dimanche, mai 01, 2011

L'Agartha & la race qui nous exterminera



Dans les années 1960, le journaliste italien Pier Domenico Colosimo (nom d'auteur Peter Kolosimo) mentionne l'existence d'un puits sans-fond situé en Azerbaïdjan. Le journaliste évoque l'existence d'un monde souterrain habité par un peuple mystérieux. S'agit-il de la race décrite dans le livre « La Race à venir, celle qui nous exterminera » du rosicrucien Edward Bulwer-Lytton ?

Ce furent ces phénomènes bizarres, exagérément grandis par la superstition populaire qui conduisirent les savants soviétiques à s'intéresser au « puits sans fond » de l'Azerbaïdjan : d'un trou très profond sortaient, des hurlements épouvantables, des sifflements, des gémissements, des plaintes, et quelquefois une lueur bleuâtre semblait émaner de ses parois.
Les chercheurs savaient très bien que ce genre de phénomène est fréquent et qu'il n'a rien à voir avec le surnaturel. Quelques-uns d'entre eux essayèrent de descendre dans « la cheminée » mais, n'arrivant pas à voir la fin, ils préférèrent en explorer les alentours immédiats avec l'espoir de trouver quelque voie de communication avec le puits lui-même. Ils découvrirent plus qu'ils n'attendaient : un véritable réseau de galeries qui se révélèrent avoir des correspondances avec la Géorgie et toute la région caucasienne.
On crut d'abord qu'il s'agissait de grottes préhistoriques car, tout près des entrées, on trouva des graffiti et des restes d'ossements humains. Un examen plus approfondi démontra que les os étaient très postérieurs aux dessins et il fut tout de suite évident que la majeure partie des grottes ouvraient sur des tunnels creusés au cœur des montagnes. Ils étaient difficilement explorables à cause des éboulements qui les obstruaient. Pourtant, ce qu'on en pouvait visiter apparut stupéfiant : de larges corridors conduisaient à de petites « places » rondes d'où s'éloignaient d'autres chemins, de petites niches vides, des puits, des canaux si minces qu'un enfant n'aurait pu s'y introduire.
La seule grande galerie qu'on put suivre assez longtemps conduisait à une immense salle haute de vingt mètres, certainement construite par des êtres doués d'intelligence. Mais dans quel but ? Il est impossible de formuler aucune hypothèse : la solution du problème gît probablement plus loin, là où personne n'a encore pu pénétrer.
Les entrées principales des galeries du Caucase sont très régulières : leurs murs droits, leurs virages étroits offrent quelquefois un aspect d'une beauté surnaturelle, mais ce qui est le plus étonnant, c'est que ces souterrains rappellent étrangement – sont même presque semblables - les tunnels de l'Amérique centrale.
Dans les grottes qui précèdent souvent les galeries, on observe de curieux graffiti ; curieux surtout parce qu'on les retrouve dans toutes les parties du monde et que leur origine pose des points d'interrogation fantastiques ; on y remarque presque partout le svastika, le signe de l'infini et la spirale.
Par qui ont été creusés ces tunnels et dans quel but ? C'est impossible de répondre. Pour un groupe d'archéologues soviétiques, ils feraient partie d'un gigantesque système d'artères qui se dirige vers l'Iran et qui rejoindrait, non seulement les galeries découvertes dans le voisinage du fleuve Amou-Daria (Turkménistan et frontière russo-afghane), mais aussi les labyrinthes souterrains de la Chine centrale de l'Est du Tibet et de la Mongolie.
L'écrivain naturaliste Ossendowski nous en révéla l'existence, entre 1920 et 1921, en disant qu'elles avaient servi de refuge aux tribus mongoles poursuivies par les hordes de Gengis Khan. Ce qui confirme la croyance illustrée par l'orientaliste Nicolas Rörick que l'Asie cacherait un immense royaume souterrain appelé Shambhala d'où sortira un nouveau messie, le fabuleux Maitreya.
Les Tibétains affirment qu'il s'agit de citadelles, les dernières, ou se cacheraient encore les représentants d'un peuple ayant échappé a un terrible cataclysme. Ces gens mystérieux se serviraient d'une énergie qui, en se libérant, émet une sorte de fluorescence verte ayant les propriétés du Soleil pour faire pousser les végétaux et dotée du pouvoir de prolonger l'existence des hommes.
Notons que les légendes américaines parlent aussi de « lumière verte » et d'hommes vivant dans le sous-sol. En Amazonie, un explorateur, ayant glissé dans un labyrinthe souterrain, dit avoir vu l'endroit où il se trouvait illuminé « comme par un soleil d'émeraude » et que, tout en courant pour échapper à une araignée monstrueuse, il avait aperçu « des ombres pareilles à des hommes » s'agiter au fond d'un couloir.
Les descendants des Incas racontent des histoires effrayantes à propos de leurs ancêtres qui vivaient « au cœur des montagnes », ne sortant rarement, que la nuit pour se promener à la lueur des étoiles. Mais personne ne sait si on parle d'êtres en chair et en os ou de fantômes. Si on en croit Tom Wilson, un guide indien demeurant en Californie, il s'agirait bien de vivants : son grand-père (qui ignorait les légendes sud-américaines) tomba par hasard - il y a une quarantaine d'années - dans une grande ville souterraine et il vécut pendant un certain temps au milieu d'individus « vêtus de quelque chose qui ressemblait à du cuir » (matière plastique en l920 ?) qui parlaient un langage incompréhensible et qui mangeaient des aliments non naturels. Cet homme avait-il rencontré les « immortels de Mu » ? Les adeptes des sciences ésotériques n'hésiteraient pas à répondre par l'affirmative mais nous, nous préférons inviter nos lecteurs à une grande prudence.
Une quinzaine d'années plus tard, un certain White, chercheur d'or, se trouva un jour entraîné dans une nécropole souterraine où un spectacle extraordinaire se présenta à sa vue : au milieu d'un grand espace qui ressemblait à la fois à une salle de réunion et à une place publique, il y avait des centaines de corps momifiés, les uns assis sur des sièges de pierre, les autres allongés par terre dans des poses bizarres comme si la mort les avait touchés à l'improviste. Là aussi, les cadavres portaient des habits ressemblant à du cuir, là aussi la scène était éclairée par une fluorescence verte. Autour des défunts veillaient de gigantesques statues d'or.
Ayant entendu le récit de White, quelques personnes décidèrent de se rendre sur les lieux, mais il fut impossible de retrouver l'endroit précis. Un vieux mineur, qui sur le moment avait été retenu par des craintes superstitieuses, déclara qu'il connaissait cette nécropole et il révéla des détails, pas nouveaux pour White, mais dont il n'avait parlée à qui que ce soit.
Les Apaches des États-Unis rêvent de galeries qui relieraient leur terre à la mythique Tiahuanaco, à travers lesquelles ils seraient restés des années pour accomplir un voyage qui les conduisit au cœur de l'Amérique du Sud.
Tous ces récits nous laissent évidemment assez sceptiques, mais comment ne pas rester perplexes devant les Indiens qui parlent de galeries creusées au moyen « de rayons qui désagrègent le rocher, et d'êtres venant des étoiles »?
En revenant en Asie, nous trouverons, à côté du mythe de Shambhala, celui de l'Agarthi (ou Agartha ou Agharti), un autre royaume qui s'étendrait, lui et son sanctuaire, sous l'Himalaya. D'après Ossendovski l'origine de ce « centre de la sagesse et de l'intelligence universelle » remonterait à 600 000 ans en arrière.
Peter Kolosimo
La Prophétie du Roi du Monde en 1890 

