vendredi, février 01, 2013

L’appel de Bruxelles





Le luciférien Jean-Paul Bourre appartient à la mouvance européenne identitaire et néo-païenne de l'extrême droite. « Dès 1965, écrit-il, j’ai fait la connaissance psychédélique du diable, en quelque cinq cents microgrammes d’acide. L’expérience des hallucinogènes - comme le L.S.D. - avait ouvert une brèche dans les vieilles habitudes. On croyait que tout était possible, que l’univers était un bouillonnement de forces, d’énergies, que rien n’existait, en dehors de cette danse incroyable, et que les dieux et les démons nous offraient d’autres voyages, plus haut, plus loin. »


Création de l'internationale luciférienne

« Les temps sont venus de faire une UNION SOLIDE de toutes nos sociétés, il est grand temps que les fils et les filles de l’Hyperborée dressent la flamme des temps nouveaux et du surhomme divin, héritier du Graal et de la couronne boréale. De Samballah, la cité sainte de l’Agartha, arrive ce message Polaire : UNISSEZ-VOUS !… »

Cet appel, explique Jean-Paul Bourre, lancé de Bruxelles en 1975 par l’Ordre vert en vue de préparer l’avènement d’une Internationale Luciférienne, eut des répercussions qui dépassèrent de loin le monde de l’Occulte.

Si nous tracions la ligne souterraine partie de Bruxelles un jour de l’année 1975, nous assisterions à de curieuses rencontres, tant occultes que sociales, liées entre elles par l’ordre impénétrable de Lucifer : unification des loges d’obédience luciférienne, camps d’entraînement de militants néo-nazis quelque part dans les monts d’Auvergne, réunions occultes à Paris, rue d’Assas, où l’on retrouve le mercenaire J.K. en croisade pour l’Occident, et certains amis autour d’une table tournante, puis la mort de Franco et le départ d’un petit groupe de nostalgiques vêtus de noir quittant leur siège parisien, la rencontre dans une banlieue de Madrid du mage Lopez Rega, alors en exil, ancien bras droit de Juan Perron et spécialiste de la magie sexuelle… Tout cela sous la bannière noire de Lucifer, même si pour certains des acteurs de ce drame, cette bannière porte parfois d’autres couleurs... [...]

Pour l'Ordre vert, il est indispensable d’unir toutes les forces polaires et solaires avant l’ère du Verseau, et il faut que l’homme nouveau – le surhomme – se tienne prêt à prendre le destin de l’humanité en main, car lorsque le moment le plus critique de l’Âge noir sera venu, il n’y aura plus qu’un peuple porteur de la flamme : NOUS. Il faut créer un ordre de chevalerie aryen, et former une élite de Supérieurs détenant les secrets que possédaient nos ancêtres de l’Empire polaire.

Pour R.L., grand maître de l’Ordre vert (dit encore R. Lug), la naissance de l’homogalacticus ne peut se faire que par une intense préparation tant sociale que magique. Dès lors, la prise du pouvoir politique, chimérique aux yeux de l’homme de la rue, semble s’annoncer évidemment logique.

Il y a quelques années, poursuit Jean-Paul Bourre, R.L. m’écrivait personnellement afin de me convier à la grande assemblée luciférienne. Je ne répondis pas à sa lettre, car pour moi Lucifer, l’Ange prométhéen, ne pouvait descendre au cœur des petits intérêts personnels où l’initiation véritable n’est plus qu’une couverture littéraire pour transporter les armes, physiques celles-là, d’une autre subversion.

« Nous devons lutter, m’écrivait-il, contre les fils du Dragon noir, communistes, matérialistes, tarés, etc, pour que revienne le temps de notre race et son culte solaire, et si nous portons aussi, cher frère, le nom d’Église de Mithra, en réalité nous vénérons le Grand Lug, car Lug = Mithra = Râ = Lucifer : le même porte-emblème de la flamme sous divers noms à travers les âges, Lug étant celui du Verseau. » Lucifer revenait sous le nom de Lug, divinité du feu chez les anciens Celtes, et l’Ordre vert déclarait la guerre à l’humanité ordinaire, à l’homme de tous les jours appelé, dans les dossiers secrets de l’Ordre, humain type II, et cela au nom d’un Ordre supérieur et racial lorsque la roue solaire flottait sur Nuremberg.

« Historiquement, affirme L. en créant sa légende, j’ai fondé l’Ordre vert la nuit du 6 décembre 1970, avec quelques courageux adhérents. L’Ordre resta dans l’ombre pour des raisons ésotériques internes et ne fut rendu public qu’à partir du mois de septembre 1972. Depuis, de nombreuses adhésions nous arrivent de partout et divers mouvements celtes bretons sont entrés en contact avec l’Ordre vert. Qu’est-ce que l’Ordre vert ? C’est la tradition luciférienne des Celtes (!); c’est aussi le culte du dieu solaire mazdéen Mithra; la nature qui se dresse contre les tares de la pseudo civilisation, et contre les faux dogmes des Églises et des religions d’imitation! » Et de conclure, dans la langue celte : Mar n’ouzez-te te ket me oar ! (« Si tu ne sais pas, moi je sais) [...]

Le 14 mai 1975, les représentants des diverses associations lucifériennes étaient présents à Bruxelles, au temple de l’Ordre vert, afin de sceller la charte d’unification des Légions de Mithra (fer de lance de l’Ordre vert). [...]


Julius Evola, ce philosophe italien qui connaissait très bien la pensée prométhéenne, affirmait qu’au-delà des polémiques raciales qui agitent de nombreux mouvements traditionalistes seule existait pour lui la race mentale des Éveillés. Cette théorie n’est pas du tout celle de l’Ordre vert, dont le racisme ne s’exprime pas à mots couverts. R.L. déclare sans ambiguïté : « La Pureté du sang et des coutumes est l’une des choses à défendre, car le sang biologique peut influencer le comportement d’un individu; il faut bien admettre que les chromosomes d’un Aryen diffèrent de ceux d’un Bantou… » [...]

Les commandos du diable.

Ma tentative de réhabilitation du luciférisme peut s’expliquer par la démystification de certaines organisations satanistes qui n’ont rien à voir avec l’aristocratie mentale du dépassement de soi, avec la véritable ascèse luciférienne.

Comme je l’écrivais dans un magazine ésotérique (l’Autre Monde, le magazine de l’étrange, n° 11) en prenant comme exemple le nazisme, qu’un auteur moderne rattache à Lucifer (André Brissaud : « Les Agents de Lucifer ») :

Lucifer (Lux – Fer), le Porteur de Lumière, est l’incarnation d’une magie du feu, de type prométhéen, qui n’a rien à voir avec la déviation sataniste du nazisme. C’est vouloir confondre l’aigle et le charognard, faire de Prométhée, le Voleur de Feu, un fantoche rêvant les sommets qu’il n’atteindra jamais. Mais il existe dans la déviation magique des erreurs commises par des personnalités tentées par la volonté de puissance personnelle.

Ce fut ce qui arriva à J.B. alors dirigeant du mouvement Les fils du Feu et signataire de la charte de l’Internationale luciférienne. Pour les inspecteurs des Renseignements généraux du Puy-de-Dôme Les Fils du Feu étaient avant tout les maîtres doctrinaires de nombreuses organisations d’extrême-droite. Mais l’initiation ne s’arrêtait pas à la conférence ou à la table ronde sur les origines mythologiques de l’Occident ou sur la manière de vaincre la peur… L’initiation, du moins la pseudo – initiation, avait aussi lieu sur le terrain, tout près du camp d’entraînement militaire de la Fontaine du Berger, à quelque dix kilomètres de Clermont-Ferrand.

C’est dans ce lieu réservé, inaccessible pour le simple touriste ou le promeneur du dimanche, que se réunissaient au cours de l’été 1975 une trentaine de jeunes portant treillis et rangers, la matraque et la lance de bois à la main, afin de subir un entraînement digne des commandos militaires.

Dirigés par d’anciens mercenaires parachutistes, ce groupe d’action se préparait, au delà de la guérilla urbaine, au renouvellement magique annoncé par Les Fils du Feu présents sur le terrain.

Chemise bleue ornée du casque spartiate, J.B. et ses adeptes étaient là pour « réveiller dans chaque militant l’âme antique et prométhéenne de l’Empire polaire »…

Ce discours, identique à celui de l’Ordre vert qui avait aussi ses Légions de Mithra, se traduisait en actes précis au cours de rituels guerriers. Par exemple avant l’entraînement, les lances de bois (qui servirent aux militants d’Ordre nouveau à la Mutualité) étaient marquées des runes magiques du combat à l’aide du sang de chaque militant. Cette innovation luciférienne n’était pas pour déplaire aux nostalgiques du nazisme ivres d’un lyrisme guerrier anachronique. Trois figures runiques revenaient constamment sur les armes d’entraînement : Odin, le combat et le Pouvoir, tracée au sang à l’endroit précis où la main se referme sur le manche de l’arme. [...]

