samedi, août 17, 2019

L'hommage d'Alain Soral aux intellectuels juifs



Alain Soral réédite le livre d'Abraham Léon, "La Conception matérialiste de la question juive". 

Extrait :


Le sionisme


Le sionisme est né à la lueur des incendies provoqués par les pogroms russes de 1882 et dans le tumulte de l'affaire Dreyfus, deux événements qui reflétèrent l'acuité que commence à prendre le problème juif à la fin du XIX° siècle.

La capitalisation rapide de l'économie russe après la réforme de 1863 rend intenable la situation des masses juives des petites villes. En Occident, les classes moyennes, broyées par la concentration capitaliste, commencent à se tourner contre l'élément juif dont la concurrence aggrave leur situation. En Russie se fonde l'Association des « Amants de Sion ». Léo Pinsker écrit « l'Auto-émancipation », livre dans lequel il préconise le retour en Palestine, unique solution possible de la question juive. À Paris, le baron Rothschild, qui, comme tous les magnats juifs, considère avec très peu de faveur l'arrivée massive dans les pays occidentaux des immigrants juifs, commence à s'intéresser à l’oeuvre de la colonisation juive en Palestine. Aider « leurs frères infortunés » à retourner dans le pays des « ancêtres », c'est-à-dire à aller le plus loin possible, n'a rien pour déplaire à la bourgeoisie de l'Occident, craignant avec raison la montée de l'antisémitisme. Un peu après la parution du livre de Léo Pinsker, un journaliste juif de Budapest, Théodore Herzl, assiste à Paris aux manifestations antisémites provoquées par l'affaire Dreyfus. Il écrira « l'état juif » qui demeure jusqu'à aujourd’hui l'Évangile du mouvement sioniste. Dès le début, le sionisme apparaît comme une réaction de la petite bourgeoisie juive (qui forme d'ailleurs encore le noyau du judaïsme), durement frappée par la vague montante de l'antisémitisme, ballottée d'un pays à l'autre, et qui essaie d'atteindre la Terre promise où elle pourra se soustraire aux tempêtes déferlant sur le monde moderne.

Le sionisme est donc un mouvement très jeune ; c'est le plus jeune des mouvements nationaux européens. Cela ne l'empêche pas de prétendre, bien plus que tous les autres nationalismes, qu'il tire sa substance d'un passé extrêmement lointain. Tandis que le sionisme est en fait le produit de la dernière phase du capitalisme, du capitalisme commençant à pourrir, il prétend tirer son origine d'un passé plus que bimillénaire. Alors que le sionisme est essentiellement une réaction contre la situation créée au judaïsme par la combinaison de la destruction du féodalisme et de la décadence du capitalisme, il affirme qu'il constitue une réaction contre l'état de choses existant depuis la chute de Jérusalem en l'an 70 de l'ère chrétienne. Sa naissance récente est naturellement la meilleure réplique à ces prétentions. En effet, comment croire que le remède, à un mal existant depuis deux mille ans, ait seulement pu être trouvé à la fin du XIX° siècle ? Mais comme tous les nationalismes, et bien plus intensément encore, le sionisme considère le passé historique à la lumière du présent. C'est ainsi d'ailleurs qu'il déforme l'image du présent. Tout comme on présente aux enfants français la France comme existant depuis la Gaule de Vercingétorix ; tout comme on présente aux enfants de Provence les victoires que les rois de l'Ile-de-France ont remportées contre leurs ancêtres, comme leurs propres succès, ainsi le sionisme essaie de créer le mythe d'un judaïsme éternel, éternellement en butte aux mêmes persécutions.

Le sionisme voit dans la chute de Jérusalem la cause de la dispersion et par conséquent l'origine de tous les malheurs juifs dans le passé, le présent et le futur.

« La source de tous les malheurs du peuple juif est la perte de sa patrie historique et sa dispersion dans tous les pays », déclare la délégation marxiste du Poaley-Zion au Comité hollando-scandinave. Après la dispersion violente des Juifs par les Romains, la lamentable histoire continue. Chassés de leur patrie, les Juifs n'ont pas voulu (ô beautés du libre arbitre !) s'assimiler. Pénétrés de leur « cohésion nationale », « d'un sentiment éthique supérieur » et « d'une croyance indestructible dans un Dieu unique », ils ont résisté à toutes les tentatives d'assimilation. Leur seul espoir, pendant ces jours sombres qui ont duré deux mille ans, fut la vision d'un retour dans leur antique patrie.

Le sionisme ne s'est jamais sérieusement posé cette question pourquoi, pendant ces deux mille ans, les Juifs n'ont-ils jamais tenté réellement de retourner dans cette patrie ? Pourquoi a-t-il fallu attendre la fin du XIX° siècle pour que Herzl parvienne à les convaincre de cette nécessité ? Pourquoi tous les prédécesseurs de Herzl, comme le fameux Sebetai Zevi, s'étaient-ils vus traiter de faux messie ? 

Pourquoi les adhérents de Sabetai Zevi furent-ils férocement persécutés par le judaïsme orthodoxe ?

Naturellement, pour répondre à ces questions intéressantes, on se réfugie derrière la religion.