Le 
Houtouktou de Narabanchi, écrit Ossendovski, me raconta ceci quand je lui fis une visite à son monastère, au commencement de 1921 :

- Quand le
 Roi du Monde apparut devant les lamas favorisés de Dieu, dans notre monastère, il y a trente ans, Il fit une Prophétie relative aux siècles qui devaient suivre. La voici:

«De plus en plus, 
les hommes oublieront leurs âmes et s'occuperont de leurs corps. La plus grande corruption régnera sur la Terre. Les êtres humains deviendront semblables à des animaux féroces, assoiffés du sang de leurs frères. Le Croissant s'effacera et ses adeptes tomberont dans la mendicité et dans la guerre perpétuelle. Ses conquérants seront frappés par le Soleil, mais ne monteront pas deux fois; il leur arrivera le plus grand des malheurs, qui s'achèvera en insultes aux yeux des autres peuples. Les couronnes des rois, grands et petits, tomberont: un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit... Il y aura une guerre terrible entre tous les peuples. Les océans rougiront... La terre et le fond des mers seront couverts d'ossements... Des royaumes seront morcelés, des peuples entiers mourront... La faim, la maladie, des crimes inconnus des lois, que jamais encore le monde n'avait vus. Alors viendront les ennemis de Dieu et de l'Esprit Divin, qui se trouvent dans l'être humain. Ceux qui prennent la main d'un autre périront aussi. Les oubliés, les persécutés, se lèveront et retiendront l'attention du monde entier. Il y aura des brouillards et des tempêtes. Des montagnes dénudées se couvriront de forêts. La terre tremblera... Des millions d'êtres humains échangeront les chaînes de l'esclavage et les humiliations pour la faim, la maladie et la mort. Les anciennes routes seront couvertes de foules allant d'un endroit à un autre. Les plus grandes, les plus belles cités périront par le feu... une, deux, trois... Le père se dressera contre le fils, le frère contre le frère, la mère contre la fille. Le vice, le crime, la destruction du corps et de l'âme suivront... Les familles seront dispersées... La fidélité et l'amour disparaîtront... De dix milles hommes, un seul survivra... Il sera nu, fou, sans force, et ne saura pas se bâtir une maison ni trouver sa nourriture... Il hurlera comme le loup furieux,dévorera des cadavres, mordra sa propre chair et défiera Dieu au combat... Toute la Terre se videra. Dieu S'en détournera. Sur elle se répandra seulement la nuit et la mort. Alors j'enverrai un Peuple, maintenant inconnu, qui, d'une main forte, arrachera les mauvaises herbes de la folie et du vice, et conduira ceux qui restent fidèles à l'esprit de l'être humain, dans la bataille contre le mal. Ils fonderont une nouvelle vie sur la Terre purifiée par la mort des nations. Dans la centième année, trois grands Royaumes seulement apparaîtront, qui vivront heureux pendant soixante et onze ans. Ensuite, il y aura dix-huit ans de guerre et de destruction. Alors les peuples d'Agarthi sortiront de leurs cavernes souterraines et apparaîtront sur la surface de la Terre.»

Ferdinand Ossendowski, « Bêtes, hommes et Dieux ».

Bêtes, hommes et Dieux

Un livre-culte de la littérature d'aventure vécue. Krasnoïarsk (Sibérie centrale), hiver 1920. L'homme vient d'apprendre qu'on l'a dénoncé aux " Rouges ", et que le peloton d'exécution l'attend. Il prend son fusil, fourre quelques cartouches dans la poche de sa pelisse, sort dans le froid glacial - et gagne la forêt. Commence alors une course-poursuite dont il ne sortira vivant, il le sait, que s'il ose l'impossible gagner à pied l'Inde anglaise à travers l'immensité sibérienne, puis les passes de Mongolie, puis le désert de Gobi, puis le plateau tibétain, puis l'Himalaya... L'itinéraire qu'il suivra sera quelque peu différent, et si possible plus sidérant encore. Mais ce que le livre révèle - et que le lecteur n'attend pas - c'est, parallèle an voyage réel. une étrange odyssée intérieure qui nous introduit au cœur des mystères de l'Asie millénaire. Car Ossendowski, géologue de son état, n'est pas qu'un savant doublé d'un aventurier. C'est un esprit exalté et curieux qui vit sa marche folle à la manière d une initiation...



Le rayon vert

Illustration :
http://www.ufodigest.com/news/0208/aldebaran-mystery2.html


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Les enfants prêcheurs du Brésil



Des sectes évangéliques n'hésitent pas à manipuler des enfants...


vendredi, avril 29, 2011

L'âge sombre



La doctrine hindoue enseigne que la durée d'un cycle humain, auquel elle donne le nom de Manvantara, se divise en quatre âges, qui marquent autant de phases d'un obscurcissement graduel de la spiritualité primordiale; ces sont ces mêmes périodes que les traditions de l'antiquité occidentale, de leur côté, désignaient comme les âges d'or, d'argent, d'airain et de fer. Nous sommes présentement dans le quatrième âge, le Kali- Yuga ou « âge sombre », et nous y sommes, dit-on, depuis déjà plus de six mille ans, c'est-à-dire depuis une époque bien antérieure à toutes celles qui sont connues de l'histoire « classique ». Depuis lors, les vérités qui étaient autrefois accessibles à tous les hommes sont devenus de plus en plus cachées et difficiles à atteindre ; ceux qui les possèdent sont de moins en moins nombreux, et, si le trésor de la sagesse « non humaine », antérieure à tous les âges, ne peut jamais se perdre, il s'enveloppe de voiles de plus en plus impénétrables, qui le dissimulent aux regards et sous lesquels il est extrêmement difficile de le
découvrir.

