dimanche, décembre 18, 2011

Pauvreté du peuple & médiocrité du prince





Un jour Maître Tchouang revêtit sa longue robe toute rapiécée, chaussa ses sandales dont la semelle avait été rapetassée avec de la ficelle et s'en fut trouver le prince de Wei. Celui-ci s'exclama en le voyant :

Mon Dieu ! dans quelle détresse je vous vois !

Dans la pauvreté, Sire, non la détresse. Quand un gentil-homme ne peut faire valoir sa vertu, il connaît la détresse ; mais lorsque ses vêtements sont rapiécés et ses souliers percés, il connaît la pauvreté, non nécessairement la détresse. Vous n'avez jamais vu le singe arboricole ? Sitôt qu'il a trouvé un chêne ou un camphrier sur lequel grimper, il bondit de branche en branche et évolue avec une telle aisance dans ses hautes frondaisons que même l'archer le plus habile ne peut l'ajuster. Mais s'il doit se mouvoir sur des arbustes épineux ou des jujubiers, il avance précautionneusement, tournant la tête de tous côtés et tremblant de tout son corps. Non que ses membres aient perdu leur souplesse, mais le milieu défavorable ne lui permet pas de déployer son agilité. Lorsqu'un sage vit sous le règne d'un prince aveugle entouré de ministres débauchés, il ne peut échapper à la détresse.

Jean Levi, Les Œuvres de Maître Tchouang.



Les Œuvres de Maître Tchouang, ce texte datant du quatrième siècle avant notre ère contient tout l'esprit du Tao.

Traductions du Tchouang-tseu

Avant la parution de la traduction de Jean Levi, Jean François Billeter a fait ce commentaire :

La seule traduction que je puisse recommander est celle de Burton Watson, The Complete Work of Chuang Tzu, New York, Columbia University Press, 1968. Watson reprend l'interprétation traditionnelle du texte, mais il est un traducteur expérimenté, qui s'exprime avec un bonheur constant. Il est bien informé des difficultés du texte et en informe discrètement le lecteur. Notes succinctes, index. La traduction de A.C. Graham, Chuang-tzû, The Seven Inner Chapters, Londres, Allen & Unwin, 1981, est beaucoup moins convaincante et n'est pas complète, mais elle mérite d'être consultée parce que Graham a tenté de regrouper les textes du Tchouang-tseu selon leurs diverses provenances et analyse les caractéristiques de chaque groupe. Ses vues sont contestables sur certains points, mais présentent de l'intérêt. Il existe d'autres traductions en anglais, plus anciennes ; voir la notice de H. Roth mentionnée ci-dessus et l'appendice bibliographique qui figure dans V. Mair (éd.), Experimental Essays on Chuang-tzu (1983). Je ne connais pas la traduction plus récente de Victor Mair, Wandering on the Way — Early Taoist Tales, New York, Bantam Books, 1994.

Il n'existe pas de traduction satisfaisante en français. Celle du père Léon Wieger, incluse dans ses Pères du système taoïste (1913), rééditée depuis 1950 par Cathasia, Paris, est définitivement dépassée. Celle de Liou Kia-hway, L'Œuvre complète de Tchouang-tseu, a paru chez Gallimard en 1969 dans la collection "Connaissance de l'Orient" ; elle a été rééditée en format de poche et reprise en 1980 dans Philosophes taoïstes, dans la "Bibliothèque de la Pléiade". Elle est insuffisante sur le plan de l'expression comme sur celui de la compréhension du texte. Celle de Jean-Jacques Lafitte, Tchouang-Tseu, Le rêve du papillon, Albin Michel, 1994, aurait dû apporter un progrès, mais ne l'a pas fait ; pas plus que celle, partielle, de Jean-Claude Pastor, Zhuangzi, Les chapitres intérieurs, Cerf, 1990.

En allemand, la traduction (incomplète) de Richard Wilhelm, Dschuang Dsi, Das wahre Buch vom südlichen Blütenland (1912), rééditée par Diederichs à Munich depuis 1969, est aussi dépassée que celle du père Wieger. Récemment, la traduction anglaise de Victor Mair a été retraduite en allemand Zhuangzi, Francfort, Krüger, 1998. Un choix de chapitres (1 à 7 et 17, 18, 19) a paru en format de poche : Zhuangzi, Stuttgart, Reclam, 2003. Kristofer Schipper a publié une traduction néerlandaise des chapitres intérieurs : Zhuang Zi, De innerlijke geschriften, Amsterdam, Meulenhoff, 1997. Pour autant que je puisse en juger, elle ne renouvelle pas la lecture du Tchouang-tseu. Je ne connais pas la traduction polonaise de Janusz Chmielewski et al., Czuang-tzy, Varsovie, Panstvoe wydawnictwo naukowe, 1953 ; il paraît qu'elle est d'une grande qualité et annotée de façon détaillée.

On me demande parfois si j'ai l'intention de publier une traduction complète du Tchouang-tseu. Peut-être y parviendrai-je un jour, quand j'aurai compris tout ce qu'il y a dans cet ouvrage. En attendant, j'espère publier des traductions annotées et commentées de certains chapitres, en premier lieu du chapitre II.

Études sur Tchouang-tseu

« L'action doit avoir un but précis, sinon elle se divise, elle se brouille, elle tourne mal et cause à la fin des dégâts irréparables. Les sages d'autrefois gardaient en eux le ressort de l'action, ils ne le laissaient pas à d'autres. Tant que tu n'es pas sûr de le détenir, ne te mêles pas de mettre fin aux méfaits d'un tyran ! »

Tchouang-tseu





La version du père Wieger :

Habillé d'une robe en grosse toile rapiécée, ses souliers attachés aux pieds avec des ficelles, Tchoang-tzeu rencontra le roitelet de Wei.

Dans quelle détresse je vous vois, maître, dit le roi.

Pardon, roi, dit Tchouang-tzeu ; pauvreté, pas détresse. Le lettré qui possède la science du Principe et de son action, n'est jamais dans la détresse. Il peut éprouver la pauvreté, s'il est né dans des temps malheureux... Tel un singe, dans un bois de beaux arbres aux branches longues et lisses, s'ébat avec une agilité telle, que ni I ni P'eng-mong (archers célèbres) ne pourraient le viser. Mais quand il lui faut grimper à des arbres rabougris et épineux, combien son allure est moins alerte ! C'est pourtant le même animal ; mêmes os, mêmes tendons. Oui, mais les circonstances devenues défavorables, l'empêchent de faire un libre usage de ses moyens... Ainsi le Sage né sous un prince stupide qu'entourent des ministres incapables, aura à souffrir. Ce fut le cas de Pi-kan, à qui le tyran Tcheou-sinn fit arracher le cœur.

