jeudi, octobre 20, 2011

L'idéologie totalitaire du Nouvel Age





L'entrée prochaine dans une ère de paix et de spiritualité, la vision globalisante du monde, ainsi que la nécessité d'une transformation personnelle, sont les thèmes majeurs du New Age qui, loin d'être un « fourre-tout » ésotérique, forme une idéologie cohérente.

Selon le philosophe Michel Lacroix, cette pensée fait peser de graves dangers sur l'individu et sur la société. Une idéologie de la totalité ne risque-t-elle pas de devenir une idéologie totalitaire ?

Les idées politiques du Nouvel Age

Au premier abord, le Nouvel Age semble se situer en dehors de la politique. Il n’a pas de visibilité institutionnelle. Il ne se réclame d’aucun parti. On a l'impression qu’il s’adresse à des individus désincarnés, délivrés de toute attache sociale, professionnelle, civile, syndicale, familiale, et qui sont occupés exclusivement de leur vie intérieure. Mais derrière l'arbre de l'apolitisme se cache la forêt des ambiguïtés et des non-dits. Ainsi, on ne tarde pas à deviner la silhouette d’un ordre mondial autoritaire.

A la base des idées politiques du Nouvel Age, il y a derechef le holisme. Le holisme est la pierre de touche qui permet de juger, en premier lieu, la valeur de la politique actuelle, et le diagnostic est accablant. Quel est le défaut de cette politique ? Le manque de vision globale. La politique menée par les gouvernements actuels n’est holistique ni dans ses finalités, ni dans ses moyens. Or, les vraies questions d’aujourd’hui, souligne le Nouvel Age, sont d’échelle planétaire. C’est le monde dans sa globalité qui est en péril, en raison des problèmes écologiques, de l'épuisement des ressources, de la surpopulation, du fossé économique entre les deux hémisphères, du gigantesque arsenal nucléaire et de l'instabilité politique. Le sort des générations futures est incertain et l’extinction complète du genre humain fait désormais partie du possible. Face à ces enjeux, il faudrait une prise de conscience globale, une politique de sauvegarde de la planète, une volonté ferme de prendre les commandes du «vaisseau spatial Terre». Mais la politique actuelle, enfermée dans l'horizon de ses petites questions, n’est pas à la hauteur de ces exigences. Les gouvernants ont des conceptions périmées, ils n’ont pas atteint un degré de conscience suffisant, ils ne sont pas assez «illuminés ». Il est donc suicidaire, estime le Nouvel Age, de continuer à leur confier les intérêts de la planète.

De plus, nos institutions politiques sont archaïques. Tributaires du vieux paradigme, elles en sont encore au stade du morcellement et de la séparation, et c’est la raison de leur inefficacité. En mettant en avant le holisme, en disant non à la politique fragmentée et «séparatiste», le Nouvel Age dit non à la démocratie. Après tout, le dogme holistique contredit sur un point capital le principe même qui est à la base des régimes démocratiques : je veux parler de la « séparation des pouvoirs » législatif, exécutif et judiciaire qui est la clé de voûte de notre démocratie représentative. Elle n’a évidemment aucune valeur pour une idéologie qui préconise le dépassement de l'état de séparation... Le non à la démocratie se double d’ailleurs d’un non tout aussi catégorique à l’État-nation et au principe de la souveraineté nationale. Le puzzle de cent quatre-vingt-dix nations composant le tissu international ne donne-t-il pas une pitoyable impression de morcellement ? Prisonniers de leurs frontières, les États s’avèrent incapables de faire face aux grands enjeux planétaires.

Il faut donc mettre en place un nouvel ordre politique, et le Nouvel Age indique les deux piliers sur lesquels il devra reposer : ce sont d’une part le moi, tel qu’il résulte de la transformation personnelle, et d’autre part Gaïa, dont l'unification est scellée par l’apparition du Cerveau global.

La fin du citoyen

Le moi, d’abord. L’un des axiomes les plus constants du Nouvel Age énonce que toute vraie politique découle en dernière instance de la source de l'intériorité. La politique n’est pas une pièce qui se joue sur la scène publique, sur une agora, dans des Assemblées, dans des cabinets gouvernementaux. Le seul facteur de changement global, c’est le changement individuel. « Si la conscience individuelle change, le monde lui-même changera. » Tel est l’un des principes directeurs de la politique du Nouvel Age. Les individus engagés dans leur transformation personnelle n’ont pas à formuler de projet de société; ils n’ont pas à élaborer de doctrine politique, économique, sociale. Ils n’ont pas à se préoccuper d’agir en citoyens ordinaires, à militer dans la société civile, car le véritable changement de société s’opérera d’une manière indirecte : c’est en transformant leur propre conscience qu’ils transformeront ipso facto la civilisation. Loin d’exclure les problèmes de la cité, le travail sur la conscience est le seul moyen efficace de leur apporter une solution. Un adepte qui « entre en méditation » n’éprouve donc pas le sentiment qu’il fuit la réalité, et les maîtres spirituels du Nouvel Age l'encouragent dans la voie de l'intériorité, à l'instar de Graf von Dürckheim qui introduisait les séances de méditation par ces mots : « Nous pratiquons la méditation pour que, là où nous sommes assis, le monde soit un peu plus en ordre. »

