mercredi, novembre 28, 2012

De l'exemple islandais à l'e-République




En France, les cinq millions de chômeurs ne sortiront pas de l'ornière sans se débarrasser d'une classe politique qui est à vomir. Il est temps de s'inspirer de la révolution pacifique islandaise pour en finir avec les bouffonneries de l'UMP, la trahison des socialistes, l'arrogance de l'oligarchie, la dictature de la finance internationale... 

Dans ma circonscription, durant les législatives de 2012, j'étais le seul candidat à la députation à préconiser la démocratie directe. Aujourd'hui, j'ajoute que la Ve République doit être renouvelée par une e-République.

Le droit à une e-démocratie

« L'application du principe démocratique, écrit Marie-Charlotte Roques-Bonnet, est déterminée par les trois premiers articles de notre Constitution : l'article 1er pose que « la France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale ». L'article 2 alinéa 5 pose le principe du « gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Enfin, l'article 3 énonce la délicate interaction entre souverainetés nationale et populaire : « La souveraineté nationale appartient au peuple, qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. » Pourtant, jusqu'à l'émergence du réseau, le compromis entre l'école représentative des « élites responsables » et l'école « participationniste » était fort théorique. Peut-être faut-il expliquer cette frilosité par les déconvenues occasionnées par le recours aux machines à voter et les expérimentations de vote électronique. Média interactif, média de l'abondance, espace d'expression directe libéré de toute censure et de toute ascendance gouvernementale, l'Internet devient le support d'une liberté d'expression et d'action qui caractérise la composante directe de nos démocraties. Il a incarné un premier enjeu démocratique, en devenant l'instrument du suffrage via l'e-vote. Le deuxième enjeu à relever dans la société numérique sera de définir ce qu'est l'e-démocratie, sa dimension politique et ses limites constitutionnelles. [...]

Un débat fondamental : la Ve République à l'épreuve de l'Internet

De la société hors ligne à la société en ligne, ce ne sont pas seulement nos pratiques et actions quotidiennes qui ont changé. C'est aussi notre République. Il convient donc de définir ce qu'est l'e-République. Ce qui devrait permettre de mieux comprendre comment la hiérarchie des normes a été bousculée par l'Interner. Parce qu'elle encadre des institutions, des droits et des normes redéfinis sur le modèle du réseau, la Constitution française basculerait du modèle de la pyramide à celui du réseau, c'est-à-dire du paradigme de la « supraconstitutionnalité » à celui de l'« identité constitutionnelle de la France », dont la Constitution reste le cœur.

De l'existence d'une e-République

Dans la première partie du XXe siècle, le modèle de l'État de droit présupposait un système juridique « autarcique ». Il était caractérisé par une production des normes autonome : la garantie des droits du citoyen français restait indépendante des autres systèmes de droit. Et la séparation des pouvoirs se construisait efficacement au sein de la seule République. Aujourd'hui, toute interaction avec des systèmes de droit subsidiaires et supranationaux est à l'origine d'un processus normatif en deux étapes : la création de normes subsidiaires à l'échelle communautaire (directives) et/ou internationale (conventions) et leur réception dans l'ordre normatif français (article 88-1 et article 53 de la Constitution). De manière inédite, à partir de 1992, simultanément à l'émergence de l'Internet, le pouvoir constituant devait admettre le basculement de l'« autarcie normative » à l'interactivité normative. C'est-à-dire le basculement vers un droit construit en réseau, produit pour partie au sein de l'État et, pour partie, au sein de l'Union en application du principe de subsidiarité.

L'e-République n'est pas un concept remettant en cause l'État de droit, mais le redéfinissant en partie par la subsidiarité normative. Face au réseau, « d'un point de vue de logique comme de pratique juridique, l'affirmation d'une hiérarchie dans un des ordres juridiques seulement ne semble plus véritablement défendable ». En marge du « fantasme de l'interconnexion généralisée de tous les terminaux, et l'avènement d'une culture transnationale, déracinée, mondiale » , il s'agit à présent d'observer les mouvements réels du droit. Et d'admettre que la pyramide des normes définie par H. Kelsen un siècle plus tôt ne reflète plus les modes de production du droit. Saisi « dans ses trois dimensions (institutionnelle, normative et substantielle), le droit constitutionnel tend à devenir un droit commun à tous les systèmes qui se veulent démocratiques ». Le réseau électronique universel stigmatise une transformation préexistante au réseau, et identifiée par L. Scheer comme la Constitution d'une société qui « connecte ou commute ».

S'il revient « à la technologie de s'adapter aux exigences fondamentales du droit » , il revient aussi au constituant d'adapter le Pacte à la société. Sans soutenir la thèse proposée par le professeur Macintosh ni la mise en place du site « http://www.etats.net » nous admettrons, à l'unisson avec M.-A. Frison-Roche, que, pour partie, « le droit doit se mettre à l'image de son objet : puisque son objet est ici un réseau mondial, les États doivent se structurer en reflet » . Tout comme il s'agit d'admettre, en écho aux propos de L. Favoreu et G. Vedel, « un droit constitutionnel transnational » dépassant l'« impérialisme "constitutionnaliste" ». Parce qu'il est transnational, parce que l'« Internet tue la hiérarchie », parce qu'il met le droit constitutionnel « à l'épreuve de la pratique », le droit du développement numérique impose une réflexion de fond sur la définition de la Constitution.

Certes, « le progrès, toujours technique, dans nos sociétés industrielles, ne s'est jamais réalisé sans atteintes inédites à l'ordre public ». Certes, à son époque, Victor Hugo avait dit de l'apparition de l'imprimerie qu'il s'agissait de « la révolution mère » de « la pensée humaine » . Dans une même logique de mise à disposition de la pensée humaine, en un clic, l'Internet est lui aussi devenu une révolution. À la différence que ce dernier est plus qu'un média : il est un facteur de démocratie. Il apporte plus qu'une nouvelle forme pour nos idées ; il les rend interactives. Il ne révolutionne pas seulement la communication de ces idées ; il redéfinit leur conception en réseau. Et le développement numérique a ceci de différent qu'en modifiant le visage de notre démocratie, il modifie aussi celui de notre République. L'e-démocratie impose une réflexion que n'imposaient certes pas le téléphone, la radio ou bien la télévision sous la IIIe République. À ce titre, le constituant ne pourrait, à long terme, rester indifférent à la révolution numérique sans apparaître, finalement, indifférent à la démocratie.

Mais, pas plus que la Cohabitation, par exemple, il n'impose de changer de Pacte social. La percée des « acteurs participatifs » et des citoyens, portée par l'environnement numérique, crée une normativité « dialoguée », désintermédiée, « communautarisée ». Par conséquent, « la société de l'information apparaît comme inséparable de la démocratie dont tes valeurs forment, avec les siennes, un socle commun et qu'elle peut contribuer à consolider, en renforçant le lien social ». Ce lien social étant redéfini à l'échelle universelle, il en résulte que, pour protéger le citoyen dans l'univers numérique, la Constitution doit encadrer les enjeux nouveaux de la subsidiarité normative. Stigmatisée par le titre XV de la Constitution, cette quatrième et dernière mission constituante replacerait enfin l'individu au centre du processus normatif et au centre de la démocratie, que le citoyen inscrive son action dans l'État, dans l'Union européenne, ou sur le réseau universel. L'organisation des systèmes de droit subsidiaire rappelle dès à présent que « l'individu placé au centre de la société acceptera d'autant mieux la norme qu'elle aura été prise par le niveau décisionnel qui lui est le plus proche » ou au niveau qui semble, techniquement, le plus compétent. Pour autant, la démocratie électronique n'impose pas une VIe République. Certes, le réseau électronique est un « média polymorphe, l'instrument moderne capable de révolutionner le rapport gouvernés-gouvernants » . Mais il exige simplement le basculement d'une représentation pyramidale de la Constitution à une représentation en réseau. »

Marie-Charlotte Roques-Bonnet, Le droit peut-il ignorer la révolution numérique.




mardi, novembre 27, 2012

Le B'naï B'rith à Hollywood





Larry Hagman, décédé le 23 novembre 2012, qui interprétait le rôle de J.R. Ewings dans la fameuse série Dallas était proche d'une loge maçonnique exclusivement réservée aux Juifs, le B’naï B’rith. Proximité que partage un autre comédien, le président de la commission européenne José Manuel Barroso (invité spécial du VIe congrès de cette obédience sioniste).