Léon Wieger, Les Pères du système taoïste (1913). Le livre est téléchargeable gratuitement à cette adresse :


Dessin :
Grâce au gouvernement d'un triste sire, un pauvre chômeur peut devenir auto-entrepreneur... pauvre.

samedi, décembre 17, 2011

Lenoir & le daïmon







Philosophe et directeur du Monde des religion, Frédéric Lenoir écrit :

« Depuis plus de vingt-cinq ans, le Bouddha, Socrate et Jésus sont mes maîtres de vie. J'ai appris à les fréquenter, à me frotter à leur pensée, à méditer leurs actes, leurs différences et leurs convergences. Ces dernières m'apparaissent finalement plus importantes. Car, malgré la distance géographique, temporelle et culturelle qui les sépare, leurs vies et leurs enseignements se recoupent sur des points essentiels. Ce témoignage et ce message, qui m'aident à vivre depuis tant d'années, j'ai eu envie de les faire partager. Je suis convaincu qu'ils répondent aux questions et aux besoins les plus profonds de la crise planétaire que nous traversons.

Car la vraie question qui se pose à nous est la suivante : l'être humain peut-il être heureux et vivre en harmonie avec autrui dans une civilisation entièrement construite autour d'un idéal de l'«avoir» ? Non, répondent avec force le Bouddha, Socrate et Jésus. L'argent et l'acquisition de biens matériels ne sont que des moyens, certes précieux, mais jamais une fin en soi. Le désir de possession est, par nature, insatiable. Et il engendre frustration et violence. L'être humain est ainsi fait qu'il désire sans cesse posséder ce qu'il n'a pas, quitte à le prendre par la force chez son voisin. Or, une fois ses besoins matériels essentiels assurés — se nourrir, avoir un toit et de quoi vivre décemment —, l'homme a besoin d'entrer dans une autre logique que celle de l'« avoir» pour être satisfait et devenir pleinement humain : celle de l'«être». »

Mais « être » n'est pas toujours simple quand il existe un pluriel assez singulier, comme le rappelle Frédéric Lenoir en évoquant le daïmon qui « hantait » et conseillait Socrate :

« Socrate a-t-il connu son aîné Anaxagore ? Né à Clazomènes, celui-ci a la réputation d'avoir introduit la philosophie à Athènes. Une légende voudrait que Socrate ait dans un premier temps compté parmi les disciples d'Anaxagore, tenant de la théorie du Nous, intelligence physique, quasi mécanique, ordonnatrice de l'univers. Cette théorie lui vaudra d'ailleurs d'être condamné à mort pour athéisme : Anaxagore fuira alors Athènes pour finir ses jours à Milet, berceau des philosophes. Il est fort probable que les deux hommes se soient croisés dans les cercles de penseurs athéniens qu'ils fréquentaient l'un et l'autre. Le Phédon de Platon et les Nuées d'Aristophane laissent supposer que, dans un premier temps, Socrate s'est intéressé aux spéculations de la physique, qui constituaient l'essentiel de la réflexion de ces philosophes que l'on appelle aujourd'hui « présocratiques ». Néanmoins, Socrate ne tarde pas à chercher ailleurs une explication aux questions qu'il se pose : « La réputation que j'ai acquise vient d'une certaine sagesse qui est en moi. Quelle est cette sagesse ? C'est peut-être une sagesse purement humaine », lui fait dire Platon dans son Apologie (20d), laissant entendre que la démarche réflexive a toujours fait partie de sa quête. D'ailleurs, parmi ses premiers compagnons, certains se vivent déjà comme ses disciples, alors même qu'il n'a pas encore entamé sa carrière de philosophe errant — carrière que l'on pourrait comparer à celle des prédicateurs sillonnant au même moment les contrées éloignées de l'Indus et de la Mésopotamie.

Sa carrière commence véritablement avec un étrange épisode qui se situe vers 420 avant notre ère, rapporté notamment par Platon dans son Apologie. Socrate a alors environ cinquante ans. Chéréphon, l'un de ses amis d'enfance, se rend à Delphes pour consulter l'oracle de la pythie, le plus célèbre de toute la Grèce, qui lui affirme : « De tous les hommes Socrate est le plus sage (sophos).» Dubitatif, Socrate se rend auprès de l'homme qui passe pour le plus grand sage d'Athènes, un politicien dont il ne révèle pas le nom. Il en revient bouleversé « Je raisonnai ainsi en moi-même : je suis plus sage que cet homme. Il peut bien se faire que ni lui ni moi ne sachions rien de fort merveilleux; mais il y a cette différence que lui, il croit savoir, quoiqu'il ne sache rien. Et que moi, si je ne sais rien, je ne crois pas non plus savoir. » Il s'adresse ensuite aux poètes, aux artistes, à tout ce que la cité compte de personnalités réputées. Il en arrive à cette conclusion : il n'existe pas d'homme sage. À partir de ce moment, Socrate voit dans l'oracle de la pythie le signe d'une mission divine, un encouragement à enseigner. Et il fait désormais sienne la devise inscrite au fronton du temple d'Apollon: « Connais-toi toi-même ».

À plusieurs reprises, Socrate insiste sur l'existence en lui d'une « voix » intérieure, un daïmon, littéralement son « démon », un génie familier qu'il considère comme une émanation de la divinité. Celui-ci l'accompagne depuis que l'oracle de Delphes l'a désigné, l'arrêtant quand il faut ou le stimulant quand il est sur le point de manquer à sa mission, se substituant aux oracles pour lui faire parvenir le message des dieux. C'est cette voix qui l'aide à croiser le chemin de Phèdre pour se lancer avec lui dans un long dialogue sur l'amour. Socrate le reconnaît avec une simplicité déconcertante : « Lorsque j'étais, bon ami, sur le point de repasser la rivière, j'ai senti ce signal divin et familier qui m'arrête toujours au moment où je vais accomplir une action. J'ai cru entendre ici même une voix qui me défendait de partir avant de m'être astreint à une expiation, comme si j'avais commis quelque faute à l'égard de la divinité », rapporte-t-il à son compagnon (Phèdre, 242). Ses disciples ne savent trop qu'en penser : « Il disait avoir en lui un génie qui lui indiquait ce qu'il devait faire et ce qu'il devait éviter », commente sobrement Xénophon (Mémorables, 4, 8). Ils restent cependant stupéfaits face au très étrange état dans lequel Socrate peut tomber à l'improviste, état de catalepsie qui le maintient complètement immobile, sans même battre des paupières. Cela pouvait durer quelques minutes ou plusieurs heures, et il était alors complètement étranger à tout ce qui pouvait se produire autour de lui. Était-il abîmé dans une sorte de méditation ? En connexion avec son daïmon, avec lequel il entretenait une relation privilégiée ? Nul ne s'est hasardé à interpréter ces états extatiques. Platon en a fait une description factuelle dans Le Banquet : «Un matin, on l'aperçut debout, méditant sur quelque chose. Ne trouvant pas ce qu'il cherchait, il ne s'en alla pas, mais continua de réfléchir dans la même posture. Il était déjà midi. Nos gens l'observaient et se disaient avec étonnement que Socrate était là, rêvant depuis le matin. Vers le soir, les soldats apportèrent leurs lits de camp à l'endroit où il se trouvait, afin de coucher au frais (on était alors en été) et d'observer s'il passerait la nuit dans la même attitude. En effet, il continua à se tenir debout jusqu'au lever du soleil. Alors, après avoir fait sa prière au soleil, il se retira » (220 c-d).