C'est pourquoi il est partout question, sous des symboles divers, de quelque chose qui a été perdu, en apparence tout au moins et par rapport au monde extérieur, et que doivent retrouver ceux qui aspirent à la véritable connaissance ; mais il est dit aussi que ce qui est ainsi caché redeviendra visible à la fin de ce cycle, qui sera en même temps, en vertu de la continuité qui relie toutes choses entre elles, le commencement d'un cycle nouveau Mais, demandera t on sans doute, pourquoi le développement cyclique doit il s'accomplir ainsi, dans un sens descendant, en allant du supérieur à l'inférieur, ce qui, comme on le remarquera sans peine, est la négation même de l'idée de « progrès » telle que les modernes l'entendent ? C'est que le développement de toute manifestation implique nécessairement un éloignement de plus en plus grand du principe dont elle procède ; partant du point le plus haut, elle tend forcément vers le bas, et, comme les corps pesants, elle y tend avec une vitesse sans cesse croissante, jusqu'à ce qu'elle rencontre enfin un point d'arrêt. Cette chute pourrait être caractérisée comme une matérialisation progressive, car l'expression du principe est pure spiritualité; nous disons l'expression, et non le principe même, car celui-ci ne peut être désigné par aucun des termes qui semblent indiquer une opposition quelconque, étant au delà de toutes les oppositions. D'ailleurs, des mots comme ceux d' «esprit» et de «matière », que nous empruntons ici pour plus de commodité au langage occidental, n'ont guère pour nous qu'une valeur symbolique; ils ne peuvent, en tout cas, convenir vraiment à ce dont il s'agit qu'à la condition d'en écarter les interprétations spéciales qu'en donne la philosophie moderne, dont « spiritualisme» et «matérialisme» ne sont, à nos yeux, que deux formes complémentaires qui s'impliquent l'une l'autre et qui sont pareillement négligeables pour qui veut s'élever au-dessus de ces points de vue contingents. Mais d'ailleurs ce n'est pas de métaphysique pure que nous nous proposons de traiter ici, et c'est pourquoi, sans jamais perdre de vue les principes essentiels, nous pouvons, tout en prenant les précautions indispensables pour éviter toute équivoque, nous permettre l'usage de termes qui, bien qu'inadéquats, paraissent susceptibles de rendre les choses plus facilement compréhensibles, dans la mesure où cela peut se faire sans toutefois les dénaturer.

Ce que nous venons de dire du développement de la manifestation présente une vue qui, pour être exacte dans l'ensemble, est cependant trop simplifiée et schématique, en ce qu'elle peut faire penser que ce développement s'effectue en ligne droite, selon un sens unique et sans oscillations d'aucune sorte ; la réalité est bien autrement complexe. En effet, il y a lieu d'envisager en toutes choses, comme nous l'indiquions déjà précédemment, deux tendances opposées, l'une descendante et l'autre ascendante, ou, si l'on veut se servir d'un autre mode de représentation, l'une centrifuge et l'autre centripète et de la prédominance de l'une ou de l'autre procèdent deux phases complémentaires de la manifestation, l'une d'éloignement du principe, l'autre de retour vers le principe, qui sont souvent comparées symboliquement aux mouvements du cœur ou aux deux phases de la respiration. Bien que ces deux phases soient d'ordinaire décrites comme successives, il faut concevoir que, en réalité, les deux tendances auxquelles elles correspondent agissent toujours simultanément, quoique dans des proportions diverses ; et il arrive parfois, à certains moments critiques où la tendance descendante semble sur le point de l'emporter définitivement dans la marche générale du monde, qu'une action spéciale intervient pour renforcer la tendance contraire, de façon à rétablir un certain équilibre au moins relatif, tel que peuvent le comporter les conditions du moment, et à opérer ainsi un redressement partiel, par lequel le mouvement de chute peut sembler arrêté ou neutralisé temporairement (1).

Il est facile de comprendre que ces données traditionnelles, dont nous devons nous borner ici à esquisser un aperçu très sommaire, rendent possibles des conceptions bien différentes de tous les essais de « philosophie de l'histoire » auxquels se livrent les modernes, et bien autrement vastes et profondes. Mais nous ne songeons point, pour le moment, à remonter aux origines du cycle présent, ni même plus simplement aux débuts de Kali-Yuga ; nos intentions ne se rapportent, d'une façon directe tout au moins, qu'à un domaine beaucoup plus limité, aux dernières phases de ce même Kali-Yuga. On peut en effet, à l'intérieur de chacune des grandes périodes dont nous avons parlé, distinguer encore différentes phases secondaires, qui en constituent autant de subdivisions ; et, chaque partie étant en quelque façon analogue au tout, ces subdivisions reproduisent pour ainsi dire, sur une échelle plus réduite, la marche générale du grand cycle dans lequel elles s'intègrent; mais, là encore, une recherche complète des modalités d'application de cette loi aux divers cas particuliers nous entraînerait bien au-delà du cadre que nous nous sommes tracé pour cette étude. Nous mentionnerons seulement, pour terminer ces considérations préliminaires, quelques-unes; des dernières époques particulièrement critiques qu'a traversées l'humanité, celles qui rentrent dans la période que l'on a coutume d'appeler « historique », parce qu'elle est effectivement la seule qui soit vraiment accessible à l'histoire ordinaire ou « profane » ; et cela nous conduira tout naturellement à ce qui doit faire l'objet propre de notre étude, puisque la dernière de ces époques critiques n'est autre que celle qui constitue ce qu'on nomme les temps modernes.

Il est un fait assez étrange, qu'on semble n'avoir jamais remarqué comme il mérite de l'être : c'est que la période proprement «historique », au sens que nous venons d'indiquer ; remonte exactement au VIe siècle avant l'ère chrétienne, comme s'il y avait là, dans le temps, une barrière qu'il n'est pas possible de franchir à l'aide des moyens d'investigation dont disposent les chercheurs ordinaires. A partir de cette époque, en effet, on possède partout une chronologie assez précise et bien établie ; pour tout ce qu: est antérieur, au contraire, on n'obtient en général qu'une très vague approximation, et les dates proposées pour les mêmes événements varient souvent de plusieurs siècles. Même pour les pays où l'on a plus que de simples vestiges épars, comme l'Égypte par exemple, cela est très frappant; et ce qui est peut-être plus étonnant encore, c'est que, dans un cas exceptionnel et privilégié comme celui de la Chine, qui possède, pour des époques bien plus éloignées, des annales datées au moyen d'observations astronomiques qui ne devraient laisser de place à aucun doute, les modernes n'en qualifient pas moins ces époques de « légendaires », comme s'il y avait là un domaine où ils ne se reconnaissent le droit à aucune certitude et où ils s'interdisent eux-mêmes d'en obtenir. L'antiquité dite « classique » n'est donc, à vrai dire, qu'une antiquité toute relative, et même beaucoup plus proche des temps modernes que de la véritable antiquité, puisqu'elle ne remonte même pas à la moitié du Kali-Yuga, dont la durée n'est elle-même, suivant la doctrine hindoue, que la dixième partie de celle du Manvantara ; et l'on pourra suffisamment juger par là jusqu'à quel point les modernes ont raison d'être fiers de l'étendue de leurs connaissances historiques ! Tout cela, répondraient ils sans doute encore pour se justifier, ce ne sont que des périodes « légendaires », et c'est pourquoi ils estiment n'avoir pas à en tenir compte ; mais cette réponse n'est précisément que l'aveu de leur ignorance, et d'une incompréhension qui peut seule expliquer leur dédain de la tradition; l'esprit spécifiquement moderne, ce n'est en effet, comme nous le montrerons plus loin, rien d'autre que l'esprit antitraditionnel.