Allées et venues mystérieuses, liaisons constantes entre Bruxelles, Cologne et Paris… les lucifériens préparaient dans l’ombre les accords secrets qu’ils allaient signer à Madrid, avec Lopez Rega, mage et ancien ministre de Juan Peron. [...]

Pour les traditionalistes, lorsque les sociétés économiques se seront effondrées, resteront seulement les valeurs occultes qui se partageront la suprématie du globe… Alors l’homme devra choisir entre la Voie luciférienne et les Voies mystiques.

C’est à travers de nombreux bouleversements, des remises en question violentes, les tentatives magiques les plus folles, que l’aventure occulte, apparemment inextricable, laissera passer au grand jour les pionniers du Nouvel Âge, la race mentale dont parlais Julius Evola, celle qui osera enfin regarder le soleil en face.

Alors le « petit homme », celui qui s’accroche encore à l’égalitarisme, à la chaude promiscuité, aux délires génétiques sécurisant la race qui meurt, à sa minuscule volonté de puissance, ce petit homme ne sera plus qu’un rêve sans importance, une ombre qui passe, privée de la noblesse intérieure qui fera l’homme futur. Dans l’enseignement luciférien, il est dit que « la foudre préservera seulement ce qui lui ressemble ».

Jean-Paul Bourre




jeudi, janvier 31, 2013

Le chef du gouvernement mondial



Le film “Eyes Wide Shut” de Kubrick serait une allusion directe au programme Monarque et aux réseaux sataniques.

Selon Ferdinand Ossendowski, qui se disait informé par les plus hauts prélats du lamaïsme mongol, le siège du gouvernement mondial secret est localisé sous terre, idée qui se retrouve dans les écrits de William Cooper qui situe le gouvernement de l'ombre des USA dans la ville souterraine de Mount Weather, près de Bluemont en Virginie.

Le Roi du Monde, le monarque universel, régnerait depuis les entrailles de la terre. Ce royaume ténébreux se nomme Agartha, affirmait Ferdinand Ossendowski dont les révélations firent grand bruit à l'époque, au début du 20ème siècle. Dès la publication du livre de Ferdinand Ossendowski, « Bêtes, Hommes et Dieux », une table ronde, sur le thème de l’Agartha, fut organisée à Paris, par les Nouvelles Littéraires, réunissant Guénon, Maritain, Grousset, etc. René Guénon rencontra Ferdinand Ossendowski à plusieurs reprises avant de faire publier en 1927 son livre intitulé « Le Roi du Monde ». Pour René Guénon « le Roi du Monde doit avoir une fonction essentiellement ordonnatrice et régulatrice, (...) fonction pouvant se résumer dans un mot comme celui d'équilibre" ou d'harmonie", ce que rend précisément en sanskrit le terme Dharma ».

Mais Jean-Louis Bernard, un érudit dans les domaines de l’égyptologie, du tantrisme, du soufisme..., propose un autre regard sur le monde souterrain et son obscur monarque évoqués par Saint-Yves d’Alveydre, Ferdinand Ossendowski, René Guénon...

« La notion demeure floue, explique Jean-Louis Bernard, elle donna lieu à mythomanie, certains ésotéristes occidentaux s’étant prétendus missionnés par les « grands initiés » de la cité souterraine et reliés télépathiquement à eux. Ces missionnés (par eux-mêmes) finirent généralement leur existence dans la médiocrité ou le scandale. [...]

Le Roi du Monde, ce personnage serait caché au fond d’une cité souterraine que des radiations rendraient inaccessible aux humains. Ossendowski le décrit, lui et son assesseur, comme des momies animées ou comme des morts vivants, au visage voilé pour cacher leur crâne dénudé. Sans identifier vraiment le Roi du Monde à ce personnage, René Guénon crut en un représentant de Dieu sur la terre ; il voyait là un parallèle avec Melchisédech (" melk " = roi) qui, dans la Bible confirma la mission d’Abraham. 
Toutefois, si le personnage évoqué par Ossendowski correspond à quelque vérité fantastique, l’immortel troglodyte, au lieu d’être une figure de haute spiritualité, peut résulter tout aussi bien d’une formidable opération de magie noire. Mme Alexandra David-Neel qui connut le Tibet secret, fait état de pseudo-lamas (moines) – des morts vivants justement qui, en des lamaseries écartées, pratiqueraient un vampirisme de grand style : des vieillards plus que centenaires, morts, mais non biologiquement ; ils attireraient par magie des voyageurs égarés et les convaincraient de se laisser mourir rituellement afin d’acquérir du mérite ou un " bon karma ", valable en une autre vie ! En réalité, les "moines" viseraient à leur prendre leur vitalité par osmose, au cours d’une agonie savamment allongée… Il se peut encore que les momies d’une civilisation inconnue d’Asie centrale aient engendré des "marouts" = âmes mortes incarnées, et que ce "roi du monde souterrain" ne soit pas autre chose. [...]

Si le cadavérique " roi du monde " incarne effectivement une grand-guignolesque imposture ésotérique, il sera bien sûr le roi de tous les marouts, zombis et ombres mortes. Il freinerait la décomposition des ombres les plus redoutables et exploiterait ces fantasmes morbides pour égarer les mystiques et les intoxiquer. Il serait alors l’arcane du spiritisme mondial (ou channeling) dont les médiums lui serviraient de prêtres et de prêtresses... [...]

Mais qui alors tire les ficelles du Grand Marout ? Est-ce Dieu, Satan ou Lucifer ? La réponse est sans doute donnée par les fameux Hyksos – cavaliers d’Asie centrale qui occupèrent sauvagement l’Egypte durant un siècle et demi. Ils adoraient un dieu unique nommé Soutek (= Satan) et entreprirent la destruction méthodique des cultes égyptiens, à l’exclusion de celui de Seth (= Satan). En somme, leur mission occulte ou inconsciente, liée au "centre magique" qui les télécommandait d’Asie centrale, consistait à couper l’Egypte de son contact cosmique (culte d’Amon). Donc, à travers les Hyksos, Satan, le daïmon souterrain, se révoltait contre les hiérarchies cosmiques dont l’Egypte était le trône, tentant ainsi d’isoler la planète du cosmos. »

Vers la fin de sa vie René Guénon était devenu plus alarmiste à propos du grand monarque. Il tire la sonnette d'alarme dans l'un de ses derniers écrits : « Le règne de la quantité et les signes des temps ». Il y dénonce l'avènement d'un Chakravartî ou monarque universel à rebours dont le « Saint-Empire » instaurera le règne de la contre-tradition :

« Ce règne de la « contre-tradition » est en effet, très exactement, ce qui est désigné comme le « règne de l'Antéchrist » : celui-ci, quelque idée qu'on s'en fasse d'ailleurs, est en tout cas ce qui concentrera et synthétisera en soi, pour cette œuvre finale, toutes les puissances de la « contre-initiation », qu'on le conçoive comme un individu ou comme une collectivité ; ce peut même, en un certain sens, être à la fois l'un et l'autre, car il devra y avoir une collectivité qui sera comme l'« extériorisation » de l'organisation « contre-initiatique » elle-même apparaissant enfin au jour, et aussi un personnage qui, placé la tête de cette collectivité, sera l'expression la plus complète et comme l'« incarnation » même de ce qu'elle représentera, ne serait-ce qu'à titre de « support » de toutes les influences maléfiques que, après les avoir concentrées en lui-même, il devra projeter sur le monde. Ce sera évidemment un « imposteur » (c'est le sens du mot dajjâl par lequel on le désigne habituellement en arabe), puisque son règne ne sera pas autre chose que la « grande parodie » par excellence, l'imitation caricaturale et « satanique » de tout ce qui est vraiment traditionnel et spirituel ; mais pourtant il sera fait de telle sorte, si l'on peut dire, qu'il lui serait véritablement impossible de ne pas jouer ce rôle. Ce ne sera certes plus le « règne de la quantité », qui n'était en somme que l'aboutissement de l'« anti-tradition » ; ce sera au contraire, sous le prétexte d'une fausse « restauration spirituelle », une sorte de réintroduction de la qualité en toutes choses, mais d'une qualité prise au rebours de sa valeur légitime et normale ; après l' « égalitarisme » de nos jours, il y aura de nouveau une hiérarchie affirmée visiblement, mais une hiérarchie inversée, c'est-à-dire proprement une « contre-hiérarchie », dont le sommet sera occupé par l'être qui, en réalité, touchera de plus près que tout autre au fond même des « abîmes infernaux ».

