mardi, septembre 18, 2012

Les yippies & la révolution rock




Do It, le livre de Jerry Rubin (jadis jeune américain sage), est considéré comme le manifeste du mouvement « yippie », synthèse entre le courant hippie et le gauchisme des jeunes révolutionnaires américains.

Jerry Rubin (1938-1994), un enfant de l'Amérike

Je suis un enfant de l'Amérike.
Si un jour ils me collent au poteau pour mes «crimes» révolutionnaires, je veux un hamburger-frites avant de mourir, et un Coca.
Les grandes villes, ça me botte.
La page des sports et les potins dans leurs journaux, les programmes radio, la télé-couleur, j'adore ça.
Et aussi les grands magasins, les supermarchés géants, les aérogares. Ça me rassure de voir un restauroute Howard Johnson [équivalent des Jacques Borel], y compris les jours où je n'ai pas faim.
Je suis dingue des films de Hollywood, même les plus cons.
Je ne parle qu'une langue, l'anglais.
J'aime le rock.

Tout gosse, je collectionnais les photos de baseballeurs et je voulais devenir deuxième base dans les Cincinnati Reds.
Seize ans, ma première bagnole, je loupe mon permis — j'ai pleuré pendant huit jours avant de réessayer.
Je suis admis dans un de ces collèges où ils vous font d'abord passer un examen d'entrée. J'en sors en queue de liste.
On élit le type le « plus populaire» de la boîte, c'est moi.
J'avais les cheveux courts, courts, ultra-courts.
L'Attrape-cœur [roman de J.D. Salinger] m'a fait de l'effet.
Je n'ai jamais eu d'acné.

Je deviens un jeune as du reportage au Post and Times Star de Cincinnati. « Mon petit, me dit le patron, tu seras un jour un reporter du tonnerre, peut-être le plus formidable qu'il y ait jamais eu à Cincinnati. »

J'étais de tout cœur pour Adlai Stevenson [politicien super-libéral et chouchou de la petite bourgeoisie].
Mon père livrait du pain avec son camion. Plus tard il devint permanent du Syndicat des camionneurs de boulangerie. Il ne pensait que du bien de Jimmy Hoffa (moi aussi). [ Jimmy Hoffa : leader populiste du Syndicat.]
Il [le père de Jerry] est mort à cinquante-deux ans d'une crise cardiaque.
Ma mère avait été à l'université. Elle jouait du piano. Elle est morte d'un cancer à cinquante et un ans.
Je me suis occupé de mon frère Gil depuis qu'il a eu treize ans.
Je me suis fait réformer par piston.
Un an à Oberlin College, diplômé de l'université de Cincinnati, je passe un an et demi en Israël et me fais inscrire à Berkeley.
J'ai tout plaqué.
J'ai plaqué la race blanche et la nation amérikaine.
J'aime vivre sans entraves.
J'aime la défonce.
De complet-veston, de cravate, je n'en ai plus jamais portés.
Tout pour la révolution.
Je suis un yippie !
Je suis un orphelin de l'Amérike.

La révolution par le rock

Enfant promis à une existence furibarde, la Nouvelle Gauche est sortie du pelvis ondulant d'Elvis Presley.

En apparence, le monde des années 50 avait la bonne placidité d'Eisenhower. Satisfait et béat comme un grand reportage sur les « Fans d'Ike», papa-gâteau.
Par en dessous, la masse silencieuse des opprimés avait saisi ses chaînes à deux mains. Un drame se préparait : répression contre mécontents.
L'Amérikkke était coincée dans ses contradictions.

Papa regardait avec fierté sa maison et sa voiture, sa pelouse taillée au ciseau à Ongles. Tout ces biens qui justifiaient sa vie.
Il essayait de nous donner une bonne éducation : il voulait nous apprendre à marcher droit sur la route de la Réussite.

Travaille ne joue pas
Étudie ne traîne pas
Obéis ne pose pas de questions
Intègre-toi ne te fais pas remarquer
Sois sérieux ne te drogue pas
Fais de l'argent ne fais pas d'histoires

On nous obligeait à nous renier :
On nous apprenait que faire l'amour était mal, parce qu'immoral.
Et aussi, à cette époque d'avant la pilule, une fille en cloque vous barrait la route de la Respectabilité et de la Réussite.
On nous disait que la masturbation rendait fou et donnait des boutons.
On savait plus où on en était. Comment arriver à comprendre qu'il fallait bosser dur pour acheter des baraques toujours plus hautes ? des bagnoles toujours plus longues ? des pelouses taillées au ciseau toujours plus grandes ?
On en devenait fous. On ne pouvait plus tenir.
Elvis bousilla l'image papa-gâteau d'Eisenhower en secouant à mort nos jeunes corps emmaillotés. L'énergie sauvage du rock gicla en nous, toute bouillante, et le rythme libéra nos passions refoulées.
De la musique pour libérer l'esprit.
De la musique pour nous unir.
Buddy Holly, les Coasters, Bo Diddley, Chuck Berry, les Everly Brothers, Jerry Lee Lewis, Fats Domino, Little Richard. Ray Charles. Bill Haley, et les Cornets, Fabian, Bobby Darin, Frankie Avalon : tous nous ont donné vie / rythme et nous ont libéré.
Elvis nous disait let go ! let go ! let go ! let go !

La civilisation d'abondance, en fabriquant une voiture avec radio pour chaque famille bourgeoise, a fourni ses troupes à Elvis.
Pendant que la radio, à l'avant, gueulait Turn Me Loose, les gosses se déchaînaient sur la banquette arrière.
Beaucoup de nuits passées à baiser dans le noir au rythme du rock, sur des routes désertes.
Les banquettes arrière déclenchèrent la révolution sexuelle et les radios étaient le médium de cette subversion.
Nos vieux désespérés se servaient de la voiture comme d'un moyen de pression : « Si tu ne fais pas ce que je te dis, tu n'auras pas la voiture samedi soir. »
C'était cruel de s'en prendre ainsi à nos gonades, à notre seul moyen d'être ensemble.
La banquette arrière fut le premier terrain où s'affrontèrent les générations.

La révolution a commencé avec le rock.

[…]

Nos dirigeants ont sept ans.

L'Amérike dit : Ne fais pas ça.
Les yippies disent : Fais-le !
Toutes les actions des yippies sont destinées aux gosses de 3 à 7 ans.
Nous dévergondons les enfants.
Notre message, c'est : ne grandissez pas. Grandir, c'est abandonner ses rêves.

Nos parents mènent une guerre de génocide contre leurs propres enfants. Le système économique n'a rien à foutre de la jeunesse, il n'en a pas besoin. Tout a déjà été construit. Notre seule existence est déjà un crime.
En toute logique, ils devront nous éliminer.
Alors, l'Amérike envoie ses « nègres de jeunes » se faire crever la peau au Vietnam.
L'école a pour unique fonction d'empêcher les jeunes des classes moyennes d'être à la rue. Les lycées et les universités sont des crèches pour jeunes, sous leurs noms à la gomme.
Le Vietnam et l'école sont les deux fronts principaux où se livre la guerre de génocide de l'Amérike contre sa jeunesse, juste avant les prisons et les asiles.