Le B'naï B'rith à Hollywood

« Dès les années trente, le B'naï B'rith avait créé des « loges professionnelles » dans les secteurs où l'Ordre disposait d'une implantation suffisante ou souhaitait en disposer d'une. Dès 1927, le B'naï B'rith avait ainsi signé un accord avec le principal syndicat de production et de distribution de films américains, la Motion Picture Producers and Distributors of America. Le prétexte en fut le film Le Roi des rois de Cecil B. De Mille, qui raconte la vie de Jésus. Alfred M. Cohen, président à l'époque du B'naï B'rith, obtint du célèbre cinéaste qu'il rectifie divers passages et modifie certaines scènes, de manière à « corriger » la fiction, en particulier le passage sur la Passion du Christ, afin de dédouaner de toute responsabilité les juifs. Il fut obtenu en outre que le film ne serait pas diffusé « dans les pays européens ou dans les communautés dans lesquels le jugement du Conseil des sages (le Sanhédrin) pourrait créer des sentiments anti Juifs, et là non plus où il risquerait d'être la cause de désordre, en raison du sujet du film ». Le B'naï B'rith créa rapidement, à l'image des organisations maçonniques, sa propre Fraternelle du cinéma, qui regroupa tous les Frères dans cette profession, des acteurs aux cinéastes, des producteurs aux distributeurs, des scénaristes aux techniciens. La fine fleur du cinéma s'y retrouva, avec des hommes aussi puissants qu'Alfred W. Schwalberg, président de Paramount Pictures, Barney Balaban, président de la firme Paramount, ou Harry Goldberg, de la Warner Brothers. Dans les années 1925-1935, cette Fraternelle était déjà si puissante que Will Hays, surnommé " Le Tsar du cinéma ", invita le président du B'naï B'rith, Alfred M. Cohen (juriste, élu sénateur en 1896, à la tête du B'naï B'rith de 1925 à 1938), aux studios de production de New York afin de lui demander de devenir son conseiller en filmographie, de manière à surveiller tous les scénarios en rapport plus ou moins direct avec le judaïsme.

La Loge fut enregistrée auprès du B'naï B'rith le 16 novembre 1939 sous le numéro distinctif 1 366. Elle comprenait alors environ cent cinquante Frères fondateurs. Sous l'influence de Schwalberg, qui en fut le premier président, la Loge compta dans les années quarante plus de 1 600 Frères (acteurs, réalisateurs, producteurs, scénaristes, etc.) qui exercèrent une influence certaine sur nombre des films de cette époque, en particulier durant la Seconde Guerre mondiale. Dans les années soixante, la Loge perdit de son importance, en raison surtout du fait qu'elle demeurait réservée aux hommes. En 1974, son nouveau président, Herbert Morgan, la transforma en Loge mixte, la Cinema Unit 6 000. Elle retrouva alors une nouvelle vigueur. En 1977, ce chapitre fusionna avec la Loge Radio-Télévision, pour devenir l'actuelle Cinema-Radio-TV Unit 6 000, qui regroupe tous les membres du B'naï B'rith influents dans les médias, les spectacles et le cinéma (y compris les critiques de cinéma), afin de leur permettre de mieux coordonner leurs projets. Comme le dit l'un de ses anciens présidents, Ted Lazarus, cette Loge donne à ses membres « une raison pour identifier la judéité avec un lien professionnel ».

Dans les soirées de bienfaisance du B'naï B'rith ou dans les spots publicitaires (destinés à ramasser des fonds) de sa filiale, la Ligue Anti-Diffamation (A.D.L. ), interviennent des acteurs célèbres, membres de la Loge 6 000 ou de l'A.D.L., comme Larry Hagman, qui interprète J.R. Ewings dans la fameuse série Dallas. Dans le spot, Hagman, jouant sur son image de « méchant » demande aux téléspectateurs de se méfier dans la vie des « méchants », et d'aider les « bons » (c'est-à-dire l'A.D.L.) à gagner le bon combat. On peut aussi citer le héros de la série Hooker, William Shatner (ex-capitaine Kirk de Star Trek), ou Leonard Nimrod, le célèbre Monsieur Spock de La Guerre des étoiles (Star Trek).

Dès 1946, la filiale spécialisée du B'naï B'rith, l'A.D.L., diffusait son programme quotidien sur 216 radios. Ce chiffre a au moins doublé depuis cette date. De manière significative, le président national de l'A.D.L. fut d'ailleurs dans les années soixante Dore Schary, un célèbre scénariste et producteur de cinéma d'Hollywood. Une série de prix Dore Schary « pour les relations humaines " sont désormais décernés chaque année, depuis 1983, par l'A.D.L. A l'instar du B'naï B'rith, l'A.D.L. influence également les productions cinématographiques, telle la série We, the people, dans les années cinquante.

A l'occasion, l'A.D.L. et le B'naï B'rith lancent de grandes campagnes, comme lors de la diffusion sur les réseaux américains du « docu-drama » Holocauste, où la fiction était intimement mêlée à la réalité historique, sans que l'on puisse vraiment distinguer l'une de l'autre. A l'occasion de la diffusion de cette série, du 16 au 19 avril 1978, qui devait être regardée par plus de 120 millions d'Américains, le B'naï B'rith envoya à l'ensemble des membres du Sénat et de la Chambre des représentants l'intégralité du scénario, et diffusa un supplément de seize pages ( The Record) à onze millions d'exemplaires, principalement auprès des écoles. Un Guide du spectateur d'Holocauste fut également publié par la chaîne N.B.C., en liaison avec le Comité juif américain, contrôlé par le B'naï B'rith.

Le B'naï B'rith a également été à l'origine d'un genre nouveau, amplement relayé par les réseaux de la planète, le film « blanc terroriste », à base de savants désaxés, de nazis plus vrais que nature et autres skinheads, réalisé à partir d'enquêtes et de rapports de l'A.D.L. On peut citer Into the Homeland (1987), qui met en scène des chrétiens fondamentalistes opposés à l'impôt sur le revenu, réalisé à partir d'un rapport spécial de l'A.D.L. publié en 1986 et intitulé Les fermiers américains et les extrémistes. Autres exemples, les « docu-dramas néo-nazis » comme Trahis, Les Skinheads, La Deuxième montée de la haine, Dead Bang ou Nous saluons avec orgueil, qui s'inspirent directement des rapports de l'A.D.L. Rasés pour la bataille : les cibles des skinheads (1987) et La Jeunesse et la violence : la menace grandissante des skinheads américains néo-nazis (1988).

C'est sans doute cette volonté pédagogique qui a amené en 1982 la Fondation européenne de la Ligue Anti-Diffamation (A.D.L.E.F.), peu après sa création en Europe, à lancer en 1982, en liaison avec le Centre pédagogique juif de Paris, un vaste programme audiovisuel destiné aux écoles françaises pour être utilisé dans les programmes scolaires. Trois films devaient être diffusés dans un premier temps, sur les thèmes suivants : les stéréotypes, les boucs émissaires, le mythe de la race supérieure. »

Emmanuel Ratier, Mystère et secrets du B’naï B’rith.


