jeudi, mars 31, 2011

Les clubs du Feu de l'Enfer


Dessin satirique représentant Sir Francis Dashwood adorant Vénus

En 1734, la Dilettanti Society a été fondée dans l'intention de combiner l'art de cultiver la connaissance artistique et la convivialité. Elle recrutait ses membres parmi l'intelligentsia anglaise et les classes aisées. Elle est apparue sous le règne de George II, dans un contexte de suprématie Whig et alors que Horace Walpole était Premier ministre. Cette époque était marquée par le déclin de l'influence anglaise en Europe et peu de temps avant qu'elle n'entre en guerre, seule, contre l'Espagne. La Society attirait des hommes de goût, comme Lord Palmerston mais également de jeunes débauchés moins respectables qui se distinguaient par un fort penchant pour l'alcool et par leur richesse. L'un des ces hommes était Sir Francis Dashwood, le quinzième baron le Despenser.

Dashwood était né en 1708 et avait été élevé dans un style de vie aventureux où il s'était habitué à être dorloté. En 1738 il était à Florence où il a été initié à la franc-maçonnerie et a pris goût à l'occultisme. L'année suivante il est retourné en Angleterre et est devenu membre de la Dilettanti Society. Il a ensuite fondé son propre club, les Frères de St Francis of Wycombe, titre prétentieux d'un club secret où les membres étaient vêtus comme des moines ou frères. Leur activité non séculière s'arrêtait cependant là, car ils profitaient de leurs réunions pour boire et manger à l'excès, jouer et se livrer à des ébats sexuels. C'était un de ces clubs qui apparaissaient et disparaissaient aux XVe et XIXe siècles et qui faisaient les gorges chaudes des ragots de la société à scandales. Les activités de ces clubs du Feu de l'Enfer - ainsi se sont-ils fait connaître - ont nourri la rumeur quand ils étaient liés au satanisme et à la sorcellerie. En fait ils avaient peu de chose à voir avec les pratiques sataniques mais profitaient allègrement de leur réputation salace.

En 1751, Dashwood achète Medmenham Abbey vaste propriété située à Marlow dans le Buckinghamshire. Il décide de la convertir en centre de culte, la décore dans un style pseudo-gothique et fait amplement décorer le domaine avec une statuaire païenne. Le domaine comprenait une grotte, où les membres du club, affublés de leur costume monastique, se livraient joyeusement à leurs fêtes hédonistes. On trouvait parmi les initiés beaucoup de noms célèbres de l'époque, notamment Benjamin Franklin, Francis Duffield, Lord Sandwich, George Selwyn et john Wilkes.

John Wilkes était l'exemple type des hommes qui rejoignent les clubs du Feu de l'Enfer. Fils d'un riche distillateur, il a bénéficié de la meilleure éducation, avait été élevé dans le monde et acheté un siège parlementaire à Aylesbury. Son strabisme ne l'empêchait pas de courir les femmes assidûment. Il avait également un penchant marqué pour les joueurs et les hommes de réputation douteuse qui l'ont entraîné au bord de la ruine financière. De même, il méprisait ce qu'il considérait comme des hommes « faibles » qui se réfugiaient dans l'hypocrisie, la dissimulation et ne prenaient pas de risques. Les clubs du Feu de l'Enfer lui offraient exactement l'exaltation incessante et lubrique qu'il appréciait.

Pour beaucoup de membres l'attirance vers ces clubs était de courte durée. Vers 1762, la popularité du Club de Dashwood était tombée si bas qu'il fut obligé de fermer par manque de soutien. La même année, Dashwood est devenu Chancellor of the Exchequer (ministre des Finances), position qu'il a occupée sans talent jusqu'à l'année suivante. L'autre poste d'envergure qu'il a occupé était celui de Postmaster General (ministre des Postes), de 1770 jusqu'à sa mort en 1781, à l'âge de soixante-dix-neuf ans.

Même s'ils étaient symptomatiques d'une période relativement brève de l'histoire sociale de l'Angleterre, ces clubs du Feu de l'Enfer étaient des occupations silencieuses qui faisaient nombre d'envieux dans les salons londoniens.

Michaël Jordan

Visite guidée :
The Hellfire Club Tunnels and Caves, West Wycombe

http://blather.net/blather/2006/02/the_hellfire_club_tunnels_and.html



Vidéos :

Les chasseurs de fantômes de TAPS, The Atlantic Paranormal Society ou TAPS, enquêtent dans le sanctuaire de la Société du Feu de l'Enfer.

mercredi, mars 30, 2011

Le harcèlement au travail



L'entreprise peut en elle-même devenir un système pervers lorsque la fin justifie les moyens et qu'elle est prête à tout, y compris à détruire des individus pour parvenir à ses objectifs ; Dans ce cas, c'est au niveau même de l'organisation du travail que, par un processus pervers, le mensonge sert à la mise en place de l'emprise.

Dans un système économique compétitif, de nombreux dirigeants ne font plus face et ne tiennent que par un système de défense destructeur, refusant de prendre en compte les éléments humains, fuyant leurs responsabilités et dirigeant par le mensonge et la peur. Les procédés pervers d'un individu peuvent alors être utilisés sciemment par une entreprise qui espère en tirer un meilleur rendement. […]

Les entreprises sont complaisantes par rapport aux abus de certains individus, du moment que cela génère du profit et n'engendre pas trop de révolte. Alors qu'elles pourraient permettre aux hommes de s'épanouir, elles ne font souvent que les briser.