La relation de Socrate avec son daïmon est évidemment bien embarrassante pour certains historiens de la philosophie qui font de lui le père du rationalisme occidental. On tente alors de réduire le fameux daïmon à la voix de la conscience, et on parle des extases de Socrate comme de crises d'épilepsie. Ainsi qu'on vient de le voir, ce n'est pas ce que disent les biographes de Socrate, visiblement eux-mêmes troublés par cet étrange phénomène que l'on retrouve pourtant de manière courante chez les chamanes des traditions premières, ou chez les mystiques de toutes les religions quand ils se sentent soudain possédés par la divinité et entrent, de ce fait, dans des états extatiques. Quoi qu'il en soit, que l'on croie ou non aux esprits et aux forces surnaturelles, il est évident que
Socrate s'est présenté et a été perçu par ses disciples à la fois comme un philosophe qui s'appuie sur la raison et comme un mystique qui se sent connecté à une force supérieure. » (Fréderic Lenoir, Socrate, Jésus, Bouddha, trois maîtres de vie.)

Fréderic Lenoir aurait-il été inspiré par un démon lamaïste – au demeurant fort nombreux – en terminant son livre Socrate, Jésus, Bouddha par l'apologie, une quasi canonisation, du dalaï-lama ?


Socrate, Jésus, Bouddha
Trois maîtres de vie

La crise que nous vivons n'est pas simplement économique et financière, mais aussi philosophique et spirituelle. Elle renvoie à des interrogations universelles : Qu'est ce qui rend l'être humain heureux ? Qu'est-ce qui peut être considéré comme un progrès véritable ? Quelles sont les conditions d'une vie sociale harmonieuse ? Contre une vision purement matérialiste de l'homme et du monde, Socrate, Jésus et Bouddha sont trois maîtres de vie. Une vie qu'ils n'enferment jamais dans une conception close et dogmatique. Leur parole a traversé les siècles sans prendre une ride, et par-delà leurs divergences, ils s'accordent sur l'essentiel : l'existence humaine est précieuse et chacun, d'où qu'il vienne, est appelé à chercher la vérité, à se connaître dans sa profondeur, à devenir libre, à vivre en paix avec lui-même et avec les autres. Un message humaniste et spirituel, qui répond sans détour à la question essentielle : pourquoi je vis ?

vendredi, décembre 16, 2011

Le livre caché





Un lecteur du blog m'a fait parvenir un petit livre intitulé Démasqué. L'auteur, Jan Van Rijckenborgh, est le fondateur de la Rose-Croix d'Or. Curieusement, sur le site de cette organisation, qui pourtant diffuse les nombreux textes de Rijckenborgh (certains sont téléchargeables gratuitement), on ne trouve aucune trace de Démasqué.

Démasqué, livre écrit par un spécialiste de l'ésotérisme, est une véritable bombe. En effet, Rijckenborgh écrit :

« Tous les groupements religieux, idéalistes et occultes, dans la sphère matérielle, offre automatiquement ou par contrainte, à leur homologue dans la sphère réflective (l'au-delà,
NDLR), la force lumière qu'ils libèrent par leurs activités. Tous les humains du champ de vie matériel maintiennent ainsi un gigantesque groupe de parasites dans la sphère réflective. »

En d'autres termes, les affidés de presque toutes les organisations, spirituelles et autres, seraient manipulés et exploités par des hiérarchies perverses situées dans d'autres dimensions. « En fait, écrit Ibn al-'Arabi, il existe d'innombrables mondes dans l'Invisible, et certains d'entre eux sont bien plus dangereux que la pire des jungles du monde visible. »

Le Très précieux Gourou de l'occultisme lamaïste, le magicien immortel Padmasambhava, séjournerait dans une de ces dimensions, une « terre pure » nommée Zangdok Pelri.

« L’occultiste aspire littéralement à prolonger l’état de sa vie mortelle en forçant les processus naturels. Il soumet à un entraînement sa personnalité entière, la partie subtile comme la partie plus grossière, l’ensemble étant ainsi l’objet d’un processus de cristallisation contraire à la loi de la nature.


C’est de cette manière, brièvement esquissée et sur laquelle nous ne désirons pas nous étendre davantage, qu’une partie de l’humanité a créé dans le pays de l’au-delà, une vie contre nature et illégale. Cette vie incomplète, contraire à l’ordre naturel voulu par les puissances créatrices divines, s’efforce par tous les moyens de se maintenir consciemment dans l’au-delà, comme on s’efforce de se maintenir dans la sphère matérielle. Ces entités s’imaginent être vivantes, être arrivées au but de la vie, elles se prennent pour des habitants des cieux : en réalité, elles sont des anomalies dans la nature. C’est pourquoi, elles constituent un danger mortel pour l’humanité vivant de ce côté-ci du voile car, pour prolonger et assurer définitivement, par n’importe quel moyen, leur existence dans l’au-delà, elles sont obligées de s’alimenter constamment avec une énergie lumineuse – l’éther lumière. C’est en cela que dépend la sécurité de leur existence. Elles doivent se nourrir en énergie lumineuse.

Cet « éther de lumière », elles ne le possèdent plus, ou très fragmentairement seulement. Et, parce que leur personnalité n’existe plus que partiellement, elles ne peuvent plus extraire elles-mêmes la lumière des courants de l’atmosphère intercosmique.

Voilà pourquoi, c’est de nous, êtres humains, qui vivons encore dans la sphère matérielle, qu’elles doivent obtenir ces forces éthériques.

Vous comprendrez ainsi ce qu’est une fraternité de l’au-delà. C’est un égrégore d’entités qui se maintiennent abusivement dans l’au-delà. Elles sont extrêmement néfastes pour l’humanité, parce que la prolongation de leur existence est obtenue au prix d’une violation des lois de la nature et par des pratiques qui en sont la conséquence.

Ce qu’est la grande hiérarchie des égrégores de l’invisible, vous le comprenez aussi. C’est un rassemblement – une sorte de syndicat du pillage énergétique – fondé sur un besoin commun d’autoconservation. Ces divers groupements font preuve le plus souvent les uns vis-à-vis des autres d’une inimitié totale ou d’un exclusivisme complet ; mais quand la nécessité les traque, ils se rapprochent par communautés d’intérêts.

Actuellement, menacés de ne plus pouvoir se maintenir en vie dans la sphère de l’au-delà en raison du manque toujours croissant d’éther-lumière, les fraternités occultes de l’invisible sont occupées à préparer une grande opération politique connue en Occident sous le nom d’Antéchrist ou d’Antichrist, opération qui a été prophétisée dans le Livre de l’Apocalypse mais dont très peu ont compris le sens réel dans le monde chrétien.

Ils tenteront d’organiser une parodie du retour du Christ, pour amener l’humanité à augmenter la production d’éther-lumière au profit de la multitude de ces parasites. [...]