Mystère et secrets du B’naï B’rith

Le B'naï B'rith, qui veut dire « Fils de l'Alliance » en hébreu, a été fondé aux Etats-Unis en 1843. Exclusivement réservé aux israélites, il comprend aujourd'hui plus de 500 000 Frères et Sœurs dans une cinquantaine de pays. L'élite internationale des diverses communautés juives, de Sigmund Freud à Albert Einstein, en est ou en a été membre. Il s'agit donc de la plus ancienne, de la plus vaste et, sans doute, de la plus influente organisation juive internationale. C'est le B'naÏ B'rith qui a, par exemple, obtenu la reconnaissance d'Israël par le président américain Harry Truman. C'est également le B'naï B'rith qui a obtenu que l'Eglise catholique change le contenu de son enseignement bimillénaire à propos du judaïsme.

En France, où la communauté juive est la plus importante d'Europe, le B'naï B'rith, sortant de sa réserve traditionnelle, a pris, ces dix dernières années, des positions politiques publiques hostiles au renouveau des idées nationales. Devant les assemblées du B'naÏ B'rith, les hommes politiques, de droite comme de gauche, se sont notamment engagés à ne s'allier en aucun cas avec le Front national. C'est le fameux « serment des B'naï B'rith ». Disposant de nombreux soutiens dans la classe politique et dans le milieu intellectuel, les Fils de l'Alliance, qui se présentent comme les précurseurs des organisations humanitaires, ont également œuvré pour l'adoption de la loi Fabius-Gayssot.

Le B'naÏ B'rith, en France comme à l'étranger, est pourtant totalement inconnu du grand public. Calquée sur le modèle des organisations maçonniques, cette association de solidarité a en effet toujours cultivé la discrétion. Mystères et Secrets du B'naï B'rith est la première enquête indépendante qui lui ait jamais été consacrée dans le monde. Comprenant de très nombreux documents inédits, ce livre explosif répondra aux questions que tout citoyen est en droit de se poser.













lundi, novembre 26, 2012

Le pouvoir secret contre le peuple




Quelques mois après l'élection de François Hollande, les Français savent que l'idéal socialiste n'est plus porté par les politiciens professionnels de gauche.

Le seul objectif de la classe dominante, de droite et de gauche, est d'accroître son pouvoir. Pour ce faire, les puissants s'acoquinent et complotent contre le peuple dans des sociétés secrètes ou des clubs très fermés comme Le Siècle (voir la vidéo ci-dessus et lire le livre d'Emmanuel Ratier, Au cœur du pouvoir. Enquête sur le club le plus puissant de France, réédité l'année dernière).

André Frossard se souvient du socialisme de son enfance, durant les années 1920 :

« Lorsque l'on eut coupé mes anglaises pour m'apprendre à lire, le premier livre que m'offrirent mes parents après le Roman de Renart fut un ouvrage à couverture rouge, de l'épaisseur d'un dictionnaire et intitulé Petit-Pierre sera socialiste.

Pour autant qu'il m'en souvienne, c'était une variante idéologique du Tour de France de deux enfants, rédigée de manière à rendre familières aux petits, dans le langage approprié, les données principales de la pensée marxiste. Petit-Pierre, cheminant et questionnant, prenait connaissance des réalités sociales, des servitudes de la condition prolétarienne et des injustices d'une société fondée sur l'exploitation des humbles par une classe favorisée, détentrice des moyens de production et d'échange que sont la terre, les outils, les machines ou l'argent, et qui aspirait tout le profit du travail d'autrui. Ce profit lui fournissant de nouveaux moyens d'acquérir, elle s'enrichissait sans cesse tandis que se multipliaient les pauvres, qui s'appauvrissaient encore.

Il en résultait entre la classe des possédants et celle des démunis un état de tension permanente ou de « lutte de classes » aboutissant périodiquement à des révoltes que les lois n'avaient d'autre fin que d'empêcher, d'interdire ou de réprimer. De tout temps les institutions avaient été conçues par les privilégiés pour perpétuer leurs privilèges ; la morale était chargée de lier les consciences à l'ordre établi contre la justice, méprisée par le capitalisme et ajournée par la religion elle-même.

Mais Petit-Pierre apprenait bientôt qu'il existait un remède à ce mal immense et vieux comme l'histoire. La socialisation des moyens de production et d'échange modifierait radicalement les rapports humains en les purifiant de tout ce qu'il y avait en eux d'inique et de pernicieux. Ils ne s'établiraient plus de maître à esclave, d'oppresseur à opprimé, mais d'homme à homme dans l'égalité parfaite d'une désappropriation générale prononcée par la loi au bénéfice de la collectivité. Sur les biens produits par les travailleurs, la communauté prélèverait de quoi donner « à chacun selon son travail », en attendant d'être assez riche pour pouvoir donner « à chacun selon ses besoins ». L'avidité, la volonté d'accaparement et de domination, ne trouvant plus de soutien et encore moins d'encouragement dans la société nouvelle, périraient d'inanition; les antagonismes économiques et sociaux ayant disparu avec ce qui les rendait inévitables, la guerre deviendrait sans objet et disparaîtrait de la surface de la terre. Les anciens possédants réduits en quelque sorte à l'équité s'humaniseraient d'autant, cependant que les travailleurs recouvreraient leur dignité avec la pleine possession de leur propre personne. La morale ne serait plus ce code diversement pénal de la résignation qu'elle était jusqu'alors, et les derniers pans de la construction religieuse, privée de ses points d'appui, s'effondreraient d'eux-mêmes. Les hommes sauraient enfin le goût de la justice et de la paix. La science se chargerait du reste.

Je ne prétends pas résumer le marxisme en une page, et il est probable que je viens de mêler le souvenir de ses premières leçons à celui de mon gros livre rouge. Quoi qu'il en soit, Petit-Pierre devenait socialiste. Comme il était sérieux et gentil, je le devins aussi. »

André Frossard, Dieu existe, je l'ai rencontré.



Histoire de Petit Pierre sera socialiste (1913)


Le Siècle est la matrice de la pensée unique

« Il y a une idéologie, dit Emmanuel Ratier, c’est celle du libéralisme mondialisé. Comme l’a expliqué Laurent Joffrin, directeur du Nouvel Observateur, qui a démissionné avec fracas du Siècle il y a environ un mois, Le Siècle est véritablement la section française de l’hyper-classe ou de la super-classe mondialisée. Il correspond à cette expression de Samuel Huntington : « la super-classe née de la mondialisation ». De même Jacques Julliard, ancien membre de la Commission trilatérale, écrit assez courageusement : « Le Siècle, le club de cette superclasse dirigeante (…) Dans ce milieu fermé où les socialistes ont leur place à côté des gros bataillons de la droite française, fermente l’idéologie de la classe dominante : modernisme économique, bien-pensance sociale et culturelles, conformisme économique, respect absolu de la puissance de l’argent. » Hormis qu’il y a largement autant d’oligarques de gauche que de droite au Siècle, cette description est parfaitement exacte : il y a bien une idéologie… mais qui ne se revendique pas en tant que telle. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que tous les membres du Siècle ne sont pas égaux et que le pouvoir est passé d’un groupe à un autre à mesure que le capital se restructurait en France, en Europe et dans le monde. On est donc passé, en 60 ans, du primat des politiques (IVe République) à celui des industriels (Pompidou), puis aux technocrates (Giscard d’Estaing et les débuts de François Mitterrand), puis aux banques (Bérégovoy) et enfin à la finance mondialisée (Chirac, Sarkozy). Aujourd’hui, ce sont les financiers qui contrôlent le Siècle et dictent leurs règles aux politiques. Comme le dit Julliard, « il existe, derrière les apparences successives des combinaisons ministérielles, un gouvernement de facto, un gouvernement invisible des élites financières et institutionnelles qui, à défaut de dicter sa loi, fournit la pensée et inspire l’action des élites dirigeantes françaises. »