Harcèlement


Dans le film Harcèlement de Barry Levinson, nous voyons comment une entreprise rend possible une tentative de destruction d'un individu par un autre. L'histoire se déroule dans une entreprise de Seattle spécialisée dans la fabrication de puces électroniques. Lors d'une fusion avec une firme qui, elle, fabrique des programmes, un responsable doit être nommé. Meredith, jouée par Demi Moore, obtient cette promotion inattendue, au détriment de Tom (joué par Michael Douglas) qui avait pourtant plus d'expérience, de professionnalisme et de compétence pour le poste. On pourrait penser que celle-ci savourerait tranquillement sa victoire... Pas du tout, il lui faut aussi la tête de son rival, car elle est surtout envieuse du bonheur des autres. Tom est un homme sain, heureux auprès d'une femme douce et de deux charmants enfants. Meredith, autrefois sa maîtresse, ne peut lui prendre ce bonheur simple. Elle choisit de le détruire. Pour cela, elle se sert du sexe comme d'une arme. Elle lui fait des avances, qu'il repousse. Elle se venge en l'accusant, lui, de harcèlement sexuel. L'agression sexuelle n'est qu'un moyen d'humilier1'autre, de le traiter comme un objet, pour finalement le détruire. Si l'humiliation sexuelle ne suffit pas, elle trouvera d'autres moyens pour « démolir » sa victime.

Dans ce film, nous retrouvons la lutte pour le pouvoir qui caractérise une agression par un pervers narcissique, mais aussi le besoin de tenter de s'approprier, et, si ce n'est pas possible, de détruire, le bonheur de l'autre. Pour cela on utilise ses failles, et sil n'y en a pas suffisamment on en crée.

Que le point de départ soit un conflit de personnes ou qu'il naisse de la mauvaise organisation de 1'entreprise, c'est à celle-ci de trouver une solution, car, s'il y a harcèlement, c'est qu'elle laisse faire. Il y a toujours un moment dans ce processus où elle aurait pu chercher des solutions et intervenir. Mais, malgré l'apparition des directeurs des ressources humaines, les entreprises, sauf exception, prennent rarement en compte le facteur humain et encore moins la dimension psychologique des relations de travail.

Pourtant, les conséquences économiques du harcèlement ne sont pas négligeables pour une entreprise. La détérioration de l'atmosphère de travail a pour corollaire une diminution importante d'efficacité ou de rendement du groupe ou d'une équipe de travail. La gestion du conflit devient la principale préoccupation des agresseurs et des agressés, et parfois même des témoins qui ne sont plus concentrés sur leurs tâches. Les pertes pour l'entreprise peuvent prendre alors des proportions importantes, d'une part par une diminution de la qualité du travail, et d'autre part par l'augmentation des coûts dus à l'absentéisme.

Il peut d'ailleurs arriver que le phénomène s'inverse. L'entreprise devient alors victime des individus qui la dirigent. Elle est vampirisée par des prédateurs dont l'unique souci est de se maintenir dans un système qui les valorise.

Le harcèlement résulte toujours d'un conflit. Reste à savoir si ce conflit provient du caractère des personnes concernées ou s'il s'inscrit dans les structures mêmes de l'entreprise. Tous les conflits ne dégénèrent pas en harcèlement. Pour que cela se produise, il faut la conjonction de plusieurs facteurs : déshumanisation des rapports de travail, toute-puissance de l'entreprise, tolérance ou complicité envers l'individu pervers.

Marie-France Hirigoyen, « Le harcèlement moral ».


Le harcèlement moral dans la vie professionnelle

Une analyse intelligente des problèmes qui peuvent exister dans les sociétés, qu’ils soient sexuels, moraux ou autre. En 1998 Marie-France Hirigoyen publie Le harcèlement moral et son livre rencontre un succès considérable. Des centaines de personnes ont adressé leur témoignage à Marie-France Hirigoyen et, quatre ans plus tard, elle peut mieux encore mesurer l’ampleur du phénomène “ harcèlement ” et répondre à toutes les questions concrètes qu’il suscite, que ce soit du côté des victimes ou de celui des “harceleurs”. Après Le harcèlement moral, un livre pour aller plus loin dans la compréhension des situations de harcèlement, les prévenir ou les désamorcer.

Quatrième de couverture :

Le harcèlement moral au travail est une des violences les plus destructrices qui soient. Le succès du premier ouvrage de Marie-France Hirigoyen, paru en 1998, démontre que chacun d'entre trous est un jour l'acteur ou le témoin de ce phénomène social dont on ignorait jusque-là l'ampleur. Depuis, les témoignages se sont accumulés, de multiples affaires ont éclaté, dans le public ou le privé, un débat permanent s'est instauré dans les médias entre psychologues, chef, d'entreprises, syndicalistes, parties prenantes de ce fléau ordinaire. Riche de quatre années d'expériences et de réflexions nouvelles, Marie-France Hirigoyen, dans ce second ouvrage paru sous le titre original "Malaise dans le travail, harcèlement moral - Démêler le vrai du faux", affine son analyse, poursuit son combat, afin de mieux comprendre et prévenir.




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Les experts français à Fukushima par Sofia Aram


A Fukushima, les experts japonais ont fait construire un mur de protection de la centrale atomique de seulement 5 mètres de haut. Dans ce pays exposé aux tsunamis géants, c'était un décision criminelle dictée par la recherche du profit. Les experts avaient décrété que le séisme de Meiji San-riku (1896) et le tsunami qui s'ensuivit, mesuré à 38 mètres, ne pouvaient pas se reproduire.

mardi, mars 29, 2011

Le culte du chuchoteur




L'Epona tibétaine

Selon le tibétologue John Myrdhin Reynolds, la déesse du panthéon Bönpo, Sidpaï Gyalmo, s'apparente à Epona, la déesse-cavalière des Gaulois et des Gallo-Romains. Il écrit :

"En terme de mythologie comparative, Sidpaï Gyalmo était connue des celtes païens comme la déesse à cheval. Dans la Gaule ancienne, elle était appelée Rigantona, « la grande reine », qui devint plus tard Rhiannon en gallois médiéval. En tant que déesse à cheval, Epona fut la seule déesse celtique à être adoptée par le calendrier rituel romain, où elle devint la déesse gardienne et patronne de la cavalerie romaine. Dans le mythe nordique, elle est Freya, chef de Walkyries. Cependant, à la différence du culte hindou de Durga, tel qu'il est encore pratiqué au Bengale et au Népal, Sídpaï Gyalmo ne reçoit pas de sacrifices sanglants (dmar mchod). Elle n'est pas seulement un esprit de l'atmosphère inférieure se nourrissant du prâna ou énergie vitale du sang versé lors d'un rite sacrificiel, mais plutôt une émanation, une manifestation (sprul-pa) de la conscience éclairée et de la compassion du Bouddha. Néanmoins, le symbolisme des offrandes de chair et de sang est toujours en vigueur dans la puja interne (nang mchod) et le torma (gtor) ou gâteau sacrificiel sert de substitut à l'offrande de sang dans les Rites des Gardiens."