Au VIe siècle avant l'ère chrétienne, il se produisit, quelle qu'en ait été la cause, des changements considérables chez presque tous les peuples ; ces changements présentèrent d'ailleurs des caractères différents suivant les pays. Dans certains cas, ce fut une réadaptation de la tradition à des conditions autres que celles qui avaient existé antérieurement, réadaptation qui s'accomplit en un sens rigoureusement orthodoxe ; c'est ce qui eut lieu notamment en Chine, où la doctrine, primitivement constituée en un ensemble unique, fut alors divisée en deux parties nettement distinctes : le Taoïsme, réservé à une élite, et comprenant la métaphysique pure et les sciences traditionnelles d'ordre proprement spéculatif; le Confucianisme, commun à tous sans distinction, et ayant pour domaine les applications pratiques et principalement sociales. Chez les Perse, il semble qu'il y ait eu également une réadaptation du Mazdéisme, car cette époque fut celle du dernier Zoroastre (2). Dans l'Inde, on vit naître alors le Bouddhisme, qui, quel qu'ait été d'ailleurs son caractère originel (3), devait aboutir, au contraire, tout au moins dans certaines de ses branches, à une révolte contre l'esprit traditionnel, allant jusqu'à la négation de toute autorité, jusqu'à une véritable anarchie, au sens étymologique d'« absence de principe », dans l'ordre intellectuel et dans l'ordre social. Ce qui est assez curieux, c'est qu'on ne trouve, dans l'Inde, aucun monument remontant au-delà de cette époque, et les orientalistes, qui veulent tout faire commencer au Bouddhisme dont ils exagèrent singulièrement l'importance, ont essayé de tirer parti de cette constatation en faveur de leur thèse; l'explication du fait est cependant bien simple : c'est que toutes les constructions antérieures étaient en bois, de sorte qu'elles ont naturellement disparu sans laisser de traces (4) ; mais ce qui est vrai, c'est qu'un tel changement dans le mode de construction correspond nécessairement à une modification profonde des conditions générales d'existence du peuple chez qui il s'est produit.

En nous rapprochant de l'Occident, nous voyons que la même époque fut, chez les Juifs, celle de la captivité de Babylone ; et ce qui est peut-être un des faits les plus étonnant qu'on ait à constater, c'est qu'une courte période de soixante-dix ans fut suffisante pour leur faire perdre jusqu'à leur écriture, puisqu'ils durent ensuite reconstituer les Livres sacrés avec des caractères tout autres que ceux qui avaient été en usage jusqu'alors. On pourrait citer encore bien d'autres événements se rapportant à peu près à la même date : nous noterons seulement que ce fut pour Rome le commencement de la période proprement « historique », succédant à l'époque « légendaire » des rois, et qu'on sait aussi, quoique d'une façon un peu vague, qu'il y eut alors d'importants mouvements chez les peuples celtiques ; mais, sans y insister davantage, nous en arriverons à ce qui concerne la Grèce. Là également, le VIe siècle fut le point de départ de la civilisation dite « classique », la seule à laquelle les modernes reconnaissent le caractère « historique », et tout ce qui précède est assez mal connu pour être traité de « légendaire », bien que les découvertes archéologiques récentes ne permettent plus de douter que, du moins, il y eut là une civilisation très réelle ; et nous avons quelques raisons de penser que cette première civilisation hellénique fut beaucoup plus intéressante intellectuellement que celle qui la suivit, et que leurs rapports ne sont pas sans offrir quelque analogie avec ceux qui existent entre l'Europe du moyen âge et l'Europe moderne. Cependant, il convient de remarquer que la scission ne fut pas aussi radicale que dans ce dernier cas, car il y eut, au moins partiellement, une réadaptation effectuée dans l'ordre traditionnel, principalement dans le domaine des « mystères » ; et il faut y rattacher le Pythagorisme, qui fut surtout, sous une forme nouvelle, une restauration de l'Orphisme antérieur, et dont les liens évidents avec le culte delphique de l'Apollon hyperboréen permettent même d'envisager une filiation continue et régulière avec l'une des plus anciennes traditions de l'humanité. Mais, d'autre part, on vit bientôt apparaître quelque chose dont on n'avait encore eu aucun exemple, et qui devait, par la suite, exercer une influence néfaste sur toast le monde occidental: nous voulons parler de ce mode spécial de pensée qui prit et garda le nom de « philosophie » ; et ce point est assez important pour que nous nous y arrêtions quelques instants.

Le mot « philosophie », en lui-même, peut assurément être pris en un sens fort légitime, qui fut sans doute son sens primitif, surtout s'il est vrai que, comme on le prétend, c'est Pythagore qui l'employa le premier : étymologiquement, il ne signifie rien d'autre qu' « amour de la sagesse » ; il désigne donc tout d'abord une disposition préalable requise pour parvenir à la sagesse, et il peut désigner aussi, par une extension toute naturelle, la recherche qui, naissant de cette disposition même, doit conduire à la connaissance. Ce n'est donc qu'un stade préliminaire et préparatoire, un acheminement vers la sagesse, un degré correspondant à un état inférieur à celle-ci (5) ; la déviation qui s'est produite ensuite a consisté à prendre ce degré transitoire pour le but même, à prétendre substituer la «nphilosophie » à la sagesse, ce qui implique l'oubli ou la méconnaissance de la véritable nature de cette dernière. C'est ainsi que prit naissance ce que nous pouvons appeler la philosophie «profane», c'est-à-dire une prétendue sagesse purement humaine, donc d'ordre simplement rationnel, prenant la place de la vraie sagesse traditionnelle, suprarationnelle et « non humaine ». Pourtant, il subsista encore quelque chose de celle-ci à travers toute l'antiquité; ce qui le prouve, c'est d'abord la persistance des « mystères », dont le caractère essentiellement « initiatique » ne saurait être contesté, et c'est aussi le fait que l'enseignement des philosophes eux-mêmes avait à la fois, le plus souvent, un côté « exotérique » et un côté « ésotérique », ce dernier pouvant permettre le rattachement à un point de vue supérieur, qui se manifeste d'ailleurs d'une façon très nette, quoique peut-être incomplète à certains égards, quelques siècles plus tard, chez les Alexandrins. Pour que la philosophie « profane » fût définitivement constituée comme telle, il fallait que l' « exotisme » seul demeurât et qu'on allât jusqu'à la négation pure et simple de tout « ésotérisme » ; c'est précisément à quoi devait aboutir, chez les modernes, le mouvement commencé par les Grecs ; les tendances qui s'étaient déjà affirmées chez ceux-ci devaient être alors poussées jusqu'à leurs conséquences les plus extrêmes, et l'importance excessive qu'ils avaient accordée à la pensée rationnelle allait s'accentuer encore pour en arriver au « rationalisme », attitude spécialement moderne qui consiste, non plus même simplement à ignorer, mais à nier expressément tout ce qui est d'ordre supra rationnel ; mais n'anticipons pas davantage, car nous aurons à revenir sur ces conséquences et à en voir le développement dans une autre partie de notre exposé.

