Stephen Jourdain qualifie ces couleurs de
spirituelles, car elles ne relèvent pas du domaine sensoriel, bien
qu'elles le gouvernent, leur règne étant universel : « Ces entités
qualitatives » habitent « le dedans » et « ce qu'on appelle « le
dehors ». Elles habitent « Partout ».
Il ne les voit pas avec ses yeux
physiques, mais avec son moi spirituel. Il en parle comme s'il
s'agissait d'entités qui lui sont aussi intimes que ses êtres les
plus chers mais dont l'identité réelle et la compréhension
échappent à l'intelligence humaine : « ne me demandez pas qui
elles sont », « je les connais comme je connais mon épouse, mes
enfants ».
Ces lumières lui semblent si intimes
qu'il hésite à en parler, comme par pudeur, essayant de se
justifier comme il peut, sans vraiment convaincre. Il ne voit pas en
quoi ces renseignements pourraient nous être utiles et craint de
faire des erreurs dans leur interprétation, alors qu'il les
considère comme primordiales et qu'il les connaît mieux que sa
femme et ses enfants.
Une autre raison de son hésitation est
peut-être la peur de choquer son interlocuteur :
« Je vais vous
dire des choses qui vont vous paraître choquantes. Inacceptables. »
ou de se faire passer pour une personne
déséquilibrée :
« Vous allez penser : « Est-il devenu fou ?! »
. S'agit-il d'une crise de folie... ?», tant la révélation de leur
secret dépasse l'entendement.
Ces couleurs déclenchent des émotions
qui dépassent en intensité et en qualité celles que l'on a pu
connaître jusqu'alors et élèvent l'être au-dessus du marasme des
soucis les plus graves car elles sont ressenties « comme un coup de
poignard de joie pure. ».
Ces « mères-couleurs » sont considérées
comme des déesses créatrices qui engendrent tout ce qui existe sur
les plans matériel et spirituel, qu'elles gouvernent et maintiennent
dans leurs états. L'être, la « Conscience », « Esprit » et même
l'« Ultime » sont engendrés par ces « matrices » maternelles.
Elles sont à l'origine de tout. elles sont premières « A TOUT »
et avant tout, au-delà des concepts « elles sont antérieures à
l'existence et à l'inexistence ». « Elles sont les mères du Un ».
Les couleurs spirituelles jouent donc un
rôle primordial dans l'expérience spirituelle de Stephen Jourdain
puisqu'elles sont l'origine et le ciment de tout ce qui existe, y
compris l'être auquel elles se sont assimilées car « elles sont
l'être ».
Une de leurs fonctions est de permettre à
l'être d'accéder à sa véritable nature, de se réaliser. L'Éveil
ne s'obtient donc pas par une volonté délibérée de l'individu,
mais s'octroie à titre de faveur délivrée par ces médiatrices
d'illumination.
Elles sont aussi porteuses de sens. Elles
sont appelées « les matrices du sens ». Pour Stephen Jourdain le
sens n'est pas le fruit d'une acquisition naturelle, il relève du «
miracle » accompli par ces matrices.
Ces couleurs sont tellement essentielles
que si elles étaient appelées à se retirer d'une personne,
celle-ci mourrait immédiatement. Elles sont donc indispensables,
vitales et Stephen Jourdain leur voue un culte dévotionnel.
passionnel, « Un amour sans borne, une reconnaissance sans borne,
une soumission absolue ».
Cette armée de couleurs significatives se
diversifie en fonction de leur tâche à accomplir en une variation
de signes créateurs, caractérisés par une couleur spécifique qui
leur est propre et pouvant effectuer différents travaux : La couleur
qui caractérise le versant de l'éveil correspondant à « une
certitude infinie d'être » et coïncide avec la « couleur » -
signe « vert-émeraude ». Si cette couleur n'est pas présente «
La certitude infinie d'être » n'existe pas; La couleur «
rouge-violet » est celle de « l'Imaginaire », elle entrouvre «
les portes de la vraie dimension spirituelle ».
Mondes de lumière, transcrit par
A.K. Edwards relate l'expérience spirituelle de prisonniers
d'opinion incarcérés dans des mines de sel en Sibérie. Éprouvés
par des conditions de vie extrêmes, implorant la grâce divine, ils
eurent la révélation d'une Voie de Lumière. Dans cet état de
conscience modifié, ils y décrivent comme S. Jourdain, un univers
de couleurs significatives qualifiées de couleurs-tonalités. La
radiation bleue se révèle à leur âme comme la couleur-tonalité
créatrice. Bleu est l'essence qui soutient l'être, il est la
fondation sous-jacente à toute manifestation.