Il est navrant de constater que très peu de personnes parmi celles qui prétendent être éveillées à la réalité politique mondiale sont informées de ce plan. Les informations que nous diffusons sur ce problème qui est d’une gravité immense pour notre avenir ne sont pas toujours bien comprises. Sans doute, est-ce un sujet trop brûlant, qui dérange notre tranquillité car il remet en cause nos croyances religieuses et notre espérance en l’avènement d’un âge d’or. Nous attendons un salut d’en-haut, et on se dit que n’importe quel sauveur serait le bienvenu s’il pouvait stopper le cours de l’effondrement mondial, et remettre la civilisation sur un nouveau rail. C’est pourquoi, de manière inconsciente, nous appelons l’Antéchrist par notre désir de sécurité. »

Cet extrait d'un article de la revue Undercover résume parfaitement et très clairement le chapitre L'ombre des choses à venir du livre introuvable de Rijckenborgh.


Le fascisme théocratique mondial selon Jan Van Rijckenborgh :
http://bouddhanar.blogspot.com/2011/12/le-fascisme-theocratique-mondial.html


jeudi, décembre 15, 2011

Convulsionnaires parisiens





Le diacre Pâris est dans la contrebasse


En 1729, sur la tombe du diacre Pâris, au cimetière de Saint-Médard, se déroulèrent des scènes de convulsions hystériques. On put voir cette chose stupéfiante : une convulsionnaire se coucher sur un brasier ardent et y demeurer plus d'une demi-heure sans que les flammes brûlent le moins du monde son corps. ni même le drap qui l'enveloppait.

Cependant, la police s'en mêla, dispersa les excités, et un humoriste décréta :

De par le roi, défense à Dieu
De faire miracle en ce lieu.

Qu'étaient ces convulsions, sinon une forme violente de la danse ? La danse qui conduit à l'extase, à l'insensibilité, au délire, est de tous les temps et de tous les lieux.

J'y songeais à la suite d'une rencontre avec ce contrebassiste mystique – d'autres diront satanique – qui dirige un cercle privé de convulsionnaires modernes.

Jusqu'à deux heures du matin, il joue dans un dancing de la rive gauche, puis il rejoint le groupe de ses adeptes en un lieu tenu secret. Il accepta pourtant de m'y conduire et me fixa rendez-vous dans le banal établissement où il travaille.

Mon attention, parmi la foule qui s'y pressait, ne tarda pas à se concentrer sur lui. Cet homme ne jouait pas, il vivait sa musique. Ses gestes étaient la projection d'une âme brûlante. Il pouvait avoir la quarantaine, montrait un visage ravagé, inquiet, avec des yeux fébriles sous des arcades sourcilières touffues. Ses rares cheveux semblaient se dresser sous l'effet d'une émotion intérieure. Il appartenait à la catégorie des êtres possédés par un démon qu'ils ont choisi.

La grandeur et le danger de l'art se manifestaient ainsi de façon tangible. Je ne voyais, je n'entendais plus que lui et je ne saurai jamais si en réalité il surpassait les autres musiciens de l'orchestre ou si c'était mon attention qui l'isolait. Je compris en tout cas que c'est de la parfaite communion de l'exécutant avec l'auditeur que naît, certains soirs, cet enthousiasme dionysiaque qui rassemble pour un instant les maillons d'une chaîne perdue.

Je le happai à la sortie ; nous prîmes ensemble la soupe à l'oignon. Il ne paraissait pas ennuyé de mes questions, mais plus généralement ennuyé de toute chose.

C'en est au point, me confia-t-il, que plus rien ne peut me tenir éveillé sinon la musique et son corollaire la danse. Par la puissance de mon instrument, qui tour à tour rythme, module et bourdonne, je force les gens à sortir d'eux-mêmes, à perdre tout contrôle, à se montrer dans leur primitive vérité... Vous ne pouvez imaginer le plaisir que j'en éprouve !

Le spectacle de la jeunesse qui se trémousse vous paraît-il tellement excitant ?

En aucune façon.

Alors, je ne comprends plus.

Notre cercle n'admet que des membres âgés de plus de quarante ans.

Ah bah !

Les jeunes, en se livrant à la danse, ne font qu'évacuer un trop-plein de vie, une force à l'état brut ; ils n'ont le sens ni du sacré, ni du pervers. Mais que les plus vieux en arrivent à se débrider, voilà qui est instructif ! J'offre ainsi à quelques-uns l'occasion de se libérer et d'atteindre des sommets où mystique et sensualité se rejoignent. Il ne s'agit pas de faire sortir les démons de nous-mêmes, mais de nous rendre conscients de leur présence, de nous familiariser avec eux. Le rythme est le procédé magique qui conduit à l'état de transe où le contact s'établit. Le dernier mot de la philosophie n'est pas « Connais-toi toi-même », mais « Connais ceux qui t'habitent »... Mais suivez-moi si vous voulez avoir la démonstration vivante de ce que je viens d'avancer.

Nous sortîmes. C'était l'heure suspecte qui donne tout son sens à ce quartier de ruelles sans âge. Un peuple d'ombres allait et venait et j'éprouvais comme un malaise à me mêler à ces créatures de la nuit, surgies d'un monde souterrain, proies à la recherche d'autres proies.

Au fond d'une impasse, mon guide me poussa à l'intérieur d'un étroit corridor. Une minuterie s'alluma, laissant voir des murs qui suintaient d'une humidité brune. Nous descendîmes des marches.

Ne vous méprenez pas, dit-il, nous n'allons pas dans un de ces cabarets de fantaisie avec squelettes et cercueils où l'on boit dans des crânes...

Il ouvrit une porte capitonnée et me fit pénétrer dans une salle basse : bruit infernal, fumée épaississant un air rare, lumières tamisées. Sur un mur nu, un christ janséniste au torse étique tendait vers le ciel ses bras désespérés.

Trois musiciens jouaient qui méritent une courte description : le premier, un pianiste en smoking mauve, s'était coiffé d'un bicorne d'académicien et agitait des doigts couverts de bagues étincelantes. Le deuxième, un trompettiste, avait revêtu une soutane et portait une barrette très en arrière sur la tête. Quant au troisième, à la batterie, c'était un Noir déguisé en pierrot.

Je m'assis dans un coin et observai l'assistance. Il y avait là des groupes qui semblaient échappés d'un hospice. Des vieillards à barbe blanche badinaient avec de grosses dames aux cheveux oxygénés. Un patriarche déplumé et tremblotant sablait le champagne en compagnie d'une petite vieille filiforme, au visage parcheminé et au sourire édenté. Sur la piste, les danseurs se livraient à des contorsions grotesques tandis que des matrones riaient à gorge déployée en battant des mains.

Lorsque le contrebassiste s'empara de son instrument et se lança dans une improvisation, le spectacle prit une allure acrobatique. La frénésie gronda et j'assistai, suffoqué, à un déchaînement renouvelé des convulsionnaires d'autrefois.

