samedi, juillet 14, 2012

La gouvernance synarchique de la planète





La crise sociale, morale, économique, environnementale... aboutira-t-elle à un gouvernement mondial ?

Une oligarchie instaurera-t-elle un nouvel ordre hiérarchique fondé sur une inquiétante conception sacrale de l'histoire ?

Des sociétés secrètes œuvrent depuis longtemps à l'avènement d'un gouvernement synarchique et d'une société de castes. S'identifiant toujours aux brahmanes (dominants), jamais aux dalits (les plus dominés), de nombreux spiritualistes sont favorables à un tel gouvernement. Écrit dans les années soixante-dix, le texte suivant expose les principaux arguments des agents du nouvel ordre mondial pour séduire les spiritualistes :

En 1929, René Guénon fit paraître aux éditions Véga, à Paris, un ouvrage dont le titre, à lui seul, était tout un programme : Autorité spirituelle et Pouvoir temporel. Par ce livre, l'illustre traditionaliste prenait position dans le débat politique qui opposait son ami Léon Daudet au Saint-Siège.

En fait, ce n'était là que la raison externe ; le débat était plus profond et plus puissantes les sources de ce livre. Car il s'agissait bien de repenser, au XXe siècle, en des termes radicalement nouveaux, le problème de la gestion politique des hommes et des États.

Un ordre hiérarchique qui garantit l'équilibre social

Autorité spirituelle et Pouvoir temporel soulevait le problème de la hiérarchie des pouvoirs, de la dégradation des structures sociales au cours de l'histoire. Ainsi, René Guénon rendait vie et actualisait une des plus troublantes idées politiques, celle que, communément, on nomme synarchie, sans que, pour autant, il utilise explicitement ce mot dans l'ouvrage cité.

Face à une conception historiciste et matérialiste des rapports sociaux devant la montée du matérialisme marxiste, ce livre permettait aux Occidentaux de repenser toute l'organisation politique du monde moderne. « L'histoire montre clairement, écrit Guénon dans cet ouvrage, que la méconnaissance de cet ordre hiérarchique (fondé sur la suprématie du spirituel face au » temporel) entraîne partout et toujours les mêmes conséquences : déséquilibre social, confusion des fonctions, domination des éléments de plus en plus inférieurs, et aussi dégénérescence intellectuelle, oubli des principes transcendants d'abord, puis, de chute en chute, on en arrive à la négation de toute véritable connaissance (...).

« Cependant, tant qu'il subsistera une autorité spirituelle régulièrement constituée, fût-elle méconnue de presque tout le monde et même de ses propres représentants, fût-elle réduite à n'être plus que l'ombre d'elle-même, cette autorité aura toujours la meilleure part... Parce que, même affaiblie ou endormie, elle incarne encore la seule chose nécessaire, la seule qui ne passe point », c'est-à-dire la répartition des pouvoirs dans la société, le respect de l'ordre traditionnel fondé sur l'autorité sacerdotale destinée à soutenir et à diriger le pouvoir gouvernemental quelle qu'en soit la forme. Partant de cette idée maîtresse, Guénon nous amène à reconnaître que seule l'autorité spirituelle peut maintenir l'équilibre des fonctions sans lequel il n'y a que désordres, iniquités, chaos.

Les classes sociales sont soumises au changement

Déjà, quelques années auparavant, le sociologue allemand Max Weber (1864-1920), soulignait dans Écrits de sociologie et de politique sociale que « les facteurs idéologiques ne sont pas un simple reflet des conditions économiques ; ils possèdent une réalité propre et peuvent orienter d'une manière décisive le devenir historique ».

Ce que Max Weber pressentait en termes de sociologue empiriste, Guénon le démontrait sur le plan métaphysique.

L'idée synarchique des pouvoirs va être constamment l'objet de ces deux types de réflexion. Antérieure à la théorie de la « lutte des classes » (dont l'idée de base apparaîtra dans le « Manifeste du parti communiste » de Karl Marx en 1848), la conception synarchique de la société sera appelée à réanimer toute vision non essentiellement économique de la société et de la politique. Les sciences humaines du XXe siècle lui apporteront d'inattendus développements qui autoriseront une revalorisation des structures de castes qui s'opposent radicalement à toute perception économiste des classes sociales.

Les castes, elles, sont un garant de stabilité

Les classes sont le fruit des fluctuations économiques, des « hasards » de l'offre et de la demande dans une société donnée ; une classe peut toujours en supplanter une autre. Dans ce concept, rien n'est fixe, rien n'est achevé. Les castes, en revanche, répondent à une idée naturelle de la société, idée établie sur la nécessité organique du respect de la fonction spécifique de chacun. Cette stabilité, ou mieux, cette immuabilité, des fonctions et de leur transmission, par voie héréditaire ou de corporation, n'est concevable que dans un respect permanent et naturel du rôle de chacun dans la société.

L'inutilité de la lutte des classes

Cette conception sociopolitique exclut dès l'abord toute idée de compétition sociale, partant de « lutte de classes » ; chacun étant, socialement et sacralement, à sa place dans l'ordre de la cité, et le travail de chacun signifiant une indispensable réalité profitant à l'équilibre général. Le concept même d’État en est singulièrement relativisé ; l’État n'étant lui-même que la représentation, non plus abstraite mais concrète, de la totalité des membres de la société dans l'exercice de leurs fonctions hiérarchiques.

Dans ce sens, les sages de l'Inde ancienne présentaient souvent une image allégorique : la société est comme un corps parfaitement organisé ; chacun y est à sa place comme dans le corps chaque organe est à sa place. On ne peut imaginer que le foie soit à la place des reins, qu'une main remplisse la fonction de la bouche, etc. La société non hiérarchique est précisément à l'image d'un corps aberrant : les organes y sont sans cesse déplacés nul n'y est plus à sa place. Grand est le déséquilibre, et profond le désarroi quand les hommes quittent leurs fonctions traditionnelles pour errer de classe en classe, de métier en métier. Celui qui a reçu le dépôt d'une fonction ne peut se substituer à un membre d'une autre caste.

L'autorité émane d'un principe d'harmonie

Au départ est posé le postulat suivant : l'autorité spirituelle, qui est le régulateur de toutes les fonctions, peut seule régir le monde. Elle est, par essence, la véritable « synarchie », c'est-à-dire le « Pouvoir », synarchie signifiant en effet « avec le Principe », ou « dans le Principe » ; ce qui revient à écrire que l'autorité synarchique est censée représenter parmi les hommes la réalité matérielle d'un principe d'harmonie universelle celui-là même qui doit donner à la société une stabilité hiératique radicalement étrangère aux tribulations et crises incessantes que ne peuvent manquer de traverser les États politiques régis par des impératifs économiques (ces derniers étant par nature instables et générateurs de tous les désordres et de tous les mécontentements sociaux).