Je ne veux pas être trop long, mais Le Siècle est un endroit, un laboratoire, où se décident beaucoup de choses. On en a des éléments dans les mémoires d’anciens membres, au détour d’articles, etc. Les conversations étant secrètes, il est toujours difficile d’apporter la preuve de ce pur affairisme mais plusieurs membres me l’ont confirmé tout comme diverses fuites, le système de recrutement, etc. La plupart des membres ne sont pas recrutés pour leurs qualités propres mais pour les fonctions qu’ils occupent. C’est le libéralisme antisocial pur et dur qui ne rêve que d’une chose : que les classes populaires françaises travaillent pour 2 euros par jour comme les Chinois aujourd’hui et que l’oligarchie, qui les exploite, engrange ses bénéfices colossaux dans des paradis fiscaux. » 




vendredi, novembre 23, 2012

« 0+0 = la tête à TOTO »





Les nouvelles mathématiques des mélanges chimiques

Tout indique que l'imprégnation des femmes enceintes par les pesticides est généralisée et qu'elle concerne autant les zones urbaines que les régions rurales. Ainsi une étude réalisée dans les années 2000 en Bretagne (sur une cohorte dite « Pélagie ») a révélé la présence d'un total de 52 molécules dans les urines de 546 femmes enceintes, dont 12 appartenaient à la classe des triazines (comme l'atrazine), 32 à celle des organophosphorés (comme le chlorpyriphos et le chlorpyriphos-méthyl), 6 à la classe des amides et 2 à celle des carbamates. « Les résidus de pesticides sont généralement multiples, soulignaient les auteurs en 2009 ; et leurs impacts, individuels ou conjoints, sur le fœtus et son développement sont encore incertains dans la littérature épidémiologique. Ils seront évalués prochainement dans la cohorte Pélagie. »

Si la « charge chimique corporelle » des femmes enceintes et des bébés est particulièrement préoccupante, il en est de même pour les enfants, dont le taux d'imprégnation par les pesticides est proportionnellement beaucoup plus élevé que celui des adultes. C'est ce que montrent de nombreuses études (qu'il n'est pas possible de toutes énumérer), comme celle réalisée dans le Minnesota, une région d'agriculture intensive comprenant aussi d'importantes zones urbaines : publiée en 2001, elle a révélé que 93 % des échantillons urinaires prélevés sur 90 enfants ruraux et urbains présentaient un cocktail de résidus d'atrazine, de malathion, de carbaryl et de chlorpyriphos. Comme on l'aura remarqué, le fameux chlorpyriphos revient avec la régularité d'une pendule dans tous les études de biomonitoring : d'après le deuxième rapport du CDC, il est l'un des pesticides dont le taux de résidus dépasse régulièrement les normes autorisées, particulièrement chez les enfants testés. Dans un document qui commente les résultats de ce rapport, Pesticides Action Network (PAN) souligne que « s'il y a quelqu'un qui est responsable de la présence du chlorpyriphos dans nos organismes, c'est bien Dow Chemical, qui a développé et commercialisé en premier le pesticide [...] et continue de le produire et de le promouvoir aux États-Unis et internationalement, malgré des preuves solides qu'il a un impact significatif sur la santé publique ». Et l'association d'en appeler à la « mise en cause des firmes chimiques » qui polluent nos organismes à travers nos assiettes, et mettent particulièrement en danger la santé de nos enfants.

Si l'on en croit les résultats d'une étude publiée en décembre 2010 par Générations futures (l'ex-MRDGF), les responsables potentiels sont nombreux . L'association a en effet fait analyser l'alimentation quotidienne d'un enfant d'une dizaine d'années, comprenant trois repas types qui suivent les recommandations officielles — cinq fruits et légumes frais, trois produits laitiers et 1,5 litre d'eau par jour — et un encas (avec des friandises). Ainsi que l'écrit Le Monde.fr, « le bilan est accablant » : « Cent vingt-huit résidus, quatre-vingt-une substances chimiques, dont quarante-deux sont classées cancérigènes possibles ou probables et cinq substances classées cancérigènes certaines ainsi que trente-sept substances susceptibles d'agir comme perturbateurs endocriniens (PE). [...] Pour le petit déjeuner, le beurre et le thé au lait contiennent à eux seuls plus d'une dizaine de résidus cancérigènes possibles et trois avérés comme des cancérigènes certains, ainsi que près d'une vingtaine de résidus susceptibles de perturber le système hormonal. Le steak haché, le thon en boîte, et même la baguette de pain et le chewing-gum, étaient truffés de pesticides et autres substances chimiques. Dans l'eau du robinet, les analyses ont révélé la présence de nitrates et de chloroforme. Mais c'est le steak de saumon prévu pour le dîner qui s'est révélé le plus "riche", avec trente-quatre résidus chimiques détectés. »

Ainsi que l'a expliqué François Veillerette, le fondateur de Générations futures, au quotidien du soir, « les effets de synergie probables induits par l'ingestion de tels cocktails contaminants ne sont pas pris en compte et le risque final pour le consommateur est probablement très sous-estimé. Actuellement, nous ne savons à peu près rien de l'impact des cocktails chimiques ingérés par voie alimentaire ».

Les « nouvelles mathématiques des mélanges : 0 + 0 + 0 = 60 »

« Je pense que nous avons été extrêmement naïfs dans nos études et système de réglementation en ne nous intéressant qu'à un seul produit chimique à la fois, alors qu'aucun d'entre nous n'est exposé à une seule substance, m'a dit Linda Birnbaum lorsque je l'ai rencontrée dans son bureau du NIEHS. Je pense que nous sommes passés ainsi complètement à côté d'effets qui peuvent se produire. C'est particulièrement vrai pour les hormones naturelles et synthétiques. C'est pourquoi le défi que nous devons maintenant relever, c'est de comprendre et évaluer les effets que peuvent provoquer les mixtures chimiques dans lesquelles nous vivons. Mais, malheureusement, il y a très peu de laboratoires qui travaillent là-dessus... »

Une fois n'est pas coutume, les laboratoires qui font référence dans le domaine de la toxicologie des mélanges chimiques sont européens, en l'occurrence danois et britannique. Le premier est dirigé par Ulla Flass, une toxicologue qui travaille à l'Institut danois de la recherche alimentaire et vétérinaire, situé à Soborg, dans la banlieue de Copenhague. Je l'ai rencontrée un jour enneigé de janvier 2010. Avant de commencer notre entretien, elle m'a fait visiter sa « ménagerie », une pièce d'un blanc clinique où sont installées les cages des rats wistar qu'elle utilise pour ses expériences. Grâce au soutien de l'Union européenne et en collaboration avec le centre de toxicologie de l'université de Londres, elle a conduit une série d'études visant à tester les effets des mélanges de substances chimiques ayant une action antiandrogène sur des rats mâles exposés in utero. Dans la première d'entre elles, le cocktail comprenait deux fongicides, la vinclozoline et le procymidone, et la flutamide, un médicament prescrit pour traiter le cancer de la prostate.

« Qu'est-ce qu'un antiandrogène ? ai-je demandé à la toxicologue danoise.