N’importe quel problème politique peut être résolu ainsi, par la mise en œuvre de la transformation personnelle et de la méditation. Soit par exemple le problème de la guerre. D’où viennent les conflits entre les hommes ? La réponse est simple : de l’illusion de l’état de séparation, qui fait croire aux hommes qu’ils sont des êtres distincts les uns des autres. Pour peu qu’ils arrivent à dissiper cette illusion et à percevoir le monde d’une manière holistique, la violence disparaîtra comme un mauvais nuage. Il n’y a que grâce à la descente en ondes alpha qu’on surmonte les divisions et qu’on désamorce les conflits, car le moi se confond alors avec autrui dans une unité essentielle, de sorte qu’il n’y a plus d’agressivité ni d’antipathie. Notons que le Nouvel Age se garde de condamner la guerre au nom de l'éthique. Son approche n’est pas moralisatrice.

Il ne s’agit pas de mettre en œuvre une politique volontariste en faveur de la paix. On ne dit pas « tu dois », « vous devez », « faites ceci », car des injonctions de ce type impliqueraient un dualisme de l’être et du devoir-être, et un tel dualisme contredirait le principe de la non-séparation. La solution est beaucoup plus simple : grâce à la transformation personnelle, c’est la réalité même de la guerre qui s’évanouit : « Avec le nouveau paradigme, affirme Marylin Ferguson, la guerre devient impossible. » Partant de ce principe, la secte Méditation transcendantale proposa au président Bush, en 1991, une méditation collective afin de mettre fin à la guerre du Golfe. A la même époque, Jacques Castermane, animateur d’un centre de développement personnel très connu, déclarait à propos du plan américain de Nouvel Ordre mondial : « Seule la transformation de la personne individuelle représente la matière première du Nouvel Ordre tant espéré. »

Comment expliquer une telle action du changement intérieur ? D’où ce dernier tient-il le pouvoir de catalyser le changement extérieur ? L'explication réside dans la correspondance entre la partie et le tout, entre l’homme et l’Univers, qui est postulée par le holisme. Le corps politique que constitue la planète des humains est comparable à un hologramme où chaque partie contient l'ensemble des informations relatives à l'image complète. Les individus qui le composent sont autant de fragments de ce grand hologramme planétaire de sorte que chacun d’eux récapitule toute la planète. Chaque homme est donc en droit de dire : « Je suis un résumé de tout l'Univers », et il n’a plus qu’à se recueillir en lui-même pour découvrir non seulement la clé de la connaissance universelle mais aussi le pouvoir d’agir sur le tout. En vertu de la théorie de l'homme-microcosme, avoir le souci de soi, c’est avoir le souci du monde.

Les conséquences d’un tel point de vue sont faciles à prévoir. La politique du Nouvel Age est aspirée avec une force irrésistible vers la sphère étroite du moi. Plus rien ne peut freiner la dérive vers le solipsisme (1). Le holisme encourage les comportements de repli, et prononce ainsi l’acte de décès de toute vie politique et sociale digne de ce nom. Dès lors que le principe du changement réside dans l'intériorité, pourquoi participer au débat public, pourquoi agir, lutter ? Il est clair que l’engagement de l’individu dans la méditation va de pair avec le désengagement vis-à-vis de la politique et de la société civile. A mesure que la « conscience s’élargit », le champ politique et social se réduit comme une peau de chagrin. Que reste-t-il même de la notion de citoyen ? Car un citoyen est un individu qui ne perd pas de vue le fait qu’il est distinct de ses semblables, et la conscience de cette altérité lui permet d’accomplir les actes politiques essentiels que sont la discussion, la négociation, la lutte, le compromis. A l’évidence, cette conception de la polis, définie il y a près de deux mille cinq cents ans en Grèce, disparaît avec le Nouvel Age. Dans la perspective holistique, cela n’a aucun sens, non plus, d'analyser les rapports sociaux en termes de contrat entre citoyens. Le Nouvel Age nous montre donc une fois de plus qu’il remplit dans notre société une fonction éminemment idéologique : de même qu’il légitime les excès de la culture du moi, il couvre d’un voile flatteur certaines évolutions qui minent la démocratie moderne, en donnant sa caution à la déresponsabilisation politique.