Les bras et les jambes se disloquaient, les visages ruisselaient, les perruques s'envolaient, les ventres se tortillaient et s'entrechoquaient. Une harpie, l'écume aux lèvres, se dépoitrailla en poussant des hurlements de bête qu'on égorge.

Ce fut comme un signal. La plupart des femmes suivirent l'exemple, exhibant de hideux appas, des outres vides qu'elles faisaient balloter en cadence. Des hommes entrèrent en transe, tournant comme des toupies ou, étendus sur le dos, agitant les membres en l'air comme de gros scarabées. D'autres se mirent à marcher à quatre pattes. Certains corps formaient de monstrueux angles droits puis ondulaient comme des serpents.

Une mégère en mini-jupe s'approcha soudain de moi et voulut à toute force m'entraîner sur la piste. Il me fallut user des poings et des pieds pour m'en débarrasser. Furibonde, elle tenta de m'assommer à l'aide d'une bouteille de whisky et je ne dus mon salut qu'à un brusque saut de côté. Elle alla s'en prendre ensuite à un gamin de soixante ans qu'elle baisa ignoblement sur la bouche.

Combien de temps dura ce carnaval de cauchemar ?... J'avais perdu toute notion d'heure, subjugué par une sorte de terreur sacrée, devenant fou moi-même au milieu de la démence collective. Enfin, l'un des danseurs s'abattit pour ne plus se relever. Un deuxième subit le même sort, puis un troisième. Les femmes, plus résistantes, tombèrent les dernières dans un bruit sourd.

L'orchestre alors se tut et le contrebassiste contempla le champ de carnage d'un air triomphant. On aurait pu croire que le plancher était jonché de cadavres.

Après un moment de silence et d'immobilité, les musiciens entamèrent un hymne lent et toute l'assistance se mit à genoux devant le crucifix en chantant d'une même voix éraillée. Plusieurs eurent une crise de larmes, puis l'apaisement naquit, de la musique ou bien des courbatures.

Profitant de l'émotion générale, je me sauvai.

Dehors, c'était l'aube. Les camions remontaient le boulevard Sébastopol et les arroseuses municipales tentaient de vaincre l'ordure.

Guy de Wargny, La France des sorciers.


La France des sorciers

Au fond des campagnes, comme au centre des villes, ils organisent des conciliations, tiennent des assemblées, pratiquent des rites étranges, saugrenus ou lubriques.

Guy de Wargny nous conte les étapes d'un petit tour de France de la magie contemporaine.






Dessin :

lundi, décembre 12, 2011

Le N.O.M. & le Tibet





Jan Leene, alias Jan van Rijckenborgh (1896-1968), était un rosicrucien hollandais. En 1945, avec Catharose de Petri, nom d'écrivain de Henriette Stok-Huizer (1902-1990), il fonde le Lectorium Rosicrucianum, également connu sous le nom de Rose-Croix d'Or. Le Lectorium Rosicrucianum est une organisation initiatique d'inspiration gnostique et chrétienne.

Dans un e-mail adressé à Bouddhanar, un membre de Rose-Croix d'Or écrit : « En France, l'école a rencontré un écho favorable auprès des bouddhistes tibétains, bien plus qu'auprès des religions européennes. » Il précise aussi : « La Rose-Croix d'Or utilise, lors de certains rituels, la Voix du silence, un texte mystique tibétain transcrit du livre des préceptes d'or par Mme Blavatsky. »

L'e-mail de l'initié indique clairement que la Rose-croix d'Or a renié les mises en garde contre le Tibet du fondateur de l'école initiatique. En effet, immédiatement après l'invasion du Tibet, au début des années 1950, au moment où l'Occident s'apitoie sur le sort des lamas, Rijckenborgh prend sa plume pour dénoncer les dangers du bouddhisme tibétain.

D'un point de vue spiritualiste, le texte de Rijckenborgh, intitulé Lumière sur le Tibet, est un réquisitoire implacable contre le lamaïsme accusé d’œuvrer à l'instauration « d'une puissance mondiale immense, d'un caractère fort particulier ». L'auteur précise : « Rome a fait ce qu'il fallait pour empêcher l'Occident de connaître le vrai visage du Tibet, de sorte que le monde occidental ignore le caractère profond du Toit du Monde ». Grâce au journaliste d'investigation Bruno Fouchereau, nous savons que depuis 1945, les États-Unis ont resserré leur emprise sur l’Église catholique. Et, pour boucler la boucle, rappelons que des prélats tibétains, le Dalaï-lama à leur tête, ont empoché des millions dollars pour leur collaboration avec la CIA.

Mais l'intention de Rijckenborgh n'est pas de dénoncer la politique étasunienne ou le rôle du Vatican. Son propos vise à révéler un plan démoniaque de domination du monde qui est à l’œuvre depuis les lamaseries. Il est persuadé que les rituels tibétains catalysent des forces occultes afin d'égarer l'humanité.

Lumière sur le Tibet est un texte écrit par un iconoclaste qui n'hésite pas à démolir le mythe du Tibet, pays sacré de prétendus maîtres bienveillants et protecteurs de l'humanité des fables théosophistes. Jan van Rijckenborgh n'est pas un provocateur en mal de publicité. Il est crédité d'une étonnante faculté de clairvoyance, l'éclairage qu'il apporte sur le Tibet semble sincère. Toutefois, Rijckenborgh a recours à une phraséologie ésotérique qui déconcertera les personnes qui ne se sont pas familiarisées avec ce genre d'écrits. En réalité, Lumière sur le Tibet ne s'adresse pas à un large public, c'est un document interne, dactylographié et ronéocopié (le Ronéo est l'ancêtre de la photocopieuse).

Une autre révélation de Jan van Rijckenborgh surprendra les lecteurs qui ne peuvent imaginer que de véritables sages « se sont regroupés quelque part en Chine, (pays des ennemis du lamaïsme féodal). Ils se sont échappés de leur patrie d'origine, les Indes, à cause des terribles persécutions auxquelles les bouddhistes étaient exposés. Ils étaient obligés de fuir, précise Rijckenborgh, car ils s'étaient engagés à : ne pas se venger, ne pas se laisser entraîner en quelque conflit que ce fût, continuer leur action tant que leur œuvre ne serait pas achevée ».

Ce groupe, qui n'approuve pas les sinistres desseins des lamas, a été localisé dans le kham, la partie orientale du Tibet. Le Kham est situé dans le Sichuan qui fut dévasté par un terrible séisme le 12 mai 2008. 