L'analyse du monde contemporain par Ortega y Gasset

Trois ans avant que René Guénon ne se penche sur le problème de l'autorité spirituelle dans ses rapports avec le pouvoir temporel, le sociologue et philosophe espagnol José Ortega y Gasset (1883-1955) commençait, sous la forme d'articles, la publication d'une remise en question fondamentale de la société moderne non régie par l'idée synarchique : la Révolte des masses (1926- 1928). Par cet ouvrage, Ortega y Gasset essayait d'évaluer les rapports existant entre le monde contemporain, son économie industrielle et l'ordre traditionnel du monde tel qu'il avait été envisagé dans des sociétés gouvernées par l'autorité spirituelle soumise au pouvoir temporel. Il s'agissait d'expliciter, face au postulat marxiste de l'absolue souveraineté de l'économie, l'idée que seul un ordre synarchique peut sauver la civilisation occidentale en crise.

Le courant illustré par le sociologue espagnol n'était certes pas nouveau ; il avait eu, depuis Dante et son De Monarchia, bien des défenseurs dont le génie politique ne fut pas toujours compris dans le siècle.

Pourtant Gasset rénovait la question, fondait une épistémologie sociale des fonctions, analysait le mal qui ronge l'Occident ; il était de ceux qui allaient susciter dans notre siècle la grande philosophie politique opposée au marxisme, celle-là même qui, occultée longtemps, pourrait aujourd'hui réapparaître comme absolument neuve et seule capable d'apporter aux sollicitations sociales de notre siècle des solutions que le marxisme, idéologie fermée et sécularisée, ne pouvait prétendre apporter.

L'avènement politique des masses

Ortega y Gasset souligne que l'irruption au plein pouvoir social des masses dans le monde moderne est un fait sans précédent dans l'histoire, qui nous suggère une révision globale des structures politiques, économiques et sociales, mais que cette révision doit se faire selon des lignes de faîte organiques qui, en rien, ne doivent se différencier des structures sociales traditionnelles. L'avènement politique des masses est un fait en soi, produit de la révolution industrielle ; tel quel, il doit être reconsidéré dans les limites de l'ordre synarchique des castes. La prolétarisation du monde est une aberration pouvant entraîner l'écroulement de la civilisation présente ; la mécanisation ayant fait perdre aux hommes le sens même de leurs fonctions hiérarchiques, il convient, avant tout, de replacer, de re-situer l'homme non dans un cadre de classes, illusion marxiste n'utilisant que des vues économiques à court terme, mais bien dans celui des fonctions sociales, lesquelles, par leur hiératisme, sont seules susceptibles d'apporter à chacun le sens de son rôle dans la société, le sens de son rôle dans une caste ; l'assemblage des castes étant susceptible de rénover la conscience politique européenne tout d'abord, mondiale ensuite.

Il faut refaire l'homme noble

Ortega y Gasset nous convie à une formidable conversion : faire sortir l'homme de la masse, lui rendre sa dignité, tout en ne détruisant pas les victoires techniques et sociales du monde moderne. Il faut rendre à l'homme le sens de la noblesse, non celui de la noblesse héréditaire, mais celui de la noblesse de volonté. L'homme noble est celui qui s'efforce, qui s'accomplit et porte témoignage. En cela est le germe du renouveau : « Pour moi, noblesse est synonyme d'une vie vouée à l'effort ; elle doit toujours être préoccupée à se dépasser elle-même, à hausser ce qu'elle est déjà vers ce qu'elle se propose comme devoir et comme exigence. De cette manière, la vie noble reste opposée à la vie médiocre ou inerte, qui, statistiquement, se referme sur elle-même, se condamne à une perpétuelle immanence tant qu'une force extérieure ne l'oblige à sortir d'elle-même. C'est pourquoi nous appelons masse ce type d'homme, non pas tant parce qu'il est multitudinaire que parce qu'il est inerte. »

Un nouveau sens à la révolution

Un fait est à remarquer : il faut anéantir toute une conception unilatéralement économique du monde afin de rendre à l'homme sa dignité, sa situation dans le monde et le sens de sa volonté. La volonté étant une volonté au monde, un avènement, une naissance mystique. Il s'agit, sur des bases neuves, d'être le vrai révolutionnaire, non d'hier ni de demain, mais du moment présent. Toute fatalité messianique doit être rejetée : demain n'est pas l'aube des « lendemains qui chantent », hier n'est pas l'abîme monstrueux dont, à grand-peine, l'humanité s'est évadée. Aujourd'hui seul existe ; cette perception implique de faire sortir tout ce qu'il y a d'humain de la masse indifférenciée afin de lui rendre énergie, volonté et dignité. Partant, l'homme ainsi reconstruit pourra reprendre sa place dans un cadre synarchique, le seul authentique, celui des fonctions humaines, correspondant aux structures organiques des castes ancestrales.

Le grand danger : l'emprise de l’État

Architecture utopique ? Non, pragmatisme adapté aux circonstances du siècle ; synarchie traditionnelle et approche scientifique des données sociales du monde moderne qu'il faut adapter aux lois fondamentales des castes seules capables de rendre à l'homme son individualité. Sinon, l'homme, devenu « animal-masse », oublie son être propre, perd sa situation spécifique et se dilue dans l'illusion de l’État.

« Le plus grand danger qui menace aujourd'hui la civilisation : l'étatisation de la vie et l'"interventionnisme" de l’État, l'absorption de toute spontanéité sociale par » l’État, c'est-à-dire l'annulation de la spontanéité historique qui, en définitive, soutient, nourrit et entraîne les destins humains. (...) L’État contemporain et la masse coïncident seulement en ce qu'ils sont anonymes... »

Le grand vide : la perte de la morale traditionnelle

Enfin, Ortega y Gasset nous indique où, selon lui, réside la « vraie question » : c'est une question de morale. L'homme-masse occidental croit avoir perdu sa morale traditionnelle ; en vain il en cherche une nouvelle, mais il la cherche dans le plus total désarroi. Refusant les fondements ancestraux de la société, s'attachant éperdument à l'idée d'« État », se dépersonnalisant selon les normes de l'économie marxiste, il sent pourtant, mais très confusément, qu'il ne peut vivre sans l'assise morale, celle-là même qui fut le ciment des antiques castes.

« L'homme-masse manque tout simplement de morale, laquelle est toujours, par essence, un sentiment de soumission à quelque chose, la conscience de servir et d'avoir des obligations.

« (...) L'Europe subit aujourd'hui les pénibles conséquences de sa conduite spirituelle. Elle s'est enthousiasmée sans réserve pour une culture d'aspect magnifique mais sans racines... »

L'harmonie des fonctions au sein de la société

L'idée synarchique apparaît donc comme étroitement liée à l'éthique des pouvoirs dans la tradition occidentale. Actualisée au XXe siècle par des sociologues, elle a été définie par des historiens et des traditionalistes, dans les limites organiques de son existence, dans les grandes civilisations passées. Certains, comme Rudolf Steiner, le fondateur de l'anthroposophie, ont même essayé de lui donner son exacte correspondance au sein de l'économie moderne des pouvoirs.
Simple dans ses structures, cette idée apparaît comme une harmonie des fonctions, chacune étant soumise à celle qui la précède tout en gardant une entière liberté à l'intérieur de son cadre spécifique : le prêtre — autorité spirituelle — régissant l'action du prince politique — pouvoir temporel —, ce dernier gouvernant l'ensemble des populations agricoles, industrielles et commerçantes suivant les directives sacerdotales. Au-dessous de ces trois castes fixes s'agite la masse indifférenciée, celle-là que l'on nomme communément la « quatrième caste » : c'est la représentation traditionnelle de l'homme-masse dont parle Ortega y Gasset. Ces castes synarchiques sont souvent définies par leurs noms hindous : brahmanes (les prêtres) ; kshattryas et rajas (les guerriers et les rois) ; vaisyas (les agriculteurs et les commerçants) soudras (la masse indifférenciée ).