Le culte du chuchoteur

Quelques-unes des sectes quasi-religieuses les plus extraordinaires sont basées sur des traditions ancestrales de communication secrète et de pouvoir sur les animaux. A l'époque où le cheval était l'animal domestique le plus important pour la société humaine - parce qu'il servait de monture, de bête de somme et de nourriture - les peuples qui dépendaient du cheval, comme les Celtes, développèrent de profondes croyances ésotériques dans ces animaux. Le culte du cheval était surtout lié à celui de la déesse mère mais parmi les divinités irlandaises celtes, on retrouve des figures masculines comme Ro-Ech, qui signifie “Grand Cheval” et Eochaid.

Epona, la déesse romano-celtique, s'incarna dans un cheval et c'est sous cette forme qu'elle est représentée sur de nombreux autels de la période romaine en Gaule. Le commentateur Geraldus Cambrensis, au 17ème siècle, nous apprend également l'existence d'un culte du cheval, étrange, pratiqué par les tribus d'Ulster. Durant son initiation, le chef du clan devait se plonger dans une soupe de viande de cheval.

Après avoir tué la jument, l'avoir découpée en morceaux et bouillie, on lui (le chef) prépare un bain avec le bouillon. Il s'assoit dedans et mange la viande qu'on lui apporte, les gens qui se tiennent debout autour de lui en mangent aussi. Il doit aussi boire le bouillon dans lequel il baigne mais sans le mettre dans aucun récipient, ni même dans ses mains : il doit le laper avec la bouche.

De toute évidence, ce rite apparemment grotesque symbolisait la communion entre la déesse et le roi, qui la considérait comme son épouse sur terre.

L'utilisation d'une tête de cheval durant les rituels, qui est à l'origine du cheval de bois moderne (symbole encore très utilisé dans les cultes traditionnels dans des villes comme Padstow dans le Devon) pourrait remonter à l'époque préhistorique. L'une des rares représentations de la forme humaine de l'âge de la pierre à avoir survécu en Grande-Bretagne, sculptée sur un os, porte un masque de cheval.

Quelques-unes des sectes quasi-religieuses les plus extraordinaires sont basées sur des traditions de communication secrète et de pouvoir sur les chevaux. Celui qui entretenait une relation ésotérique avec des chevaux ou qui exerçait une certaine influence sur eux était respecté. Ainsi, ceux qu'on appelait les « chuchoteurs à l'oreille des chevaux » purent-ils bénéficier d'un statut social à part dans certains comtés des îles Britanniques.

Certains prétendent que les activités des sociétés de chuchoteurs remontent à l'époque romaine mais il n'existe pas de traces de leurs exploits avant le 17ème siècle. Des archives retrouvées dans le Sussex et datant de 1648 font état d'un certain JohnYoung qui possédait l'art de commander aux chevaux en leur murmurant à l'oreille. Ce culte resta très vivace jusqu'à la fin du 19ème siècle dans des régions d”élevage de chevaux telles que l'East Anglia, notamment autour de Stowmarket et de Newmarket. On pense que le siège secret de ce culte se trouve quelque part près d'Ipswich. Dans les régions reculées d’Écosse et d'Irlande, ce culte survécu sans doute beaucoup plus longtemps et d'aucuns prétendent même que cet art a été préservé jusqu'à aujourd'hui par quelques personnes. En Écosse, ces chuchoteurs étaient regroupés sous le nom de Sociétés des cavaliers et, bien qu'officiant en grand secret, ils étaient très populaires et bénéficiaient d'un immense respect dans les périodes qui précédèrent la révolution industrielle.

L'un des chuchoteurs les plus célèbres fut James Sullivan de Cork, en Irlande, qui naquit vers la fin du 18ème siècle. Il exerçait son art en grand secret mais il connut la célébrité en 1804 en domptant un étalon particulièrement rebelle nommé King Pippin. L'animal avait résisté à toutes les tentatives de dressage jusqu'à ce que Sullivan parvienne à le maîtriser sans recourir à la force.

L'art de chuchoter à l'oreille des chevaux était censé se transmettre de génération en génération, ce qui avait pour résultat une forte rivalité entre les individus qui prétendaient pouvoir se faire obéir des chevaux et leur faire exécuter des manœuvres de plus en plus compliquées. Les gens croyaient que cet art nécessitait des dons semi-magiques mais on sait qu'il était basé en partie sur l'utilisation de mots et de sons spécifiques accompagnés par un rituel.

L'initiation à ce culte était ouverte aux fermiers et autres habitants de la campagne qui montraient une certaine habileté avec les chevaux. Une fois admis dans la confrérie, ils devaient prêter serment et étaient ensuite initiés aux aspects plus ésotériques de l'art chuchotement.

L'un des noms les plus curieux donnés à ces individus était « Toadmen », de l'anglais « toad » qui signifie « crapaud », car la rumeur prétend qu'i1s avaient au fond de leur poche un os de crapaud en forme de V pour accomplir leurs rites. Personne ne sut jamais comment cet instrument était utilisé mais on prétend qu'il était très efficace.