C'est une substance chimique qui affecte l'action des androgènes, c'est-à-dire des hormones masculines comme la testostérone, m'a-t-elle répondu. Or, les hormones masculines sont capitales pour la différenciation sexuelle qui, chez les humains, a lieu à la septième semaine de grossesse. Ce sont elles qui permettent au modèle de base, qui est féminin, de se développer en un organisme masculin. Donc, les antiandrogènes peuvent faire dérailler le processus et empêcher le mâle de se développer correctement.

Comment avez-vous procédé pour votre étude ?

Nous avons d'abord observé les effets de chaque molécule séparément en essayant de trouver, pour chacune d'elles, une dose très basse qui ne provoquait aucun effet. Je vous rappelle que notre objectif était de mesurer l'effet potentiel des mélanges, il était donc particulièrement intéressant de voir si trois molécules qui individuellement n'avaient pas d'effet pouvaient en avoir une fois mélangées. Et ce fut exactement les résultats que nous avons obtenus. Prenons, par exemple, ce que nous appelons la "distance anogénitale", qui mesure la distance entre l'anus et les parties génitales de l'animal. Elle est deux fois plus longue chez le mâle que chez la femelle, et c'est précisément dû au rôle des androgènes pendant le développement fœtal. Si elle est plus courte chez les mâles, c'est un indicateur de l'hypospadias, une malformation congénitale grave des organes de reproduction masculins. Quand nous avons testé chaque produit séparément, nous n'avons constaté aucun effet, ni aucune malformation. Mais, quand nous avons exposé les fœtus mâles à un mélange des trois substances, nous avons observé que 60 % d'entre eux développaient plus tard un hypospadias, ainsi que des malformations graves de leurs organes sexuels. Parmi les malformations que nous avons observées, il y avait notamment la présence d'une ouverture vaginale chez certains mâles qui avaient, par ailleurs, des testicules. En fait, ils étaient sexuellement dans l'entre-deux-sexes, comme des hermaphrodites. »

Et la toxicologue de conclure par cette phrase que je n'oublierai jamais : « Nous devons apprendre de nouvelles mathématiques quand nous travaillons sur la toxicologie des mélanges, parce que ce que disent nos résultats, c'est que 0 + 0 + 0 fait 60 % de malformations...

Comment est-ce possible ?

En fait, nous assistons à un double phénomène : les effets s'additionnent et ils entrent en synergie pour décupler, m'a expliqué Ulla Hass.

C'est effrayant ce que vous dites, surtout quand on sait que chaque Européen a ce que l'on appelle une "charge chimique corporelle" ! Ce que vous avez observé chez les rats pourrait-il aussi se produire dans nos organismes ?

En fait, le gros problème, c'est que nous n'en savons rien, a soupiré Ulla Hass, qui a alors fait la même remarque que son collègue Tyrone Hayes. Il est très difficile de comprendre pourquoi cela n'a pas été pris en compte plus tôt. Quand vous allez à la pharmacie pour acheter un médicament, il est écrit sur le mode d'emploi qu'il faut faire attention si vous prenez d'autres médicaments, car il peut y avoir une combinaison d'effets. C'est pourquoi il n'est pas surprenant que l'on ait le même phénomène avec des polluants chimiques.

Pensez-vous que les toxicologues doivent complètement revoir leur manière de fonctionner ?

Il est clair que pour pouvoir évaluer la toxicité des mélanges chimiques, et tout particulièrement celle des perturbateurs endocriniens, il faut sortir du modèle qu'on nous a enseigné, qui veut qu'a une faible dose on ait un petit effet et à une forte dose un gros effet, avec une courbe linéaire dose-effet. C'est un modèle simple et rassurant, mais qui, pour de nombreuses molécules chimiques, ne sert à rien. En revanche, il faudrait développer des outils comme ceux mis en place par le laboratoire d'Andreas Kortenkamp, à Londres, avec qui mon laboratoire collabore. Après avoir entré toutes les caractéristiques chimiques des trois substances que nous avons testées dans un système informatique, il a pu prédire, grâce à un logiciel spécifique, quels allaient être les effets de l'addition et de la synergie des molécules. C'est une piste très intéressante pour l'avenir... »

Marie-Monique Robin, Notre poison quotidien.


Notre Poison Quotidien est une grande enquête de Marie-Monique Robin (Le monde selon Monsanto) qui démontre de manière implacable comment l'industrie chimique empoisonne nos assiettes. Durée : 1 heure 55




Notre poison quotidien

Au cours des trente dernières années, le taux d'incidence du cancer a augmenté de 40 % (déduction faite du facteur de vieillissement de la population). Durant cette période, la progression des leucémies et des tumeurs cérébrales chez l'enfant a été d'environ 2 % par an. Et on constate une évolution similaire pour les maladies neurologiques (Parkinson et Alzheimer) et auto-immunes, ou pour les dysfonctionnements de la reproduction. Comment expliquer cette inquiétante épidémie, qui frappe particulièrement les pays dits « développés » ?

C'est à cette question que répond Marie-Monique Robin dans ce nouveau livre choc, fruit d'une enquête de deux ans en Amérique du Nord, en Asie et en Europe. S'appuyant sur de nombreuses études scientifiques, mais aussi sur les témoignages de chercheurs et de représentants des agences de réglementation, elle montre que la cause principale de l'épidémie est d'origine environnementale : elle est due aux dizaines de milliers de molécules chimiques qui ont envahi notre quotidien et notre alimentation depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Pour cela, l'auteure retrace le mode de production des aliments, depuis le champ du paysan (pesticides) jusqu'à notre assiette (additifs et plastiques alimentaires). Elle décortique le système d'évaluation et d'homologation des produits chimiques, à travers les exemples des pesticides, de l'aspartame ou du bisphénol A, et montre qu'il est totalement défaillant et inadapté. Surtout, elle raconte les pressions et les manipulations de l'industrie chimique pour maintenir sur le marché des produits hautement toxiques.



Marie-Monique Robin, journaliste et réalisatrice, est lauréate du Prix Albert-Londres (1995). Elle a réalisé de nombreux documentaires - couronnés par une trentaine de prix inter-nationaux - et reportages tournés en Amérique latine, Afrique, Europe et Asie. Elle est aussi l'auteure de plusieurs ouvrages, dont Voleurs d'organes, enquête sur un trafic (Bayard), Les 100 photos du siècle (Le Chêne/Taschen), Le Sixième Sens, science et paranormal (Le Chêne), 100 photos du XXIe siècle (La Martinière). À La Découverte, elle a déjà publié : Escadrons de la mort, l'école française (2004, 2008), L'École du soupçon (2006) et, en coédition avec Arte Éditions, le best-seller Le Monde selon Monsanto (2008, 2009).

Blog de Marie-Monique Robin :

jeudi, novembre 22, 2012

Mourir en bonne santé




« Mourir en bonne santé c'est le vœu le plus cher de tout bon vivant bien portant. »
Pierre Dac



J'ai été et je suis encore, je crois, un homme vigoureux avec, mes amis me le disent tous, une grande capacité de résistance et beaucoup d 'énergie. La guerre me l'a à moi-même prouvé et écrivant Au Nom de tous les Miens, revivant les épisodes tragiques et violents que j'avais traversés, je m'étonnais moi-même d'avoir eu assez de force pour survivre. Mes parents m'avaient légué un magnifique « capital-santé » et mon père, les traditions de mon peuple qui m'avaient donné un « capital-énergie psychique ». Chacun de nous possède cet héritage plus ou moins important mais que trop souvent on gaspille. 