Fonction sacerdotale et fonction royale

Le chef politique, roi, prince, empereur, appartenant à la seconde caste, est le sujet du chef religieux ; il s'agit bien de l'absolue dépendance de la royauté face au sacerdoce. Il ne peut même, à la limite, y avoir d'opposition entre sacerdoce et royauté, le second terme n'existant que par le premier, duquel il est émané. Il s'agit d'une dialectique des fonctions et non des hommes.

Le souverain et le prêtre ne valent que par la fonction qu'ils incarnent : leur personne physique importe peu. Ainsi, dans certaines civilisations anciennes, le prêtre et le roi sont dissimulés au peuple, et, dans les rares occasions où ils apparaissent, leurs traits sont masqués. Un roi ou un prêtre ne meurt jamais : seul le corps d'un mandaté disparaît ; il est alors immédiatement remplacé par un autre substitut humain qui incarne une fonction d'origine divine. Le continuum des pouvoirs et de l'autorité spirituelle ne peut avoir de fin. Il ne peut, dans cet ordre d'idée, y avoir ni rupture ni révolution. Et quand, après bien d'autres, René Guénon parle d'une autorité spirituelle permanente, même si, à certaines époques, elle est occultée, c'est précisément ce qu'il entend. La « Révolution française » n'a pas supprimé le pouvoir royal en France, elle a seulement transformé l'économie politique d'un État en proie à une grave crise interne. Le pouvoir royal n'est pas mort avec Louis XVI sur l'échafaud, ou, au mieux, lors du départ de Louis-Philippe pour l'exil (1848), il est resté permanent, occulté seulement pour réapparaître au moment opportun ; car, dans cette conception, les pouvoirs monarchiques et sacerdotaux sont doués d'une existence propre qui échappe à la volonté des hommes. Fonction sacerdotale et fonction royale sont des réalités d'ordre divin ; mises en dépôt chez les hommes, afin que l'humanité ne s'écarte pas de son principe (archê), elles ne sont jamais des biens dont les humains peuvent librement disposer.

Une conception sociale de l'histoire

Dans cet ordre d'idée, on notera que, pour les philosophes de la tradition, cet équilibre entre l'autorité spirituelle et le pouvoir temporel s'est trouvé rompu à un moment donné. Il y a eu « rupture du pacte entre les hommes et le Principe ». L'état antérieur, celui qui vit l'homme assumer la tradition authentique, est appelé « Tradition primordiale » ; il est situé en un temps aléatoire, pour ainsi dire « hors du temps ». Tout ce qui vient ensuite, et qui possède une réalité dans le temps historique tel que nous le concevons, est appelé « Age sombre », ou, selon son nom hindou cher aux traditionalistes, « Kâli-Yuga ». Cette conception sacrale de l'histoire et de la société, qui, au niveau métaphysique, reçut sa pleine mesure avec la pensée de René Guénon en France et de Julius Evola en Italie.

Jean-Claude Frère




vendredi, juillet 13, 2012

A quoi croyons-nous ?





Les civilisations et les empires s'écroulent de l'intérieur. C'est ainsi que Rome finit, c'est ce qui nous arrive.

Le 24 août 410, le barbare wisigoth Alaric entra dans Rome inviolée depuis huit cents ans avec 40 000 hommes armés pour un sac qui dura trois jours. Il fut désormais certain pour les habitants du plus grand empire du monde que celui-ci était mortel. « La lumière la plus éclatante de la Terre s'est éteinte, la Terre entière a péri avec cette seule ville », s'écrit Jérôme en Italie, tandis que sur l'autre rive de la Méditerranée, en Afrique du Nord, Augustin, évêque d'Hippone, sous le choc, écrit La Cité de Dieu, la première histoire du monde et de ses civilisations disparues.

Certes, Rome se releva de cette catastrophe, bien que la moitié de sa population fût tuée, emmenée en esclavage ou en fuite, sans parler des viols et du pillage. Évidemment, l'empire ne devint pas «gothique», comme l'espérait l'ambitieux Alaric. Généralissime romanisé adoubé par l'empire, chrétien arien, Alaric mourut bientôt et l'empereur Honorius, protégé par les marais qui entouraient Ravenne, resta empereur. Bien sûr, à Rome, on rétablit les jeux dans l'arène et les combats de gladiateurs, signes avérés de la « civilisation » romaine. Il y eut même quarante années de paix avant les invasions d'Attila puis l'éclatement politique de l'empire romain d'Occident vers 477. Mais, après le sac de Rome, rien ne fut plus jamais comme avant.

Cette première convulsion fut pour l'ensemble du monde civilisé le signe de la fin de la civilisation gréco-romaine qui avait conduit la destinée du monde de Gibraltar à la lointaine Syrie et de la Germanie à l'Afrique du Nord pendant un millénaire. Quel mystérieux ressort s'était alors cassé ?

Fondamentalement, le drame de 410, et Augustin l'a compris le premier, montrait que nulle civilisation, aucun empire humain, n'est promis à une survie éternelle. Rome avait cru à ses dieux, à son destin, à la piété civique, au culte quotidien des ancêtres divinisés qui assurait le lien des générations. Mais ces croyances n'étaient pas éternelles et l'empire avait péri avec elles.

S'ensuivirent quinze siècles de christianisme.

En quoi tout cela nous concerne-t-il ? Que signifient pour nous la crise et la fin de la civilisation antique voilà quinze siècles ?

Nous nous trouvons aujourd'hui au terme de la civilisation qui a suivi celle de Rome, que l'on peut identifier comme la chrétienté. Dissipons un malentendu. Lorsque je parle de chrétienté, il ne s'agit pas de « l'Église » mais de la nébuleuse de croyances et des mentalités engendrées par les croyances juives et leur « post-scriptum » chrétien. Comme Rome, la civilisation judéo-chrétienne, la chrétienté donc, a imposé une hégémonie militaire et culturelle fascinante pour les peuples qui la composaient. Mais elle se distingue surtout par le prodigieux développement économique, unique dans l'histoire des civilisations, qu'elle a créé. Les continents qui ont lancé le capitalisme mondialisé, l'Europe et les États-Unis, sont d'abord des parties du monde ayant des racines culturelles judéo-chrétiennes. Comme nous le verrons, le développement de la civilisation du capitalisme se confond avec celui de la chrétienté et de ses croyances. Il en est la partie visible.

