiguait des conseils sur la meilleure façon d'uriner et de déféquer :

« Il est nécessaire à chacun, au moment d'uriner ou de déféquer, de cacher son sexe à tous ceux qui sont pubères, même à sa sœur ou à sa mère, aussi bien qu'à un faible d'esprit et aux enfants en âge de comprendre. Mais le mari et la femme ne sont pas tenus de le faire. […]

Il ne suffît pas de dévier son sexe, tout en faisant face ou en tournant le dos à La Mecque ; et il ne faut pas avoir le sexe exposé face à La Mecque ou en direction opposée à La Mecque. 

Il est interdit d'uriner ou de déféquer dans quatre endroits :

- les impasses, sauf avec l'autorisation des riverains ;

- la propriété de quelqu'un qui n'a pas accordé cette permission ;

- les lieux du culte, comme certaines medersas ;

- les tombes des fidèles, sauf si on veut les offenser... »


Il était intarissable sur les rapports conjugaux : « Il est défendu d'épouser sa mère, sa sœur ou sa belle-mère. [...]
L'homme qui a commis l'adultère avec sa tante ne doit pas épouser ses filles, c'est-à-dire ses cousines germaines. […]

La mère, la sœur et la fille d'un homme qui a été sodomisé par un autre homme ne peuvent pas épouser ce dernier, même si les deux hommes ou l'un des deux étaient impubères; mais si celui qui a subi l'acte ne peut pas le prouver, sa mère, sa sœur ou sa fille pourront épouser l'autre homme.

Si un homme qui a épousé une fille impubère la possède avant ses neuf ans révolus et provoque chez elle des traumatismes, il n'a pas le droit de répéter l'acte avec celle-ci.

Si l'homme sodomise le fils, le frère, ou le père de sa femme après son mariage, ce mariage reste valide.

Si un homme ou une femme se trouve forcé, pour donner des soins médicaux, de regarder les parties génitales de quelqu'un, il doit le faire indirectement, dans un miroir, sauf en cas de force majeure.

Il est hautement recommandé de se hâter de marier sa fille pubère. Un des bonheurs de l'homme consiste à ce que sa fille n'ait pas ses premières règles dans la maison paternelle, mais dans celle de son mari. »

Le docteur de la foi affirmait : « Les femmes de la lignée du Prophète de l'Islam sont ménopausées à l'âge de soixante ans. Les autres à cinquante ans révolus. » Il ajoutait :

« Pendant les menstrues de la femme, il vaut mieux que l'homme évite le coït, même s'il ne pénètre qu'incomplètementc'est-à-dire jusqu'à l'anneau de circoncision – et même s'il n'éjacule pas. Il est également haute ment déconseillé de la sodomiser.

Si on divise le nombre de jours de menstrues de la femme par trois, le mari qui fait le coït pendant les deux premiers jours doit payer l'équivalent de 18 nokhods (3 g) d'or aux pauvres ; s'il le fait pendant les troisième et quatrième jours, l'équivalent de 9 nokhods ; et s'il le fait les deux derniers jours, l'équivalent de 4 1/2 nokhods. »

L'homme de Dieu, qui connaissait trop bien la nature humaine, disait : « Il est défendu de regarder une autre femme que la sienne, un animal ou une statue, d'une façon sensuelle ou lubrique. »

Les préceptes de ce célèbre théologien sont réunis dans son livre Towzihol -Mazaël (L'explication des problèmes). La version française, Extraits des principes politiques, sociaux et religieux de l'ayatollah Komeiny, Éditions Libres Hallier, est en ligne à cette adresse :




Les athées

Dans le cadre de la 4e rencontre interreligieuse d’Assise, l'athéisme était présent à l'université Roma Tre.

La veille, le 26 octobre, des intellectuels athées, invités par le Pape, ont participé à une table ronde animée par le philosophe italien Giacomo Marramao, membre du Collège international de philosophie de Paris. Parmi les invités, il y avait la psychanalyste française Julia Kristeva (épouse de l’écrivain Philippe Sollers), le philosophe italien Remo Bodei (professeur à l’Université de Californie à Los Angeles), le philosophe britannique Anthony Clifford Grayling, le philosophe mexicain Guillermo Hurtado (de l’Université nationale autonome du Mexique), et le penseur autrichien Walter Baier.



jeudi, octobre 27, 2011

Les talibans chrétiens





Pour les fanatiques chrétiens, la pièce de théâtre Sul Concetto di volto nel figlio di Dio (Sur le concept du visage du fils de Dieu) de Romeo Castellucci est une œuvre blasphématoire. Dès qu'ils apprennent que leur demande d'interdiction de la pièce est rejetée par la justice, ils passent immédiatement à l'action :

- tentative violente d’intrusion dans le théâtre par des militants organisés, avec usage de gaz lacrymogènes ;
- enchaînement des portes de la salle dans le but d’en empêcher l’accès.
- Utilisation de boules puantes ;
- Distribution de tracts dénonçant le prétendu caractère « christianophobe » du spectacle, reposant sur des allégations entièrement mensongères ;
- Envahissement de la scène du théâtre par 9 activistes interrompant la représentation.

Les médias occidentaux sont intarissables sur les fanatiques musulmans qui détruisent les statues anciennes, décapitent publiquement les blasphémateurs, flagellent des femmes pour des raisons futiles... Mais ils ne s'intéressent pas beaucoup aux talibans chrétiens. Un de leurs leaders, Randall Terry, a pourtant déclaré :

« Quand moi-même ou des gens comme moi dirigerons les USA, vous aurez intérêt à vous sauver car nous vous trouverons, nous vous jugerons et nous vous exécuterons. Je sais ce que je dis. J'inclurai dans ma mission de veiller à ce qu’ils soient jugés et exécutés. » 


Richard Dawkins précise : Terry désignait là les médecins qui effectuent des avortements, et son inspiration chrétienne apparaît clairement dans d'autres déclarations :

« Je veux seulement que vous laissiez déferler sur vous une vague d'intolérance. Je veux que vous laissiez déferler sur vous une vague de haine. Oui, la haine est une bonne chose. [...] Notre objectif, c'est d'avoir une nation chrétienne. Nous avons un devoir biblique, nous sommes appelés par Dieu à conquérir ce pays. Nous ne voulons pas de partage. Nous ne voulons pas du pluralisme.

Notre but doit être simple. Il nous faut une nation chrétienne édifiée sur la loi de Dieu, sur les Dix Commandements. Pas d'excuses. 
» 

Cette ambition de créer ce que l’on ne peut qu’appeler un État fasciste chrétien est tout à fait typique des talibans américains. C'est une image miroir presque parfaite de l'État fasciste islamique que recherchent si ardemment beaucoup de gens dans d'autres parties du monde. ( Richard Dawkins)

Randall Terry a déclaré en janvier 2011 qu'il se présenterait aux primaires démocrates pour devenir candidat à l'élection présidentielle de 2012.



Chacun est un éveillé qui s’ignore

Le buffle représente notre nature propre, la nature de l’éveil,  la nature de Buddha, l’Ainsité (et la vacuité) Le Chemin de l’Eveil Le dres...