Cet être, même s'il apparaît sous la forme d'un personnage déterminé, sera réellement moins un individu qu'un symbole, et comme la synthèse même de tout le symbolisme inversé à l'usage de la « contre-initiation », qu'il manifestera d'autant plus complètement en lui-même qu'il n'aura dans ce rôle ni prédécesseur ni successeur ; pour exprimer ainsi le faux à son plus extrême degré, il devra, pourrait-on dire, être entièrement « faussé » à tous les points de vue, et être comme une incarnation de la fausseté même. »


A propos de la monnaie :

Plus de soixante ans avant la crise de l'euro et du dollar (depuis 2009, les USA font fonctionner la planche à billets), René Guénon annonce que, durant le règne de la contre-tradition, "la monnaie elle-même, ou ce qui en tiendra lieu, aura de nouveau un caractère qualitatif (qualité prise au rebours de sa valeur normale), puisqu'il est dit que "nul ne pourra acheter ou vendre que celui qui aura le caractère ou le nom de la Bête, ou le nombre de son nom" (Apocalypse, XIII, 17)... »


Lire gratuitement « Le règne de la quantité et les signes des temps » :


Programme Monarque :

mercredi, janvier 30, 2013

Le nouvel ordre mondial selon Bill Cooper




Le doyen de la théorie américaine de la conspiration était Milton William Cooper, de St. Johns, Arizona ; il est l'auteur d'un compendium pour le mouvement millénariste et conspirationniste, Behold a Pale Horse (1991).

Fils d'un officier de l'armée de l'air, Bill Cooper est né en 1943 ; il a grandi dans différents pays, selon les affectations de son père. Après avoir quitté le lycée au Japon en 1961, il s'engagea dans l'Air force, puis la Navy en 1965. Alors qu'il servait à bord d'un sous-marin dans le Pacifique, Cooper aperçut pour la première fois une énorme soucoupe volante qui émergea de l'océan et s'envola dans les nuages. La soucoupe fut aperçue par d'autres membres d'équipage et par des officiers, mais seul Cooper fut menacé de prison s'il dévoilait ce qu'il avait vu. A partir de 1968, il fut affecté à l'espionnage naval. C'est là qu'il découvrit l'existence d'une conspiration d'un haut niveau dirigée contre les citoyens des États-Unis. Il était convaincu que l'espionnage naval avait participé à l'assassinat de John F. Kennedy, et en 1972, il avait amassé des informations dérangeantes classées secrètes sur les OVNIs, la Navy, le gouvernement secret, l'ère glaciaire à venir, le projet Galileo, et la stratégie pour l'établissement d'un Nouvel ordre mondial.

Bill Cooper quitta l'armée en 1975 et tenta alors de transmettre ce genre d'informations à la presse. Il affirme que les puissances cachées étaient prêtes à le supprimer. En Californie, une limousine noire poussa sa voiture vers une falaise, puis deux hommes descendirent jusqu'à la carcasse du véhicule. L'un d'eux se pencha pour vérifier son pouls, et l'autre demanda s'il était mort. Le premier répondit que ce n'était plus qu'une question de minute, et l'autre répondit que le boulot était fait. Un mois plus tard, la même voiture mystérieuse provoqua un nouvel accident. Cette fois-ci, Cooper perdit une jambe. Deux hommes lui rendirent visite à l'hôpital, le menaçant d'un accident fatal s'il persistait à vouloir divulguer des informations secrètes. Ces rencontres presque fatales, s'ajoutant à la découverte d'actions secrètes de la part des militaires et du gouvernement, convainquirent définitivement Cooper de la réalité d'une conspiration mondiale. Tout en continuant à collecter des
documents, il restait résolu à dévoiler la vérité de ces plans visant à soumettre l'humanité au Nouvel ordre mondial. C'est ainsi qu'il publia son livre, qu'il décrivait comme « plus proche de la vérité que tout ce qui a été précédemment écrit. »

Behold a Pale Horse est un amas chaotique de mythes de la conspiration, parsemé d'extraits de lois, de lettres officielles, de rapports et de documents visant à dévoiler la sombre perspective d'un gouvernement mondial imposé au peuple américain contre sa volonté et en conflit flagrant avec la Constitution. Le premier chapitre contient un mémorandum gouvernemental soi-disant secret titré « Armes silencieuses pour guerres tranquilles ». Découvert dans une photocopieuse IBM lors dune vente aux enchères en juillet 1986, ce document est devenu très célèbre dans les milieux conspirationnistes. Nous y apprenons que l'élite a décidé en 1954 d'exploiter les opérations de recherche, la technologie informatique et la finance pour modeler une société entièrement prévisible et manipulable, dans le but de transférer la richesse des masses indisciplinées et irresponsables vers un petit nombre de gens valeureux et intelligents. L'éducation garderait les masses inférieures indisciplinées et ignorantes, tandis que les sujets triviaux traités par les médias et les divertissements vulgaires se chargeraient de les maintenir dans la confusion, la désorganisation et la distraction. Le document est rédigé dans un jargon technique qui mêle ingénierie sociale, économique et électronique, pour suggérer que tous les individus d'une société peuvent être programmés, car « ceux qui ne se servent pas de leur intelligence ne valent pas mieux que des animaux dépourvus d'intelligence. De tels individus sont comme des bêtes de somme... »

Cooper voit dans ce document une déclaration de guerre formelle des Illuminati contre les citoyens des États-Unis. Il affirme que les citoyens pacifiques sont en droit d'user de tous les moyens, y compris la violence, pour identifier, contre-attaquer et détruire l'ennemi. Le deuxième chapitre, « Sociétés secrètes et Nouvel ordre mondial », contient les investigations et les réflexions de Cooper sur le complot mondial contre l'indépendance et la liberté. Les racines de la conspiration des Illuminati remontent à l'ancienne Confrérie du Serpent, et donc incluent les Templiers et les francs-maçons. Cooper croit que la plupart des sociétés secrètes modernes n'en forment en fait qu'une seule, dotée d'un but unique. Leur apparente pluralité masque la conspiration visant à soumettre l'humanité :

« L'Ordre de la quête, la Société de JASON, la Roshaniya, la Qabbalah, les Templiers, les Chevaliers de Malte, les Chevaliers de Colomb, les jésuites, les maçons, l'ordre mystique de la rose-croix, les Illuminati, le parti nazi, le parti communiste, les membres du Conseil des relations extérieures, la Fraternité du Dragon, l'Institut royal des affaires internationales, la Commission trilatérale, le groupe Bilderberg, le Vatican, le Russell Trust, Skull & Bones, Scroll & Key [société secrète des universités de Yale et Harvard]. Toutes ces organisations ne forment qu'une seule entité et travaillent dans le même but : le Nouvel ordre mondial. » (Milton William Cooper)

L'analyse obsessionnelle que produit Cooper sur ces groupes à la fois imaginaires et réels, accumule les détails visant à suggérer le pouvoir terrifiant des élites mondiales. Cependant, selon lui, l'organisation secrète la plus puissante au monde est le groupe Bilderberg, dont les trois comités comprennent des membres des Illuminati, de la franc-maçonnerie, du Vatican et des vieilles familles aristocratiques européennes : « Ce sont eux qui dirigent VRAIMENT le monde », affirme Cooper.

Cooper décèle des preuves de l'influence cabalistique des Illuminati dans la fondation des États-Unis. L'œil omniscient dans la pyramide représente Lucifer et est également l'ancien symbole de la Confrérie du Serpent. Il souligne la répétition du chiffre 13, qui se retrouve dans les 3 comités de 13 membres du groupe Bilderberg, ce qui, pour lui, prouve sans aucun doute l'influence des Illuminatis.

Pour Cooper, les pouvoirs présidentiels utilisés abusivement sont une preuve supplémentaire des plans du gouvernement américain pour imposer un socialisme totalitaire. Par le biais de « lois secrètes » cachées au public, le président (à l'époque, Georges Bush) a le pouvoir de lancer des actions secrètes, de déclarer la guerre, de combattre le terrorisme et de suspendre la Constitution en cas d'urgence, sans en référer au Congrès. Cooper s'étend sur l'Agence fédérale de gestion des urgences (FEMA), qui en cas d'urgence est autorisée à contrôler les médias, la nourriture, l'énergie et les transports, tout en mobilisant chaque citoyen au sein de brigades commandées par le gouvernement. William R. Pabst, de Houston, fournit des détails sur les emplacements d'une douzaine de camps de concentration construits pour la détention de prisonniers politiques. « Lorsque votre famille sera séparée et éclatée dans tous les États-Unis pour effectuer un travail d'esclave et que vous ne verrez plus jamais ceux que vous aimez ; ce sera votre faute, parce que vous n'aurez rien fait pour empêcher cela. » (Cooper)

L'élite dirigeante croit que seul un gouvernement secret et totalitaire peut résoudre les problèmes actuels. Apparemment, leur principal souci est la surpopulation. Pour contrôler la croissance de la population, le gouvernement américain mène une guerre contre ses propres citoyens, avec l'introduction de maladies, de substances chimiques et radioactives dangereuses. L'élite dirigeante vise les éléments les plus indésirables de la société, dont les Noirs, les Hispaniques et les homosexuels. La variole fut introduite en Afrique pour décimer la population noire. L'hépatite B a été répandue en Amérique pour infecter la population. Le virus du sida est une arme du gouvernement. Des déchets nucléaires sont répandus sur les champs de tabac pour provoquer le cancer du poumon. la dioxine et d'autres polluants prolifèrent malgré les dénis officiels. Une installation fédérale secrète connue sous le nom de Mount Weather, près de Bluemont, Virginie, est décrite comme une ville souterraine construite pour le gouvernement de l'ombre qui attend d'avoir le pouvoir, sera prêt à réagir en cas de crise. Les patriotes, les nationalistes et les groupes de droite sont les premières cibles de leurs mesures répressives.