Ensuite nous sommes concernés parce que cette civilisation à laquelle nous appartenons doute de plus en plus d'elle-même. Pas seulement parce qu'un nouvel Alaric, lui aussi formé militairement par l'empire, un certain Ben Laden, l'a frappé en son cœur économique le 11 septembre 2001. Mais surtout parce que c'est maintenant la croyance dans le capitalisme lui-même qui est en crise. Comme si celui-ci implosait de l'intérieur.

En effet, la crise du capitalisme globalisé que nous traversons n'est pas qu'un aléa de la croissance économique mondiale. C'est une crise plus profonde - économique, politique, sociale et morale - de la civilisation occidentale arrivée peut-être à ses limites. C'est la crise de nos valeurs fondamentales. C'est la crise de l'hypercapitalisme né dans les années 1980, stade ultime du développement de la civilisation du capitalisme. Véritable culte du marché appliqué à toute l'existence humaine, l'hypercapitalisme s'écroule sous nos yeux. Enrichissant les riches et ne laissant aux plus pauvres que les miettes du festin, il fonctionnait sur un espoir d'hyperconsommation des classes moyennes, à l'infini. La vie à crédit devait financer la bulle. Le krach du crédit en 2008, brusque retour à la réalité, a brisé ce rêve. Il révèle l'inéluctable appauvrissement des classes moyennes, piliers de la démocratie, invitées à passer à la caisse pour refinancer le système.

Plus grave, l'hypercapitalisme a trahi cette « passion pour l'égalité » qui, selon Tocqueville et les philosophes des Lumières, était la marque des peuples démocratiques. Il entraîne dans sa chute la démocratie et ses valeurs qu'il a privatisées avant de les vider de leur sens. Or, si la démocratie a besoin du capitalisme, le capitalisme n'a pas forcément besoin de la démocratie pour survivre. Et d'autres empires piaffent d'impatience de montrer leur hégémonie sur le devant de la scène mondiale.

Qu'adviendra-t-il après la chrétienté, après la démocratie, après l'hégémonie de l'Occident ? Que faire?

Pour répondre, nous devons tout d'abord comprendre la nature religieuse du capitalisme, puis analyser en quoi l'hypercapitalisme constitue un détournement des valeurs de la civilisation chrétienne avant d'identifier les lignes de force qui conditionneront en grande partie notre avenir.

Si nous voulons sauver la démocratie et nous réapproprier la politique, si nous voulons réinventer un capitalisme à visage humain, si nous voulons sauver l'écosystème de notre planète pour simplement survivre, nous devons répondre dans l'urgence à une seule question : « À quoi croyons-nous ? »

Didier Long, Capitalisme et christianisme.




Né dans les années 1980, l'hypercapitalisme s'écroule sous nos yeux.

II n'est pourtant pas inévitable que la civilisation du capitalisme se termine dans le chaos. Cette civilisation a une histoire. Née du rêve d'égalité des citoyens d'Athènes, elle fusionne avec le christianisme et apparaît concrètement dans les monastères au Moyen Age. Ces World Companies seront les premières sociétés de production capitalistes. Au XIIle siècle, les ordres mendiants nés avec les villes en pleine expansion seront les premiers théoriciens de l'économie moderne, réfléchissant à la manière de mettre la richesse au service du bien commun. La révolution industrielle portée par l' " esprit du capitalisme " de la Réforme, la liberté d'entreprendre et les Lumières poursuivront cet élan. L'idéal de liberté, d'égalité et de fraternité chrétienne est donc fondateur de la civilisation du capitalisme. Sans le judéo-christianisme ces valeurs n'existeraient pas.

A la lumière de cette histoire, la cupidité et le cynisme n'ont rien à voir avec le capitalisme. Ils n'en sont que la perversion. Si nous voulons sauver la démocratie et réinventer un capitalisme à visage humain, nous devons donc répondre à une seule question : A quoi croyons-nous ? La fraternité ou l'argent ?

L'auteur :

Didier Long a été moine bénédictin, éditeur et artiste pendant dix ans à l'abbaye de la Pierre-Qui-Vire avant de devenir consultant McKinsey. Il dirige aujourd'hui un cabinet de conseil en stratégie Internet. Auteur de plusieurs livres dont Défense à Dieu d'entrer (Denoël, Prix Maisons de la presse 2005) et Pourquoi nous sommes chrétiens (Cherche Midi) Didier Long a publié en 2008 Jésus le rabbin qui aimait les femmes chez Bourin.

Site de Didier Long

jeudi, juillet 12, 2012

Un pauvre hère





Quand Claude Duneton se penche sur l'origine de certaines expressions, il nous fait découvrir des pratiques chrétiennes pas très catholiques.

Un pauvre hère

Dans la même série des parias (du « tamoul parayan homme de la dernière caste des Indiens, qui est un objet de mépris et d'exécration ») « le pauvre hère » a sa place assurée.

Quittez les bois, vous ferez bien,
Vos pareils y sont misérables,
Cancres, hères et pauvres diables
dit le gros chien de La Fontaine au loup maigre et affamé.

Deux hypothèses sont en présence pour ce hère unique. Traditionnellement on le fait venir de l'allemand Herr, « seigneur », employé par dérision, mais pour Bloch & Wartburg « il n'est pas impossible qu'il se rattache plutôt à haire », et ce serait alors un pèlerin, un moine mendiant ou autre pénitent de choc portant la « haire ».

Un usage bien oublié que cette chemise en crin ou poil de chèvre, appelée aussi cilice, mise à même la peau pour se faire mal, pour se torturer, s'écorcher l'épiderme en marchant, dans la plus pure tradition masochiste appelée gaiement « esprit de mortification »... Certains y ajoutaient même des clous pour être bien sûrs de leur effet ! Saint Louis, monarque passablement réactionnaire et confit en dévotion, était friand de ces plaisirs — d'où son grade posthume : « En l'abeïe du Lis sont les heres que St Loys portait, une faite à la manière de gardecors longue jusque desouz la ceinture, et l'autre faite à la manière de ceinture... »

Pourtant la haire était un objet décrié depuis longtemps et le symbole de l'hypocrisie religieuse de celui qui « en fait trop ». Molière a repris cette notion-là dans Tartuffe : « Laurent donnez-moi ma haire avec ma discipline », mais la plaisanterie comme le personnage étaient traditionnels depuis des siècles. En 1225, alors que Saint Louis était encore un gamin, le Roman de la Rose présente Papelardie, l'hypocrite, la bigote, la fausse marmiteuse toujours occupée :

De fere Deu prieres faintes
et d'apeler et sainz et saintes
...
fu par samblant ententive (appliquée)
don tôt a bones ovres faire,
et si (et aussi) avoit vestue haire.

En tout cas, c'est bien dans le sens de pèlerin, de moine errant, et faux dévot, que Rabelais emploie le mot. Il défend l'entrée de son abbaye de Thélème à beaucoup de gens, mais en tout premier lieu il est écrit sur la porte :

Cy n'entrez pas, hypocrites, bigots
Ny Ostrogotz, precurseurs des magotz (singes hypocrites)
Haires, cagotz, caffars empantouflez,
Geux mitouflez, frapars escorniflez (moines mendiants),
Befflez, enflez, fagoteurs de tabus, etc.
(Gargantua, chap. XXII.)