Dans Lumière sur le Tibet, Rijckenborgh évoque la possibilité d'une auto-libération et son fils, qui n'est plus rose-croix, récuse formellement la démarche qui consiste à s'en remettre à un maître ou à une école pour parvenir à l'éveil. Or, depuis 1968, date du décès de Rijckenborgh, la Rose-Croix d'Or (Lectorium Rosicrucianum) s'est éloignée de cet idéal. Elle est en effet classée comme secte : http://www.prevensectes.com/rco1.htm


Lumière sur le Tibet est un texte gnostique profondément mystique. Il prouve que la critique du lamaïsme ne provient pas toujours du milieu matérialiste ou prochinois. Il contient plusieurs chapitres :


I) LUMIERE SUR LE TIBET

II) LA MAINMISE MAGIQUE DU TIBET SUR L' HUMANITE

III) LA METHODE LAMAÏSTIQUE DE DOMINATION DU MONDE

IV) LA METHODE LAMAÏSTIQUE DE DOMINATION DU MONDE (suite)

V) CONCLUSIONS ET REFLEXIONS




Lire Lumière sur le Tibet :




dimanche, décembre 11, 2011

Des enfants sacrifiés à Satan





Depuis quelques années, les coulisses du petit monde de l'information bruissent de rumeurs sordides. Des sectes sataniques organiseraient en France des rituels de magie sexuelle au cours desquels des enfants seraient torturés et violés... À plusieurs reprises, il m'a été donné d'approfondir ces incroyables rumeurs. Des bénévoles de l'U.N.A.D.F.I. et du C.C.M.M., dont la fonction est de recevoir et conseiller les familles dont un proche est la proie d'une secte, m'affirmèrent avoir reçu régulièrement des témoignages de parents d'adeptes sous l'emprise de maniaques hallucinés vouant un culte au démon. Ce qu'ils rapportent est particulièrement odieux. Comme la rumeur l'évoquait, la joie de ces pervers illuminés serait le viol ritualisé d'enfants de moins de treize ans. Certains récits recueillis par les associations font même état de bébés torturés...

Mais voilà, ces témoignages se font, presque toujours, sous couvert d'anonymat par des individus terrifiés. Ces personnes ont vu l'un de leurs proches passer du rôle de victime à celui de bourreau, car, sous l'emprise de la secte, les adeptes participent aux rituels et deviennent, par la force des choses, les complices des actes criminels qui y sont perpétrés. Certains fanatiques sombrent dans la folie la plus totale et entraînent avec eux leurs propres enfants, rajoutant le crime d'inceste à celui de pédophilie. Leurs familles se retrouvent donc elles-mêmes prises au piège. En dénonçant ces turpitudes, elles condamnent du même coup celui qu'elles veulent sauver. L'anonymat constitue dès lors pour elles une garantie de sauver l'être cher devenu complice des exactions de la secte.
Ce genre de relations ne permettent pas à des journalistes d'investigation de se forger une opinion et encore moins d'acquérir la certitude que de tels actes ne sont pas purement imaginaires. Les mobiles qui poussent les témoins à la discrétion sont compréhensibles, mais ils empêchent l'enquêteur de réunir les preuves de ces crimes. Devant cet obstacle, les rares journalistes qui s'intéressaient aux dossiers ont fini par renoncer à leurs enquêtes, classant ces informations dans les rumeurs extraordinaires et invérifiables.

Pourtant, de nombreux faits démontrent la montée en puissance fulgurante des sectes sataniques. Des quatre coins du monde nous parviennent des documents démontrant la multiplication des crimes rituels exécutés en l'honneur du démon.

Aux U.S.A., le phénomène remonte à la fin des années 60. L'une des premières sectes du genre à avoir remis au goût du jour Belzébuth, Pazuzu et Asmodée est l'Église de Satan de l'ancien dompteur de cirque Szandor la Vey. Cette dernière, fondée en 1966 à Los Angeles, dispose aujourd'hui de plus de quarante mille fidèles sur le continent américain et six mille en Europe. Son but est d'instaurer « la loi du plus fort, la suppression de ses ennemis, des gêneurs, des incapables, le culte du surhomme »... En bref, une doctrine proche du nazisme. Charles Manson et d'autres tueurs en série se réclamèrent de cette organisation. En France, les écrits de Szandor la Vey sont diffusés par la maison d'édition d'un groupe à tendance fasciste dirigé par Christian Boucher, qui, par ailleurs, dirige l'Ordo Templi Orientis, une secte experte en l'invocation des démons et en magie sexuelle.

L'autre organisation née aux U.S.A. et qui défraya la chronique par ses activités criminelles est le Temple de Seth. Il fut fondé en 1974 par le colonel Michael Aquino, de l'U.S. Air Force. Les dévots du Temple de Seth seraient cent vingt-deux mille dans le monde ! Cette secte est aujourd'hui passée en grande partie dans la clandestinité car, le 22 avril 1987, éclata un énorme scandale. Une école maternelle située dans l'enceinte de la base militaire de San Francisco, où était en fonctions le colonel Aquino, fut le théâtre d'un véritable cauchemar : le prêtre protestant, Gary Hambright, avait violé plusieurs dizaines d'enfants de cette école. Comble de l'horreur, on découvrit qu'il était séropositif. Le prêtre faisait partie du Temple de Seth. Le colonel, Gary Hambright et de nombreuses personnalités faisaient subir des sévices sexuels aux enfants pour les besoins de leurs rituels sataniques...

Toujours aux U.S.A., cinq jeunes ont été interpellés à Baton Rouge parce qu'ils étaient soupçonnés d'avoir assassiné rituellement les parents de l'un d'entre eux. Heather Wendorf est une jeune fille de quinze ans, son petit ami, Rod Ferrell, a seize ans. Tous deux se prétendent satanistes et, avec trois autres de leurs camarades, ils prient les forces du mal. Rod affirme être un vampire, Heather est convaincue d'être la réincarnation d'un démon... Dans les rues de la petite ville d'Eustis, on les voyait souvent déambuler tout habillés de noir. Depuis quelques semaines, les cimetières des environs avaient reçu leur visite, mais il semble que ces jeunes aient radicalisé leur position et, pour la joie des démons, battu à mort et saigné les parents de Heather.

Ce crime peut paraître incroyable, mais aux U.S.A. il est presque banal. Les ravages du satanisme et autres délires « gothiques » atteignent des proportions alarmantes. On estime à deux mille le nombre d'assassinats perpétrés chaque année par des satanistes en Amérique du Nord. La criminalité liée à des pratiques sataniques prend des formes très diverses. On trouve des sectes très structurées comme le Temple de Seth, des groupes spontanés comme celui fondé par les cinq adolescents d'Orlando, mais aussi de pures organisations mafieuses. [...]

Le continent africain connaît lui aussi une vague de satanisme. Au Cameroun, le révérend père Engelbert Mveng a été assassiné le 22 avril 1995. Son meurtre est venu s'ajouter à une longue liste d'hommes d'Église abattus dans ce pays au cours des dernières années. Le plus effrayant est que le corps du père Mveng a été amputé rituellement de son sexe et de son cerveau. Le théologien camerounais Jean-Marc Ela, réfugié politique au Canada et soutenu par l'ensemble des Églises chrétiennes, a déclaré, lors d'une conférence donnée le 2 septembre 1995, que le gouvernement camerounais était directement impliqué dans ces meurtres rituels : « Le pouvoir gère un système de violence en s'appuyant sur un culte satanique qui s'organise dans les allées du pouvoir. Ce sont des réseaux mystiques qui procèdent à l'élimination des intellectuels...» Ses affirmations ont été largement soutenues par les spécialistes des affaires africaines du Quai d'Orsay, et le gouvernement camerounais ne les a pas démenties.