L'Amérike dit : l'Histoire est finie. Intégrez-vous. On a découvert le meilleur système de toute l'histoire de l'humanité — c'est le nôtre. On n'aura jamais rien de mieux, parce que l'homme est égoïste, avaricieux, parce qu'il porte le stigmate du péché originel. Et si nous ne voulons pas nous intégrer, ils nous bouclent.
Mais pour les masses du monde entier, l'histoire ne fait que commencer. Et nous, les mômes, nous voulons aussi tout recommencer à partir de presque rien. Nous voulons être des héros, comme ceux des livres d'histoire. Nous n'avons pas vécu la Première Révolution amérikaine. Ni la Deuxième Guerre mondiale.
Nous avons manqué les révolutions chinoise et cubaine. Allons-nous passer notre vie à faire des grimaces béates en regardant la télé ?
Une société qui abolit toute aventure, fait de l'abolition de cette société la seule aventure possible. (Vaneigem)

Jerry Rubin, Do It.




Quand il était jeune, Rubin disait : « ne fais jamais confiance aux plus de quarante ans ». Ironie du sort, après la fin de la guerre du Vietnam, à un âge approchant la quarantaine, il renia totalement son idéal yippie pour se consacrer au business et adhéra à la contre-révolution conservatrice de Reagan.

Le livre en anglais :


Scenarios of the Revolution

lundi, septembre 17, 2012

L'innocence des musulmans




Innocence of Muslim sur Radio Libre Expression

L'innocence des musulmans est un « film créé pour jeter de l'huile sur le feu », affirme l'animateur de Radio Libre Expression dont l'analyse n'est pas dénuée d'intéressantes réflexions, notamment sur les croyances religieuses et l'au-delà.

Le film est coproduit par un copte égyptien Nakoula Basseley Nakoula, alias Sam Bacile (?), et des évangélistes de la mouvance extrémiste du pasteur Terry Jones. Le réalisateur est un auteur de films pornographiques nommé Alan Roberts.

L'innocence des musulmans permet aux fondamentalistes, comme les Wahhabites et les salafistes, de passer à l'action. Ils se sont rassemblés illégalement à Paris, pratiquement sous les fenêtres de l’Élysée.

Pour Ian Hamel, journaliste spécialiste du terrorisme et des services secrets, le wahhabisme et le salafisme ont un objectif commun : l'assaut du monde musulman.

« Le wahhabisme est un dogme musulman spécifique apparu au XVIIIe siècle dans la péninsule Arabique. C'est une variante d'une des quatre écoles juridiques reconnues chez les musulmans sunnites, l'école hanbalite, considérée comme la plus rigoriste et la plus puritaine. Parmi les trois autres écoles juridiques, le rite hanafite prédomine dans l'ancien l'Empire ottoman, dans les républiques musulmanes d'Asie centrale, ainsi qu'en Inde. Le rite malakite est, lui, implanté dans le Maghreb et en Afrique occidentale. Tandis que les shafi'ites sont majoritaires en Asie, et les hanbalites en Arabie Saoudite.

Le wahhabisme est un islam intransigeant. Lorsqu'en 1924 Ibn-Séoud, ardent défenseur du wahhabisme, s'empare de La Mecque, il fait détruire les tombes des Hachémites, descendants du Prophète (et grands rivaux des Séoud), sous prétexte qu'il est interdit de révérer quiconque autre que Dieu, même pas le Prophète. Peu après, le roi rase la tombe d 'Ève à Djedda pour « mettre fin aux superstitions ». Toutefois, les partisans de cette secte refusent le mot « wahhabite ». Ils s'appellent eux-mêmes Muwahhidun (Unitariens).

C'est Ibn Abd Al-Wahhab (1703-1792) qui fonde ce mouvement politico-religieux dans la région du Nadjd, le centre désertique de la péninsule. « Il a ensuite conquis toute l'Arabie jusqu'aux confins du Golfe, grâce à l'alliance indéfectible, conclue vers les années 1744-1745, avec Ibn saoud "au nom de Dieu et de son prophète". C'est le pacte de Nadjd », résume Hamadi Redissi, professeur à la faculté de droit de Tunis . C'est la version islamique du sabre et du goupillon.

Le chef de tribu Mohamed Ibn Séoud, ancêtre et homonyme du futur roi d'Arabie Saoudite, donne sa fille à marier au théologien Ibn Abd Al-Wahhab, la condamnant à une ascèse extrême. La jeune épouse se voit interdire la musique, la poésie, le port de la soie, la sculpture, et même le rire.

Le marché passé entre le guerrier impitoyable et le prédicateur illuminé se résume ainsi : les Séoud imposent le wahhabisme sur leurs territoires et, « en échange, les wahhabites garantissent l'obéissance des fidèles au pouvoir ». Le puritanisme extrême se double d'un conservatisme tout aussi inébranlable.


Deux siècles plus tard, en 1932, lors de la création de l'Arabie Saoudite, le pacte de Nadj est toujours en vigueur. Les mœurs et la religion sont immuables. Ibn-Séoud confine ses sujets dans leurs traditions : « Il interdit les films et la musique de jazz sur toute l'étendue de son territoire. Il demanda aux directeurs américains de ne pas embaucher de Juifs », raconte Jacques Benoist-Méchin . Néanmoins, les oulémas (docteurs de la loi musulmane) les plus conservateurs jugent Ibn-Séoud encore trop progressiste. L'automobile, l'avion, le téléphone, la radio, sont tout de même des inventions sataniques... Les châtiments corporels s'appliquent toujours. On continue à couper la main des voleurs. Sous la pression des Américains, le roi tolère que le sabre du bourreau soit désinfecté, et que le moignon, après l'amputation, soit badigeonné au Mercurochrome. Le 3 août 2005, quand les grands oulémas prêtent serment d'allégeance au nouveau roi Abdallah, sixième monarque de la dynastie, c'est Abdelaziz Al-Cheikh, grand mufti et descendant d'Ibn Abd Al-Wahhab, qui conduit la délégation.

Dans Les Filles de Riyad, un roman interdit en Arabie Saoudite, traduit en français en 2007, la Saoudienne Rajaa Alsanea, vingt-cinq ans, installée à Chicago, aborde le sujet sensible des relations entre les filles et les garçons. Lamis et Ali, sans liens de parenté et non mariés, commettent l'impensable : ils se retrouvent ensemble dans un café. Ils sont aussitôt arrêtés par la brigade pour la prévention du vice et la protection de la vertu. Quelques heures d'interrogatoire plus tard, des responsables de la brigade alertent le père de Lamis et l'informent que sa fille « était à présent en état d'arrestation [...] et qu'il fallait qu'il vienne la chercher après avoir signé une déclaration selon laquelle il s'engageait à ne pas la laisser recommencer à porter atteinte aux bonnes mœurs ». Quant à Ali, « son châtiment serait autrement plus dur ». Pour la brigade, Ali est un « hérétique », car il est... chiite.»