Les OVNIs et les extraterrestres jouent un rôle apocalyptique dans le culte de la conspiration de William Cooper. Des vaisseaux extraterrestres sont censés avoir visité les États-Unis entre 1947 et la fin de l'année 1952. Des débris d'OVNIs crashés des extraterrestres morts et vivants découverts à Roswell, dans le Nouveau-Mexique' ont été étudiés par des scientifiques sous les auspices de la CIA tandis que des fausses informations et des rumeurs maintenaient le public dans l'ignorance. Cooper semble croire que les humanoïdes extraterrestres sont venus sur Terre pour prélever le matériel génétique qui fait défaut à leur espèce en déclin. Le président Eisenhower est censé avoir officiellement rencontré les extraterrestres en février 1954, et un traité fut signé entre eux et le gouvernement américain : en échange de leur technologie avancée, les extraterrestres ont obtenu la permission d'étudier un nombre limité d'humains dans le cadre de leur projet génétique. Toutes les relations avec les extraterrestres sont soumises au comité connu sous le nom de MAJESTIC-12.
D'immenses pistes d'atterrissage pour les extraterrestres ont été construites à Dreamland, ou Area 51, près de Rachel, dans le désert du Nevada. Depuis, Area 51 est devenu un lieu de rendez-vous pour les ufologues et les tenants de la théorie de la conspiration. Anthony Hilder a enregistré une cassette audio, The Panic Project, au sujet des OVNIs stationnés sur la base de Dreamland. L'élite dirigeante s'est alliée en secret avec les extraterrestres contre le reste de l'humanité.

Le millénarisme de Bill Cooper est quasiment littéral. En l'an 2000, des mesures gouvernementales secrète à l'encontre du peuple devaient déboucher sur des hostilités ouvertes. Au même moment, la présence des OVNIs et des extraterrestres devait être officiellement révélée. Un vaisseau spatial appelé Galileo, en route pour Jupiter, allait déposer une charge de plutonium au cœur de la planète géante, générant une réaction atomique et la naissance d'une nouvelle étoile, qui doit être nommée Lucifer. Un vaste programme de manipulation médiatique interprétera ce phénomène comme un signe d'une grande portée religieuse et le monde entier espérera l'accomplissement de l'ancienne prophétie. Alors, un caveau contenant les anciennes données de la Terre sera ouvert dans la grande pyramide de Khéops, en Egypte, où George Bush assistera à une célébration occulte du millénaire et à la proclamation du Nouvel ordre mondial.

Bill Cooper est habité par un esprit anarcho-libertaire de rébellion. contre le gouvernement, qu'il perçoit comme anticonstitutionnel, criminel et despotique. Il en va de même pour Anthony H. Hilder, Linda Thompson et de nombreux autres porte-parole de groupes conspirationnistes américains. Étant donné que ces groupes identifient souvent le national-socialisme allemand comme le précurseur du Nouvel ordre mondial, on peut se demander le rapport qu'ils entretiennent avec le nazisme ésotérique. La réponse se trouve dans leur obsession du secret et de la conspiration. En déclarant la guerre aux élites dirigeantes secrètes qui asservissent les populations innocentes, les théoriciens de la conspiration font une projection fatale. L'élite est considérée comme totalitaire, antidémocratique, méprisante envers le peuple. Les victimes ont donc le droit de combattre et de détruire l'élite par tous les moyens nécessaires. Les actions secrètes, la violence, le terrorisme - tous les moyens que l'élite est accusée d'utiliser - sont bons pour que le peuple retrouve son autonomie perdue.

Les parallèles psychologiques entre les conspirationnistes américains et le système de pensée nazi sont évidents lorsqu'on se rend compte que la réimpression complète des Protocoles des Sages de Sion forme les 15 premiers chapitres de Behold a Pale Horse. Le texte provient de la première édition anglaise, traduite par Victor E. Marsden, publiée en 1921 par la Britons Publishing Society, un groupe notoirement antisémite. Bien que Cooper cite Mayer Amschel Rothschild (1743-1812) disant : « Donnez-moi le contrôle de la monnaie d'un pays, et peu m'importera qui en dicte les lois », il n'attribue pas exclusivement les Protocoles à une conspiration mondiale juive. Il suggère que toute allusion aux « juifs » en tant que conspirateurs doit être remplacée par le mot « Illuminati » tandis que les mots« goyim »et « gentils » doivent être remplacés par « prisonniers ».

Malgré une prose datant de la fin du XIXe siècle les Protocoles illustrent les craintes et l'anxiété des conspirationnistes au sujet d'un gouvernement secret et du Nouvel ordre mondial. Les juifs (Illuminati) créent des désordres et de l'hostilité entre États pour augmenter leur endettement et provoquer des guerres (Protocole 7) ; d'où des guerres mineures constantes depuis 1945. Les juifs (Illuminati) sèment la confusion dans l'opinion publique grâce à la contradiction (Protocole 5). Les juifs (Illuminati), avec la distraction, les jeux, le divertissement, détournent les masses de leurs vrais objectifs (Protocole 13). Ces stratégies sont reflétées dans la politique artificielle et le consumérisme futile. Les juifs (Illuminati) vont désigner un dirigeant fantoche qui aura le droit
de proposer des lois d'urgence, de modifier la Constitution et de déclarer l'état de guerre (Protocole 10). D'où la mobilisation et les directives de la FEMA pour établir un État policier. Les juifs (Illuminati) vont créer un gouvernement fortement centralisé pour contrôler toute l'humanité (Protocole 15). En découlera le Nouvel ordre mondial.

Les théories de la conspiration s'épanouissent toujours à des époques où les gens se sentent exclus du processus politique. Ces nouvelles croyances conspirationnistes américaines ont vite trouvé un écho en Europe, alors que l'Union européenne se développait dans les années 1990. Le mouvement « alternatif » en particulier, avec sa suspicion envers un gouvernement puissant, les milieux des affaires et la médecine orthodoxe, s'est montré sensible aux théories de la conspiration.

Nicholas Goodrick-Clarke, « Soleil noir ».

Soleil noir

Voici un formidable ouvrage qui s'intéresse à un sujet totalement délaissé par les historiens, à savoir : le succès posthume de l'Hitlérisme en Europe. Avec une écriture fluide,  "Soleil noir" se lit comme un roman. Nicholas Goodrick-Clark démontre que la pensée nazie s'est adaptée, ou plutôt a nourri, toutes les tensions ontologico-protestataires : contre le gouvernement, contre la main mise des banques, contre la mixité raciale, contre les Juifs et tout cela servi par une dialectique mêlant critique du monde moderne, attrait pour l'Inde et sa religion, refus du consumérisme, éloge de la nature et des racines païennes de l'occident. Le dernier chapitre, consacré à la théorie du complot, s'avère peut-être le plus remarquable car elle est très en vogue actuellement et il permet de voir que cette théorie entretient des liens avec les doctrines des groupes d'extrême-droite presque sans le vouloir. Au final, ce "Soleil noir" me semble être un livre d'une grande intelligence qui mérite de figurer dans toute bonne bibliothèque des personnes s'intéressant aux parcours des extrêmes droites, des mouvements racistes et contestataires.

Commentaire de Nicolas, Amazon.



Le rapport de la montagne de fer :

mardi, janvier 29, 2013

Marc Bosche et le « dess[e]in » intelligent





Découvrir, au hasard d’une recherche sur internet, les travaux de Marc Bosche vous ouvre les portes d’un univers insoupçonné. Né en 1959, cet anthropologue spécialiste de l’interculturalité, ancien responsable du département sciences humaines de l’Essec a construit une œuvre considérable, dont la plus grande partie est consacrée au bouddhisme tibétain. En quatre essais et un roman, il a su dresser un portrait sans concessions de ce courant religieux, qu’il connaît pour en avoir longtemps fait partie. Loin de la légende dorée qui constitue, dans notre pays, la version officielle du tantrisme himalayen, Marc Bosche nous initie à des réalités complexes, troublantes et parfois scandaleuses. Témoin engagé de la pénétration du bouddhisme en Occident, il livre ses souvenirs, ses réflexions et le fruit de ses recherches sous la forme d’ouvrages qu’il édite lui-même et dont la version numérique peut être obtenue gratuitement sur son site.