Michael Jordan, journaliste et présentateur de l'émission Mushroom Magic de Channel 4.

Sidpaï Gyalmo



L'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux

Profondément marquée par un accident qui a coûté la vie à sa meilleure amie et causé d'irréparables lésions à son cheval, Grasse MacLean, jeune fille de quatorze ans, vit repliée sur elle-même renonçant à lutter contre l'infirmité. Sa mère, Annie, refuse de s'avouer vaincue. Fermement décidée à sauver à la fois sa fille et l'animal, dont les destins sont liés, elle se lance à la recherche d'un dompteur de chevaux capable de guérir l'animal de sa peur. Elle retrouve ainsi au cœur du Montana la piste d'un légendaire "Horse Whisperer", spécialiste du dressage par la douceur...

lundi, mars 28, 2011

Zone autonome temporaire




Utopies pirates.

Au XVIIIe siècle, les pirates et les corsaires créèrent un «réseau d'information» à l'échelle du globe: bien que primitif et conçu essentiellement pour le commerce, ce réseau fonctionna toutefois admirablement. Il était constellé d'îles et de caches lointaines où les bateaux pouvaient s'approvisionner en eau et nourriture et échanger leur butin contre des produits de luxe ou de première nécessité. Certaines de ces îles abritaient des «communautés intentionnelles», des micro-sociétés vivant délibérément hors-la-loi et bien déterminées à le rester, ne fût-ce que pour une vie brève, mais joyeuse.

Il y a quelques années, j'ai examiné pas mal de documents secondaires sur la piraterie, dans l'espoir de trouver une étude sur ces enclaves - mais il semble qu'aucun historien ne les ait trouvées dignes d'être étudiées (William Burroughs et l'anarchiste britannique Larry Law en font mention - mais aucune étude systématique n'a jamais été réalisée). J'en revins donc aux sources premières et élaborai ma propre théorie. Cet essai en expose certains aspects. J'appelle ces colonies des «Utopies Pirates».

Récemment Bruce Sterling, un des chefs de file de la littérature Cyberpunk, a publié un roman situé dans un futur proche. Il est fondé sur l'hypothèse que le déclin des systèmes politiques générera une prolifération décentralisée de modes de vie expérimentaux : méga-entreprises aux mains des ouvriers, enclaves indépendantes spécialisées dans le piratage de données, enclaves socio-démocrates vertes, enclaves Zéro-travail, zones anarchistes libérées, etc. L'économie de l'information qui supporte cette diversité est appelée le Réseau; les enclaves sont les Iles en Réseau (et c'est aussi le titre du livre en anglais: Islands in the Net).

Les Assassins du Moyen Âge fondèrent un «État» qui consistait en un réseau de vallées de montagnes isolées et de châteaux séparés par des milliers de kilomètres. Cet État était stratégiquement imprenable, alimenté par les informations de ses agents secrets, en guerre avec tous les gouvernements, et son seul objectif était la connaissance. La technologie moderne et ses satellites espions donnent à ce genre d'autonomie le goût d'un rêve romantique. Finies les îles pirates! Dans l'avenir, cette même technologie - libérée de tout contrôle politique - rendrait possible tout un monde de zones autonomes. Mais pour le moment ce concept reste de la science-fiction - de la spéculation pure.

Nous qui vivons dans le présent, sommes-nous condamnés à ne jamais vivre l'autonomie, à ne jamais être, pour un moment, sur une parcelle de terre qui ait pour seule loi la liberté ? Devons-nous nous contenter de la nostalgie du passé ou du futur? Devrons-nous attendre que le monde entier soit libéré du joug politique, pour qu'un seul d'entre nous puisse revendiquer de connaître la liberté? La logique et le sentiment condamnent une telle supposition. La raison veut qu'on ne puisse se battre pour ce qu'on ignore ; et le cœur se révolte face à un univers cruel, au point de faire peser de telles injustices sur notre seule génération.

Dire : «Je ne serai pas libre tant que tous les humains (ou toutes les créatures sensibles) ne seront pas libres» revient à nous terrer dans une espèce de nirvana-stupeur, à abdiquer notre humanité, à nous définir comme des perdants.

Je crois qu'en extrapolant à partir d'histoires d'«îles en réseau», futures et passées, nous pourrions mettre en évidence le fait qu'un certain type d'«enclave libre» est non seulement possible à notre époque, mais qu'il existe déjà. Toutes mes recherches et mes spéculations se sont cristallisées autour du concept de «zone autonome temporaire» (en abrégé TAZ). En dépit de la force synthétisante qu'exerce ce concept sur ma propre pensée, n'y voyez rien de plus qu'un essai (une «tentative»), une suggestion, presque une fantaisie poétique. Malgré l'enthousiasme ranteresque de mon langage, je n'essaie pas de construire un dogme politique. En fait, je me suis délibérément interdit de définir la TAZ - je me contente de tourner autour du sujet en lançant des sondes exploratoires. En fin de compte, la TAZ est quasiment auto-explicite. Si l'expression devenait courante, elle serait comprise sans difficulté... comprise dans l'action.

En attendant la révolution.


Comment se fait-il que «le monde chaviré» parvient toujours à se redresser? Pourquoi la réaction suit-elle toujours la révolution, comme les saisons en Enfer?

Soulèvement, ou sa forme latine insurrectio, sont des mots employés par les historiens pour qualifier des révolutions manquées - des mouvements qui ne suivent pas la courbe prévue, la trajectoire approuvée par le consensus : révolution, réaction, trahison, l'état s'érige plus fort, et encore plus répressif - la roue tourne, l'histoire recommence encore et toujours: lourde botte éternellement posée sur le visage de l'humanité.