Après la guerre, quand j'ai rejoint les États-Unis, j'ai dû à nouveau me lancer dans de dures batailles que j'ai racontées aussi. Ici je veux dire que j'ai senti jour après jour que ma santé, mon énergie psychique s'épuisaient. Je vivais mal dans la grande ville agitée et comme c'est souvent le cas, pour résister à la fatigue, à l'usure nerveuse, je mangeais trop, je buvais trop, sans même réfléchir à ce que j'avalais. Je choisissais les plats les plus épicés, les viandes les plus rouges. J'avais besoin, imaginais-je, d'énergie, de force. Alors les digestions étaient lourdes. Je buvais des excitants pour me réveiller : alcool, café.

Un jour, quand j'ai connu ma femme, j'ai pris conscience de ce gaspillage que j'étais en train d'accomplir. Gaspillage irrémédiable puisque c'était celui de ma santé. Ma femme, elle aussi, était prise dans le même engrenage : vie trop rapide, ville trop dure, repas hâtivement avalés et le travail immédiatement après, nourriture choisie parce que nous croyions qu'elle nous apportait des calories que nous brûlions dans notre course. Quand nous nous sommes connus nous étions l'un et l'autre à ce moment où les jeux se décident. Nous avons eu de la chance. Je suis entré en clinique. J'ai commencé sous surveillance médicale un jeûne de trente-huit jours et j'ai maigri de 17 kilos. Ma femme a, elle aussi, suivi ce même régime. Et, alors que nous ne réussissions pas à avoir d'enfants, elle s'est trouvée rapidement enceinte.

Plus tard, dans ma maison, j'ai vécu avec la préoccupation de donner aux miens un « capital-santé-énergie-psychique » qui serait le plus beau des héritages. J'ai alors beaucoup réfléchi aux problèmes de l'alimentation de l'homme. J'ai lu les ouvrages de l'école hygiéniste américaine du Dr Herbert McGolphin Shelton et je me suis décidé à appliquer une stricte discipline alimentaire. J'ai compris que ce qui compte, ce sont les COMBINAISONS d'aliments au cours d'un repas. J'ai compris que la plupart des maladies sont moins provoquées par des microbes que par les toxines qui sont dans notre corps. Et ces toxines sont souvent le résultat d'une très mauvaise alimentation. Par la suite, après mon drame, j'ai été contraint de partiellement abandonner cette règle de vie.

Je ne veux pas la défendre ici. Elle est trop stricte pour vous — pour moi maintenant — parce que vous travaillez et vivez dans la ville, qu'il est difficile d'adopter un régime parfait auquel je crois, mais dont je sais qu'il est très malaisé de l'appliquer pour des raisons pratiques, financières et sociales. […]

J'ai voulu que vous sachiez que j'ai éprouvé dans ma chair, expérimenté, la suralimentation et le jeûne, que je sais la satisfaction que donne un bon repas, un alcool qui réchauffe. Tout cela paraît procurer la gaieté mais je connais aussi l'agilité de l'esprit, la légèreté, le sentiment de puissance intellectuelle et d'énergie qu'apporte une alimentation contrôlée, la purification de soi que représente un jeûne.

J'ai choisi entre la satisfaction d'une alimentation selon mon goût, selon l'humeur ou la mode et le plaisir vrai, profond, durable d'une alimentation réfléchie. J'en ai tiré profit. Je voudrais que vous partagiez cette expérience. Je voudrais réussir à vous convaincre ou à confirmer vos choix. […]

LE PREMIER PRINCIPE à appliquer est simple en apparence : NE JAMAIS MANGER QUE SI ON A VRAIMENT FAIM. Simple, pensez-vous. Mais réfléchissez : laissez-vous la faim vous prendre, ne consommez-vous des aliments que si elle est présente en vous, joyeuse de savoir qu'elle va être satisfaite ? Le plus souvent, il vous suffit de vous observer, de regarder autour de vous, pour découvrir que manger ne résulte pas seulement de la faim mais de l'habitude, du plaisir qu'il y a à consommer des aliments qui sont préparés, présentés pour exciter votre appétit.

Or, l'appétit n'est pas la faim. La faim — j'en ai connu d'extrêmes — c'est le vrai désir, le vrai besoin. C'est, en soi, une sorte de joie qui est présente dans le corps, une joie naturelle qui sait qu'elle va être satisfaite. L'appétit ce n'est que la bouche satisfaite. Écoutez-moi : je ne veux pas que vous vous disiez : « Mais à quoi bon vivre si peu à peu nos plaisirs disparaissent, s'il faut se refuser le plaisir de l'appétit, de la dégustation d'un mets de qualité. La vie n'est pas faite que de ce qui est seulement nécessaire. Le plaisir, celui de manger, cela compte dans une existence. »

Vous avez raison de penser cela. Il faut simplement que vous ayez conscience que vous devez établir un contrôle sur votre alimentation. N'oubliez pas que dans notre monde tout est tourné vers la vente. On cherche à aiguiser votre appétit, votre soif. On fait naître vos besoins, parfois de faux besoins, pour vous transformer en consommateurs, en acheteurs réguliers.

Ne vous laissez pas transformer en « machine consommatrice ». Ne soyez pas de simples appendices d'une chaîne qui vend et qui ne se préoccupe pas de savoir si ce qu'elle vous force à consommer est bon pour vous.

Prenez du plaisir Mais sachez où est le vrai, le profond, le durable plaisir. Il est dans la simplicité, dans la vérité des aliments. Dans leur combinaison, car notre estomac est comme une usine chimique et certaines associations d'aliments provoquent des réactions favorables ou défavorables à l'organisme. Quel est celui d'entre vous qui sait — et quel médecin le lui a dit ? — qu'associer les féculents et les protéines dans le même repas provoque des toxiques et rend difficile la digestion ?

Ceci dit, sachez vous donner des fêtes, régulièrement, mais ne devenez pas des esclaves d'habitudes alimentaires qui vous sont néfastes. Or, selon les derniers avis médicaux, l'homme occidental mange — quantitativement — de trois à cinq fois plus qu'il n'a besoin. Son corps est surchargé en poids, en calories. Ce corps est transformé en usine d'élimination. Il y a des surplus, des déchets qui peu à peu s'accumulent dans lês artères, qui deviennent des graisses sur le corps et dans le sang.

Comment s'étonner alors de ces nouvelles maladies qui durcissent les artères, qui provoquent des tensions trop élevées ? L'homme soumis à une civilisation brutale qui le force à accélérer les rythmes de sa vie, « consomme », charge de calories sa machine, s'alourdit, cherche dans les plaisirs de la table la fuite et de bien faciles satisfactions.

Car vous savez bien que souvent l'angoisse et l'inquiétude vous poussent à consommer. Manger, boire, être avide : c'est notre façon d'échapper à ce qui nous tourmente. Et cela exprime trop souvent notre « grande peur de manquer », cette terreur qui vient peut-être du fond des âges ; alors nous mangeons. Alors nous croyons avoir faim et ce n'est que de l'appétit. Nous imaginons que la soif nous tenaille et ce n'est que notre habitude de boire un « apéritif ». Combien de mes amis, sans raison aucune, dès qu'ils trouvent un prétexte, se servent une boisson, veulent que, en acceptant de boire avec eux, on leur donne une occasion de boire encore. On parle des drogues dures et on a raison, mais combien d'entre nous qui se « droguent » sans même le savoir : cigarettes, boissons alcoolisées régulièrement consommées et aussi pilules de toutes sortes : somnifères, tranquillisants, aspirine !

Je veux vous aider à retrouver votre équilibre. Et, au fond de vous-même, vous savez bien que vous le pouvez. Il ne faut pas que vous cédiez à la pression des autres, des habitudes. Il faut que vous vous repreniez en main et que vous ayez conscience que votre vie se joue aussi à la façon dont vous mangez. A la manière dont vous associez les aliments dans un même repas. Car vous ne pouvez mêler dans votre estomac, l'eau et le feu.