L'Arabie Saoudite, précise Ian Hamel, « avec des comités de la commanderie de la vertu et de l'interdiction du vice, composés de mutawaa (contrôleurs des mœurs), qui interviennent à tout instant dans la vie quotidienne, on y est fouetté si l'on oublie l'une des cinq prières quotidiennes, si on ne respecte pas le jeûne du ramadan, si le voile féminin laisse échapper une mèche de cheveux. Les femmes demeurent mineures à vie, n'ont ni papiers d'identité ni permis de conduire, et doivent obtenir le consentement de leurs tuteurs avant d'être hospitalisées (dans ce dernier cas, la situation vient juste de changer, une femme peut dorénavant décider seule d'entrer en clinique). [...]

Les Frères musulmans apparaissent moins sectaires, plus pragmatiques, plus politiques que les wahhabites. Mais existe-t-il une différence fondamentale entre eux ? Pas vraiment. Ce sont des salafistes, des adeptes d'une doctrine religieuse qui s'inspire exclusivement des textes juridiques des pieux ancêtres (salaf sâlih) : les oulémas des premiers siècles de l'islam et les compagnons du Prophète . Selon eux, l'islam a connu à cette époque une gloire et un rayonnement inégalés. Pour retrouver cet âge d'or, il faut revenir à l'islam des origines, et faire table rase de toutes les évolutions novatrices. Frères musulmans et wahhabites font du Coran et de la Sunna (la vie du Prophète) une lecture fondamentaliste, voire littéraliste. Tout effort d'interprétation fondé sur la raison humaine est « perçu comme une altération du message religieux qui doit exclusivement se référer, selon la tradition salafiste, à la raison divine », souligne Dominique Thomas, spécialiste des questions islamistes et du Proche-Orient. »

Ian Hamel

Ian Hamel a écrit La vérité sur Tariq Ramadan : Sa famille, ses réseaux, sa stratégie. Il est l'auteur de L'énigme Oussama Ben laden, Et si la Suisse ne servait plus à rien, Sarko et Cie, la République des copains...




samedi, septembre 15, 2012

Survivalisme




Survivre à l'effondrement économique

Michel Drac, essayiste, responsable des éditions Scriptoblog, ancien membre du bureau national d’Égalité & Réconciliation, prédit l'effondrement de notre société :

« La crise commencée en 2008 avec l'implosion de la bulle des subprimes n'est pas une crise ordinaire. Intuitivement, tous les observateurs l'ont compris. Quelque chose s'est déréglé dans notre monde, quelque chose qui gisait tout au fond de notre manière de vivre, de notre manière de produire, de notre manière de consommer - et même de notre manière de penser.

Ce quelque chose qui vient de rompre, c'est notre foi dans le messianisme millénariste du Progrès.

Depuis trois siècles, l'homme occidental s'était fait à l'idée qu'il n'avait pas besoin de Dieu, puisqu'il était son propre sauveur. L'humanité était le Messie de l'humanité : voilà ce que proclamait la religion nouvelle. Une religion entrée dans le monde catholique sur la pointe des pieds, avec Descartes. Une religion, aussi, qui avait fini par se substituer, partout, à l'antique croyance.

On rit parfois du Djoutché, cette assez ridicule idéologie nord-coréenne dont l'unique article est que l'homme peut transformer la nature indéfiniment. On a tort : sous des formes bien sûr plus sophistiquées, tous les systèmes contemporains sont appuyés sur ce postulat de toute-puissance humaine. La Chine a brisé la maison de Confucius et s'est convertie avec frénésie à la religion de la croissance. L'Inde éternelle, même l'Inde, s'est mise à penser l'avenir sous la forme d'une courbe ascendante.

Toute l'humanité, progressivement, est entrée dans la communion naïve d'une nouvelle religion, bien moins rationnelle qu'elle ne le semble : la techno-science pour accomplir les miracles, la banque pour servir de temple à l'idole monétaire. Ultime idéologie, victorieuse sur les cadavres du jacobinisme, du libéralisme . classique, de la social-démocratie, du communisme et du fascisme, le néolibéralisme monétariste conduisait l'humanité au Millénium, vers le Paradis terrestre, depuis longtemps perdu, et bientôt retrouvé.

Fausse promesse. Attention : piège. On aurait dû se méfier. Depuis quelques décennies, la façade du temple progressiste commençait à se fissurer...

Dès les années 70, de mauvais coucheurs avertissent : on ne peut pas développer un projet de croissance indéfinie dans un monde fini. On balaye leurs arguments : ils ne prennent pas en compte les perspectives scientifiques.

Dans les années 80, l'effondrement de l'URSS, faisant suite à la catastrophe de Tchernobyl, donne à réfléchir à tous ceux qui le veulent bien : ainsi, les très grands systèmes sur-intégrés logistiquement peuvent imploser d'un seul coup, une fois un certain seuil de fragilité dépassé? Là encore, on refuse de tirer les leçons de l'événement : on préfère mettre l'implosion sur le dos de l'idéologie communiste, sans poser la question du principe de concentration et d'intégration, en lui-même.

Dans les années 90, l'Occident s'enivre de son triomphe. Ce sont les années folles de la bulle Internet. Peu importe que le monde matériel humain soit fini : le capitalisme envahira des univers virtuels qu'il fabrique lui-même. Mais le rêve s'achève brutalement, quand le « modèle » introuvable de la « nouvelle économie » révèle sa nature profonde : un mirage, une illusion. S'il y eut une chute vertigineuse au tournant du millénaire, ce ne fut pas celle des tours jumelles, mais bien l'effondrement des espérances placées dans le virtualisme, porte de sortie des contradictions internes de plus en plus insurmontables d'un système capitaliste rendu fou par la confusion permanente entre la carte monétaire et le territoire économique.

On décida, une fois de plus, de ne rien voir, de ne rien savoir. Pour maintenir coûte que coûte l'illusion que l'utopie millénariste pouvait construire le sens de l'histoire, les oligarchies financières mirent le système économique sous perfusion, shootant littéralement l'économie des États-Unis avec de la dette, encore et encore. Ce fut une entreprise absurde, et qui en outre dénonçait toute l'absurdité de la machine sémantique produite par le monétarisme néolibéral parvenu à maturité...

Cette absurdité ne pouvait avoir qu'un temps. À l'automne 2008, ce temps prit fin.

Un grand frisson parcourut l'échine de l'animal aux cent mille têtes - les classes dirigeantes et supérieures. En catastrophe, on réinjecta du dollar dans le système, comme autant de signe qui ne recouvrait rien, mais qui permettrait encore, pour quelques années peut-être, de faire tourner la machine sémantique, coûte que coûte.

Ultimes manœuvres dilatoires, qui ne changeront, au final, rien ou presque : c'en est fait de l'illusion. Peu importe qu'on maintienne artificiellement les indices boursiers en ramenant à zéro les taux d'intérêt. Casser le thermomètre n'a jamais fait tomber la fièvre.

La seule rationalité économique n'est pas capable de fonder le sens de l'histoire. La techno-science ne peut pas tout. On ne peut pas conduire un projet de développement infini sur une planète finie. L'homme ne peut pas avoir tout ce qu'il veut. Il doit vouloir ce qu'il peut.

Retour à la limitation.

L'humanité ne sera pas son propre Messie : la religion humaniste est un échec.