Il est vrai qu'il emploie aussi ailleurs « pauvre haire » pour désigner un pénis ! Panurge ayant manqué d'être rôti à la broche par les Turcs raconte : « Une jeune Tudesque [...] regardoit mon pauvre haire esmouché, comment il s'estoit retiré au feu : car il ne me alloit que jusques sur les genoulx » (Pantagruel, chap. II). A moins que justement, son zizi, avec son capuchon, ne lui fasse penser à un moine !...

Enfin le pauvre hère est un minable. A la même époque Bonaventure Des Périers parle d'un « renard qu'il avait fait nourrir petit ; et lui avait-on fait couper la queue, et pour cela l'appelait-on le hère ».

Remarque pratique, qui peut rendre service à certains : « Here, est aussi un jeu de cartes, où l'on ne donne qu'une carte à chaque personne. On la peut changer contre son voisin, et celui à qui la plus basse carte demeure perd le coup. Le here est le jeu des pères de famille, parce qu'ils y font joüer jusqu'aux plus petits enfans » (Furetière).

Claude Duneton, La puce à l'oreille.



La puce à l'oreille

Qui irait soupçonner que mener une vie de bâton de chaise, sous son apparence bon enfant, cache probablement une gauloiserie des plus vertes ? Ou qu'avoir la puce à l'oreille eut pendant des siècles un sens uniquement érotique ? Que casser la graine est parti d'une plaisanterie de vignerons, que le rapprochement des vessies et des lanternes (qu'il ne faut pas confondre !) remonte à l'époque romaine ? L'histoire des expressions est une véritable boîte à surprises. Après vingt-cinq années de recherches et de publications diverses sur le sujet - parmi les plus récentes dans la rubrique " Le plaisir des mots " du Figaro - Claude Duneton, auteur du Bouquet des expressions imagées (Le Seuil), dévoile ici les doubles fonds des images qui parlent.

mercredi, juillet 11, 2012

Au nom de Dieu clément et miséricordieux




Condamnation à mort de khalida Messaoudi par des islamistes algériens

Au nom de Dieu clément et miséricordieux
Mouvement pour l'État islamique

De la part des soldats de Dieu, alliés et dépositaires du Clément, aux collaborateurs du Despote, alliés et dépositaires de Satan

COMMUNIQUÉ ET AVERTISSEMENT

Prénom : Khalida
Nom : Messaoudi

Les hommes du Djihad en Algérie ont pris le chemin vers la construction de l’État de l'islam, l'État d'il n'y a de Dieu qu'Allah et Mohammed est son prophète. Ils ont déclaré la guerre aux despotes dont l'opposition à l'islam et son peuple a été prouvée et ils ne comprennent que le langage des armes.

A partir de là, et pour avoir la conscience tranquille devant Dieu et l'Histoire, les hommes du Djihad islamique adressent un avertissement solennel à tous ceux qui pensent pouvoir se dresser face aux soldats de Dieu et qui en fait ont été élevés dans les bras du Despote, lui offrant des services — de quelque nature et lieu que ce soit — contre le mouvement du Djihad islamique.

Donc les hommes du Djihad islamique disent à ces apostats collaborateurs du Despote, que la force de frappe et la longueur du bras armé islamique augmentent de jour en jour — grâce à l'aide de Dieu — et qu'il est capable plus qu'à aucun autre moment de poursuivre tous ces traîtres, apostats et criminels, où qu'ils soient.

Rien n'arrêtera les soldats de Dieu qui les poursuivront et les tueront, qu'ils soient à l'intérieur ou à l'extérieur, qu'ils s'entourent de remparts imprenables ou même s'ils s'accrochent aux rideaux de la Kaâba. Qu'ils [les collaborateurs] ne comptent surtout pas sur la protection de leur Despote car les despotes tombent les uns après les autres, du plus petit au plus grand. Et qu'ils sachent que leurs soutiens à l'étranger ne sont pas du tout à l'abri du bras du Djihad islamique.

Alors, ou vous cessez votre opposition au Djihad islamique, ou sa violente tempête vous emportera.

Ceci représente notre premier et dernier avertissement.

Sachez que celui qui avertit est absous et qu'il ne vous restera aucune excuse après ce communiqué.


Autre lieu et même barbarie, toujours au nom de Dieu clément et miséricordieux, les intégristes religieux afghans s'inspirent d'une sourate du coran condamnant l'adultère et scellent l'arrêt de mort d'une femme.


Les intégristes se livrent aussi à des violences sexuelles sur les enfants... Mais ils le font au nom de Dieu, précise Khalida Messaoudi dans une interview. Le journal Horizons rend compte d'une affaire qui a eu lieu à Blida, le fief intégriste. Un imam, prédicateur du F.I.S., s'est attaché un gamin de quatorze ans, et l'a violé en voyage, à Oran. On savait encore beaucoup d'autres choses. Mais comment les faire connaître ? Jusqu'à ce que, dernièrement, le pouvoir ouvre l'antenne télévisée à un prédicateur repenti. Pour mieux justifier la répression, bien sûr. Personnellement, tout ce qui ressemble à de la délation me met profondément mal à l'aise. Et je me suis demandé pourquoi, au lieu de laisser la parole à cet homme, ceux qui nous dirigent ne nous la donnent pas, à nous qui proposons une autre société. Toujours le même problème... Bref, j'en viens à cette affaire. Il y a quelques années, le G.I.A. a enlevé deux prédicateurs pour les besoins de ses tribunaux islamiques : d'ordinaire, c'est « l'émir » qui y rend la « justice », mais lorsqu'il fait défaut, il faut un imam consacré pour le remplacer. Le premier des deux kidnappés appartenait au mouvement Hamas, suspect aux yeux du F.I.S. d'avoir des accointances avec le pouvoir. Ce prédicateur, animateur important de la daâwa islamique, a refusé de légitimer les fatwas qui impliquaient la violence et la mort des cibles désignées. Il a été retrouvé mutilé, décapité, et coupé en morceaux. Le second a accepté de le faire. Mais il a réussi à s'enfuir et, très perturbé psychologiquement par ce qu'il avait fait et vu, il est passé aux aveux. Il a raconté son passage dans le monde de la mort, devant l'Algérie tout entière. Il a notamment évoqué tous ces viols d'enfants pour lesquels il avait été forcé de donner sa « bénédiction ».


F.I.S. : Front islamique du salut (الجبهة الإسلامية للإنقاذ, al-Jabhah al-Islāmiyah lil-Inqādh).

G.I.A. : Groupe islamique armé (arabe : الجماعة الإسلامية المسلحة, al-Jama'ah al-Islamiyah al-Musallaha)


mardi, juillet 10, 2012

Les Cosmocrators de l'ombre





Jean Prieur, bientôt centenaire, n'est pas pressé de quitter notre monde, et pour cause : ce spécialiste de l'au-delà, auteur de nombreux livres, est convaincu que l'autre monde est peuplé d'entités peu avenantes.