Un certain type de « « couleur »-signe
» accompagne l'être pendant un certain temps, puis lorsqu'une
évolution ou un changement doit s'opérer, passe le relais à une
autre « « couleur »-signe », afin de mener à bien la mission en
cours pour préparer la prochaine étape, une matrice engendre la
Conscience, une autre l'Etre, et ainsi de suite pour l'Esprit, la
Créature.
Ce lien d'amour qui existe entre la
créature et ces couleurs semble les unir pour toujours de façon
indéfectible. « Entre l'Impression d'Enfance et ces « couleurs »
- signes, il y a continuité, consubstantialité ». Ce lien devient
perceptible si l'être retrouve cet esprit de réceptivité et
d'ouverture qui caractérise la perméabilité du cerveau de
l'enfance et comme nous le rappelle S. Jourdain : « Quand vous étiez
enfant, vous vous trouviez près des portes de leur royaume».
Pour retrouver cette sensitivité pré
pubertaire, il faut redécouvrir le chemin intérieur qui mène à
l'habitat, où résident ces « couleurs spirituelles ». Ainsi,
faisant acte d'une présence vigilante, au seuil de leur demeure,
leurs radiations colorées finiront par rayonner par
l'entrebâillement de la porte de l'esprit où existe un « Irréel
Pur (...) l'habitat des « couleurs spirituelles » créatrices ».
Stephen Jourdain part du postulat que
l'étendue obscure de l'« en-deçà des yeux » fermés appartient
au monde de « l'Imaginaire », c'est-à-dire de « l'Esprit », qui
est « de nature METAPHYSIQUE ». C'est donc par une observation
attentive avec les yeux invisibles de l'esprit dirigés vers l'amont
des paupières closes que l'on accède à cet univers immatériel.
Petit à petit, de la surface noire de notre espace mental, se
distingueront des anfractuosités et se développeront des formes
géométriques. Les matrices de couleurs chatoyantes seront précédées
par des « vagues blancheurs » de lumière diffuse ou une « volée
de phosphènes », avant de se déployer et se répandre dans
l'espace illimité. Ainsi, le lien jusqu'alors invisible avec les «
mères-couleurs » aura été rétabli.
Le docteur Francis Lefebure (1916-1988)
avait effectué des études très intéressantes sur les phosphènes.
Il avait attribué à ces sensations lumineuses subjectives
(c'est-à-dire non créées par un rayon lumineux direct), des
propriétés énergétiques qu'il pensait être à la base
d'expériences parapsychologiques ou les effets concomitants d'une
recherche spirituelle. Les lecteurs intéressés par les surprenants
résultats de ses travaux pourront les compulser dans ses nombreux
ouvrages.
D'autre part certains aspects lumineux de
l'expérience spirituelle de Stephen Jourdain ressemblent aux effets
obtenus par la pratique du yoga. Dans son livre, Yoga, méthode de réintégration, Alain Daniélou explique que des régions du corps,
correspondant à des centres nerveux réels, sont des foyers
d'énergie importants qui peuvent être stimulés par des exercices
de concentration de l'attention. Lorsqu'ils sont ainsi réveillés,
ils se mettent en mouvement et s'éclairent libérant leur énergie.
C'est alors qu'ils révèlent leurs couleurs et leurs pouvoirs
particuliers.
Il y a une similitude avec les
renseignements donnés dans le livre cité ci-dessus et la
description que fait Stephen Jourdain concernant le phénomène qui
s'est développé au niveau de son plexus solaire. Il parle d'une
lumière inconnue qui se développe dans sa poitrine, sous la forme
d'une fleur et qui l'envahit jusqu'à l'intérieur de sa tête. Cet
éblouissement dépassait son intériorité et inondait le monde
extérieur.
Dans le yoga, ce centre d'énergie a pour
nom « Le centre du son spontané (anâhata chakra) ». il a une
couleur « rouge flamboyant » et ces centres sont aussi représentés
sous la forme d'une fleur ...de « lotus ».
La métaphore de l'épanouissement d'une
fleur est réutilisée pour décrire l'ouverture d'un « œil
immatériel » à l'intérieur de son esprit, associée à
l'apparition de ses visions.
Dans le yoga, on le nomme « le centre de
commande (âjnâ chakra) » et selon les conseils yoguiques, « en
concentrant la pensée sur cette lumière, on atteint très sûrement
la suprême réalisation ».
Pascal Boyer, « L'expérience del'illumination dans l’œuvre de Stephen Jourdain ».
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Le corps d'arc-en-ciel
Les lumières spirituelles
Le cœur dans le Dzogchen