L'animal aux cent mille têtes se comporte réellement comme une bête - et, en particulier, il est aussi dangereux qu'une bête blessée, lorsqu'il sent que son heure est proche. Renvoyés à l'échec du système de croyance qui servait d'habitation idéologique à leur domination, les puissants et leurs kapos vont à présent, pour sauver leur pouvoir, s'efforcer de maintenir la fiction messianique en la restreignant progressivement à eux-mêmes. D'un côté, une humanité supérieure, qui se voudra son propre Messie - pour elle-même et pour elle seule. Et de l'autre côté, une humanité inférieure, renvoyée dans les ténèbres symboliques de l'absence de pensée, c'est-à-dire de l'inexistence du sens - au vrai, dans la négation pure et simple de son statut de sujet autonome, dans l'interdiction même de définir un espace mental d'indétermination à l'égard de ses contraintes. Une humanité à qui l'on aura ôté la peau de l'esprit.

Tel sera le schéma génératif des prochaines décennies. L'avenir est sinistre, autant le savoir : la religion humaniste va se transformer en idéologie antihumaine.

Ce retournement, qui fera la Bête par ceux-là qui voulaient faire l'Ange, a commencé progressivement dès les années 1970. Mais les années 2010 vont marquer une accélération très sensible dans ce processus. Et la vie, en conséquence, sera très difficile, bientôt, pour beaucoup d'entre nous.

Dans ce contexte, l'enjeu de la lutte, pour les hommes véritables, sera bien souvent de survivre. Juste cela : survivre.

Rejoindre les rangs des dominants fous n'est pas une option : on y gagne peut-être l'illusion enivrante d'une supériorité apparente, et à coup sûr des conditions de vie plus décentes ; mais on y perd son âme.

Se résigner à végéter dans la masse des dominés est à peine moins déprimant. Au sein de cette masse opprimée et appauvrie, la violence sera de règle. Nos contemporains ont trop profondément intégré les logiques perverses de la société de consommation pour se convertir, du jour au lendemain, à une simplicité volontaire salvatrice.

La survie se jouera presque certainement à l'écart, dans des refuges qu'il faudra savoir aménager et défendre. Survie matérielle, bien sûr. Mais survie psychologique et spirituelle aussi.

Nous n'avons certes pas là un idéal exaltant. Seulement voilà, c'est ainsi : à ce stade, résister à la machine inhumaine qui est en train de se mettre en branle, ce sera, souvent, être capable de nous soustraire à sa vue, et d'abord savoir nous passer d'elle.

Un combat modeste, mais certainement pas médiocre.

Car un jour, quand cette machine aura épuisé les possibilités de son élan initial, elle vacillera et tombera. Il suffira alors d'être là, nombreux, soudés, pour reprendre ensemble le contrôle de notre terre, après avoir défendu âprement nos quelques territoires de repli. C'est pour être là, à ce moment décisif, qu'en attendant nous devons survivre.

Alors pas de honte : bâtissons nos refuges ! Souvenons-nous qu'un résistant gagne, s'il tient une heure de plus que son adversaire : organisons-nous pour tenir.

Et donc, mon ami...

On m'efface ce sourire crispé et triste. On lève les yeux, qu'on a si longtemps baissés. On regarde droit devant soi, le regard à l'horizon. On redresse la tête.

Voilà.

Ta vie a un sens : survivre une heure de plus que la machine.
Passe le mot : camarade, nos enfants comptent sur toi. »

Michel Drac, Avant-propos de Survivre à l'effondrement économique.


Survivre à l'effondrement économique 
de Piero San Giorgio

Les problèmes auxquels le monde doit faire face dans les 10 prochaines années sont considérables :

surpopulation, pénurie de pétrole et de matières premières, dérèglements climatiques, baisse de la production de nourriture, tarissement de l'eau potable, mondialisation débridée, dettes colossales...

La convergence de ceux-ci aura comme probable conséquence un effondrement économique qui ne laissera personne indemne, riche ou pauvre. Comment se préparer ? Comment survivre à ces prochaines années de grands changements qui seront à la fois soudains, rapides et violents ? Etes-vous prêts ? Avez-vous accès à de l'eau potable si rien ne sort de votre robinet et si les supermarchés sont vides ? Et dans ce cas, comment allez vous défendre votre famille de votre voisin affamé, du gang de racailles local ou d'un état devenu mafieux et totalitaire ? Comment allez-vous protéger votre fortune dans un monde où la finance n'existe plus ? Vous croyez que ces questions sont absurdes ? Tentez votre chance alors ! Au moins, les lecteurs de ce livre auront à leur disposition les plans, les outils et les solutions, basées sur des exemples pratiques et sur l'expérience de ceux qui l'ont déjà fait, pour survivre et commencer à se préparer progressivement...






vendredi, septembre 14, 2012

Une richesse inépuisable





Les auditeurs de l'émission « Les p'tits bateaux », animée par Noëlle Bréham sur France inter, ont entendu Fantine, âgée de huit ans, demander :

« Pourquoi les parents parlent-ils toujours d'argent ? »

La psychanalyste Claude Halmos a répondu à Fantine ceci :

« En fait, l'argent compense tout ce qui ne va pas dans leur vie. Il leur permet par exemple de racheter, dans tous les sens du terme, une enfance qui ne s'est pas bien passée. C'est un moyen de prendre leur revanche. Comme tous ceux qui éprouvent le besoin de démontrer leur force physique, d'étaler leurs succès avec les femmes ou avec les hommes, ils expriment leur faiblesse. Quand on se sent fort, on ne ressent pas le besoin de le montrer. En général, on étale son argent parce qu'on se sent pauvre en autre chose ; on a le sentiment profond de ne pas valoir grand-chose. »

Ce sentiment de pauvreté ou de faiblesse intérieure n'est-il pas produit par un système qui nous coupe des forces vives qui sommeillent en nous ? On nous inculque que seuls des spécialistes ayant reçu une solide formation théologique, ou psychologique, ou spirituelle sont aptes à explorer le monde intérieur. Nous renonçons donc à découvrir par nous-mêmes notre propre réalité, préférant ânonner les paroles de maîtres à penser officiels ou officieux. Or ces « spécialistes », victimes d'une intellectualisation souvent sclérosante, possèdent rarement les clés permettant d'accéder à la véritable dimension de l'esprit. En revanche, des personnes nullement spécialisées et moins formatées par le système découvrent spontanément cette dimension. Elles évoquent alors une « expérience spirituelle ». C'est le cas de Paul Pujol dont l'existence a été profondément transformée à la suite d'une telle expérience.

Trente ans plus tard, il a écrit « Senteur d'éternité », un livre qui nous incite à « avoir un regard neuf, frais, non teinté par l'avis des autres » pour découvrir les inépuisables richesses de l'esprit.

« Ce tout jeune homme avait mis fin à toutes croyances, il était passé à travers tout ce processus, et tout cela s'était détaché de lui pour toujours. Il avait clairement vu l'illusion des religions, des sectes, du nationalisme ; toutes choses qui séparent les hommes et engendrent les conflits et les guerres. Il n'était donc plus français ou européen, il n'était plus également chrétien, bouddhiste, hindouiste ou autre. L'identification à un quelconque groupe fut très bien perçue comme une pure illusion, une vue de l'esprit.