Les Cosmocrators de l'ombre, les Dominations, les Puissances du chaos... auraient quitté l'inframonde et se répandraient dans les sphères astrales ainsi que dans l'atmosphère terrestre afin de détruire l'humanité.

« Ces êtres spirituels sont foncièrement hostiles à l'homme, explique le théiste Jean Prieur. Ils le jalousent d'avoir été créé à l'image de Dieu et destiné à la vie éternelle ; de tout temps, ils conspirent contre son bonheur présent et à venir et ils font tout pour provoquer sa déchéance. Ils désirent ardemment la destruction, non seulement de l'humanité, mais aussi de l'animalité qu'ils atteignent à travers la barbarie de l'espèce qui se croit supérieure.

Ce qu'ils veulent, c'est le retour du chaos, c'est la destruction de toute loi physique ou métaphysique. Ce qui les inspire : c'est l'informe, l'absurde, l'inorganique.

Ces puissances de méchanceté et de désespoir sont aussi des puissances de confusion : confusion volontaire du mal et du bien, du faux et du vrai, du hideux et du beau. Soldatesque sournoise, elles attaquent sur tous les fronts.

Sur le front de la pensée, en élevant le non-sens et l'ennui à la dignité de genre littéraire et le nihilisme à la hauteur d'un système philosophique. Il s'agit pour elles, et pour leurs complices provisoirement incarnés, de détruire le rationnel, puisqu'un spirituel sain ne peut s'édifier que sur du rationnel sain.

Sur le front de la musique, en répandant le grinçant, le dissonant, le discordant, en déversant sur une humanité abrutie les vibrations mauvaises.

Sur le front des arts plastiques et du spectacle, en exaltant le morbide et le sordide, le criminel et l'excrémentiel.

Sur le front de l'esprit, en suggérant le démantèlement de cette charte de l'espérance qui a pour nom Nouveau Testament et en calomniant les hommes qui l'ont écrit.

A l'heure actuelle, les puissances de méchanceté ouvrent un nouveau front : le front biologique.

La destruction de la nature fait partie de leur programme. La souffrance des bêtes les réjouit presque autant que la souffrance des hommes. Quand on parle de souffrances des bêtes, on est bien obligé de constater que les religions y contribuent avec entrain. Que de rituels comportent toujours des sacrifices d'animaux ! Certes, il est plus facile d'égorger un mouton que de changer de vie. Et que dire des sacrifices ordonnés par la religion la plus récente : la science ? Toutes ces agonies animales créent des vibrations délétères qui empoisonnent l'atmosphère de la planète. Aussi longtemps que subsisteront le martyre et le massacre des innocents, que ce soit au nom des Dieux ou du progrès, il n'y aura pour les Inhumains aucun espoir d'évolution. Comment leur faire comprendre cette tragique loi de la réversibilité des horreurs ? »

Jean Prieur, Les visiteurs de l'autre monde.

Les visiteurs de l'autre monde

Dans ce livre qui vient après Témoins de l'Invisible et Les morts ont donné signes de vie, l'auteur présente une suite de récits où seuls les noms sont changés, mais dans lesquels les situations ont été vécues et les passions ressenties soit dans ce monde, soit dans l'Au-delà qui n'est pas une nécropole, mais un monde vivant.




Blog de Jean Prieur

dimanche, juillet 08, 2012

La radicalisation islamique en Occident





Les révolutions arabes ont provoqué un réveil islamique. Ce réveil se propagera-t-il dans les banlieues ? Doit-on redouter une radicalisation islamique en Occident ?

En France, l'engagement militant au nom de l'islam est le fait de jeunes musulmans de deuxième génération, acculturés, francophones, ayant une faible formation religieuse, scolarisés, mais en échec professionnel ou déçus par les perspectives de promotion sociale. Ils sont originaires des banlieues « chaudes », ont parfois un passé de petite délinquance mais ne sont pas tous des marginaux, loin de là : beaucoup en effet ont réussi leurs études mais n'ont pas trouvé de débouchés à la hauteur de leurs attentes. Ils acceptent des postes désertés par les « Français de souche » : maîtres auxiliaires en sciences dans les collèges difficiles, animateurs ou médiateurs dans les quartiers chauds. Bref, ils sont renvoyés au milieu qu'ils cherchent à fuir. L'islam est pour eux une occasion de recomposition identitaire et protestataire, qui se fait sous deux formes (compatibles entre elles) : la construction d'un espace islamisé local, autour d'une mosquée, l'accession à l'oumma par la participation à un réseau internationaliste. D'un seul coup, on est dans la cour des grands : on se construit contre la civilisation dominante, contre l'hégémonie américaine. Cette recomposition identitaire fondée sur l'islam explique aussi la présence de convertis : on n'est plus dans une situation de diaspora, mais de construction d'une identité protestataire. Il est significatif que ces jeunes ne retournent pas dans les pays d'origine de leurs parents (quand il y en a un) pour y mener le jihad, mais préfèrent se diriger vers les jihad en cours (Afghanistan), à la périphérie du monde musulman. Leurs références sont vraiment internationalistes.

Il s'agit bien de l'islamisation d'un espace de contestation sociale et politique et d'un nouveau tiers-mondisme, dont le symétrique et concurrent est le mouvement anti-mondialisation, qui recrute dans des milieux beaucoup plus intégrés. Personne ne milite plus dans les banlieues, sauf les militants islamistes. Or, beaucoup de jeunes trou-vent dans le discours anti-occidental des dirigeants néo-fondamentalistes en Europe un moyen de rationaliser leur exclusion et leur opposition. Abou Hamza et Qatada prêchent régulièrement sur le thème de la fallacité de l'intégration. « L'Occident a considérablement opprimé notre nation. Renforcer les racines de la religion dans notre nation, c'est rejeter l'idéologie occidentale », déclare Qatada. Il ne mentionne jamais le christianisme, mais toujours l'« Ouest », la culture et la société dominantes. Ils disent aux jeunes qu'ils seront toujours des exclus.

Quelles perspectives alors ? Les raisons de la réislamisation ne sont pas près de disparaître. Mais islamisation et radicalisation ne sont pas synonymes. Il convient d'abord de voir que beaucoup de ces retours paroxystiques à l'islam ne sont que des moments dans des histoires de vie autrement plus complexes. En Iran comme en France, il y autant d'anciens radicaux chez les musulmans modérés que d'anciens communistes chez les libéraux.[...] Nous pouvons dire que, certes, l'islam humaniste fait partie de la solution et non du problème. L'islam conservateur qui veut jouer la carte du multiculturalisme pour se faire reconnaître est par définition contraint à la négociation et à la recherche d'alliances (avec d'autres religions par exemple). C'est le cas en particulier des grandes organisations comme l'UOLF, qui ont choisi, contre la stratégie de rupture et d'internationalisation, la négociation sur une base moins idéologique que de logique d'organisation (impossibilité de rester marginale). La plupart des imams de mosquée sont dans une quête de reconnaissance, voire de notabilisation (être reçu par le préfet au même titre que l'évêque, participer aux commissions administratives et aux plateaux de télévision). La stratégie de ghetto prônée par les néo-fondamentalistes pose ses propres limites, car elle s'applique d'abord contre les autres musulmans ; le phénomène de la communauté locale autour d'un imam charismatique isole plus qu'il ne fait tache d'huile.

