lundi, mars 20, 2017

La tradition contemplative de Saint Michel du Var



A Saint Michel du Var, il est possible d'apprendre les techniques psycho-physiques employées par les hésychastes. 

« Il faut se souvenir, écrit Jean-Yves Leloup, que ces exercices ne doivent être utilisés qu’avec la plus grande discrétion car ils peuvent être dangereux si on les accomplit mal. En eux-mêmes ils reposent sur un principe anthropologique sûr et solide : l’unité du composé humain, corps et âme, et sur le fait que, par conséquent, le corps a un rôle positif à jouer dans la prière, mais les auteurs orthodoxes insistent pour que ceux qui pratiquent ces méthodes se placent sous la direction constante d’un père spirituel expérimenté. »

Mieux vaut dire que Dieu n’existe pas que de projeter dans l’infini nos manques et nos fantasmes... […]

« Dostoïevski, dans le même esprit, dira qu’un athée est quelquefois plus proche de Dieu qu’un croyant qui ne fait que répéter les idées et les images qu’on lui a enseignées sur Dieu, et qui se dispense ainsi du vertige qu’on éprouve aux bords des abîmes... quand les « réels apparents » cèdent sous l’analyse du psychiatre ou du physicien et que le monde se révèle plus proche du Rien que du Quelque Chose.

Avoir les pieds sur terre aujourd’hui, c’est savoir qu’on pose les pieds sur un Vide qui n’a que les apparences du solide. La démarche apophatique, dans sa lucidité impitoyable, n’ignore rien de tout cela, et pourtant elle ne conduit nullement à l’absurde ou au nihilisme. Au contraire, son lent travail de déconstruction des idées et des idoles la conduit à l’expérience nue du Réel, à la Divinisation sans illusion de l’homme et du Cosmos, à l’enfance intelligente qui joue — étonnée — avec les éléments spatio-temporels de la « Divine Comédie ». [...]



Une méthode spirituelle et thérapeutique

Le Practikè d’Evagre est un traité de thérapeutique du IVe siècle « dont le but est de permettre à l’homme de connaître sa véritable nature « à l’image et à la ressemblance de Dieu », délivré de toutes ses malformations ou déformations pathologiques.

C’est dans ce sens qu’on pourrait traduire le mot apatheia qu’emploient Evagre et la tradition monastique du désert non par « impassibilité », mais par « état non pathologique » de l’être humain, s’il est vrai que la conversion « consiste à revenir de ce qui est contraire à la nature vers ce qui lui est propre » (saint Jean Damascène).

La practikè est une forme de psychanalyse dans le sens propre du terme : analyse des mouvements de l’âme et du corps, des pulsions, des passions, des pensées qui agitent l’être humain et qui sont à la base de comportements plus ou moins aberrants. Ainsi, l’élément essentiel de la practikè au désert va- t- elle consister dans une analyse et une lutte contre ce qu’Evagre appelle les « logismoi », qu’il faut traduire littéralement par les « pensées ».

Dans la tradition chrétienne, par la suite, on parlera des démons ou des « diabolos » (littéralement, ce qui « divise » (dia) l’homme en lui-même, ce qui le déchire; c’est également l’étymologie du mot hébreu shatan, l’ « obstacle » : ce qui s’oppose à l’unité de l’homme, à l’union avec les autres, à l’union avec Dieu. Il s’agit toujours de la même idée de discerner dans l’homme ce qui fait obstacle à la réalisation de son être véritable, ce qui empêche l’épanouissement de la vie de l’Esprit (du pneuma) dans son être, sa pensée et son agir.

Evagre distingue huit « logismoi » à la racine de nos comportements qui sont huit symptômes d’une maladie de l’esprit ou maladie de l’être qui font que l’homme est « vicié », à côté de lui-même, en état d’« amartia » :

1. La gastrimargia (Jean Cassien traduira directement du grec de spiritu gastrimargiae). Il ne s’agit pas seulement de la gourmandise, mais de toutes formes de pathologie orale.

2. La philarguria (Cassien : de spirituphilarguriae) : non seulement l’ « avarice », mais toutes formes de « constipation » de l’être et de pathologie anale.

3. La porneia (Gassien : de spiritu fomicationis) : non seulement fornication, masturbation, mais toutes formes d’obsessions sexuelles, de déviation ou de compensation de la pulsion génitale.

4. Orgè (Cassien : de spiritu irae) : la colère, pathologie de l’irascible.

5. Lupè (Cassien : de spiritu tristiae) : dépression, tristesse, mélancolie.

6. Acedia (Cassien : de spiritu acediaé) : acédie, dépression à tendance suicidaire, désespoir, pulsion de mort.

7. Kenodoxia (Cassien : de spiritu cenodoxiae) : vaine gloire, inflation de l’ego.

8. Uperèphania (Cassien : de spiritu superbia) : orgueil, paranoïa, délire schizophrénique.

Ces huit symptômes auront une longue histoire — de saint Jean Cassien jusqu’à Grégoire le Grand qui, dans les Moralia, supprime l’acédie, mais introduit l’ « inuidia » (l’envie) et déclare la « superbia » « hors jeu » comme reine des vices, ce qui ramène le chiffre à sept ; ainsi les « huit symptômes » deviendront les « sept péchés capitaux » dont la liste fut répandue par la Contre-Réforme. Le moralisme fera peu à peu oublier le caractère médical de leur analyse, car à l’origine il s’agit bien de l’analyse d’une sorte de cancer psycho-spirituel ou de cancer du libre arbitre qui ronge l’âme et le corps humain et qui détruit son intégrité. Il s’agit en effet d’analyser les influences néfastes qui agissent sur la liberté, « désorientent » l’homme et lui font perdre le sens de sa finalité théanthropique. »

Extraits du livre de Jean-Yves Leloup « Écrits sur l'hésychasme ».


Une tradition contemplative

L'hésychasme (du grec hesychia : paix, silence) est la tradition millénaire qui nous enseigne cet « art des arts » que sont la méditation et la prière dans le christianisme, des pères du désert à nos jours. Jean-Yves Leloup, connu comme "père Jean Séraphin " dans l'orthodoxie, nous transmet ce qu'il a lui-même reçu au mont Athos et durant ses séjours dans les ermitages d'Orient et d'Occident.

Les différentes approches de ces écrits, historique, théologique, leur ouverture sur l'anthropologie comparée et l'apport des témoignages contemporains font de ce livre une introduction sérieuse et vivante à l'esprit et à la pratique de l'hésychasme, tradition encore trop mal connue en Occident, source toujours vive du christianisme, trésor du patrimoine spirituel de l'humanité.

La guerre contre l’Islam est-elle une phase de la guerre ultime : la Guerre contre le Christ ?

La doctrine de la « démocratie libérale et des droits de l’homme » est une crypto-religion, une forme extrême, hérétique de judaïsme christ...