Il y eut une perception aiguë du conditionnement dû à l'histoire, mais aussi dû aux mécanismes des pensées ; il y eut une perception directe, vivante, de la nature du temps psychologique. Tout cela se fit sans aucun effort, emporté par la passion et la surprise de découvrir toutes ces choses. Toutes les perceptions intérieures se réalisaient de manière très naturelle, comme de l'eau qui coule. Il y eut plusieurs "expériences" subies, mais à chaque fois la lucidité montra l'illusion et l'irréalité de ces événements, alors les "expériences de l'esprit" cessèrent d'elles-mêmes. Puis à un moment donné, sans prévenir, quelque chose d'autre cessa, quelque chose de très ancien ; une chose vieille comme le monde. Il n'en prit pas conscience tout de suite, mais il sentit une immense décontraction, comme un fardeau millénaire qui venait d'être posé au sol.

Les millénaires mémoriels venaient de tomber ; la peur, qui se perd dans la nuit des temps, la peur n'était plus. C'était la fin de l'illusion du temps psychologique, la fin du "moi" ; l'attachement à la continuité du temps n'était plus. Plutôt que le début de quelque chose, c'était la fin de "ce qui était", du monde des idéaux, des croyances, des œuvres de la pensée. Alors cette fin non prévue, non voulue, laissa l'esprit très décontracté, souple, et surtout immobile et très silencieux. Là dans ce silence immense, il y eut un mouvement totalement différent, quelque chose commença à vivre, quelque chose de jamais vue, de jamais connue.

Ce fut comme un autre univers qui s'ouvrait, le monde était entièrement neuf, plus intense, plus vivant et d'une telle beauté ! Le regard intérieur vit naître une intelligence autre, très sensible, une vision pénétrante qui voyait instantanément les soucis psychologiques. Cette vision, ce regard clair dès qu'il se posait sur quelque chose, résolvait immédiatement le problème. Toute situation existe par manque de clarté et de compréhension, dès que la lumière de l'intelligence l'éclaire, la souffrance ou ma prison mentale n'existent plus. Les conditionnements tombent pour toujours, ils n'existent plus. Il faut finir "ce qui est", profondément, véritablement. Le tout premier mouvement c'est la fin de ce qui est, on est alors hors du monde des hommes. Quand cette fin a lieu, alors existe un monde sans croyances, sans idéaux, quelque chose que l'homme n'a jamais exploré. Là dans ce nouvel espace, l'esprit se met en marche, le mouvement dans l'inconnu commence à exister. Ce mouvement sans pensée, au-delà de l'expérience et du "moi", ce mouvement est la véritable méditation, c'est l'exploration silencieuse d'un immense continent, vierge de toute présence humaine.

Cette fin de soi, et la découverte de cet autre monde se firent très rapidement, en moins de deux années tout cela eut lieu. Le jeune homme était persuadé que de nombreuses autres personnes avaient connu de tels événements dans leur vie, il ne se sentait pas du tout extraordinaire ou hors-norme (ce sentiment est toujours vrai, aujourd'hui). Tout cela était tellement naturel, tellement fluide. Pourtant quand il essaya d'en parler avec des amis, avec sa famille, il fut très surpris des réactions ou des commentaires. Certains ne voulaient pas en entendre parler, et d'autres disaient : "c'est vrai, il faut être libre", et ils suivaient une religion, ou pratiquaient de manière très superficielle différentes méditations. La plupart fuyaient leurs peurs dans des systèmes établis, et tous disaient chercher la liberté. Le jeune homme constata la grande difficulté qu'il y avait à parler de tout cela, mais surtout il constata le manque flagrant de vision profonde et de compréhension vivante, chez presque tous ses interlocuteurs. Alors il décida d'approfondir sa découverte, au lieu de parler, il se plongea profondément dans ce voyage, dans cet inconnu. Le silence fut gardé pendant près de vingt cinq années ; il y eut de nombreux écrits pendant cette longue période. Cette naissance de nouveaux mots, cette explosion de perceptions en mouvement, c'est véritablement la découverte d'une immensité sans nom, d'un pays où siège une immobilité immuable. »

Paul Pujol, Senteur d'éternité

Senteur d'éternité

La vérité n'est pas une chose que l'on peut apprendre d'autrui. Personne ne peut la posséder, ni la détenir. Aussi aucune religion, aucun ésotérisme, aucune foi organisée ne peuvent la représenter et la communiquer. Il n'existe aucun maître en la matière, toute hiérarchie est absurde, et n'entraîne qu'obéissance et soumission à une autorité. Pour comprendre les mécanismes de l'esprit et de la pensée, il faut avoir un regard neuf, frais, non teinté par l'avis des autres. Être une lumière à soi-même, c'est la seule chose qui importe ; mais cela demande une grande discipline personnelle, une grande rigueur envers soi-même.

Peut-on découvrir cette intelligence sensible ? Ce regard autre qui déconditionne l'esprit, qui met fin à la souffrance humaine ?

Ce livre est une enquête, une libre exploration, mais le lecteur n'est pas invité à suivre, ou à accepter ce qui est écrit. Il nous faut découvrir, hésiter et questionner ensemble, sans certitude préalable et surtout sans autorité.


Le blog de Paul Pujol :




mercredi, septembre 12, 2012

La lutte pour la vie, compétition ou entraide ?





« Aussi, lorsque plus tard mon attention fut attirée sur les rapports entre le darwinisme et la sociologie, je ne me trouvai d’accord avec aucun des ouvrages qui furent écrits sur cet important sujet. Tous s’efforçaient de prouver que l’homme, grâce à sa haute intelligence et à ses connaissances, pouvait modérer l’âpreté de la lutte pour la vie entre les hommes ; mais ils reconnaissaient aussi que la lutte pour les moyens d’existence de tout animal contre ses congénères, et de tout homme contre tous les autres hommes, était « une loi de la nature ». Je ne pouvais accepter cette opinion, parce que j’étais persuadé qu’admettre une impitoyable guerre pour la vie, au sein de chaque espèce, et voir dans cette guerre une condition de progrès, c’était avancer non seulement une affirmation sans preuve, mais n’ayant pas même l’appui de l’observation directe. »

Pierre Kropotkine, L'Entraide, un facteur d'évolution


Dans son livre Darwin chez les Samouraïs, Pierre Thuillier passe en revue les discussions concernant les théories darwiniennes. « Celui-ci, précise le scientifique Henri Laborit, profite de la publicité récente faite aux idées antidarwinienne d'un Japonais, Kinji Imanishi, pour rappeler, comme nous l'avons fait nous-même dans l'Inhibition de l'action (édité par Masson & Cie), que dès le début du XXe siècle Pierre Kropotkine avait déjà émis l'idée que l'évolution devait plus à l'entraide qu'à la lutte compétitive.