En ne se conformant pas à la courbe, le sous-lèvement suggère la possibilité d'un mouvement extérieur et au-delà de la spirale hégélienne de ce «progrès» qui n'est secrètement rien de plus qu'un cercle vicieux. Surgo - soulever, lever. Insurgo - se soulever, se lever. Une opération auto-référentielle. Un bootstrap. Un adieu à cette malheureuse parodie du cercle karmique, à cette futilité historique révolutionnaire. Le slogan «Révolution!» est passé de tocsin à toxine, il est devenu un piège du destin, pseudo-gnostique et pernicieux, un cauchemar où nous avons beau combattre, nous n'échappons jamais au mauvais Éon, à cet État incube qui fait que, État après État, chaque «paradis» est administré par encore un nouvel ange de l'enfer.

Si l'Histoire EST le «Temps», comme elle le prétend, alors le soulèvement est un moment qui surgit de et en dehors du Temps, et viole la «loi» de l'Histoire. Si l'État EST l'Histoire, comme il le prétend, alors l'insurrection est le moment interdit, la négation impardonnable de la dialectique - grimper au mât pour sortir par le trou du toit, une manœuvre de chaman qui s'exécute selon un «angle impossible» dans notre univers.

L'Histoire dit que la Révolution atteint la «permanence», ou tout au moins une durée, alors que le soulèvement est «temporaire». Dans ce sens, le soulèvement est comme une «expérience maximale», en opposition avec le standard de la conscience ou de l'expérience «ordinaire». Les soulèvements, comme les festivals, ne peuvent être quotidiens - sans quoi ils ne seraient pas «non ordinaires». Mais de tels moments donnent forme et sens à la totalité d'une vie. Le chaman revient - on ne peut rester sur le toit éternellement - mais les choses ont changé, des mouvements ou des intégrations ont eu lieu - une différence s'est faite.

Vous allez dire que ce n'est que le conseil du désespoir. Qu'en est-il alors du rêve anarchiste, de l'état sans État, de la Commune, de la zone autonome qui dure, d'une libre société, d'une libre culture ? Allons-nous abandonner cet espoir pour un quelconque acte gratuit existentialiste? Le propos n'est pas de changer la conscience mais de changer le monde.

J'accepte cette juste critique. Je ferai cependant deux commentaires: premièrement, la révolution n'a jamais abouti à la réalisation de ce rêve. La vision naît au moment du soulèvement - mais dès que la «Révolution» triomphe et que l'État revient, le rêve et l'idéal sont déjà trahis. Je n'ai pas abandonné l'espoir ou même l'attente d'un changement - mais je me méfie du mot Révolution. Deuxièmement, même si l'on remplace l'approche révolutionnaire par un concept d'insurrection s'épanouissant spontanément en culture anarchiste, notre situation historique particulière n'est pas propice à une si vaste entreprise. Un choc frontal avec l'État terminal, l'État de l'information méga-entrepreneurial, l'empire du Spectacle et de la Simulation, ne produirait absolument rien, si ce n'est quelques martyres futiles. Ses fusils sont tous pointés sur nous, et nos pauvres armes ne trouvent pour cible que l'hysteresis, la vacuité rigide, un Fantôme capable d'étouffer la moindre étincelle dans ses ectoplasmes d'information, une société de capitulation, réglée par l'image du Flic et l’œil absorbant de l'écran de télé.

Bref, nous ne cherchons pas à vendre la TAZ comme une fin exclusive en soi, qui remplacerait toutes les autres formes d'organisation, de tactiques et d'objectifs. Nous la recommandons parce qu'elle peut apporter une amélioration propre au soulèvement, sans nécessairement mener à la violence et au martyre. La TAZ est comme une insurrection sans engagement direct contre l'État, une opération de guérilla qui libère une zone (de terrain, de temps, d'imagination) puis se dissout, avant que l'État ne l'écrase, pour se reformer ailleurs dans le temps ou l'espace. Puisque l'État est davantage concerné par la Simulation que par la substance, la TAZ peut «occuper» ces zones clandestinement et poursuivre en paix relative ses objectifs festifs pendant quelque temps. Certaines petites TAZs ont peut-être duré des vies entières, parce qu'elles passaient inaperçues, comme les enclaves rurales Hillbillies au Sud des États-Unis - parce qu'elles n'ont jamais croisé le champ du Spectacle, qu'elles ne se sont jamais risquées hors de cette vie réelle qui reste invisible aux agents de la Simulation.

Babylone prend ses abstractions pour des réalités; la TAZ peut précisément exister dans cette marge d'erreur. Initier une TAZ peut impliquer des stratégies de violence et de défense, mais sa plus grande force réside dans son invisibilité - l'État ne peut pas la reconnaître parce que l'Histoire n'en a pas de définition. Dès que la TAZ est nommée (représentée, médiatisée), elle doit disparaître, elle va disparaître, laissant derrière elle une coquille vide, pour resurgir ailleurs, à nouveau invisible puisqu'indéfinissable dans les termes du Spectacle. A l'heure de l'État omniprésent, tout-puissant et en même temps lézardé de fissures et de vides, la TAZ est une tactique parfaite. Et parce qu'elle est un microcosme de ce «rêve anarchiste» d'une culture libre, elle est, selon moi, la meilleure tactique pour atteindre cet objectif, tout en faisant l'expérience de certains de ses bénéfices ici et maintenant.



En résumé, le réalisme veut non seulement que nous cessions d'attendre la «Révolution», mais aussi que nous cessions de tendre vers elle, de la vouloir. «Soulèvement» - oui, aussi souvent que possible et même au risque de la violence. Le spasme de l'État Simulé sera «spectaculaire», mais dans la plupart des cas, la meilleure et la plus radicale des tactiques sera de refuser l'engagement dans une violence spectaculaire, de se retirer de l'aire de la simulation, de disparaître.