« Aussi longtemps que les masses croyaient qu'elles devaient demeurer dans la Diaspora jusqu'à la venue du Messie, il fallait souffrir en silence », dit Zitlovski dont le sionisme est d'ailleurs assez conditionnel. Mais cependant cette explication ne nous explique rien. Il s'agit précisément de savoir pourquoi les masses juives croyaient qu'il fallait attendre le Messie pour pouvoir « retourner dans leur patrie » ? La religion étant un reflet idéologique des intérêts sociaux, elle doit forcément leur correspondre. Aujourd'hui, la religion ne constitue nullement un obstacle au sionisme.

En réalité, aussi longtemps que le judaïsme était incorporé dans le système féodal, le « rêve de Sion » n'était précisément rien d'autre qu'un rêve et ne correspondait à aucun intérêt réel du judaïsme. Le cabaretier ou le « fermier » juif de Pologne du XVI° siècle pensait aussi peu à « retourner » en Palestine qu'aujourd'hui le millionnaire juif d'Amérique. Le messianisme religieux juif ne se distinguait en rien des messianismes propres aux autres religions. Les pèlerins juifs qui se rendaient en Palestine y trouvaient des pèlerins catholiques, orthodoxes, musulmans. Ce n'était d'ailleurs pas tant le « retour en Palestine » qui constituait le fond de ce messianisme que la croyance dans la reconstruction du temple de Jérusalem.

Toutes ces conceptions idéalistes du sionisme sont naturellement inséparables du dogme de l'antisémitisme éternel.

« Aussi longtemps que les Juifs habiteront la Diaspora, ils seront haïs par les autochtones. »

Ce point de vue essentiel au sionisme, son ossature, peut-on dire, est naturellement nuancé par ses divers courants. Le sionisme transpose l'antisémitisme moderne à toute l'histoire, il s'épargne la peine d'étudier les diverses formes de l'antisémitisme, son évolution. Cependant, nous avons vu qu'à diverses époques historiques, le judaïsme faisait partie des classes possédantes et était traité comme elles. En somme, les sources du sionisme devraient être cherchées dans l'impossibilité de s'assimiler, à cause de l'antisémitisme « éternel » et de la volonté de sauvegarder les « trésors du judaïsme ».

En réalité, l'idéologie sioniste, comme toute idéologie, n'est que le reflet défiguré des intérêts d'une classe. C'est l'idéologie de la petite bourgeoisie juive, étouffant entre le féodalisme en ruine et le capitalisme en décadence. La réfutation des fantaisies idéologistes du sionisme ne réfute naturellement pas les besoins réels qui l'ont fait naître. C'est l'antisémitisme moderne, et non pas le mythique antisémitisme « éternel » qui est le meilleur agitateur en faveur du sionisme. De même, la question essentielle qui se pose est de savoir dans quelle mesure le sionisme est capable de résoudre, non pas « l'éternel problème juif, mais la question juive à l'époque de la décadence capitaliste ».

Les théoriciens sionistes aiment à comparer le sionisme à tous les autres mouvements nationaux. Mais, en réalité, les fondements des mouvements nationaux et du sionisme sont tout à fait différents. Le mouvement national de la bourgeoisie européenne est la conséquence du développement capitaliste; il reflète la volonté de la bourgeoisie de créer les bases nationales de la production, d'abolir les survivances féodales. Le mouvement national de la bourgeoisie européenne est étroitement lié à la phase ascendante du capitalisme. Mais au XIX° siècle, à l'époque de l'efflorescence des nationalismes, loin d'être sioniste, la bourgeoisie juive était profondément assimilatrice. Le processus économique, d'où sont issues les nations modernes, posait les bases de l'intégration de la bourgeoisie juive dans la nation bourgeoise.

C'est seulement quand le procès de la formation des nations touche à sa fin, quand les forces productives se trouvent depuis longtemps à l'étroit dans les frontières nationales, que commence à se manifester le procès de l'expulsion des Juifs de la société capitaliste, que commence à se développer l'antisémitisme moderne. L'élimination du judaïsme accompagne la décadence du capitalisme. Loin d'être un produit de développement des forces productives, le sionisme est précisément la conséquence de l'arrêt total de ce développement, le résultat de la pétrification du capitalisme. Tandis que le mouvement national est le produit de la période ascendante du capitalisme, le sionisme est le produit de l'ère impérialiste. La tragédie juive du XX° siècle est une conséquence directe de la décadence du capitalisme.

C'est là que gît l'obstacle principal à la réalisation du sionisme. La décadence capitaliste, base de la croissance du sionisme, est aussi cause de l'impossibilité de sa réalisation. La bourgeoisie juive est obligée de créer de toutes pièces un état national, de s'assurer les cadres objectifs du développement de ses forces productives, précisément à l'époque où les conditions d'un tel développement ont depuis longtemps disparu. Les conditions de la décadence du capitalisme qui ont posé d'une façon si aiguë la question juive, rendent aussi impossible sa solution par la voie sioniste. Et il n'y a rien d'étonnant à cela. On ne peut supprimer un mal sans en détruire les causes. Or, le sionisme veut résoudre la question juive sans détruire le capitalisme qui est la source principale des souffrances des Juifs.

Disponible sur Kontre Kulture 

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