On a l'impression que le succès du darwinisme n'est peut-être pas dû à la différence de mentalité entre le monde occidental et le monde oriental comme le pense Imanishi, mais plutôt et plus précisément à ce que le fondement de la société anglo-saxonne a bien été l'affirmation de l'élite par la force. La sélection naturelle réaliserait la récompense du meilleur et celui-ci, admiré et respecté par ses concitoyens, aurait ainsi recueilli la marque des faveurs toutes particulières de la Divinité envers lui, plus de chances de se reproduire, donc de participer activement à l'évolution de l'espèce. Depuis le temps que cela dure, on pourrait croire que notre espèce est composée uniquement de surdoués : mais sans doute les minus ont-ils la vie dure, bien que peu favorisés par la sélection naturelle. Nous n'entrerons pas dans une discussion déjà fort alimentée par de nombreux écrits contemporains, que viennent clore partiellement ceux d'un autre Japonais, Mooto Kimura, tendant à montrer que les mutations génétiques sont généralement « neutres », incapables de donner une supériorité dans la « lutte pour la vie ». Si un gène se maintient et se perpétue, ce n'est pas qu'il confère un gain de dominance, mais parce que les hasards de la reproduction favorisent sa survie. C'est ce que les généticiens des populations appellent la « dérive génétique ».

De toute façon, dans cette question, il semble bien que la notion de niveaux d'organisation a été ignorée. Nous avons fourni deux exemples dans lesquels l'entraide, la symbiose ou l'association ont eu manifestement une part fondamentale dans l'évolution des systèmes vivants sur la planète. A chaque étape un nouveau niveau d'organisation était atteint par ce moyen. Et c'est en cela que des auteurs comme Kropotkine, qui considèrent moins la lutte individuelle pour la vie que celle contre les conditions climatiques et environnementales difficiles que les systèmes vivants eurent à résoudre, même après l'apparition des êtres pluricellulaires auxquels il s'est intéressé, peuvent défendre l'entraide comme facteur essentiel d'évolution. Les Japonais modernes mettent l'accent sur le groupe, les Anglo-saxons sur l'individu. Nous avons, dans un chapitre de Dieu ne joue pas aux dés, tenté d'expliquer pourquoi les hommes ont analysé, disséqué, fragmenté leur monde pour aboutir à l'individu et à une morale de celui-ci. Mais aboutir à une morale du groupe c'est encore s'arrêter en chemin au sein des niveaux d'organisation alors que la seule « compréhension » cohérente est celle de l'espèce.

Ainsi, il m'apparaît que si manifestement l'entraide a été le moteur principal de l'évolution des espèces, dès qu'un nouveau palier est atteint, le nouvel individu qu'il réalise va entrer en compétition territoriale de dominance avec ses voisins. On peut penser que la « mobilité » de l'individu dans le milieu, son autonomie motrice, qu'il utilise comme moyen dans la recherche du maintien de son « information-structure » personnelle, est un facteur important dans la mise en compétition avec les autres individus de son espèce. C'est ainsi que dans l'espace occupé par le groupe, dans le « territoire » du groupe, une nouvelle structure intermédiaire, qui n'est pas celle de l'espèce, s'établit, qui est alors une structure hiérarchique de dominance. On peut même penser avec René Girard (la Violence et le Sacré, Grasset) que c'est l'inégalité entre les individus qui supprime la violence, car la révolte des dominés ne peut que leur coûter très cher, mais ajoutons aussi que cette inégalité s'est établie grâce à la violence compétitive. Dès lors, parler dans un système de compétition d'égalité, ce ne peut être que de l'égalité des chances à devenir inégal, puisque le but profond de la vie de l'individu est la recherche compétitive de la dominance.

Aussi longtemps que la finalité de l'individu devra passer, pour coïncider avec celle de l'espèce, par l'intermédiaire de celle des groupes sociaux, rien ne sera changé. Il ne s'agit pas là d'une « loi de la nature » mais d'une loi de l'ignorance des niveaux d'organisation et de leur incompréhension.

En résumé, la lutte compétitive a peut-être contribué à l'évolution de chaque espèce lorsque le niveau d'organisation qu'elle représente a été atteint, mais pour y accéder, c'est l'entraide qui fut nécessaire. Or, au niveau atteint aujourd'hui par l'espèce humaine, la compétition a sans doute eu son rôle à jouer dans le progrès technologique, mais en quoi est-elle intervenue dans l'évolution de la connaissance que l'homme possède de lui-même ? N'a-t-elle pas au contraire exacerbé l'individualisme, l'ignorance, le mépris, la jalousie et la haine de l'autre? N'a-t-elle pas ignoré ce qui unit chaque homme à tous les autres, pour ne valoriser que ce qui les distingue, les sépare, les oppose, les dresse agressivement, individuellement ou en groupe, les uns contre les autres ? Rien n'a changé de ce point de vue depuis le début du néolithique. La même obscurité mentale gouverne les comportements humains, mais ceux-ci ont pour moyens d'agir des machines de plus en plus meurtrières et sophistiquées. La compétition entre les groupes humains risque d'aboutir à la disparition de l'espèce, alors que l'entraide indispensable pour passer à un nouveau niveau d'organisation paraît bien difficile à réaliser, sans effectuer d'abord le changement total de la mentalité des individus. Le « secret des secrets » a toujours autant de difficultés à se faire entendre. J'ai conclu un livre déjà ancien (L'agressivité détournée) par ce vœu pieux.

« Quelle que soit la solution vers laquelle le déterminisme cosmique qui guide sa destinée engagera l'homme, l'agressivité telle que nous la connaissons, uniquement orientée vers les autres, devra disparaître pour s'orienter vers la conquête d'un nouveau monde, celui que notre œil distingue en regardant les étoiles et celui, plus incompréhensible encore, qui vit en nous. »

C'est gentil, n'est-ce pas ? »

Henri Laborit, Dieu ne joue pas aux dés.



Henri Laborit a maintes fois développé ses théories scientifiques, exposant, livre après livre, ses découvertes en biologie et ses thèses de biologie comportementale.

Henri Laborit, insatiable curieux, entreprend une extraordinaire démarche, celle qui passionne tous les honnêtes hommes de ce siècle réunir les fils apparemment épars des trois grandes sciences de la fin du XXe siècle, l'astrophysique, la physique des particules et la biologie.

Comment passer du big bang au développement cellulaire ? Qu'est-ce qui relie le « vide quantique » et les « trous noirs » ? Quels liens existent entre les électrons et l'angoisse ? Henri Laborit nous invite au fabuleux voyage. qui conduit le lecteur de la création du inonde à la réaction agressive d'un rat dans une cage de laboratoire, des « petits hommes verts » (qui n'existent pas, nous dit-il) aux charmes et à la beauté d'un corps humain. Un grand livre humaniste.




Lire en ligne L'Entraide, un facteur d'évolution de Pierre Kropotkine :

Extrait 

Attribuer le progrès industriel de notre siècle à cette lutte de chacun contre tous qu’il a proclamée, c’est raisonner comme un homme qui, ne sachant pas les causes de la pluie, l’attribue à la victime qu’il a immolée devant son idole d’argile. Pour le progrès industriel comme pour toute autre conquête sur la nature, l’entr’aide et les bons rapports entre les hommes sont certainement, comme ils l’ont toujours été, beaucoup plus avantageux que la lutte réciproque.