À lire ces travaux documentés, argumentés, nuancés, dépourvus de tout ressentiment, l’on s’étonne de ne jamais les avoir rencontrés dans les rayons d’un libraire, à côté des apologies de Matthieu Ricard ou des livres à succès du Dalaï-lama. Il est vrai que la spiritualité s’accommode mal d’une démarche critique, et que la position intermédiaire entre la dévotion et le scepticisme athée est difficile à tenir ! À la crédulité et au scepticisme, Marc Bosche préfère la description des faits et leur analyse sociologique. Bien qu’il se soit totalement détourné du bouddhisme vécu et théorique – il voit désormais la vie, non comme un synonyme de la souffrance, mais comme une opportunité unique –, il respecte ceux qui y sont restés fidèles, et reconnaît de la valeur à certaines des expériences qu’il a eu la chance de vivre. Son désenchantement n’est jamais ni violent, ni amer.

Que reste-t-il quand on a perdu ses plus belles illusions ? Sur quoi peut-on fonder son existence quand on a vu s’effondrer l’édifice majestueux d’une religion ? Cette question n’est pas réservée aux moines bouddhistes défroqués ; elle concerne chacun d’entre nous, Occidentaux déchristianisés vivant dans le monde de la technoscience. L’expérience de Marc Bosche nous intéresse, parce qu’elle nous montre comment il est possible de se libérer d’un système métaphysique sans succomber aux sirènes du nihilisme. En outre, le point de vue d’un ex-bouddhiste occidental offre sur les questions philosophiques du monde contemporain un point de vue nouveau, permettant d’échapper aux oppositions trop manichéennes qui nous sont souvent imposées.

Dans son ouvrage le plus récent, « Intelligent design ? Au cœur des champs de superconscience », il tente ainsi d’élaborer des idées qui ne se réduisent ni à une traduction du dogme chrétien dans des termes scientifiques, ni à une énième version du matérialisme. Voici comment il présente son travail :

« Aux États-Unis l’Intelligent Design a fait son entrée dans les manuels scolaires, au grand dam des tenants de la laïcité. Car il est aussi une des ripostes de Chrétiens aux théories évolutionnistes. Selon cette vision la nature, l’homme et l’évolution des espèces n’obéiraient pas (ou pas seulement) à une logique de sélection naturelle, de hasard et de nécessité, mais à un « dess[e]in » intelligent.

« Marc Bosche explore les implications de cette vision du progrès et de l’homme, en montre les limites et l’expose au risque de l’anthropologie interculturelle. Dans le même élan, il se livre à ce qu’il qualifie lui-même de folle théorie. Et si la réalité était plus surprenante encore ? Si la réalité dépassait la science et la fiction ? Et si les religions étaient des contes simples dissimulant, cachée derrière, une complexité plus familière de nos technosciences ? De questions en hypothèses, on découvrira au fil des pages que l’Intelligent Design recèle des significations plus profondes que la simple vision religieuse. Avant de souhaiter concilier ainsi les nouvelles technologies et la sagesse, la cybernétique des systèmes et la méditation, l’auteur a lui-même vécu deux expériences de mort imminente (NDE) qu’il décrit de manière vivante. Unifier l’imagination et l’observation, tel est le pari que propose l’auteur du Voyage de la 5ème Saison et de Nirvana avec cet essai spéculatif. »

De l’aveu même de ce « déçu du bouddhisme », son essai présente une « folle théorie » : celle de champs de conscience, situés hors du monde matériel, mais capables d’influencer l’évolution humaine. Chacun jugera s’il adhère ou non à cette hypothèse, dépourvue de justification scientifique, mais compatible avec un grand nombre d’expériences spirituelles. De telles spéculations n’exigent ni l’adhésion religieuse du lecteur, ni la validation d’un protocole expérimental. Elles constituent la manifestation de la liberté de penser, contre les monopoles respectifs des religieux et des scientifiques. Écoutons encore Marc Bosche :

« Les religions ont aujourd’hui encore le monopole du discours sur l’au-delà, la métaphysique, le sacré et le lien avec le sacré.

« Ce privilège n’a pas été ôté par les sciences, plus proches de l’agnosticisme et de l’athéisme.

« Car en niant les images simples du religieux, en en révélant l’étroitesse et les contes, la science contemporaine et rationnelle finit par préciser les limites mais, ce faisant, par désigner le fait religieux comme seul habilité aux questions métaphysiques.

« En évacuant le frisson du sacré la science a également coupé la branche sur laquelle elle était assise, et qui était aussi sans doute sa question, sinon la question la plus intéressante : celle de l’aventure de la conscience dans l’univers.

« De l’autre côté, celui des Églises et de leurs traditions révélées, rien de neuf à en attendre : des dogmes, commentés encore et encore. Ni satisfaits de la science, ni des grandes religions, les jeunes gens sont ainsi tentés par les groupes, communautés et sectes qui leur proposent des explications à leurs propres expériences spirituelles. Certaines de ces organisations offrent même les conditions favorables à l’occurrence de tels épisodes intérieurs.

« La suite, on la connaît : les adeptes sont invités à payer le prix fort de la dépendance, pour les miettes qu’on leur a données et à sacrifier leur vie « corps, parole et esprit » pour reprendre la formule inlassablement répétée par exemple dans une école du bouddhisme d’origine himalayenne. »

L’intérêt de telles méditations (au sens chrétien et rousseauiste) est de rétablir un questionnement sur le sens hors de tout dogme et de tout réductionnisme. Après avoir disséqué le néo-bouddhisme avec une pertinence qu’aucun athée n’aura jamais, il a refusé de jeter le bébé métaphysique avec l’eau du bain religieux. Sa lecture peut être conseillée aux agnostiques comme aux croyants sans étiquette. Inclassable, il parcourt désormais son propre chemin, qui n’est plus celui d’un bouddhiste, mais celui d’un homme.

Ajoutons que Marc Bosche est également l’auteur de plusieurs volumes de poésie, d’anthropologie, de récits de voyages et de fiction. Musicien, il offre ses œuvres en libre téléchargement sur la plate-forme, Jamendo. Enfin, il anime edutechs, un blog consacré aux nouvelles technologies de la lecture et de l’apprentissage.

Guy Morant, le 19 septembre 2007.
(Marc Bosche décédera quelques mois plus tard, en 2008)


Intelligent design ?
Au cœur des champs de superconscience

Sommaire

  • Avant-propos : une clef en forme de point d’interrogation
  • I La rumeur des distances traversées
  • II Quand d’un passé ancien rien ne subsiste
  • III Plus frêles mais plus vivaces
  • IV Les pays blanc des NDE
  • V « Dess[e]in Intelligent » ?
  • VI Les êtres singuliers d’un monde pluriel
  • VII Noir sur blanc
  • VIII Syntoniser le scanner
  • IX A l’ombre des cyborgs en fleurs
  • X L’anthropologie au risque du paradigme des technosciences
  • XI Ghost in the machine
  • XII Réalité augmentée
  • XIII Mémoire cénesthésique
  • XIV Les passagers rêveurs
  • Postface : « vous êtes arrivé »


Lire en Ligne

Téléchargement gratuit du livre ICI.


lundi, janvier 28, 2013

Le mariage




Le mariage pour tous marque une étape importante dans l'avènement de la société contre-traditionnelle.



Le mariage comme « Mystère » dans le monde de la tradition

On a généralement reconnu, surtout après la parution de l'ouvrage fondamental de Fustel de Coulanges, que la famille antique, plus qu'une association naturelle, fut une institution à base religieuse. Mais cela vaut aussi, plus généralement, pour ce que fut la famille dans toute grande culture des origines, ou culture du monde de la tradition. Ce caractère sacral ne pouvait pas ne pas investir, dans une certaine mesure, les relations intimes entre les sexes et le régime conjugal de la sexualité.