La TAZ est un campement d'ontologistes de la guérilla: frappez et fuyez. Déplacez la tribu entière, même s'il ne s'agit que de données sur le Réseau. La TAZ doit être capable de se défendre; mais l'«attaque» et la «défense» devraient, si possible, éviter cette violence de l'État qui n'a désormais plus de sens. L'attaque doit porter sur les structures de contrôle, essentiellement sur les idées. La défense c'est «l'invisibilité» - qui est un art martial -, et l'«invulnérabilité» - qui est un art occulte dans les arts martiaux. La «machine de guerre nomade» conquiert sans être remarquée et se déplace avant qu'on puisse en tracer la carte. En ce qui concerne l'avenir, seul l'autonome peut planifier, organiser, créer l'autonomie. C'est une opération de bootstrap. La première étape est une sorte de satori - prendre conscience que la TAZ commence par le simple acte d'en prendre conscience. [...]

Télécharger gratuitement "T.A.Z., Zone Autonome Temporaire", le livre de Hakim Bey : 
http://lamuse.seriedownload.free.fr/programmation/HakimBeyTAZ.pdf

T.A.Z.
Zone Autonome Temporaire



Sommaire


Utopies Pirates
En attendant la Révolution
Psychotopologie de la vie quotidienne
Le Net et le Web
« Partis pour Croatan»
La Musique comme Principe d'organisation
La Volonté du Puissance comme Disparition
Des trous-à-rats dans la Babylone de l'Information  


Commentaire d'un lecteur :

Appuyé sur de nombreux témoignages, l'ouvrage ne donne non pas une vision libertaire de la piraterie, dont on pourrait reprocher la myopie, mais bien une histoire, l'Histoire d'une certaine piraterie -libertaire. Car c'est le point central du livre, de ne pas prétendre unifier l'ensemble de l'Histoire de la Piraterie -les pirates ne furent pas tous des combattants du pouvoir en place et de l'Etat devenant marchand, de même que tous les anarchistes espagnols ne le furent pas à leur époque...- mais bien de s'attacher aux seuls libertaires. Ainsi, il est certain que l'on pourra objecter certains contre exemples d'autres formes de piraterie, mais en vain.
Car ici encore, les références historiques sont cruciales. Il n'est pas question du seul discours des pirates sur eux mêmes, lequel pourrait être fortement idéalisé. Il est question aussi de la vision qu'en avaient leurs opposants directs -les pouvoirs qu'ils combattaient. Mais bien plus encore, de nombreux recoupements sont faits avec des données objectives, pointant bien une certaine culture de cette piraterie, une certaine dynamique : des retours de certains pirates "déchus" vers les côtes africaines aux survivances d'un certain discours et de certains symboles au travers des âges.

Ainsi, une fois prises en compte les limites de la piraterie considérée et de son époque ne tient qu'à nous de nous réveiller.


Illustration :
Astérix et Latriavata.


***

Documentaire ARTE :
« Le plus redouté de ces chefs pirates modernes se cache au cœur même des Etats-Unis. Son nom: Hakim Bey. Personnage controversé et provocateur, piratologue et professeur d'université, poète et philosophe, Hakim Bey cultive le mystère. Il prend la barre du vaisseau Tracks... »

samedi, mars 26, 2011

Le bouddhisme tibétain ne m'a apporté que du malheur





Mon histoire

A l'âge de seize ans j'ai fait un stage (danse et cirque) de trois semaines à la chartreuse de Villeneuve-Lès-Avignon, dans le cadre du CIRCA. Des bouddhistes y demeuraient. Pour mon plus grand malheur, le 16ème karmy m'a vue sur une scène et il s'est ensuite précipité vers moi en disant que j'étais mort, dans une autre vie, en lui demandant de l'aide, un homme s'est interposé « tout karmy que tu es, tu n'as pas tous les droits » puis Karmy est venu me voir une autre fois, en me disant que j'avais été son compagnon, qu'il était désolé que je ne le reconnaisse pas. J'ai refusé de devenir bouddhiste et il a dit que je rendrais un grand service aux bouddhistes. Il m'a présenté Shamy en me disant qu'il était le gardien de la religion. Ces rencontres malencontreuses ont fichu en l'air toute ma vie de jeune fille et de femme.

Entre temps, ils avaient écrit à mes parents pour les prévenir de la haute destinée qui m’attendait et qui devait changer le monde. Ceux-ci très suspicieux envers ce groupe d’illuminés ne donnèrent pas suite à leur courrier qui est allé directement à la poubelle.

Plus tard, en 1980-81, alors que j'étais à Aix, où j'avais souhaité m'inscrire en fac de sociologie, ils m'ont retrouvé « quelle chance de t'avoir retrouvée » ont-ils dit. Pour moi, ça a été le début de mon malheur.
Il faut dire qu’il n’était pas difficile de les rencontrer à cette époque, ils étaient toute la journée dans la rue, assis à discuter avec les passants ou leurs amis. Le bouddhisme était alors en pleine expansion, une mode qui ne s’est pas démentie depuis les années 70. Lors de cette rencontre, c’est même une personnalité du show business qui m’a présenté au groupe réuni dans la rue et particulièrement à son dirigeant Shamy, disciple du 16ème Karmy décédé, qui s’est souvenu de la révélation de son maître concernant le grand service.


Quelques temps après je me suis retrouvé enceinte, des œuvres d'un sympathisant de ce groupe bouddhistes.