Dans ce qui vient d'être dit, une chose est à retenir particulièrement au point de vue qui nous occupe : c'est qu'il convient de chercher dans l'antiquité « classique » quelques-unes des origines du monde moderne; celui-ci n'a donc pas entièrement tort quand il se recommande de la civilisation gréco-latine et s'en prétend le continuateur. Il faut dire, cependant, qu'il ne s'agit que d'une continuation lointaine et quelque peu infidèle, car il y avait malgré tout, dans cette antiquité, bien des choses, dans l'ordre intellectuel et spirituel, dont on ne saurait trouver l'équivalent chez les modernes ; ce sont, en tout cas, dans l'obscuration progressive de la vraie connaissance, deux degrés assez différents. On pourrait d'ailleurs concevoir que la décadence de la civilisation antique ait amené, d'une façon graduelle et sans solution de continuité, un état plus ou moins semblable à celui que nous voyons aujourd'hui; mais, en fait, il n'en fut pas ainsi, et, dans l'intervalle, il y eut, pour l'Occident, une autre époque critique qui fut en même temps une de ces époques de redressement auxquelles nous faisions allusion plus haut.

Cette époque est celle du début et de l'expansion du Christianisme, coïncidant, d'une part, avec la dispersion du peuple juif, et, d'autre part, avec la dernière phase de la civilisation gréco-latine ; et nous pouvons passer plus rapidement sur ces événements, en dépit de leur importance, parce qu'ils sont plus généralement connus que ceux dont nous avons parlé jusqu'ici, et que leur synchronisme a été plus remarqué, même des historiens dont les vues sont les plus superficielles. On a aussi signalé assez souvent certains traits communs à la décadence antique et à l'époque actuelle ; et, sans vouloir pousser trop loin le parallélisme, on doit reconnaître qu'il y a en effet quelques ressemblances assez frappantes. La philosophie purement « profane » avait gagné du terrain.

L’apparition du scepticisme d'un côté, le succès du « moralisme » stoïcien et épicurien de l'autre, montrent assez à quel point l'intellectualité s'était abaissée. En même temps, les anciennes doctrines sacrées, que presque personne ne comprenait plus, avaient dégénéré, du fait de cette incompréhension, en « paganisme » au vrai sens de ce mot, c'est à dire qu'elles n'étaient plus que des « superstitions », des choses qui, ayant perdu leur signification profonde, se survivent à elle-même par des manifestations tout extérieures. Il y eut des essais de réaction contre cette déchéance : l'hellénisme lui-même tenta de se revivifier à l'aide d'éléments empruntés aux doctrines orientales avec lesquelles il pouvait se trouver en contact ; mais cela n'était plus suffisant, la civilisation gréco-latine devait prendre fin, et le redressement devait venir d'ailleurs et s'opérer sous une tout autre forme. Ce fut le Christianisme qui accomplit cette transformation ; et, notons le en passant, la comparaison qu'on peut établir sous certains rapports entre ce temps et le nôtre est peut-être un des éléments déterminants du messianisme désordonné qui se fait jour actuellement. Après la période troublée des invasions barbares, nécessaire pour achever la destruction de l'ancien état de choses, un ordre normal fut restauré pour une durée de quelques siècles ; ce fut le moyen âge, si méconnu des modernes qui sont incapables d'en comprendre l'intellectualité, et pour qui cette époque paraît certainement beaucoup plus étrangère et lointaine que l'antiquité « classique ».

Le vrai moyen âge, pour nous, s'étend du règne de Charlemagne au début du XIVe siècle ; à cette dernière date commence une nouvelle décadence qui, à travers des étapes diverses, ira en s'accentuant jusqu'à nous. C'est là qu'est le véritable point de départ de la crise moderne : c'est le commencement de la désagrégation de la « Chrétienté », à laquelle s'identifiait essentiellement la civilisation occidentale du moyen âge ; c'est, en même temps que la fin du régime féodal, assez étroitement solidaire de cette même « Chrétienté », l'origine de la constitution des « nationalités ». Il faut donc faire remonter l'époque moderne près de deux siècles plutôt qu'on ne le fait d'ordinaire; la Renaissance et la Réforme sont surtout des résultantes, et elles n'ont été rendues possibles que par la décadence préalable; mais, bien loin d'être un redressement, elles marquèrent une chute beaucoup plus profonde, parce qu'elles consommèrent la rupture définitive avec l'esprit traditionnel, l'une dans le domaine des sciences et des arts, l'autre dans le domaine religieux lui-même, qui était pourtant celui où une telle rupture eût pu sembler le plus difficilement concevable.

Ce qu'on appelle la Renaissance fut en réalité, comme nous l'avons déjà dit en d'autres occasions, la mort de beaucoup de choses ; Sous prétexte de revenir à la civilisation gréco-romaine, on n'en prit que ce qu'elle avait eu de plus extérieur, parce que cela seul avait pu s'exprimer clairement dans des textes écrits ; et cette restitution incomplète ne pouvait d'ailleurs avoir qu'un caractère fort artificiel, puisqu'il s'agissait de formes qui, depuis des siècles, avaient cessé de vivre de leur vie véritable. Quant aux sciences traditionnelles du moyen âge, après avoir eu encore quelques dernières manifestations vers cette époque, elles disparurent aussi totalement que celles des civilisations lointaines qui furent jadis anéanties par quelque cataclysme ; et, cette fois, rien ne devait venir les remplacer. Il n'y eut plus désormais que la philosophie et la science « profanes », c'est-à-dire la négation de la véritable intellectualité, la limitation de la connaissance à l'ordre le plus inférieur, l'étude empirique et analytique de faits qui ne sons rattachés à aucun principe, la dispersion dans une multitude indéfinie de détails insignifiants, l'accumulation d'hypothèses sans fondement, qui se détruisent incessamment les unes les autres, et de vues fragmentaires qui ne peuvent conduire à rien, sauf à ces applications pratiques qui constituent la seule supériorité effective de la civilisation modem ; supériorité peu enviable d'ailleurs, et qui, en se développant jusqu'à étouffer toute autre préoccupation, a donné à cette civilisation le caractère purement matériel qui en fait une véritable monstruosité.
Ce qui est tout à fait extraordinaire, c'est la rapidité avec laquelle la civilisation du moyen âge tomba dans le plus complet oubli ; les hommes du XVIIe siècle n'en avaient plus la moindre notion, et les monuments qui en subsistaient ne représentaient plus rien à leurs yeux, ni dans l'ordre intellectuel, ni même dans l'ordre esthétique ; on peut juger par-là combien la mentalité avait été changée dans l'intervalle. Nous n'entreprendrons pas de rechercher ici les facteurs, certainement fort complexes, qui concoururent à ce changement, si radical qu'il semble difficile d'admettre qu'il ait pu s'opérer spontanément et sans l'intervention d'une volonté directrice dont la nature exacte demeure forcément assez énigmatique ; il y a, à cet égard, des circonstances bien étranges, comme la vulgarisation, à un moment déterminé, et en les présentant comme des découvertes nouvelles, de choses qui étaient connues en réalité depuis fort longtemps, mais dont la connaissance, en raison de certains inconvénients qui risquaient d'en dépasser les avantages, n'avait pas été répandue jusque là dans le domaine public (6). Il est bien invraisemblable aussi que la légende qui fit du moyen âge une époque de « ténèbres », d'ignorance et de barbarie, ait pris naissance et se soit accréditée d'elle-même, et que la véritable falsification de l'histoire à laquelle les modernes se sont livrés ait été entreprise sans aucune idée préconçue; mais nous n'irons pas plus avant dans l'examen de cette question, car, de quelque façon que ce travail se soit accompli, c'est, pour le moment, la constatation du résultat qui, en somme, nous importe le plus.