Il faut tout d'abord relever que, dans le mariage antique, le facteur individualiste était ordinairement très réduit, n'apparaissait pas comme le facteur déterminant. Souvent, on ne tenait compte qu'accessoirement de l'inclination et de l'affection ; c'était la lignée qui importait le plus. Dès le début, la dignitas matrimoni se rattacha, à Rome, à l'idée de la descendance nobiliaire. C'est pourquoi l'on distinguait — non seulement à Rome, mais en Grèce et dans d'autres civilisations traditionnelles — entre la femme à choisir dans ce but pour la dignitas matrimoni — et d'autres femmes, dont l'homme pouvait en même temps, et éventuellement, user en vue de la pure expérience érotique (d'où l'institution du concubinage, légalement admis à côté du régime familial, comme son complément). Il y a plus : au sujet de l'épouse, on faisait souvent une distinction entre son usage purement érotique et un usage spécifique ordonné à la volonté consciente d'engendrer. Et lorsqu'on s'approchait de l'épouse dans cette seconde intention, on suivait fréquemment un rituel spécial, comportant des cérémonies de lustration et de propitiation, ainsi que des détails particuliers du régime même de l'union sexuelle. Parfois, on faisait précéder celle-ci d'une période d'abstinence (dans l'ancienne Chine, il s'agissait d'un régime de l'étreinte où la semence masculine était retenue) ; un rituel magique envisage même d'exorciser le démon de la lascivité, qui exerce avant tout son pouvoir sur la femme ; dans certains cas, on priait et l'on invoquait les dieux, on choisissait une date propice, puis on s'isolait. On constate l'existence d'une science relative aux circonstances en mesure de rendre plus probable la naissance d'un enfant de tel sexe, plutôt que de tel autre.

Il est en outre important de souligner que, dès les sociétés totémiques elles-mêmes, la conception de la procréation ne se ramenait pas à celle, naturaliste, de la continuation biologique de l'espèce ; en engendrant, on entendait, pour l'essentiel, conserver et transmettre la force mystique du sang propre, de la gens, et surtout celle de l'ancêtre primordial, force immanente en tant que genius de la lignée et concrétisée, dans l'Antiquité gréco-romaine, par le feu sacré domestique toujours allumé. Et de même que c'était la participation aux rites d'une famille qui créait éventuellement de nouvelles parentés, donc qui intégrait un étranger dans cette famille, de même certaines données indicatives permettent de penser que, dans l'Antiquité traditionnelle, la femme, avant d'être épousée par son mari, l'était par cette force mystique de la lignée. Il est significatif qu'a Rome le thalamus, le lit conjugal, était appelé lectus genialis, lit du genius. Un témoignage résiduel plus précis concerne une coutume nuptiale romaine : avant de s'unir à son mari, la femme devait s'unir au dieu Matitus, au Tutinus priapique qui, fondamentalement, ne faisait qu'un avec le genius domesticus, ou lar familiaris ; entrée dans la demeure de l'époux, la jeune femme, la nova nupta, devait, avant d'accéder au lit nuptial, s'asseoir sur la statue ithyphallique de ce dieu, comme s'il revenait à ce dernier de la déflorer le premier. On pourrait indiquer l'existence de rites analogues dans d'autres cultures, et possédant la même signification. Le but véritable du mariage n'était pas une progéniture quelconque, mais en premier lieu le « fils du devoir », expression qui qualifiait en Inde le premier né mâle, avec le vœu qu'il fût un « héros ». La formule finale de la cérémonie nuptiale, shraddâ, était : vîram me datta pitarah (« O pères, faites que j'aie pour fils un héros ! »).

Dans la famille sacralisée, la polarité des sexes est associée à un régime de complémentarité. D'où le rôle que joua la femme dans le culte domestique indo-européen, en relation avec le feu, dont elle était la gardienne naturelle, ayant elle-même, en principe, la nature de Vesta, « flamme vive » ou feu-vie. La femme était en quelque sorte le vivant soutien de cette influence suprasensible, servant de contrepartie au pur principe viril du pater familias. C'est pourquoi il incombait surtout à la femme de veiller à ce que la flamme ne s'éteignît point et restât pure ; elle en invoquait la force sacrée, jetant dans le feu les sacrifices . A Rome, un régime de complémentarité analogue était en vigueur pour le sacerdoce lui-même. Lorsque venait à décéder l'épouse du Flamen — la flaminica dialis —, le prêtre devait abandonner son office, comme si son pouvoir, à cause de l'absence de son complément vivifiant, était diminué ou paralysé. On peut recueillir des témoignages allant dans le même sens auprès d'autres traditions, la tradition brahmanique par exemple, dans laquelle d'autres contenus sont pourtant déjà mis en relief. La femme unie à l'homme par le sacrement — samskâra — se présente comme la « déesse de la maison » — grhadevatâ — et fut originellement associée à son mari dans le culte et les rites. La femme est vue soit comme le foyer — kunda —, soit comme la flamme du sacrifice. Il est conseillé de méditer sur la femme conçue comme un feu — yoshamagnin dhyâyîta. Ici, on entrevoit déjà le plan opératif, et non plus seulement rituel, puisque dans ce cadre l'union entre homme et femme était conçue comme un grand rite — vajñia —, un équivalent du sacrifice du feu, homa. Un texte dit que « celui qui connaît la femme sous la forme du feu, atteint la libération ». Et le Çathapatha-brahmâna fait dire à la femme : « Si tu uses de moi durant le sacrifice, quelle que soit la bénédiction que tu invoqueras, à travers moi tu l'obtiendras ». Les fruits d'une des formes du sacrifice du soma (vajapeya) sont comparés à ceux produits par l'union avec une femme lorsqu'on accomplit celle-ci en connaissant les correspondances et les contenus cosmiques de la femme et de son corps. La matrice, centre de la femme, est désignée comme le feu sacrificiel. Dans un autre texte traditionnel, on fait correspondre toutes les phases de l'étreinte à celles d'une action liturgique, et il est indiqué que celle-ci peut être faite en même temps que l'étreinte.

En règle générale, le mariage pouvait déjà présenter sous cette forme les caractères d'un « Mystère », dans un régime de ritualisation. En Grèce la déesse, en tant que déesse du mariage, portait le nom d'Aphrodite Teleia, cet attribut dérivant de telos, terme également utilisé pour désigner l'initiation. La reprise consciente des correspondances cosmiques du masculin et du féminin — le Ciel et la Terre — est clairement attestée dans un célèbre rituel indo-européen : « Qu'il [l'époux] s'approche d'elle, en prononçant la formule : "Je suis Lui, tu es Elle ; tu es Elle, je suis Lui. Je suis le chant, tu es la strophe... Je suis le Ciel, tu es la Terre. Viens, embrasse-moi, mêlons notre semence, pour la naissance d'un mâle, pour l'opulence de notre maison". Puis, faisant en sorte que la femme écarte les jambes, qu'il dise : "Ô vous, Ciel et Terre, mêlez-vous !" La pénétrant, sa bouche unie à sa bouche, la caressant trois fois de haut en bas, qu'il dise : "...Comme la Terre accueille en son sein le Feu, comme le Ciel renferme en son sein Indra, comme les points cardinaux portent le vent, ainsi je dépose en toi le germe de X. (nom de l'enfant)" » . La virilité est donc rattachée au Ciel, la féminité à la Terre. De façon analogue, en Grèce, selon Pindare, comme pour se référer au fondement de leur nature la plus profonde, les hommes, durant l'amour, invoquaient Helios, le Soleil, et les femmes Séléné, la Lune . Il faut aussi relever que dans presque tous les dialectes indiens d'origine sanscrite, les femmes sont appelées prakritî, terme qui désigne métaphysiquement la « nature », ainsi que la femelle-force du dieu impassible, du purusha. Ce contexte de sacralisation du mariage devait peu à peu s'estomper, mais il en subsistait récemment encore des traces positives, qui ne s'expliquent que par lui. Il ne devait se conserver, avec de précises homologations divines et cosmiques, que dans le domaine cultuel au sens strict, en rapport avec les variantes du hieros garnos, de la hiérogamie ou théogamie rituelle. Mais, au sujet de l'Antiquité, on n'a pas eu tort d'affirmer qu'un peuple où les pratiques matrimoniales étaient ritualisées et toujours conformes aux lois éternelles, constituait une grande chaîne magique reliant la sphère matérielle aux sphères supérieures. Novalis a raison de considérer le mariage, tel que nous le connaissons aujourd'hui, comme un « mystère profané » ; au fil des temps, il est effectivement devenu la seule alternative sociologiquement offerte à ceux qui ont horreur de la solitude. Et l'exactitude des paroles suivantes n'est pas entachée par le fait que leur auteur, Louis-Claude de Saint-Martin, n'en a certainement pas réalisé la portée et n'a pas eu une vision de la situation où elles sont vraies : « Oh ! si le genre humain savoit ce que c'est que le mariage, il en auroit à la fois un désir extrême et une frayeur épouvantable ; car il est possible aux hommes de se rediviniser par là, ou de finir par se perdre tout à fait ».