Restent les réseaux radicaux internationalistes. Ils sont et resteront marginaux tant qu'il n'y aura pas une véritable stratégie pour déterminer leur action. Le succès de l'opération du 11 septembre ne doit pas masquer le fait qu'il s'agit d'un acte gratuit, détaché de toute réelle stratégie. Ses seuls effets stratégiques sont la reformulation par les Américains de la menace et de la manière d'y répondre. Quelles que soient les critiques que l'on émette envers la réponse américaine, une conclusion s'impose : l'initiative est à Washington, et non pas dans les grottes d'Afghanistan où pourrait survivre un état-major ben-ladeniste.

Le problème de la radicalisation telle qu'elle existe autour d'Al-Qaïda est qu'elle ne correspond en rien à la constitution d'un mouvement de type révolutionnaire. Ce n'est ni le Parti communiste, ni l'ETA basque ou l'IRA irlandaise, ni le PKK kurde. Il n'y a ni parti politique organisé ni organisations frontistes pour mobiliser les masses, ni relais dans la société (syndicats, associations d'étudiants, de femmes, de jeunes, etc.), ni presse, ni compagnons de route. Bref, le peuple est laissé sur le bord de la route, en téléspectateur ou en amateur de jeux vidéo. Al-Qaïda n'est qu'une secte, millénariste et suicidaire.

Or cette conclusion n'est pas seulement nôtre : elle a été aussi tirée par bien des néo-fondamentalistes radicaux. Ben Laden a lancé le jihad et il a échoué. Bien plus, la riposte américaine a partout nui aux musulmans, qu'il s'agisse des combattants tchétchènes ou palestiniens, ou tout simplement des clandestins paisibles qui faisaient leur « trou » en Amérique. Le débat rappelle celui qui était récurrent entre organisations gauchistes et léninistes dans les années 1920 et 1930: le rapport entre la mobilisation politique des masses et le déclenchement de la révolution. Faut-il mobiliser les masses par l'action ou bien privilégier le travail politique en profondeur, la conscientisation et la mobilisation ? Bin Laden a choisi l'action, et il a échoué. Aujourd'hui, les autres organisations rappellent qu'elles ont toujours insisté sur le caractère préalable de la da' wat — la prédication —, et elles sont confortées dans ce choix. Les organisations dawatistes (Hizb ut-tahrir, Tabligh, salafistes) ne sont pas touchées par l'échec de Ben Laden et vont continuer leur travail. Mais ici aussi le mouvement pose ses propres limites : en insistant sur la réislamisation au lieu de la conversion, il reste enfermé dans une population musulmane qui est en situation de minorité. Il contribue à créer des isolats, qui ne pourront peser à long terme sur la vie politique qu'en se banalisant à leur tour. Nous ne pouvons que répéter ce que nous disons depuis des années : la réislamisation peut poser des problèmes de sécurité et de société, mais elle n'est pas une menace stratégique.

Olivier Roy



Pour mieux dépasser une vision schématique et manichéenne trop souvent répandue, la lecture de L'Islam mondialisé permet de se remettre les idées en place sur un sujet complexe et très sensible. Olivier Roy, grand spécialiste de l'Afghanistan ainsi que des conflits arabo-musulmans livre un essai éclairant la véritable position de l'islam aujourd'hui et l'influence trop souvent éludée de l'Occident sur les mouvements néo-fondamentalistes. 

Pour Roy, ce que nous parvenons difficilement à admettre, c'est que les mouvements islamistes les plus radicaux aient été forgés, pensés depuis l'Occident. Par exemple, Kalhed Kelkal pour les attentats en France en 1995, Ahmed Ressam et Mohamed Atta pour ceux des États-Unis en 2001 "se sont pour la plupart réislamisés en Occident". Rompant avec leur pays d'origine, avec leur famille et leur pays d'accueil, certains islamistes vont dévier vers le terrorisme réinventant un islam à leur façon. C'est-à-dire, et c'est ce que nous oublions de voir la plupart du temps, qu'ils "sont loin de représenter la communauté religieuse dont ils se sont mis à la marge". En effet, pour Olivier Roy, le monde islamiste n'a pas changé de l'intérieur mais bien de l'extérieur. Les terroristes, qui sont à leur manière des dissidents de l'islam, veulent créer un "néo-fondementalisme". Leur action bouscule les valeurs religieuses de l'islam. L'autre exemple sur lequel Roy développe sa thèse est bien sûr celui de Ben Laden. Comme le fait justement remarquer l'auteur, il ne se prend pas à Saint-Pierre de Rome mais à Wall Street ; sa guerre n'est pas une guerre de religion, mais une guerre contre l'impérialisme souverain. 

Dans cet essai balayant les idées reçues – tant on nous présente souvent le terrorisme comme un monstre venu d'ailleurs, mystérieux et barbare –, Olivier Roy démontre que "la radicalisation islamique vient d'Occident". Magistralement, il dévoile les crises du monde musulman qui, asphyxiée de l'intérieur, se recompose de l'extérieur en intégrant des schèmes de pensée occidentaux. Il nous présente un islam en pleine mutation, dont les pratiquants affirment de plus en plus une individualisation de leur rapport à la foi et un refus des hiérarchies traditionnelles. Ce livre précieux permet de mieux saisir la force de l'Histoire en marche. 
Denis Gombert

samedi, juillet 07, 2012

Après que le poète a disparu





Juillet 1993, Léo Ferré meurt à Castellina in Chianti (Toscane).

« Le mec s'est calté, un 14 juillet, par temps dégueu. Il pleuvait des cordes à nœuds sur la république. Sur ce qui en restait. Léo Ferré est parti. On le comprend. Rester à ce point, obstinément, radicalement en marge de sa pensée unique, ce n'était plus tenable. Un « barbare » qui ne laissait pas les flics de l'idéologie officieuse pisser à sa place sur les glycines. Qu'est-ce qui reste d'ailleurs de la poésie, qu'est-ce qui reste de la musique, qu'est-ce qui reste de leur osmose unique et sublime — la chanson — quand règnent, complices du même conformisme de plomb, Lorie, Pierre Boulez et Jean-Pierre Foucault ?

« Il est parti sans crier gare. » Les cheveux devant ; les pieds, eux, qu'il mit si souvent dans le plat, étaient déjà dans la fourmilière. Les petits et gros délinquants du showbiz étaient enfin débarrassés de cette tronche de Belzébuth crucifié par erreur à la place de l'anar de Dieu. Il fut un temps où on le censurait à la radio. Pas parce que c'était trop subversif, mais parce que ce n'était pas assez con. Ces gens-là, monsieur, n'aiment pas les mots incotables à la Bourse du lieu commun. C'est leur boulot de gardes-chiourmes de l'inintelligence que de traquer (car ils ne sont sensibles au verbe que lorsqu'il se fait très cher) toute phrase qui pleure, grince ou gronde. Mieux vaut à leurs yeux une vacuité qui hurle qu'une pensée qui chante, une idiotie qui gigote qu'une idée qui danse. Ils ont conquis la télé. Léo n'avait plus qu'a mettre les bouts.