Le 15 septembre 1996, le gouvernement du Kenya a rendu public le rapport d'une commission présidée par l'archevêque catholique de Nyeri et Mgr Nicodemus Kirima. Suite à de nombreux meurtres et disparitions, la commission a mené une enquête dans l'ensemble du pays sur les activités des adeptes du satanisme. Le compte-rendu des investigations met en évidence, dans les différents rites qu'il décrit, l'usage d'incantations dans une langue inconnue, de drogues et de vin, d'objets cultuels et de symboles divers tels que : crânes humains, serpents, swastika, tête de bouc à l'envers, chiffre «666 »... Les adorateurs de Satan « pratiqueraient des sacrifices humains lors desquels ils boivent le sang et mangent la chair de leurs victimes. Une sexualité débridée et le viol, en particulier d'enfants, seraient généralisés »...

En Europe, le satanisme a de multiples facettes. Le chercheur et sociologue de l'école royale de théologie de Norvège, Valéry Kubens, constate : « Nous avons largement sous-estimé le satanisme, nous sommes peut-être devant l'une des principales structures occidentales de violence mystique de la fin du XXe siècle ! Il est vrai que dans ce pays, depuis 1992, les adeptes de ces organisations ont détruit plus de dix-huit églises par le feu. En décembre 1994, Varg Vikernes, vingt-deux ans, appelé der Graaf (« le comte »), a été condamné à vingt et un ans de prison. Gourou de la secte satanique Inner Circle, militant d'extrême droite et chanteur du groupe Heavy Metal Burzum, il avait assassiné son producteur, incendié une dizaine d'églises et attaqué un dépôt de munitions. En représailles de cette condamnation, en Angleterre, deux adeptes mirent le feu à une église. À Upsala, en Suède, deux femmes firent de même, et en Allemagne, le German black metal mafia publia une liste de destructions à opérer...

En France, une vague de profanations de tombes laisse entrevoir des réseaux sataniques extrêmement bien implantés sur notre territoire ; des réseaux, à l'ampleur largement sous-estimée, qui agissent depuis plusieurs années. La surprise est de taille et les services spécialisés des Renseignements généraux essayent de rattraper leur retard, mais le problème est difficile à appréhender. Comme aux U.S.A., il existe en France et en Europe plusieurs formes de satanisme. Certaines, espérant capter leur besoin de révolte, prennent pour cibles les adolescents et sont largement infiltrées par l'extrême droite, d'autres, beaucoup plus subtiles, s'adressent aux adultes. Les adolescents pratiquent un satanisme relativement grossier et caricatural. Les adultes, eux, sont surtout attirés par les déviances sexuelles et le sadisme qu'impliquent certains rituels. Là entrent en jeu des structures initiatiques comme l'Ordo Templi Orientis et la Golden Dawn. [...]

Un réseau de pédophilie impliquant de hautes personnalités serait en activité entre Paris, Nice, Monaco et Bruxelles depuis de nombreuses années et ferait subir à des enfants, en ce moment même, les pires sévices. […]

Un réseau pédophile de cette envergure, pour survivre et agir, a besoin d'une sorte de maquis, d'un terrain propice à ses entreprises pour les dissimuler et leur servir de point d'ancrage. Dans cette perspective, les éléments attestant, dans le témoignage des jeunes victimes, l'existence de rituels, de symboles ésotériques et d'initiations prennent toute leur valeur. La dimension sectaire de ces réseaux peut expliquer la cohésion de ces groupes et leur aptitude à fonctionner dans l'ombre. Les sectes sont des espaces clos et opaques, susceptibles de faire naître d'importantes structures secrètes par l'intermédiaire desquelles peuvent se développer des activités criminelles qui sont ainsi dissimulées efficacement. Les adeptes sont des jouets entre les mains de leur gourou. Soumis à des techniques de manipulation mentale quasi scientifiques, ils sont prêts à exécuter n'importe quel ordre, fût-ce celui de se suicider. Ils sont donc autant de pions que ceux qui tirent les ficelles peuvent manipuler dans n'importe quel dessein, et pourquoi pas dans celui d'organiser et de protéger un réseau de pédophilie.[...]

Des sectes, voire des organisations initiatiques occultes, pourraient donc servir de « maquis » à ces réseaux de pédophilie. [...]

L'aspect occultiste et initiatique de ces réseaux n'est pas sans faire écho à certains faits de l'histoire connue, récente et ancienne, des sociétés secrètes qui influencèrent l'Ordre du Temple Solaire et le gourou du Mandarom. Nous savons, grâce aux déclarations des enfants arrachés aux réseaux pédophiles niçois et parisiens, que la mise en scène des orgies auxquelles ils étaient contraints de participer reposait sur l'usage d'un certain nombre de symboles et de rituels, et même d'une langue qui ne ressemblait à aucune de celles qu'ils pouvaient connaître. Un inventaire précis permit de remarquer que ce décorum semblait directement inspiré des mises en scènes de l'ordre occultiste de la Golden Dawn. Il est crucial de se pencher un peu plus sur cette organisation et son histoire pour comprendre tout l'intérêt que nous avons à faire ce constat. Cet ordre fonctionne comme une obédience maçonnique dont les réseaux feraient naître de véritables sociétés secrètes sous forme de loges. Aussi curieux que cela puisse paraître, la Golden Dawn est née au XIXe siècle dans les milieux de la franc-maçonnerie anglaise. La « loge mère » de cette obédience dévoyée s'appelait Isis-Urania et a implanté des groupes plus ou moins formels dans l'Europe entière. Les initiateurs de cette organisation, qui se donnent pour but de communiquer avec les anges et les démons, étaient de fervents égyptologues pour la plupart issus de Cambridge. C'est ainsi que les symboles et les rites de l'Ordre s'inspirèrent largement de l'imagerie égyptomaniaque et romantique, voire ridicule, de cette époque. Des rites et des symboles si particuliers qu'ils sont facilement identifiables, même à travers le récit d'un enfant. Notons aussi que les adeptes de cet ordre doivent apprendre un langage secret inventé par John Dee, un alchimiste du XVIIe siècle, langue que l'on désigne sous le nom pompeux d'« énochien ». Cette langue, extrêmement complexe, inspirée de cryptologie, de latin, d'arabe et de divers dialectes de la haute Antiquité peut s'écrire en lettres latines, sous une forme quasi phonétique, mais aussi à partir d'un alphabet secret qui n'est révélé qu'à quelques adeptes choisis.