La conception générique d'une sacralité de l'acte procréateur a toutefois subsisté dans le cadre des religions créationnistes, puisque cet acte est considéré comme un reflet, un prolongement ou une reproduction de l'acte créateur divin. Pour l'Iran mazdéen, on peut rappeler un ancien rituel nuptial où l'idée d'un certain nombre de faveurs divines est même associée à l'intensité maximale de l'étreinte. En ce qui concerne l'aire islamique, il existe un rituel qui rappelle en partie le rituel indo-européen cité plus haut et qui nous montre combien l'idée de la sexualité comme quelque chose de peccamineux et d'obscène — tout rapport entre celle-ci et la divinité apparaissant blasphématoire — était étrangère à ces traditions. Selon ce rituel, au moment de pénétrer la femme, l'époux dira : « Au nom d'Allah, le Clément, le Miséricordieux, Bismallah al-rahman al-rahim ». Puis l'homme et la femme diront ensemble : « Au nom de Dieu », et, enfin, seul l'homme ajoutera, au moment de la jouissance de la femme et juste avant d'éjaculer, le reste de la formule, à savoir les mots « le Clément, le Miséricordieux ». Dans la même perspective, Ibn Arabi, un maître du soufisme, va jusqu'à parler d'une contemplation de Dieu dans la femme, à travers une ritualisation de l'union sexuelle conforme à des contenus métaphysiques et théologiques. Il écrit dans son traité Fuçuç al-Hikam : « ...la contemplation de Dieu dans les femmes est la plus intense et la plus parfaite ; et l'union la plus intense [dans l'ordre sensible, qui sert de support à cette contemplation] est l'acte conjugal... Or, le Prophète aima les femmes précisément en raison de leur rang ontologique, parce qu'elles étaient comme le réceptacle passif de son acte, et qu'elles se situent par rapport à lui comme la Nature universelle (at-tabî'ah) par rapport à Dieu. C'est bien dans la Nature universelle que Dieu fait éclore les formes du monde, par projection de Sa volonté et par le Commandement [ou l'Acte : al-amr] divin, lequel se manifeste comme acte sexuel dans le monde des formes constituées par les éléments, comme volonté spirituelle [al-himmah — ce que nous avons appelé ailleurs la virilité transcendante] dans le monde des esprits de lumière et comme conclusion logique dans l'ordre discursif [on pourrait renvoyer à ce sujet à la rigueur logique comme expression typique du principe masculin — ». Ibn Arabi dit que celui qui aime les femmes de cette façon, donc en réalisant ces significations alors même qu'il s'unit à une femme, « les aime par amour divin ». En revanche, pour celui qui n'obéit qu'à la seule attraction sexuelle, « l'acte sexuel sera... une forme sans esprit ; bien entendu, l'esprit reste toujours immanent à la forme comme telle, seulement, il demeure imperceptible à celui qui s'approche de son épouse — ou d'une femme quelconque — pour la seule volupté, sans connaître l'objet véritable de son désir... "Les gens savent bien que je suis amoureux. Mais ils ne savent pas de qui..." Ceci s'applique bien à celui qui aime pour la seule volupté, c'est-à-dire qui aime le support de la volupté, la femme, mais reste inconscient du sens spirituel de ce dont il s'agit. S'il le connaissait, il saurait en vertu de quoi il jouit, et qui jouit [réellement] de cette volupté ; dès lors, il serait [spirituellement] parfait ». Il faut voir dans cette théologie soufie de l'amour l'élargissement et l'élévation à une conscience plus précise de l'univers rituel où l'homme de la civilisation islamique a plus ou moins distinctement compris et vécu les rapports conjugaux en général, à partir de la sanctification que la Loi coranique confère à l'acte sexuel, et ce dans un contexte aussi bien polygamique que monogamique. C'est de là que dérive aussi le sens particulier que peut avoir la procréation, entendue comme le fait d'administrer le prolongement, existant dans l'homme, du pouvoir créateur divin.

Le judaïsme lui-même ignora la condamnation ascétique du sexe : le mariage n'y fut pas conçu comme une concession à la loi de la chair, plus forte que l'esprit, mais comme l'un des mystères le plus sacrés. Pour la Kabbale hébraïque, tout véritable mariage est en effet une reproduction symbolique de l'union de Dieu avec la shekinah.

La doctrine chinoise des unions royales, enfin, mérite un aperçu. Outre celle qui est son épouse dans un sens éminent, le roi possède cent-vingt femmes. L'union avec chacune d'elles a une signification rituelle et obéit à un symbolisme précis. Les femmes royales sont divisées en quatre groupes, diversifiés tant par le nombre que par la valeur, en sens inverse : le groupe le plus nombreux est celui composé par les femmes jugées les moins nobles. Les femmes ne peuvent s'approcher du roi que pendant certaines nuits, à distance décroissante de celle de la pleine lune, en partant du groupe le plus nombreux et le plus extérieur, dont les femmes sont appelées durant les nuits presque noires, sans lune, pour arriver au dernier groupe, composé de trois femmes seulement, qui ont pour elles les deux nuits précédant la nuit sacrée de la pleine lune. Durant celle-ci, où, macrocosmiquement parlant, la lune nue dans toute sa lumière se trouve face au soleil, seule la reine reste face au roi, à l'Homme Unique, et ne fait qu'un avec lui. C'est l'idée d'une union qui, absolue lorsqu'elle se produit au centre, se répète sous une forme atténuée dans les degrés où le multiple l'emporte de plus en plus, où la dignité de féconder, en tant que force de l'Un, la matière, s'amenuise : comme autant de reflets de plus en plus conditionnés de ce qui est en acte dans la hiérogamie du couple royal, à travers un système de participation qui répète un modèle cosmique.

Julius Evola, « Métaphysique du sexe ».





dimanche, janvier 27, 2013

La véritable méditation selon Guendune Rinpoché



L'acteur James Coburn utilise une pseudo-méditation pour relaxer Animal, le batteur fou du Muppet Show. Le but de la véritable méditation est plus ambitieux.


Certaines personnes identifient la méditation à un état dans lequel l'esprit serait complètement « ailleurs » : le corps est maintenu rigide comme un morceau de bois, et l'esprit est figé dans une recherche d'ouverture et de clarté. Cette attitude, créée et maintenue artificiellement par la volonté et la tension, est erronée. D'autres personnes se concentrent sur la vacuité, essayant de « faire le vide », de produire une dimension spéciale de « vide » dans laquelle rien n'apparaît jamais, une sphère bienheureuse où l'on serait protégé de « tout » dans le « rien ». Bien entendu, ce vide n'a rien à voir avec la vacuité authentique, il n'est qu'une fabrication mentale. Certains méditants cherchent à calmer l'esprit en le faisant sombrer, en le tirant vers le bas. Ils tentent de faire disparaître l'agitation en confinant l'esprit, comme dans une boîte. Les énergies se resserrent alors au niveau du cœur, donnant l'impression que le calme est obtenu. Cependant, aucune luminosité ne se révèle, mais au contraire l'esprit est sombre et lourd et s'enfonce dans la torpeur et l'inconscience. Si l'on persiste dans cette voie, un véritable malaise s'installe, qui conduit à une irritation de plus en plus intense. Finalement, le refoulement est tellement intense qu'il explose en colère.

Toutes ces erreurs proviennent de la volonté d'enfermer l'esprit dans des représentations conceptuelles, de le réduire à l'une ou l'autre idée qui contrarie sa liberté et son espace naturel. Cela est la cause de toutes les perturbations et de toutes les souffrances rencontrées dans la méditation. Il est important que chaque méditant découvre et reconnaisse dans quel type d'erreur il tombe. En effet, ce n'est qu'une fois que nous avons vu clairement quelle erreur nous commettons, que nous pouvons nous en défaire. [...]

Pour pouvoir véritablement méditer, nous devons nous défaire de l'espoir que notre esprit puisse rester stable longtemps, et de la crainte qu'il devienne agité et envahi par les pensées. Acceptons le fait que, quel que soit l'état de l'esprit, c'est toujours l'esprit. Quand il est calme, c'est l'esprit. Quand il est agité et produit des pensées, c'est encore l'esprit. Et ce qui est conscient de ces différents états, c'est toujours l'esprit. Il n'y a donc aucun sens à établir une séparation artificielle entre l'esprit et les pensées, ou de préférer le calme au mouvement, car les deux sont également l'esprit. Il est vain de préférer l'un au détriment de l'autre. Alors, laissons simplement l'esprit reposer dans sa luminosité, sa radiance naturelle, sans interférer le moins du monde sur le mouvement des pensées. Reconnaissons que l'esprit est dépourvu d'apparition et de cessation : il est non né, sans commencement et sans fin, spontanéité pure. De ce fait, il est absurde de souhaiter ne connaître qu'une seule forme d'esprit, l'esprit calme, et de redouter de rencontrer l'esprit actif. Abandonnons l'espoir ou la crainte, et laissons l'esprit être ce qu'il est, tel qu'il est, naturellement libre, sans nous attacher à l'un ou l'autre de ses moments.