Le groupe a été rapidement mis au courant de telle sorte que peu après lorsque je les ai croisés dans la rue, ils m’ont questionné sur mon état, l’avancement de ma grossesse, si j’avais des maladies, si j’allais allaiter… A l’époque, j’ai surpris quelques conversations qu’ils avaient entre eux me concernant, mais dont je ne comprenais pas très bien l’intérêt, du style « Il faut la mettre au courant pour la cérémonie qui va bientôt avoir lieu ». Rapidement, ils m’ont envoyé un adepte, Marcello, pour « veiller sur moi ». Je lui ai dit que je n’avais rien à voir avec les bouddhistes, que je ne les connaissais pas, lui m’a répondu « Mais, eux te connaissent ». Paroles biens absconses pour moi à l’époque. Et pendant 2 semaines, il est venu me voir régulièrement, ce que je ne refusais pas car il était sympathique et j’étais seule.
Mais en fait, je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. De toute façon j'avais une histoire de vie qui me faisait craindre d'enfanter. Celui qui m'avait mise enceinte, était parti le matin même. Il se moquait bien de moi, j'étais seule, ne sachant comment affronter cette épreuve supplémentaire, non désirée. Je dois avouer que j’étais déstabilisée à cette époque, j’étais isolée à Aix, ma famille résidant dans le Var, j’étais enceinte et je portais cela toute seule à 20 ans. Je me demandais ce qui m'arrivait, je ne comprenais pas que j'avais été piégée. Je n'avais pas de situation, ni de compagnon qui m'aurait permis d'élever correctement cet enfant. J'ai donc avorté ainsi que m'y autorisait la loi.

Là mon protecteur bouddhiste Marcello n’a pas été content du tout. Lorsqu’ensuite j’ai rencontré les adeptes de Shamy dans la rue à Aix, ils se sont rués sur moi pour me sermonner, m’invectiver et même l’un d’entre eux juste un peu plus loin, m’a molestée et a failli m’étrangler. En avortant, j’avais selon eux commis une faute impardonnable qui nuisait gravement au bouddhisme.
Ils sont devenus très agressifs, me disant qu'ils faisaient des cérémonies occultes pour me condamner au malheur, que j'allais être punie car leur plan avait échoué à cause de moi. Ils ont parlé, entre eux, de l’âme du Grand 16ème Karmy qui devait venir habiter le fœtus.
« C'est un être qui avait des qualités dix fois supérieures à la normale qui voulait naitre de toi, parce que tu es douce et gentille » « notre plan a échoué mais toi tu vas être punie » m’ont-ils dit. Il m'a fallu trente ans pour comprendre quel était le service que je devais rendre aux bouddhistes de cette lignée. Mais je ne comprends toujours pas pourquoi ils n'ont jamais pensé à informer le ventre que j'étais de ce qu'ils attendaient de moi.
Il y avait deux raisons à leur souhait de la naissance du karmeny  en France : 
1/ Avec la renaissance en France du karmy , il aurait eu la nationalité française et n'aurait plus été dans l'obligation de demander des visas. En y repensant, je crois qu’il était certainement plus efficace, plus lucratif pour eux d’avoir leur « Pape » (Karmy) en France parce qu’en Inde, le Karmy n’y est pas respecté et protégé comme il pourrait l’être dans notre pays. Et aussi cela lui aurait fait gagner dix ans d'évolution, pour propager sa religion.
2/ Une nouvelle branche de leur lignée venait d'apparaître et elle était plus évoluée, responsable, composée d'intellectuels, Shamy les critiquait en disant qu'ils ne respectaient pas la religion.


Shamy leur maître les avait vraiment ligués contre moi, en invoquant des croyances bouddhistes extrémistes. Il était question maintenant, et ils ne se gênaient pas pour le dire en ma présence, que mon acte sacrilège appelait de leur part une cérémonie de malédiction à mon encontre. Je devais être maudite à jamais et ne plus avoir de vie amoureuse avec qui que ce soit. Et ne pas enfanter pour rester la mère spirituelle du 17° karmy Toujours d'après eux.


Toujours est-il que même après le départ de leur maitre les adeptes aixois dirigés par une certaine SANDRINE , étaient très remontés contre moi. Shamy avait su exacerber leurs croyances superstitieuses contre moi : j’étais une sorte de sacrilège ambulant, une sorte de déicide, que l’on pourrait mettre en parallèle dans le monde chrétien avec une Vierge Marie qui aurait attenté à la vie du Messie en gestation. Et effectivement, c’est ce qu’ils ont fait par la suite, ils m’ont traitée comme un animal, une ordure, la lie de l’humanité.


Il faut dire, qu’ils n’ont pas eu de mal à me prendre en main, car j’étais à ce moment là extrêmement affaiblie, physiquement et moralement, après les bouleversements hormonaux encore présents dans mon corps suite à ma grossesse, cet avortement ensuite, assumé seule et mon isolement.


Je ne me souviens plus à l’époque (cela fait 32 ans) comment les choses se sont passées exactement, toujours est-il qu'ils m’ont convaincue de les suivre pour participer à une cérémonie, suivies d'autres séances, où l'on m'offrait toujours un petit thé. JMC disait « tu vois c'est moi qui te prépare ton thé » en fait, je les soupçonne très fortement d’avoir commencé à me droguer systématiquement, compte tenu de mon comportement irrationnel à cette époque.


La première fois, arrivée en haut des escaliers qui menaient à leur appartement, j’ai soudain ressenti une vive douleur à la tête, je me suis effondrée dans un état semi-conscient. Ce dont je me souviens dans le brouillard ou l’état second dans lequel j’étais à ce moment là, ce sont les conversations, notamment celle d’une professionnelle de santé apparemment qui disait avoir manipulé ma 5ème vertèbre pour bloquer mon énergie sexuelle afin que je n’enfante plus. Je me souviens encore de ses propos qui me laissent penser qu’elle était du milieu médical : « Mon Dieu ! Si l’ont apprend que je fais cela, je n’aurai plus le droit d’exercer » Pendant ce rituel, j’ai senti que l’on m’introduisait quelque chose, un objet dans mon sexe et lorsque je me suis révélée complètement, j’étais nue et mon corps portait de nombreuses marques de griffures.