Au tout début du XXe siècle, la Golden Dawn adopta un nouveau visage lorsqu'Aleister Crowley (1875-1947) en prit la direction. Cet homme est considéré par les adeptes comme le précurseur de la libération sexuelle. Épicurien à tendance dionysiaque, il fut l'ami de Rodin et apprécié par de nombreux intellectuels européens. Les rituels de la Golden Dawn, déjà largement décriés, se tournèrent alors radicalement vers la magie sexuelle. Cette sous-structure de la Golden Dawn se fit connaître sous le nom d'Ordo Templi Orientis. Aujourd'hui, les adeptes du genre se réclament de cette organisation sous l'une où l'autre de ces appellations, si ce n'est des deux. La loge allemande Thelema de Michaël Kühnen, le leader charismatique du mouvement nazi et skinhead allemand, participait de cette obédience dévoyée. En Italie, à Rome, l'existence d'un groupe de l'O.T.O. pratiquant des viols d'enfants dans ses rituels a été dévoilée, ce qui fit scandale car la jeunesse dorée de la ville y participait, ainsi que des avocats réputés. En France des groupes se revendiquant de la Golden Dawn ont fait très discrètement leur apparition dans les milieux paramaçonniques. Il semblerait que ce put être le cas à Strasbourg en 1989, où la loge de la Golden Dawn est devenue un cercle de repli pour les militants du Front national écartés des grandes obédiences maçonniques. À Nice, la quasi-mafia mise en place par Jacques Médecin avait sa société secrète : le Cube. Cet ordre se réclamait de la Golden Dawn et était l'héritier d'une « loge » anglo-saxonne elle aussi dévoyée. Cette dernière est connue par les historiens spécialisés sous le nom de Order of cubic stone et largement implantée dans le milieu de la Mafia sicilienne depuis 1969... Enfin, pour revenir à l'Ordre du Temple Solaire et au Mandarom, on doit savoir que les dirigeants de ces sociétés secrètes, comme certains de leurs adeptes, passèrent par l'ordre de la Rose-Croix A.M.O.R.C. avant d'être acceptés dans ces sectes, et plus précisément par la « loge » rosicrucienne de Nice. Ce détail est important car l'ordre de la Rose-Croix A.M.O.R.C. est affilié à celui de la Golden Dawn, et certaines de ses « loges » en pratiquent les rituels. Cette filiation remonte à la mythique société secrète franco-allemande de la Rose-Croix d'Or, qui vit le jour au XVIIe siècle et dont l'existence fugitive est avérée par de nombreux documents historiques. Celle-ci aurait été à l'origine de l'ordre de la Golden Dawn. C'est de cette même Rose-Croix — qui se manifesta pour la première fois à Paris en août 1623 — que l'A.M.O.R.C. affirme, lui aussi, détenir sa propre légitimité !... Ces revendications sur l'héritage spirituel de cette ancienne société secrète n'ont rien d'historique, et les documents proposés comme preuves ne sont que des faux grossiers. En réalité, l'A.M.O.R.C. a été fondé en 1909 par Harvey Spencer-Lewis aux U.S.A., et la Golden Dawn en 1888 par Samuel L. Mathers en Angleterre. Mais si l'on écarte les filiations historiques farfelues, restent les liens mythiques qui font de l'A.M.O.R.C. et de la Golden Dawn des organisations sœurs nées de la même influence obédientielle. Un état de fait qui provoqua de nombreux échanges entre ces deux ordres, voire certaines fusions par « loges » et personnes interposées. Cette influence de la Golden Dawn, Jo Di Mambro et Luc Jouret la revendiquaient eux aussi clairement. La structure à partir de laquelle ils constituèrent l'Ordre du Temple Solaire s'appelait la Golden Way, en référence à la Golden Dawn.

Il n'est pas question d'affirmer que le Mandarom et l'Ordre du Temple Solaire furent à l'origine des réseaux de pédophiles dont certains enfants eurent à subir les sévices que nous avons relatés, bien que ces sectes semblent avoir certaines dispositions aux perversions sexuelles... Mais l'influence que paraît avoir exercée la Golden Dawn sur ces deux ordres et l'appartenance de leur dirigeant respectif à la même loge rosicrucienne de Nice — ville dans laquelle, justement, se constitua une « loge » de la Golden Dawn sous l'influence de Jacques Médecin — nous incitent à penser que ce milieu servit de maquis à l'organisation d'un important réseau de pédophilie. C'est bien le sens que prennent les témoignages des enfants victimes de ces réseaux lorsqu'ils évoquent, avec leurs mots, l'O.T.S., le Mandarom et les rituels si spécifiques de la Golden Dawn.

Enquête réalisée par Bruno Fouchereau pour le livre L'enfant sacrifié à Satan de Samir Aouchiche (édition épuisée).

Bruno Fouchereau a aussi enquêté au Vatican. Dans son livre, Le Saint piège, il aborde la personne même de Benoît XVI, intime de Jean-Paul II, avec lequel il façonna le nouveau visage conservateur du Vatican, les personnages influents de cet État et les liens avec l'Opus Dei ou le Renouveau charismatique. Montre également que, depuis 1945, les États-Unis ont resserré leur emprise sur l’Église catholique.


Le Saint piège


" Remettre l'église au cœur des hommes ". Cet œcuménisme de principe n'est en fait qu'une apparence. Après le Polonais Wojtyla, l'Allemand Ratzinger s'est donné pour mission d'installer au Vatican un dogme intégriste en se servant de tous les moyens modernes : JMJ, mass media, argent et influences occultes. Après de longues années d'enquête, de nombreux entretiens, l'analyse de centaines de documents, Bruno Fouchereau décrit comment une poignée d'hommes minoritaires au sein de l'Eglise, conseillers du Saint-Père et serviteurs zélés de milices religieuses qui confinent au sectarisme, s'est emparée du pouvoir à Rome. Les faucons du Vatican veillent à ce que l'Œuvre de Dieu (le fameux Opus Dei), mais aussi la Légion du Christ et les autres mouvements déviants, maintiennent leur emprise sur l’Église. Ces hommes tout-puissants exercent, avec la bénédiction du pape, une influence multiforme sur l’Église et les groupes de laïques qu'elle infiltre. Cette véritable mafia, très puissante financièrement et politiquement, empêche toute évolution spirituelle et maintient les prélats dans une totale dépendance. Et cela pour poursuivre son œuvre : la nécessaire reconquête catholique. Ce livre démonte les mécanismes secrets du fonctionnement d'une institution deux fois millénaire. Il éclaire la mort étrange du réformiste Jean-Paul II, l'éviction des femmes du Saint-Siège, ses liens avec l'extrême droite, son soutien à des hommes de peu de foi, ses exactions commises " au nom de Dieu ". Il décrit les logiques et les passions de ces puissances occultes expertes en double langage. Un piège tendu à la communauté des croyants : le Saint-Piège.


Bruno Fouchereau est journaliste d'investigation. Il a notamment écrit Les ténébreuses affaires du comte de Paris en collaboration avec le prince J. d'Orléans, chez Albin Michel, et La mafia des sectes aux éditions Filipacchi. Il a réalisé plusieurs documentaires sur les mouvements extrémistes pour TF1, France 2 et Canal +. Par ailleurs, il a collaboré au Monde Diplomatique et Charlie Hebdo.





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