Il ne faut pas penser que méditer signifie essayer d'être meilleurs que nous ne le sommes actuellement, parce que nous ne faisons alors que nous laisser aller à l'espoir, et cette attente est vaine. Nous devons prendre conscience que la véritable nature de l'esprit est la nature de bouddha, et qu'il n'y a rien à chercher puisque cette dimension éveillée demeure déjà en nous. Pour cette raison, Tilopa, le grand maître indien, disait qu'il fallait être fou et ignorant pour chercher la bouddhéité à l'extérieur de soi. Certains développent beaucoup d'efforts pour chercher cette bouddhéité, et ils ne font que se fatiguer sans aucun résultat. Il faut reconnaître que la nature de bouddha est en nous, et qu'elle n'est pas quelque chose de différent de nous-mêmes, qui doit être produit ou créé. Il faut simplement la laisser se révéler. Cela ne s'accomplit que lorsque nous nous sommes défaits de toute forme d'attachement. Si nous laissons l'esprit se détendre, sans poursuivre aucune pensée ni aucun but, la véritable dimension de notre esprit, la nature de bouddha, se manifeste d'elle-même.

Lorsque nous commençons à méditer, nous avons souvent l'impression qu'il y a davantage de pensées et d'agitation mentale que lorsque nous ne méditions pas. Cette impression, commune à tous les pratiquants, est fausse. Du fait de la méditation, une plus grande conscience de l'état de l'esprit se développe. Notre esprit devenant plus clair, nous percevons à présent le mouvement des pensées qui nous échappait jusque-là. Dans l'état ordinaire, lorsqu'il ne médite pas, l'esprit est comme assoupi. Il n'est pas du tout conscient du flot incessant des pensées qui le traverse. Pour cette raison, la découverte de l'importance du flot mental dans la méditation n'est pas une faute en soi. C'est au contraire un progrès dû au développement de la méditation. Quelles que soient les pensées qui s'élèvent, regardons directement l'essence de chacune d'elles. Quand nous percevons leur essence, nous voyons l'essence de l'esprit, sa réalité, le dharmata , la dimension ultime, le dharmakaya. À chaque fois qu'une pensée survient, entraînons-nous à en reconnaître l'essence. Nous serons alors à même de découvrir le jeu incessant de l'esprit dharmakaya. Toutes les pensées qui vont et viennent ne sont plus réelles, mais sont le jeu de la créativité naturelle de l'esprit, l'expression spontanée de la réalité.

Lama Guendune, « Mahamoudra ».



Mahamoudra

Réservé traditionnellement à de rares disciples, traitant de la nature de l'esprit, de sa vacuité originelle qui n'est autre que le Bouddha lui-même, Mahamoudra ou « le Grand sceau » représente les enseignements ultimes du bouddhisme tibétain.

Nul mieux que Guendune Rinpoché, l'un des plus grands yogin et lamas tibétains de l'ancienne génération, n'était habilité à le communiquer à l'Occident. Ayant vécu en solitaire dans les grottes himalayennes pendant une vingtaine d'années, il avait la charge des retraites spirituelles, de la formation des lamas occidentaux et des sessions du Centre Dhagpo Kagyu Ling où venaient l'entendre ses disciples du monde entier.

Mahamoudra est exposé ici avec une simplicité et une profondeur incomparables. Un livre précieux qui montre comment ces enseignements peuvent s'intégrer au travaif de la conscience. Un traité qui aborde la méditation, les émotions, l'activité du mental avec une lumineuse inspiration.


samedi, janvier 26, 2013

La mort de Guendune Rinpoché




Cette vidéo présente le monastère Dhagpo Kundreul Ling, fondé par Guendune Rinpoché, où séjourna Marc Bosche. Elle tente de réveiller la générosité de donateurs de plus en plus rares.

"Que signifie réellement « méditer » ? Méditer, ce n'est pas créer un état spécial, se mettre en transe ou dans tout autre état artificiel. Ce n'est pas davantage rechercher des sensations, avoir des visions ou voir des formes ou des couleurs particulières. Méditer, c'est devenir conscient que, depuis des temps sans origine, notre esprit est prisonnier de l'attachement à ses perceptions, ce qui engendre frustration et souffrance en imposant à l'esprit des limites artificielles. Par la méditation nous apprenons à dégager l'esprit de ces limitations."

Lama Guendune Rinpoché (1918-1997)


LA MORT SANS EFFETS SPECIAUX DU MAITRE

Pour avoir rencontré nombre de maîtres asiatiques célèbres et leurs disciples, je n’ai pas trouvé, en dix-huit ans d’exploration, de « bouddha parfaitement illuminé ». Mais j’ai connu des personnes profondes, mystérieuses et dignes, comme ce lama aujourd’hui défunt. Un prêtre catholique qui l’avait connu me dit un jour en parlant de lui que c’était un « homme mirobolant »...

Pour avoir rencontré le « Très Précieux » (Guendune Rinpoché), trois jours avant sa mort, face à face, tous deux seuls quelques instants dans la pièce où il recevait ses visiteurs, j’ai mieux perçu le sens ambigu de ce mot : « mirobolant ». Le vieux lama, âgé de quatre-vingts ans, arrivait à la mort, seul et humain, peut-être au fond comme les autres.

Il fallut me rendre à cette évidence : ce moine sympathique et remarquable était fort semblable, dans son frémissement de désarroi, à ses frères humains lorsqu’il atteignait progressivement le moment de la mort...

J’ai alors rétrospectivement mieux compris qu’il avait aimé sa vie, ses biscuits Delacre « cigarettes russes », sa soupe d’os à la moelle que mitonnait son cuisinier personnel, et les dattes fourrées élégamment offertes par une disciple. Pourquoi pas : il aimait la vie...

Lorsque je le vis ce mardi, juste après sa première attaque, hélas décisive, je compris qu’il laissait son existence, après avoir été jusqu’au bout et sans rendre les armes à la mort. Il ne partait pas volontiers...

Je songe parfois qu’il me montra plus précisément la réalité de cette nature humaine, si fragile et si contradictoire. Mais, en revanche, il dissipa, par son exemple, la théorie « mirobolante » de la « bouddhéité ».

Si la bouddhéité est un concept pour l’exégèse et la catéchèse, un tel concept ne peut vraiment être un homme. Le détachement, le renoncement ? Pas tout à fait, me montra le « Très Précieux » en ces derniers instants : Plutôt la vie, aller jusqu’au bout, mais y aller... dignement. Il avait encore, à trois jours de sa mort, son attention profonde et bienveillante pour ses visiteurs. Il me montra son souci de répondre ainsi à leurs attentes, alors qu’il faisait déjà face à l’imminence de son départ.

Délicat, aimable et élégant, jusqu’au bout : le bilan de cette rencontre de neuf années avec ce Tibétain vénérable est donc bon, car j’ai abandonné, grâce à lui, le bouddha mythique des livres d’images.

Grâce à lui j’ai pu revenir vers la vie réelle avec appréciation. A l’issue de ce travail de recherche anthropologique, je n’ai pas eu de regret à troquer la robe rouge du moine novice pour un tee-shirt et un jean.

Il n’y eut pas la moindre pluie de fleurs, ni d’arcs-en-ciel, le jour de la crémation publique du vieux lama, sept semaines après le trépas, mais un temps très gris qui s’éclaircit vaguement. Le maître disparut sans corps d’arc-en-ciel, comme pour tout le monde, selon le principe de réalité et non celui de plaisir. Cependant, de son vivant, les disciples en retraite dans sa proximité, furent assez nombreux à évoquer des expériences spirituelles étonnantes, dignes des meilleurs « effets spéciaux ». D’autres soulignèrent que son influence avait eu un pouvoir transformateur sur leur vie, la rendant plus conforme à leurs aspirations et peut-être à leur nature.

Les « bouddhas vivants » sont rarement impassibles. Le surhomme doré, éthéré, souriant en permanence, assis sans fin à savourer la sagesse totale du cosmos est une statue ou une image, au mieux une vision...

Sans conflits, ni souffrances ? Cela existe sans doute dans les désirs des disciples, et aujourd’hui dans ces quelques grands films hollywoodiens où le maïs soufflé et l’esquimau géant sont incontournables pour accompagner le suspense des spectateurs. Alors le bouddha nimbé de surnaturels halos dorés vaincra-t-il l’armée des démons au pied de l’arbre de l’illumination ? Comme chacun le sait, la réalité quotidienne d’un humain est faite de toutes sortes de détails réalistes qui rendent quelque peu impraticable un tel « idéal » translucide et évanescent, en permanence... L’homme avec son corps, ses désirs, ses relations affectives, ses préférences est un défi à la sagesse, plus qu’une illustration de celle-ci.

Marc Bosche, « Le lama & l'anthropologue ».

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