Mais c’est surtout dans le domaine de l’éthique, que l’importance dominante du principe de l’entraide apparaît en pleine lumière. Que l’entraide est le véritable fondement de nos conceptions éthiques, ceci semble suffisamment évident. Quelles que soient nos opinions sur l’origine première du sentiment ou de l’instinct de l’entraide - qu’on lui assigne une cause biologique ou une cause surnaturelle - force est d’en reconnaître l’existence jusque dans les plus bas échelons du monde animal ; et de là nous pouvons suivre son évolution ininterrompue, malgré l’opposition d’un grand nombre de forces contraires, à travers tous les degrés du développement humain, jusqu’à l’époque actuelle. Même les nouvelles religions qui apparurent de temps à autre - et toujours à des époques où le principe de l’entraide tombait en décadence, dans les théocraties et dans les États despotiques de l’Orient ou au déclin de l’Empire romain - même les nouvelles religions n’ont fait qu’affirmer à nouveau ce même principe. Elles trouvèrent leurs premiers partisans parmi les humbles, dans les couches les plus basses et les plus opprimées de la société, où le principe de l’entraide était le fondement nécessaire de la vie de chaque jour et les nouvelles formes d’union qui furent introduites dans les communautés primitives des bouddhistes et des chrétiens, dans les confréries moraves, etc., prirent le caractère d’un retour aux meilleures formes de l’entraide dans la vie de la tribu primitive.


Dessin :

mardi, septembre 11, 2012

11 septembre & dossiers secrets





11 ans après les attentats du 11 septembre, des personnes attendent toujours l'ouverture des dossiers secrets de la CIA, du Mossad, de la Société Skull & Bones...

Le thème des dossiers secrets est traité par le normalien René Alladaye, professeur de littérature américaine à l'université de Toulouse :

Pourquoi Da Vinci Code a-t-il connu un tel succès ? Il y a là évidemment une part d'irrationnel, mais si l'on tente de s'en remettre à des arguments cartésiens, il me semble que deux facteurs dominent. En premier lieu, il a su fédérer deux franges a priori opposées du public. Il s'agit à la base d'un thriller, un roman dont l'intrigue est fondée sur le motif de la course-poursuite et l'élucidation d'un meurtre, les arguments grand public classiques. Mais le profil du héros — un professeur de Harvard, spécialiste d'art religieux — et sa thématique centrale — la manière dont l'Église aurait étouffé quelques vérités explosives sur les origines du christianisme — ont largement contribué à donner au roman une audience beaucoup plus vaste que celle dont Dan Brown avait pu bénéficier pour ses livres précédents. On ne compte plus les ouvrages se proposant de mener l'enquête à partir du roman pour fournir aux lecteurs des connaissances historiques précises concernant les événements ou les théories qui traversent l'intrigue ou la sous-tendent. Ouvrages qui tentent aussi de faire la part du vrai et du faux dans le livre, d'y distinguer l'histoire authentique des fantaisies de la fiction. La seconde raison réside dans le fait que ce roman a très bien saisi ce que l'allemand nomme Zeitgeist, l'air du temps. Et l'air du temps, pour le meilleur ou pour le pire, fait la part belle aux théories du complot.

Le constat paraît d'abord paradoxal. Tout nous incite en effet à considérer le monde qui nous entoure comme un lieu de transparence et de rationalité. Nous vivons l'âge des sciences et de la technologie, le siècle de l'information continue qui nous dit à toute heure du jour, et en temps réel, ce qui se passe à l'autre bout de la planète. Tout cela ne fait aucun doute. Mais l'ironie veut que cette explosion des sciences et des techniques induise comme un choc en retour inévitable l'émergence de visions complètement irrationnelles du monde. André Comte-Sponville résume clairement la situation au chapitre «Tolérance» de son Petit Traité des grandes vertus : « Nous ignorons plus que nous ne savons, et tout ce que nous savons dépend, directement ou indirectement, de quelque chose que nous ignorons. » Tout est là : l'impossibilité, pour l'immense majorité d'entre nous, de vérifier la masse des informations auxquelles nous sommes journellement confrontés a commencé de transformer une époque qu'on annonçait comme celle de la raison triomphante en règne simultané et contradictoire de la foi et du soupçon généralisé.

Face à l'omniprésence et à la toute-puissance de la technique, une question simple est redevenue étrangement centrale : comment distinguer ce qui est réel de ce qui ne l'est pas ? La radio annonce qu'un avion de ligne s'est encastré dans un bâtiment militaire, en pleine ville, à des milliers de kilomètres de l'endroit où je me trouve. La télévision et les journaux en montrent l'image : un cratère filmant et des pans de murs calcinés presque entièrement masqués par les bâches plastique des enquêteurs. Mais qui me prouve que tout cela est réel ? Comme le dit Jean Baudrillard, la vérité première de l'image, c'est que je n'y étais pas. Elle représente le fait, mais ne le présente pas, ne peut le rendre véritablement présent puisqu'il s'est produit ailleurs, avant. On fait ce qu'on veut avec une image, personne ne l'ignore, et la question revient, plus insistante : si tout cela n'était pas vrai ?

On aura reconnu évidemment la thèse d'un livre de Thierry Meyssan qui fit grand bruit quelques semaines après les attaques du 11 septembre 2001. L'Effroyable Imposture soutenait, en niant l'évidence, que l'attentat de Washington n'était que pure intoxication : aucun avion ne se serait écrasé sur le Pentagone. Absurde, mais le succès que connut l'ouvrage prouve qu'il relaie des opinions qui ne sont pas totalement marginales. Ce succès signe l'émergence d'une culture, construite et pleinement assumée, du complot dont les cibles demeurent classiques : les sociétés secrètes de tous ordres, la franc-maçonnerie, ou la mythique Trilatérale. Antoine Vitkine dans Les Nouveaux Imposteurs donne une définition très précise du phénomène : « La théorie du complot n'est pas autre chose qu'un mode de pensée qui consiste à attribuer à tel ou tel groupe d'individus des pouvoirs qu'ils n'ont pas, à les soupçonner d'être derrière des événements avec lesquels ils n'ont rien à voir, à les accuser de se concerter secrètement, d'avoir des plans cachés, des intentions dissimulées. » Le propre du conspirationniste est de mêler savamment le vrai et le faux, d'installer une logique retorse et paranoïaque où les détails et les anecdotes sont présentés comme des événements centraux, les faits avérés désignés comme des écrans de fumée, produits d'un discours officiel.

Voilà qui nous ramène à Dan Brown. Les fameux « dossiers » liés à la société secrète du Prieuré de Sion qu'évoque sa première page existent bel et bien à la Bibliothèque nationale sous la cote 4°lm 249, mais ce ne sont en aucun cas des parchemins, et loin de constituer les archives d'une société secrète séculaire, ils se composent en fait de documents fort récents, rédigés vers le milieu du XXe siècle pour donner une voix à certains courants ésotériques aux motivations troubles. On est donc loin des révélations fracassantes de l'intrigue. Évitons les faux procès : Da Vinci Code est une fiction, ne l'oublions pas. Mais son succès illustre assez la facilité avec laquelle une grande partie du public établit de nos jours un lien presque automatique entre société secrète et agissements inquiétants, et probablement répréhensibles. La manière dont l'Église s'est trouvée rapidement visée par le soupçon fait aussi apparaître au grand jour la défiance ambiante à l'endroit de tout discours officiel, sans doute alimentée par le discrédit qui frappe actuellement les élites en place, qu'elles soient religieuses ou politiques, le sentiment diffus mais général qu'« on nous cache tout » auquel la série X-Files adosse ses intrigues et un slogan qui a fait flores : « La vérité est ailleurs. »