Ce sont 2 adeptes qui m’ont soutenues pour me ramener chez moi et qui je m’en souviens comme si c’était hier, râlaient d’avoir été assignées à cette corvée parce que « si on nous voit avec elle, on va nous reconnaitre et c’est nous qui aurons la police sur le dos »


A cette époque j'avais toujours très mal à la tête, j'oubliais que je suivais des cours je ne retrouvais pas le chemin de mon domicile. J'étais anéantie mentalement, j’avais perdu tout discernement, j’étais devenue un zombi. Les parents de quelques camarades de faculté ont alors alertés mon père et ma mère de ce que j’avais été « envoutée » par des bouddhistes. Ils m’ont donc récupéré dans le Var quelque temps pour me remettre sur pieds, mais j’étais cassée en dedans. Finalement je suis retournée chez moi à Aix, toujours dans cet état plus ou moins végétatif, du moins au point de vue de ma volonté et de mon discernement.
Malheureusement, un disciple, JMC n'en avait pas fini avec moi, il m'a fait boire dans la rue un jus d'orange très probablement drogué, puisque je l’ai suivi lorsqu’il m’a invité à le faire. Il a abusé de moi avec deux de ses copains dont un certain Patrick. Puis un groupe de mecs est arrivé et ils ont dit « elle doit payer ». Payer quoi? D'avoir avorté et le fait que Shamy, ce tyran moyenâgeux n'ait pas pu utiliser ma fécondation? Pierre (JMC) m'a livrée à eux. Ils m'ont à nouveau déshabillée puis frappée. C'est si facile quand on a une victime inconsciente, fragile et faible. L'humoriste disait « elle est jolie notre trou à bites notre bouche à pipes » par la suite il est devenu une petite star du show business, un « comique » pour la scène, mais pas dans sa vie privée en tous cas. Quand on voit comment certains hommes traitent les femmes on se demande comment les autres femmes arrivent encore à mettre des bébés au monde. Ensuite un groupe de monstres est arrivé. J'ai compris que c'était encore pour moi. Quelques jours plus tard j’ai dit à une copine « heureusement qu'ils ne m'ont pas blessée ». Le collectif produit le pire parce qu'il donne un sentiment d'impunité. Surtout quand il est validé par des motifs pseudo religieux, expiatoires, etc.


La police est intervenue, mes amies ont donné l'alerte. J'étais tellement droguée, que j'ai perdu la mémoire, et mes capacités intellectuelles, j’étais hébétée. Je ne comprenais plus rien. Je ne pouvais plus me déplacer seule.


Mais je me souviens de la reconstitution devant la porte du 15 place Saint Honoré à Aix. Ma mère leur criant « vous lui avez demandé son accord à ma fille pour la mettre enceinte, vous lui avez demandé son accord, pour avoir des relations sexuelles avec elle? Je suis plus fière d'être la mère d'une gentille fille, même violée que si j'étais votre mère j'aurais trop honte d'être la mère de violeurs » (le dossier que ma mère est allé chercher au commissariat, quelques temps après, avait curieusement disparu).
Mes parents n'ont pas porté plainte car j'étais inconsciente et je le suis restée pendant trente ans jusqu'au décès de ma maman. Je savais que quelque chose de terrible s'était passé, mais je crois qu'elle préférait me croire inconsciente, car, elle avait trop mal, maman. Je crois en fait que nous avons occulté mutuellement cette affaire, de peur de nous faire plus de mal encore.
C'est pour elle, pour moi que je témoigne, plus jamais ça! Notre corps nous appartient et les hommes n'ont aucun droit sur notre corps. Pas le droit de décider de nous faire faire un enfant, comme l'avait décidé karmy et shamy, parce que ça leur chante, pas le droit de nous violer quand ça leur chante. Ont ils pensé tous ces violeurs qu'ils sont nés d'un ventre de femme ? En me violant c'est leur propre mère qu'ils ont meurtrie.


Mais parce qu'il n'y a pas eu de plainte, de poursuites et de sanctions, ils se sont crus protégés et ils ont continué à me harceler. Dès que j'avais un petit ami, ils s'empressaient de lui dire qu'ils avaient été obligés de me punir, en raison de ma culpabilité. Les gens se détournaient de moi, car ils les croyaient Ben voyons! Ils me démolissaient aussi, professionnellement dès qu'ils le pouvaient (Aix est une petite ville où tout le monde se connaît).


Je les ai retrouvés dans trois centres pour enfants. Une de mes animatrices était la propre sœur de mon violeur. Et dans un club réputé, ils ont arrivés à plusieurs pour faire une cérémonie destinée à me faire du mal. C'est là qu'une fille m'a tout de même posé la question « est-ce que tu savais que l’on attendait un enfant de toi? »
J’ai répondu «  mais vous ne pouvez pas faire vos propres enfants vous mêmes? ».
Ils ont enfin compris au bout de quatorze ans que je n'y étais pour rien dans l'échec de leur projet et que je ne leur avais jamais menti que je ne les avais jamais trompé, puisque j'ignorais tout. Ils ont enfin compris que j'étais innocente de ma prétendue culpabilité.


En y repensant je crois qu'ils ont eux aussi été victimes de Shamy qui les a totalement manipulés, et véritablement trompés.
Je suis effarée lorsque je constate que des intégristes comme Shamy, l’initiateur spirituel de la meute de fanatiques à l’origine de mon malheur, se retrouvent parmi les notables du bouddhisme dans notre pays et que mes contemporains gobent tout cela sans aucune conscience des risques qu’ils courent. Mais les hommes, religieux compris, sont tous les mêmes partout. S’ils ne sont pas régulés par des lois (laïques), par l’opinion publique, leur naturel autoritaire, profiteur, mégalo, hédoniste, reprend vite le dessus, et il est sans limite lorsqu’il s’appuie sur l’irrationnel.


Une sociologue a dit « lorsque c'est incroyable, c'est que c'est une secte ».


Le bouddhisme tibétain ne m'a apporté que du malheur.

M.C.

Source :


Illustration : Le Bouddha d'Azur de Cosey

Le Bouddha d'Azur

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Source :

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