Il y a un mot qui fut mis en honneur à la Renaissance, et qui résumait par avance tout le programme de la civilisation moderne : ce mot est celui d' « humanisme ». Il s'agissait en effet de tout réduire à des proportions purement humaines, de faire abstraction de tout principe d'ordre supérieur, et, pourrait on dire symboliquement, de se détourner du ciel sous prétexte de conquérir la terre; les Grecs, dont on prétendait suivre l'exemple, n'avaient jamais été aussi loin en ce sens, même au temps de leur plus grande décadence intellectuelle, et du moins les préoccupations utilitaires n'étaient elles jamais passées chez eux au premier plan, ainsi que cela devait bientôt se produire chez les modernes. L' «humanisme», c'était déjà une première forme de ce qui est devenu le « laïcisme » contemporain ; et, en voulant tout ramener à la mesure de l'homme, pris pour une fin en lui-même, on a fini par descendre, d'étape en étape, au niveau de ce qu'il y a en celui-ci de plus inférieur, et par ne plus guère chercher que la satisfaction des besoins inhérents au côté matériel de sa nature, recherche bien illusoire, du reste, car elle crée toujours plus de besoins artificiels qu'elle n'en peut satisfaire.

Le monde moderne ira-t-il jusqu'au bas de cette pente fatale, ou bien, comme il est arrivé à la décadence du monde gréco-latin, un nouveau redressement se produira-t-il, cette fois encore, avant qu'il n'ait atteint le fond de l'abîme où il est entraîné ? Il semble bien qu'un arrêt à mi chemin ne soie plus guère possible, et que, d'après toutes les indications fournies par les doctrines traditionnelles, nous soyons entré vraiment dans la phase finale du Kali-Yuga, dans la période la plus sombre de cet « âge sombre », dans cet état de dissolution dont il n'est plus possible de sortir que par un cataclysme, car ce n'est plus un simple redressement qui es alors nécessaire, mais une rénovation totale. Le désordre et la confusion règnent dans tous les domaines ; ils ont été portés à un point qui dépasse de loin tout ce qu'on avait vu précédemment, et, partis de l'Occident, ils menacent maintenait d'envahir le monde tout entier (7) ; nous savons bien que leu triomphe ne peut jamais être qu'apparent et passager, mais à un tel degré, il paraît être le signe de la plus grave de toutes les crises que l'humanité ait traversées au cours de son cycle actuel. Ne sommes-nous pas arrivés à cette époque redoutable annoncée par les Livres sacrés de l'Inde, « où les castes seront mêlées, où la famille même n'existera plus » ? Il suffit de regarder autour de soi pour se convaincre que cet état est bien réellement celui du monde actuel, et pour constater partout cette déchéance profonde que l'Évangile appelle « l'abomination de la désolation ». Il ne faut pas se dissimuler la gravit de la situation; il convient de l'envisager telle qu'elle est sans aucun «optimisme », mais aussi sans aucun « pessimisme » puisque, comme nous le disions précédemment, la fin de l'ancien monde sera aussi le commencement d'un monde nouveau.

Maintenant, une question se pose : quelle est la raison d'être d'une période comme celle où nous vivons? En effet, si anormales que soient les conditions présentes considérées en elle mêmes, elles doivent cependant rentrer dans l'ordre général: des choses, dans cet ordre qui, suivant une formule extrême-orientale, est fait de la somme de tous les désordres ; cette époque, si pénible et si troublée qu'elle soit, doit avoir aussi comme toutes les autres, sa place marquée dans l'ensemble du développement humain, et d'ailleurs le fait même qu'elle était prévue par les doctrines traditionnelles est à cet égard une indication suffisante. Ce que nous avons dit de la marche générale d'un cycle de manifestation, allant dans le sens d'une matérialisation progressive, donne immédiatement l'explication d'un tel état, et montre bien que ce qui est anormal et désordonné à un certain point de vue particulier n'est pourtant que la conséquence d'une loi se rapportant à un point de vus supérieur ou plus étendu. Nous ajouterons, sans y insister que, comme tout changement d'état, le passage d'un cycle à un autre ne peut s'accomplir que dans l'obscurité ; il y a encore une loi fort importante et dont les applications sont multiples, mais dont, par cela même, un exposé quelque peu détaillé nous entraînerait beaucoup trop loin (8).

Ce n'est pas tout: l'époque moderne doit nécessairement correspondre au développement de certaines des possibilités qui, dès l'origine, étaient incluses dans la potentialité du cycle actuel; et, si inférieur que soit le rang occupé par ces possibilités dans la hiérarchie de l'ensemble, elles n'en devaient pas moins aussi bien que les autres, être appelées à la manifestation selon l'ordre qui leur était assigné. Sous ce rapport, ce qui, suivant la tradition, caractérise l'ultime phase du cycle, c'est, pourrait-on dire, l'exploitation de tout ce qui a été négligé ou rejeté au cours des phases précédentes; et, effectivement c'est bien là ce que nous pouvons constater dans la civilisation moderne, qui ne vit en quelque sorte que de ce dont les civilisations antérieures n'avaient pas voulu. Il n'y a, pour s'en rend compte, qu'à voir comment les représentants de celles de ces civilisations qui se sont maintenues jusqu'ici dans le monde oriental apprécient les sciences occidentales et leurs applications industrielles. Ces connaissances inférieures, si vainc au regard de qui possède une connaissance d'un autre ordre devaient pourtant être « réalisées », et elles ne pouvaient l'être qu'à un stade où la véritable intellectualité aurait disparu ces recherches d'une portée exclusivement pratique, au sens le plus étroit de ce mot, devaient être accomplies, mais elle ne pouvait l'être qu'à l'extrême opposé de la spiritualité primordiale, par des hommes enfoncés dans la matière au point de ne plus rien concevoir au-delà, et devenant d'autant plus esclaves de cette matière qu'ils voudraient s'en servir davantage, ce qui les conduit à une agitation toujours croissante, sans règle et sans but, à la dispersion dans la pure multiplicité, jusqu'à la dissolution finale.