Ne dites pas : cela est ridicule.

Ne dites pas : mais alors .1a vie n'est plus qu'une suite de continuelles attentions, il faut veiller à chaque instant de son existence, où est le plaisir de vivre ?

Ne dites pas : je préfère faire ce que je désire et tant pis pour les risques.

Réfléchissez. Il faut que vous réussissiez à ajouter de la « vie aux années » et non pas des « années à la vie » comme le disait le Dr Alexis Carrel. Et cela vaut que vous preniez des attentions, que vous soyez conscient des risques que vous courez quand, de façon régulière, vous faites des excès alimentaires. Il faut, c'est le DEUXIEME PRINCIPE, que vous vous leviez de table sans avoir cette impression d'étouffement satisfait que donne le repas surabondant. IL NE FAUT PAS QUE VOUS MANGIEZ A SATIETE, jusqu'à cette lourdeur que certains appellent le plaisir des bons repas et qui est si néfaste pour la santé. Il faut, TROISIEME PRINCIPE, que LE REPAS ne soit pas un moment sans importance, il FAUT QUE VOUS LE PRENIEZ DANS LE CALME. Mieux vaut parfois ne pas manger qu'avaler trop vite des aliments incertains. Il faut, QUATRIEME PRINCIPE, que LA DIGESTION qui exige une immense dépense d'énergie nerveuse SOIT ENTOUREE DE REPOS. Il faut que vous sachiez, CINQUIEME PRINCIPE, SAUTER UN REPAS si vous avez mangé abondamment au repas précédent. Il faut, SIXIEME PRINCIPE, que vous n'oubliiez jamais que l'homme a besoin de FRUITS et de LEGUMES VERTS et, si vous le pouvez, commencez votre journée par une consommation de fruits.


Martin Gray, Les forces de la vie.



mercredi, novembre 21, 2012

Vous allez adorer la fin du monde !





Ouragan dévastateur, invasion extra-terrestre ou virus destructeur : dès aujourd'hui, "Vous allez adorer la fin du monde !", promettent le bouquet Canalsat et la chaîne de science-fiction Syfy. Les partenaires lanceront vers midi une chaîne éphémère 100% fin du monde, destinée à disparaître le 21 décembre. La Chaîne de la Fin du Monde diffusera en un mois "plus de 35 films", des séries, des documentaires et un magazine hebdomadaire présenté par Justine Fraioli.

La chaîne, accessible aux abonnés Canalsat et Canal+, s'ouvrira sur le canal 18, a précisé à Sipa la société NBC Universal, dont dépend la chaîne du câble Syfy. Quatre soirées cinéma thématiques viendront rythmer le mois spécial Apocalypse. Une "Soirée Virus" ouvrira le bal le 21 novembre, suivie notamment de soirées "Catastrophes", "Seuls au monde" ou encore "Invasion extra-terrestre".

André Manoukian "apocalyptiquement rock".

Chaque vendredi, dès le 23 novembre, Justine Fraioli sera aux commandes du Magazine de la Fin du Monde : 90 minutes de "conseils et techniques de survie" pour "résister à l'Apocalypse à travers des sujets et enquêtes inédits", précise la chaîne dans un communiqué de presse. André Manoukian y tiendra sa propre rubrique, Apocalyptiquement rock, "pour savoir quelle chanson écouter au moment ultime", précise avec humour un communiqué de la chaîne. Parmi les invités déjà annoncés, l'écrivain Bernard Werber et l'astrologue Elizabeth Teissier.

Chaque week-end, la programmation laissera place aux séries Survivors de Adrian Hodges et Invasion de Shaun Cassidy. Les prime-time du jeudi seront quant à eux réservés aux mini-séries Tommyknockers et Le Fléau, deux adaptations des célèbres œuvres de Stephen King.

Pour coller aux supposées prédictions du calendrier Maya annonçant la fin du monde, la chaîne éphémère s'éteindra dans la soirée du vendredi 21 décembre. Dernier pas vers l'Apocalypse à 20h45 avec Bugarach : L'ultime prime-time, présenté par l'humoriste et chroniqueur Mathieu Madenian et le show man Thomas VDB.

Chaque nuit pendant l'interruption des programmes, un compte à rebours s'affichera sur les écrans. Jusqu'à ce que mort s'en suive...

Source :

mardi, novembre 20, 2012

Le Catholicisme face à l’homoconjugalité et l'homoparentalité


La double question de l'homoconjugalité et de l'homoparentalité déstabilise radicalement l'ordre socio-symbolique que le catholicisme a imprimé dans la culture de trois façons au moins.

— La première concerne la relativisation qu'elle opère des notions de «couple », de « mariage », et de « famille » reçues comme allant de soi dans notre société. Certes, Pierre Centlivres est fondé à souligner que l'anthropologie, loin de découvrir des lois universelles et invariantes qui gouverneraient, en leur principe, les rapports humains, « peut en revanche nous rendre attentifs à la très grande diversité des attitudes et des institutions qui organisent les relations entre les humains dans le monde ». « Elle permet ainsi, note-t-il, de relativiser des notions qui "vont sans dire", tels le mariage, la famille, l'amour même, ainsi que les rapports que ces notions ont — ou n'ont pas — entre elles : l'approche anthropologique fait éclater des entités qui sont en réalité des assemblages de valeurs et d'usages divers. » Mais cette relativisation anthropologique — elle-même «relativisée » par le puissant sentiment de supériorité que les sociétés occidentales ont d'elles-mêmes ! — opère de l'extérieur de notre propre société, en référence à des sociétés « différentes », mais lointaines, et aucunement menaçantes, en fin de compte, pour nos évidences partagées. La reconnaissance publique des couples homosexuels fait au contraire travailler cette relativisation à l'intérieur même de ces évidences. Elle fait voler en éclats la « naturalité » du couple hétérosexuel et de la « famille naturelle », et fait apparaître cette « naturalité » même pour ce qu'elle est : une construction sociale, politique et culturelle, qui a fourni au modèle catholique du mariage (longuement reconduit, sous une forme séculière, dans le droit civil) le dispositif de « sacralisation » (d'absolutisation) qui lui a permis de s'imposer comme la forme exclusive et universelle de l'institution du mariage.

— À ce pouvoir de déconstruction qui s'attache à la manifestation publique de l'existence d'une conjugalité homosexuelle, revendiquant d'être reconnue comme telle, s'ajoute une autre dimension qui touche à la « modernité » spécifique du couple homosexuel. Le couple homosexuel, dans la mesure même où il est complètement dépourvu de cette « évidence naturelle » que porte en elle-même la potentialité procréative (deux hommes, ou deux femmes, ne feront jamais un enfant ensemble), ne correspond, pour les deux personnes qui le constituent, à aucun destin inscrit dans leur physiologie. Il est tout entier, et exclusivement, du côté du désir et du choix d'un individu pour un autre. Le couple homosexuel pousse à la limite, si l'on peut dire, la définition moderne et même ultramoderne du lien conjugal comme pur consentement, continuellement renouvelable, qui vaut contrat entre deux sujets. On peut porter, sur cette contractualisation montante du lien conjugal, le regard que l'on veut : le problème ici n'est pas d'évaluer, mais d'identifier des tendances sociales. La reconnaissance des couples homosexuels s'inscrit dans une réorganisation globale de la conjugalité et du mariage, qui est une nouvelle donne de notre culture. Comme le souligne encore P. Centlivres, « dans l'Occident postmoderne, le mariage apparaît comme s'étant vidé de son "plein", peut-être trop plein : procréation, sexualité légitime, amour romantique, sociabilité conjugale sont disjoints. L'amour, après avoir intégré le mariage dans l'idéal des classes moyennes s'en sépare à nouveau dans de nombreux cas de figure ; il déborde le couple vers le multiple, le varié et l'exotique ; il se déterritorialise, en quête de l'exaltation de soi par la diversité, loin de l'attachement-contrainte. » Contrairement à ce qu'un courant catastrophiste, alimenté par la nostalgie d'un monde en ordre, ne cesse pas d'annoncer, cela ne signifie pas la fin des valeurs et l'anomie sociale, pas plus d'ailleurs que cela ne marque nécessairement un accomplissement de l'humanité. C'est une donnée de fait, susceptible de faire émerger des tendances sociétales contradictoires, qu'il faut identifier, évaluer et qualifier en termes politiques et éthiques. Ce qui nous intéresse ici concerne uniquement l'implication majeure de cette nouvelle donne culturelle dans le processus de l'exculturation du catholicisme.