C'est à cette logique de « café du commerce» remarquablement servie, soit dit en passant, par la possibilité qu'offre Internet de transmettre de manière extrêmement large et rapide toutes sortes de rumeurs que s'attaquent Les Nouveaux Imposteurs. Et le livre est réussi en ceci qu'il démonte efficacement les mécanismes de constructions ancrées dans une rhétorique spécieuse. Mais il montre aussi, sans doute malgré lui, combien il est difficile de réfuter un discours essentiellement pervers. En fait, et c'est là un cercle, tenter d'écarter les approches conspirationnistes implique le recours à des distinctions inévitablement manichéennes : on va être amené à dire qu'il y a du vrai, sans ambiguïté, et du faux, lui aussi sans ambiguïté. Le problème, c'est que ces approches sont elles-mêmes très manichéennes et font leur miel de ce type de stratégie. Les aborder avec un système de pensée qui laisse entendre que les choses sont blanches ou noires peut donc paradoxalement contribuer à les renforcer. La difficulté est de traiter avec nuance ce qui repose sur le mépris de toute nuance. Dire que tout est complot est évidemment absurde, mais prétendre que les complots n'existent pas l'est tout autant. Il arrive qu'un événement soit le fruit d'une machination : la politique admet parfois les pratiques les plus retorses. Ce qui est délicat, c'est de distinguer l'intrigue réelle de l'intrigue hallucinée, ou d'admettre qu'une intrigue hallucinée peut cacher une intrigue réelle. Ainsi, même si on répugne à croire que les attentats de New York et de Washington puissent être le fruit d'un complot mené conjointement par la CIA et le Mossad dans le seul but de justifier des menées impérialistes prévues de longue date, on est contraint de reconnaître que les arguments employés par l'Administration américaine à la veille de l'invasion de l'Irak étaient mensongers. Manœuvre ? Sans doute, et bien qu'il semble plus avisé de l'attribuer aux conseillers de la Maison Blanche qu'aux services secrets israéliens, on ne peut s'empêcher de penser que Vitkine, dans son désir de réfuter hâtivement des thèses conspirationnistes certes délirantes, exonère trop facilement les dirigeants américains et refuse d'admettre que l'opinion américaine a, en l'espèce, fait l'objet d'une manipulation. La vérité n'est pas ailleurs, mais elle est souvent complexe.

René Alladaye, Petite philosophie du secret.


Petite philosophie du secret

Notre époque est celle de l'idéologie de la transparence et de la surveillance, quasi permanente, du citoyen. Nuit et jour, les médias font commerce et spectacle de notre intimité. Pourtant, paradoxalement, le secret ne s'est peut-être jamais aussi bien porté. On le croyait réservé aux intrigues d’État et aux romans d'espionnage. A tort, car il est omniprésent, protéiforme, chacun s'y trouve confronté et rien n'échappe à sa tutelle.

En posant un regard philosophique sur cette domination discrète et fascinante que le secret exerce sur notre quotidien, mais aussi sur notre imaginaire (comme en témoigne le succès planétaire du Da Vinci Code), cet ouvrage célèbre le secret comme autant de petits arrangements avec la vérité...



Dessin :

lundi, septembre 10, 2012

Ricard, à consommer avec modération





Auteur du livre « Plaidoyer pour le bonheur », Matthieu Ricard excelle dans l'art de noyer le poisson (ou le pastis) et de nous mystifier chapitre après chapitre. Véritable voyageur-représentant-placier du lamaïsme, il distille, sans la moindre compassion pour les victimes du servage, le mythe du Tibet terre de bonheur au temps des dalaï-lamas. Ses propos philosophiques ou scientifiques sur la méditation dissimulent un habile prosélytisme religieux. Ainsi prévenu, on évitera la lecture sans modération d'un Ricard qui peut se révéler intoxicant.

Instrumentalisée par les fossoyeurs de la démocratie, l'ivresse des extases méditatives sera-t-elle fatale à la liberté ? Matthieu Ricard intériorise la liberté et l'extirpe totalement du domaine social et politique. Les méditants, conditionnés pour ne s'affranchir que des pensée « désordonnées », se soumettent volontiers à la hiérarchie des lamas ou de celle plus actuelle de l'oligarchie politico-financière. Hiérarchie qui, pendant que l'on incite les gens à méditer sur l'« être », accapare l'« avoir ».

« Être libre, dit Matthieu Ricard, c'est être maître de soi-même. Pour beaucoup de gens, une telle maîtrise concerne la liberté d'action, de mouvement et d'opinion, l'occasion de réaliser les buts qu'on s'est fixés. Ce faisant, on situe principalement la liberté à l'extérieur de soi, sans prendre conscience de la tyrannie des pensées. De fait, une conception répandue en Occident consiste à penser qu'être libre revient à pouvoir faire tout ce qui nous passe par la tête et traduire en actes le moindre de nos caprices. Étrange conception, puisque nous devenons ainsi le jouet des pensées qui agitent notre esprit, comme les vents courbent dans toutes les directions les herbes au sommet d'un col.

« Pour moi, le bonheur serait de faire tout ce que je veux sans que personne m'interdise quoi que ce soit », déclarait une jeune Anglaise interrogée par la BBC. La liberté anarchique, qui a pour seul but l'accomplissement immédiat des désirs, apportera-t-elle le bonheur ? On peut en douter. La spontanéité est une qualité précieuse à condition de ne pas la confondre avec l'agitation mentale. Si nous lâchons dans notre esprit la meute du désir, de la jalousie, de l'orgueil ou du ressentiment, elle aura tôt fait de s'approprier les lieux et de nous imposer un univers carcéral en expansion continue. Les prisons s'additionnent et se juxtaposent, oblitérant toute joie de vivre. En revanche, un seul espace de liberté intérieure suffit pour embrasser la dimension tout entière de l'esprit. Un espace vaste, lucide et serein, qui dissout tout tourment et nourrit toute paix.

La liberté intérieure, c'est d'abord l'affranchissement de la dictature du « moi » et du « mien », de l'« être asservi et de l'« avoir » envahissant, de cet ego qui entre en conflit avec ce qui lui déplaît et tente désespérément de s'approprier ce qu'il convoite. Savoir trouver l'essentiel et ne plus s'inquiéter de l'accessoire entraîne un profond sentiment de contentement sur lequel les fantaisies du moi n'ont aucune prise. « Celui qui éprouve un tel contentement, dit le proverbe tibétain, tient un trésor au creux de sa main. »

Être libre revient donc à s'émanciper de la contrainte des afflictions qui dominent l'esprit et l'obscurcissent. C'est prendre sa vie en main, au lieu de l'abandonner aux tendances forgées par l'habitude et à la confusion mentale. Ce n'est pas lâcher la barre, laisser les voiles flotter au vent et le bateau partir à la dérive, mais barrer en mettant le cap vers la destination choisie. »

Matthieu Ricard, Plaidoyer pour le bonheur.

Plaidoyer pour le bonheur


Un rabbin affirme que les Juifs sont des extraterrestres venus pour « conquérir » la Terre.

Le rabbin Michael Laitman est l'auteur de "Kabbalah, Science and the Meaning of Life". Le livre retrace les étapes de l'év...