Telle est, esquissée dans ses grands traits et réduite à l'essentiel, la véritable explication du monde moderne ; mais, déclarons le très nettement, cette explication ne saurait aucunement être prise pour une justification. Un malheur inévitable n'est est pas moins un malheur; et, même si du mal doit sortir un bien, cela n'enlève point au mal son caractère ; nous n'employons d'ailleurs ici, bien entendu, ces termes de « bien » et de « mal » que pour nous faire mieux comprendre, et en dehors de toute intention spécifiquement « morale ». Les désordres partiels ne peuvent pas ne pas être, parce qu'ils sont des éléments nécessaires de l'ordre total; mais, malgré cela une époque de désordre est, en elle-même, quelque chose de comparable à une monstruosité, qui, tout en étant la conséquence de certaines lois naturelles, n'en est pas moins une déviation et une sorte d'erreur, ou à un cataclysme, qui, bien que résultant du cours normal des choses, est tout de même, si on l'envisage isolément, un bouleversement et une anomalie. La civilisation moderne, comme toutes choses, a forcément sa raison d'être, et, si elle est vraiment celle qui termine un cycle, on peut dire qu'elle est ce qu'elle doit être, qu'elle vient en son temps et en son lieu; mais elle n'en devra pas moins être jugée selon la parole évangélique trop souvent mal comprise : « Il faut qu'il y ait du scandale ; mais malheur à celui par qui le scandale arrive ! »




1) Ceci se rapporte à la fonction de « conservation divine », qui, dans la tradition hindoue, est représentée par Vishnu, et plus particulièrement à la doctrine des Avatâras ou « descentes » du principe divin dans le monde manifesté, que nous ne pouvons naturellement songer à développer ici.

2) Il faut remarquer que le nom de Zoroastre désigne en réalité, non un personnage particulier, mais une fonction, à la fois prophétique et législatrice ; il y eut plusieurs Zoroastres, qui vécurent à des époques fort différentes; et il est même vraisemblable que cette fonction dut avoir un caractère collectif, de même que celle de Vyâsa dans l'Inde, et de même aussi que, en Égypte, ce qui fut attribué à Thot ou Hermès représente l’œuvre de toute la caste sacerdotale.

3) La question du Bouddhisme est, en réalité, loin d'être aussi simple que pourrait le donner à penser ce bref aperçu; et il est intéressant de noter que, si les Hindous, au point de vue de leur propre tradition, ont toujours condamné les Bouddhistes, beaucoup d'entre eux n'en professent pas moins un grand respect pour le Bouddha lui-même, quelques-uns allant même jusqu'à voir en lui le neuvième Avatara tandis que d'autres identifient celui-ci avec le Christ. D'autre part, en ce qui concerne le Bouddhisme tel qu'il est connu aujourd'hui, il faut avoir bien soin de distinguer entre ses deux formes du Mahayana et du Hînayana ou du «Grand Véhicule» et du «Petit Véhicule» ; d'une façon générale, on peut dire que le Bouddhisme hors de l'Inde diffère notablement de sa forme indienne originelle, qui commença à perdre rapidement du terrain après la mort d'Ashoka et disparut complètement quelques siècles plus tard.

4) Ce cas n'est pas particulier à l'Inde et se rencontre aussi en Occident; c'est exactement pour la même raison qu'on ne trouve aucun vestige des cités gauloises, dont l'existence est cependant incontestable, étant attesté par des témoignages contemporains; et, là également, les historiens modernes ont profité de cette absence de monuments pour dépeindre les Gaulois comme des sauvages vivant dans les forêts.

5) Le rapport est ici à peu près le même que celui qui existe, dans la doctrine taoïste, entre l'état de « l'homme doué » et celui de l' « homme transcendant.

6) Nous ne citerons que deux exemples, parmi les faits de ce genre qui devaient avoir les plus graves conséquences : la prétendue invention de l'imprimerie, que les Chinois connaissaient antérieurement à l'ère chrétienne et la découverte « officielle » de l'Amérique, avec laquelle des communications beaucoup plus suivies qu'on ne le pense avaient existé durant tout le moyen âge.

7) René Guénon a écrit ce livre dans les années 1930.

8) Cette loi était représentée, dans les mystères d'Éleusis, par le symbolise du grain de blé ; les alchimistes la figuraient par la « putréfaction » et par couleur noire qui marque le début du Grand Œuvre » ; ce que les mystiques chrétiens appellent la « nuit obscure de l'âme » n'en est que l'application au développement spirituel de l'être qui s'élève à des états supérieurs; et il serait facile de signaler encore bien d'autres concordances.

René Guénon, « La crise du monde moderne ».

Télécharger gratuitement le livre :

La crise du monde moderne

Un des caractères particuliers du monde moderne, c'est la scission qu'on y remarque entre l'Orient et l'Occident. [...] Il peut y avoir une sorte d'équivalence entre des civilisations de formes très différentes, dès lors qu'elles reposent toutes sur les mêmes principes fondamentaux, dont elles représentent seulement des applications conditionnées par des circonstances variées. Tel est le cas de toutes les civilisations que nous pouvons appeler normales, ou encore traditionnelles ; il n'y a entre elles aucune opposition essentielle, et les divergences, s'il en existe, ne sont qu'extérieures et superficielles. Par contre, une civilisation qui ne reconnaît aucun principe supérieur, qui n'est même fondée en réalité que sur une négation des principes, est par là même dépourvue de tout moyen d'entente avec les autres, car cette entente, pour être vraiment profonde et efficace, ne peut s'établir que par en haut, c'est-à-dire précisément par ce qui manque à cette civilisation anormale et déviée. Dans l'état présent du monde, nous avons donc, d'un côté, toutes les civilisations qui sont demeurées fidèles à l'esprit traditionnel, et qui sont les civilisations orientales, et, de l'autre, une civilisation proprement antitraditionnelle, qui est la civilisation occidentale moderne.




A propos du Sowelo de feu (à la fin de la première partie) :


La rune Sowelo est la rune du soleil et de la réalisation de soi ; doublée sa signification s'inverse. Le double Sowelo des SS, l'ordre noir du nazisme, symbolisait la force ténébreuse et maléfique qui a ravagé le monde au XXe siècle.