— Cette exculturation se manifeste, de façon encore plus éclatante, avec la revendication des couples homosexuels d'accéder à la parentalité. Là encore, cette revendication heurte un familialisme catholique qui associe strictement la légitimité du désir d'enfant à la possibilité de procréer, dans le cadre seul autorisé du mariage. Cette problématique traditionnelle s'étaye du côté psychanalytique, de la démonstration de l'immaturité supposée de la demande homoparentale. Certes, il y a toutes les raisons d'interroger de façon critique la revendication actuelle d'un « droit à l'enfant », qui instrumentalise l'enfant à naître pour la satisfaction d'un pur désir d'accomplissement de soi et/ou d'ostentation sociale. Mais cette critique vaut aussi bien pour des couples hétérosexuels, non seulement dans les cas « d'acharnement procréatif », mais également dans des situations tout à fait ordinaires, qui témoignent néanmoins que l'enfant n'est pas voulu d'abord pour lui-même, mais pour la satisfaction narcissique des parents. Du fait de son caractère général, l'invalidation de la revendication homoparentale relève d'un autre type d'évaluation, qui prend en compte non le contexte psychologique et relationnel concret dans lequel s'exprime, au cas par cas, la demande d'enfant, mais les caractéristiques physiologiques, considérées comme déterminantes par elles-mêmes, des membres du couple. La démonstration ne peut donc pas dissimuler le simplisme biologique de la représentation de la différence des sexes qui la sous-tend. Elle manifeste, en même temps, la pauvreté de la conception de l'individu que cette biologisation induit. La revendication homoparentale est condamnée, dit-on, par « l'amour du même» qui unit ceux qui la formulent. Cette proposition suggère (et même affirme) que deux hommes qui s'aiment, ou deux femmes qui s'aiment, sont assignés — par leur constitution physiologique — à une irréductible «mêmetude » (si l'on peut s'autoriser cet affreux néologisme !).

Du point de vue de la définition, psychologique aussi bien que philosophique et politique, de l'individu comme sujet, ce point de vue mérite, à tout le moins, discussion. Mais il est curieux qu'il fasse l'objet d'un aval aussi immédiat, du côté des évêques instruits par leurs experts, au regard de la reconnaissance chrétienne de la singularité irréductible de tout individu, « créé homme et femme » (quoi qu'il en soit de son identité sexuelle biologique et anatomique) : l'affirmation de l'attention absolument spécifique que Dieu réserve à tout individu absolument singulier s'accorde mal — c'est le moins qu'on puisse en dire — avec la réduction biologisante (et in fine profondément matérialiste) de l'identité individuelle qu'implique l'argument avancé contre l'homoparentalité. Là encore, la question n'est pas de prendre parti en un sens ou un autre, mais de s'étonner de la fermeture a priori du débat théologique sur ce point, autant d'ailleurs que de la clôture dogmatique qui entoure les reprises séculières de cette négation de la singularité irréductible de tout individu, dont la notion de « sujet » est pourtant porteuse. En tout état de cause, le principal effet de la revendication homoparentale est, sur ce terrain comme sur celui de la définition du couple, d'obliger tous les couples à pousser dans toutes ses conséquences, la découverte proprement moderne que — quoi qu'il en soit de la manière dont on les fait (« naturellement», par procréation médicalement assistée ou par adoption légale) — les enfants ne sont nôtres que pour autant que nous les adoptons. Dans la mesure où la génération (physiologique) se trouve, dans le cas du couple homosexuel, radicalement disjointe de l'engendrement, la revendication homo-parentale manifeste ce fait majeur, qui trouve également toute sa portée dans la perspective du développement des procréations médicalement assistées : en matière de paternité et de maternité, la « reconnaissance » (comme choix et comme engagement) prime sur la biologie. [...]

On fera remarquer, non sans raison, qu'en campant sur ses positions traditionnelles en ces matières, le catholicisme, loin de s'automarginaliser, demeure au contraire en affinité avec les réflexes dominants d'une société qui manifeste, sur la question de l'homoparentalité, des résistances extrêmement fortes.

Danièle Hervieu-Léger, Catholicisme, la fin d'un monde.


L'androgynie sacrée



La photographie représente sainte Wilgeforte (XVIe siècle), église Saint-Etienne, Beauvais. Vierge portugaise crucifiée ; elle porte une épaisse barbe qui lui serait poussée après qu'elle eut implorée la Vierge de la préserver d'un mariage païen ! Cette fable rassurante ne masque-t-elle pas la représentation de l’androgynie du Christ ?

Jean Louis Bernard écrit : « L'Androgyne est un être fabuleux, fils d'Hermès et d'Aphrodite, réunissant les deux sexes. [...] Dans son sens profond, la fable désignait l'initié qui, s'identifiant à Hermès, épousait intérieurement la féminité cosmique ou divine, celle-ci mi-abstraite car n'existant que sur le plan de l'énergie – l'Aphrodite céleste. Par l'introversion (et non l'inversion), la force d'Eros reconvertirait son être intérieur, sublimant son anima ».


Catholicisme,la fin d'un monde
de Danièle Hervieu-Léger 

Dire que le catholicisme est en crise aujourd'hui en France apparaît comme une banalité. Et l'on invoque souvent pêle-mêle, à titre de description comme d'explication, les méfaits de la sécularisation, l'ostracisme des médias et le poids de l'histoire. Mais si cette crise n'était pas seulement due aux aléas de l'histoire et des temps ? S'il s'agissait d'une crise profonde, inéluctable, qui touche le catholicisme au cœur en ôtant toute légitimité à son discours sur l'homme, la nature, la vie en société ?
Après de nombreuses années passées à enquêter sur la religion et à proposer divers modèles d'explications des comportements religieux contemporains, Danièle Hervieu-Léger expose avec rigueur la conclusion de son analyse : Quoi que nous puissions dire ou penser, le catholicisme ne fait plus aujourd'hui partie des références communes de notre univers culturel français. Ses références et ses valeurs, ses représentations et son personnel sont sortis - ou en train de sortir - du champ social. Les conséquences de cette « exculturation » du catholicisme sont immenses. Danièle Hervieu-Léger nous fait prendre la mesure de cet événement historique majeur et interroge en finale les réactions - souvent peu appropriées du monde catholique à ce séisme culturel.


Danièle Hervieu-Léger, sociologue, dirige le Centre d'études interdisciplinaires des faits religieux à l'Ecole des hautes études en sciences sociales. Ses ouvrages sur les mutations du phénomène religieux dans la société contemporaine font largement autorité.




Un rabbin affirme que les Juifs sont des extraterrestres venus pour « conquérir » la Terre.

Le rabbin Michael Laitman est l'auteur de "Kabbalah, Science and the Meaning of Life". Le livre retrace les étapes de l'év...