Léo, sous de Gaulle, avait cru renifler une odeur de dictature. Le pauvre! A l'époque il y avait de nombreux journaux, représentant des sensibilités diverses et défendant des points de vue contradictoires.

Qu'est-ce qu'un Léo Ferré aurait eu à foutre plus longtemps dans ce monde-là ? Une seule pensée, donc une seule chanson. Dictature des clans cadenassés à double tour. Plus de place pour le troubadour solitaire qui dérange la quiétude de notre société féodale. Un couplet non estampillé et les archers de la garde médiatique décochent leurs flèches de tout bois. Léo Ferré chantait les poètes. La poésie est morte et la chanson a été bradée au CAC 40. « Poètes, vos papiers ! » il n'y avait donc plus de place pour Léo. »

Jean-François Kahn


vendredi, juillet 06, 2012

Satan, va-t'en !





Selon un psychiatre, le Docteur Kenneth McAll, pour soigner la maladie il faut combattre Satan.

Dans son livre « Médecine psychique & guérisons spirituelles », vendu à plus de 100 000 exemplaires et traduit en 15 langues, Kenneth McAll écrit :

« Une jeune fille de dix-huit ans alla voir un film sur Satan et les sciences occultes. Sérieusement troublée par ces images elle se dit qu'avec le temps elle oublierait le choc reçu. Mais ce ne fut pas le cas : elle devint de plus en plus obsédée par des apparitions du Malin et des voix qui l'incitaient à se suicider. Elle dut arrêter son travail et commença à prendre des stupéfiants qui en firent graduellement une droguée. C'est neuf mois plus tard qu'elle vint me consulter, se reprochant amèrement d'avoir regardé ce film. Il était clair que les tranquillisants que je lui aurais proposés n'auraient pas eu plus d'effet qu'un emplâtre sur une jambe de bois ! C'est pourquoi je l'invitai à prier avec moi, ce qu'elle accepta de bon cœur. Le plus simplement du monde, j'invoquai le nom de Jésus-Christ pour que le pouvoir maléfique qui la tyrannisait perdît toute emprise sur sa vie. Ce fut la fin de ses tourments. Elle n'eut plus de visions, n'entendit plus de voix et cessa de se droguer.

Je citerai un autre cas. Le médecin d'un Institut d'Études Bibliques m'envoya Brian qui y suivait des cours. Cet étudiant divorcé, frisant la trentaine, avait un comportement qui perturbait le train-train quotidien de l'établissement. Il ne pouvait dormir, en proie à d'inexplicables terreurs nocturnes.

Brian m'exposa que, pendant son enfance, ses parents se querellaient continuellement, qu'ils avaient fini par divorcer et que, souhaitant s'en éloigner le plus vite possible, il s'était engagé dans la Royal Air Force. Certains des amis qu'il s'était faits dans ce milieu l'avaient initié à l'utilisation du oui-ja, à la numérologie et aux tarots. Il s'adonna à l'étude de l'astrologie et participa même notamment à des assemblées de sorciers. Mais il s'alarma au plus haut point quand, ayant appris la technique de l'écriture automatique, il se mit à répéter d'une façon irrépressible les mots : « meurtrier allemand ».

Il alla consulter un médium qui utilisait des photographies de famille destinées à recevoir des messages de personnes défuntes. Elle lui fit observer qu'il présentait une ressemblance frappante avec un grand-oncle mort à la guerre. Cette femme s'était montrée fort active au sein d'une église non-conformiste mais, après avoir découvert ses aptitudes médiumniques, le seul fait de mentionner le nom de Jésus-Christ suffisait à la rendre incapable de communiquer avec les esprits.

Brian en vint à éprouver un ardent désir d'embrasser la foi chrétienne, raison pour laquelle il avait sollicité son admission à l'Institut d'Études Bibliques. Malgré cela, il ne parvenait pas à oublier les pratiques auxquelles il s'était appliqué, et surtout il était poursuivi chaque jour davantage par les mêmes mots.

Lorsque nous retrouvâmes la filiation des diverses branches de la famille, nous découvrîmes que le grand-oncle dont avait parlé le médium avait sauté sur une mine allemande pendant la guerre et n'avait jamais été convenablement consacré au Seigneur. Nous célébrâmes un service pour lui et Brian demanda pardon au Seigneur pour son comportement attaché à l'occultisme et au satanisme. C'est alors qu'il se sentit pardonné et totalement libéré, ce qui lui permit de terminer ses études sans difficulté. »

Afin de guérir ses patients, le docteur Kenneth McAll effectue des recherches généalogiques. Il est aussi l'auteur du « Guide de la guérison de l'arbre généalogique ». Les idées de Kenneth McAll font penser au mouvement sectaire de Bert Hellinger, les Constellations des familles.

« Bert Hellinger est connu pour avoir développé sa propre méthode de thérapie systémique familiale, où, partant du principe que la vie de chaque être humain est fortement déterminée par son histoire familiale, il considère que des exclusions, des drames et des secrets de famille se transmettent de génération en génération, telles des malédictions, et, par voie de conséquence, que « les ancêtres se mêlent de nos affaires » et qu’il faut en tenir compte « pour nous libérer sans nous détacher » de nos groupes de référence, à commencer par notre propre famille. »


Médecine psychique & guérisons spirituelles

Tel est notre paradoxe : nous vivons dans un Monde superstitieux... et qui, pourtant, ne croit pas à l'existence des Esprits.

Nier la réalité des Forces occultes est folie. Elles existent et sont positives ou négatives.

Comment vivre au milieu de ces tensions entre Ciel et Terre et comment assumer, paisiblement, cette condition de l'homme ? Dans le cas de Forces négatives, comment éviter d'être entraîné, puis victime... souvent aliéné sans que nous le sachions ? Comment s'en libérer ? Question capitale dans notre Monde d'envoûteurs.

Il s'agit là du premier ouvrage, à audience internationale, qui ose aborder ces thèmes de la vie quotidienne, au bord du troisième millénaire.

Certes, notre Monde est de plus en plus religieux, comme le souhaitait André Malraux... mais pour quel au-delà ?

L'auteur ? Un médecin généraliste devenu psychiatre, pour avoir observé d'étranges guérisons en Chine... alors que sa famille et lui-même étaient prisonniers des Japonais.

Membre associé du Collège Royal des Psychiatres d'Angleterre, célèbre dans le monde entier, l'auteur nous présente plusieurs cas dont certains ont des rapports étroits avec Conan Doyle, avec la NASA ou avec le Triangle des Bermudes... et ses témoignages sont des plus stupéfiants.


Cartoon :

Ils veulent nos âmes

  Henry Makow : "Ils veulent nos âmes. Les mondialistes veulent nous faire subir à tous ce que les Israéliens font aux Palestiniens. Et...