Illustration :

jeudi, avril 28, 2011

La réalisation du grand transfert





La réalisation du grand transfert ou du corps de lumière est l'étape ultime du Dzogchen. Le corps de lumière constitue le fruit particulier de la pratique du Franchissement du Pic (thod-rgal).

Shardza Tashi Gyaltsen (1859-1935) enseignait le Dzogchen de la tradition du Zhang Zhung. Dans l'année du chien de bois, alors qu'il était âgé de soixante-seize ans, Kelzang Yungdrung, l'un de ses disciples, priait pour bénir des médicaments quand Shardza lui dit qu'il devait terminer avant le quatrième mois, car, après, ils ne se rencontrerait plus. Au deuxième jour du quatrième mois, Shardza reçut les médicaments bénis, et une fois la prière terminée, dit : « Je dois maintenant me rendre dans des endroits retirés ». Il alla alors s'installer dans un lieu appelé Rabzhi Teng, et y construisit une petite tente.[...]

Le treizième jour du quatrième mois, il fit une offrande de ganapûja selon le Tsewang Bö Yulma (tshe dbang bad yul ma), et chanta de nombreux enseignements. Puis il donna l'ordre à ses disciples de coudre la tente de sorte qu'elle soit complètement fermée, et de ne pas 1'ouvrir avant plusieurs jours. Il entra dans la tente, dit quelques prières, souhaita « bonne chance! » à ceux qui étaient là, et s'assit, à l'intérieur, dans la posture en cinq points.

Le lendemain, ses disciples virent de nombreux arcs-en-ciel au-dessus de sa tente : des grands, des très petits, des ronds, des droits, des horizontaux, des verticaux, tous très colorés. La nuit, en particulier, tout le monde pouvait voir briller des lumières blanches, étirées comme de longues écharpes. Le quatrième jour, il y eut un tremblement de terre, des sons étranges et très bruyants et des pluies de fleurs. De nombreuses lumières de différentes couleurs - monochromes ou quinticolores - sortirent, comme de la vapeur, à travers les orifices de la tente. Tsultrim Wangchug, un de ses étudiants, dit: « Si nous laissons le corps plus longtemps il n'en restera rien et nous n'aurons pas les reliques pour notre culte. » Il ouvrit donc la tente et se prosterna. Le corps de Shardza réduit à la taille d'un enfant d'un an, tout auréolé de lumière, lévitait d'une coudée au-dessus du matelas. Entrant dans la tente, le disciple vit que les ongles, détachés des doigts, s'étaient répandus sur le matelas. Lorsqu'il toucha le corps, le cœur était encore chaud. Il recouvrit le corps d'un tissu, le garda pendant quarante-neuf jours, puis fit une pûja des mille noms des Bouddhas, de nombreuses ganapûjas et toutes sortes d'offrandes. Lorsqu'ensuite les visiteurs virent le corps et le touchèrent, ils éprouvèrent tous des sensations très particulières. Tout le monde vit, chaque jour, des lumières, des arcs-en-ciel, et des pluies de fleurs. Les gens de la région vinrent voir le corps et il naquit chez eux une dévotion et ils eurent foi en Shardza. […]

Un des principaux disciples de Shardza Tashi Gyaltsen s'appelait Tsewang Gyurme (tse dbang 'gyur med). Il mourut entre 1969 et 1970 dans une geôle chinoise. Cela se passa au Nyarong, dans le Kham ; on ne sait pas ce qu'il advint de lui. Quatre jeunes moines vinrent du Khyungpo pour le voir avant son arrestation, et ils en reçurent tous les enseignements Dzogchen, y compris toutes les œuvres de Shardza et toutes les initiations. Ils y demeurèrent très longtemps. Ces moines se nommaient Tsultrim Tarchen (tshul khrims thar phyin), Tsewang Dechen N yingpo (tshe dbang de chen snying po), Tsupu Özer (gtsud phud 'od zer) et Sonam Kelsang (bso nams skal sangs).

Ils restèrent avec lui pendant neuf ans, mais, en 1958-1959, quand les Chinois commencèrent à gouverner le Tibet directement, ils repartirent au Khyungpo. Le premier moine, Tsultrim, fut porté disparu dans le chaos de 1969. Le second, Tsewang, fut caché par des villageois durant la Révolution Culturelle de 1969-1970, mais n'étant pas en bonne santé il mourut à cette époque. Pendant dix jours son corps rétrécit, ensuite on le cacha dans une cuvette ; il était réduit à la taille d'une assiette de dix pouces.

Cette dissimulation avait représenté un danger considérable pour les villageois, mais, plus tard en 1984, ils purent le montrer, car, à cette période, les Chinois avaient levé les restrictions concernant la pratique religieuse. Le troisième disciple, Tsupu Özer, mourut en 1983. Au bout de sept jours, son corps avait également rétréci à une petite taille puis il cessa de diminuer, et son corps fut conservé pendant deux mois aux côtés de celui de Tsewang.

Puis ces deux corps furent incinérés ensemble, lors d'une grande cérémonie. Deux moines, Yeshe Ozer (ye shes 'od zer) et Sangye Monlam (sangs rgyas smon lam), qui vivent à Kathmandu avec Lopön Tenzin Namdak, assistèrent à ces crémations.

Au moins dix mille personnes vinrent participer à la cérémonie; Yeshe vit les deux corps de très près ; ils étaient presque nus, assis en posture du lotus. Les corps étaient très légers, parfaits mais de petite taille, toutes les parties de chaque corps ayant rétréci proportionnellement. Ces deux moines étaient dans le village où et quand Tsupu Özer mourut, et ils furent témoins de beaucoup d'autres manifestations inhabituelles, telles que des arcs-en-ciel s'étalant à ras de terre, malgré un ciel dégagé. Ce fut d'autant plus surprenant que Tsupu Ozer n'était pas considéré comme un grand pratiquant, parce qu'il était porté sur le chang (boisson alcoolisée) !

Un autre disciple de Shardza appelé Tsondru Rinpoche (brtson 'grus rin po che) en 1985 dans le centre Bönpo de Dolanji. Tous ceux qui y habitaient ont vu des arcs-en-ciel, droits ou courbes, certains blancs, d'autres quinticolores. À sa mort, ils sont apparus dans un ciel sans nuage. Même quand la nuit tombait, des arcs-en-ciel blancs luisaient dans le ciel. Beaucoup de gens ont vu cela à. Dolanji. Après son incinération, ils furent nombreux à rechercher des reliques dans les cendres. Les moines en charge de la crémation ont trouvé beaucoup de grosses « pilules-reliques » ; d'autres, aperçues tandis qu'on cherchait à les prélever, disparaissaient au moment où on les saisissait. Les « pilules » sont conservées par l'Abbé de Dolanji. »

Les Sphères du Cœur.


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Franchissement du Pic, fresque du Lukhang.

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