Un gouvernement mondial

Gaïa constitue le second principe de la politique du Nouvel Age. Ainsi tient-on les deux extrémités de la chaîne. D’un côté, on a des individus libérés de leurs liens politiques, déchargés des obligations du contrat social. De l’autre se déploie l'immense champ de conscience planétaire formé par la coagulation des consciences individuelles. Étonnante synthèse de l'individualisme intégral et du collectivisme intégral ! Tout se passe comme si, aussitôt après avoir arraché les individus à la politique fragmentée, le Nouvel Age se hâtait de les jeter dans le grand chaudron du Cerveau global. Et, entre les deux, il n’y a plus rien ! Il n’y a plus d’étage intermédiaire, plus de « corps intermédiaire » entre le territoire du moi et la fusion planétaire. L’espace public qui s’étend entre la sphère privée et le Cerveau global se trouve pour ainsi dire évidé. La sphère du politique se referme sur du néant. Le citoyen disparaît, avec ses traditions, sa culture, sa patrie, ses fidélités, ses devoirs, pour faire place au nouvel Homo politicus, l’homme planétaire, voué corps et âme au service de Gaïa.

En faisant de la fusion dans Gaïa le principe directeur du nouvel ordre humain, le Nouvel Age planétarise définitivement la politique. Et cela conduit tout naturellement à préconiser la création d'institutions à l’échelle planétaire. Il faut donner au Cerveau global des organes de décision, de gestion, d'administration, autrement dit un gouvernement mondial. Seul un gouvernement mondial sera à même de piloter ce que la littérature du Nouvel Age se plaît à appeler le « vaisseau spatial Terre » (une belle métaphore techniciste, au demeurant...). Ces idées sont partagées, notons-le, par un grand nombre de leaders de sectes. Leur projet est un directoire mondial des affaires planétaires, qui serait assuré par les personnalités et les sectes parvenues au degré de conscience le plus élevé. On retrouve quelque chose d’identique chez World Goodwill (Bonne Volonté mondiale), qui formule un programme combinant l’idée d’un gouvernement mondial avec l’annonce d’un proche retour du Christ sur la Terre. L'unification politique du globe sous la houlette du messianisme religieux...

Pour faire face aux problèmes de notre temps, le Nouvel Age rêve d’une aristocratie spirituelle dans le style de la République de Platon, d’un magistère de sociétés secrètes, d’une synarchie planétaire. Le mondialisme autoritaire, la coagulation des individus dans le Cerveau global, l'enrôlement dans la conscience mystico-planétaire, n’ont-ils pas quelques points communs avec les grandes cérémonies fascistes où le cœur d’un peuple entier vibrait à l'unisson ? Si les « new-agers » sont souvent des individualistes cultivant leur moi, il n’en reste pas moins vrai que la mystique de Gaïa s’apparente aux mythes collectifs de l'époque totalitaire. L’échelle est différente, car ce n’est pas une race qui est exaltée, ni un peuple, ni un État, mais la masse humaine tout entière, réunie dans le culte de Gaïa. Cependant, c’est la même ferveur collective, le même besoin de fusion, le même vertige de la dissolution individuelle.

Si, demain, un gouvernement mondial voyait le jour, il aurait besoin de s’appuyer sur une idéologie pour assurer sa légitimité, et il y a toutes les chances pour que le Nouvel Age consume cette idéologie... On peut sourire et se rassurer en se disant qu’on n’en est pas encore là. Mais prenons garde : ces fantasmes planétaires ne sont pas d’innocentes rêveries, car [...] le Nouvel Age est une réserve d’idées pour les sectes. En attendant la révolution mondiale tant espérée, ces fantasmes autour de Gaïa servent d’alibi pour maintenir, à une plus petite échelle, la cohésion de ces sectes. Celles-ci utilisent le Nouvel Age pour construire méthodiquement leur microfascisme. Au nom des intérêts supérieurs de la planète, au nom du futur ordre mondial, les adeptes qui ont eu l'imprudence de se laisser enrôler sont pressés de se soumettre à la loi inflexible que leur dicte un maître, qui connaît le Vrai et le Bien. La vision holistique et les plans de salut planétaire servent cyniquement à légitimer l'embrigadement et l'exploitation.

Une nouvelle forme de totalitarisme

l'hypothèse que nous formulons est que le Nouvel Age est en train d’inventer une nouvelle forme de totalitarisme. Essayons d’en préciser la nature. Ce totalitarisme résulte de la conjugaison de deux idées majeures que le Nouvel Age place au centre de sa doctrine : la formation d’un champ de conscience planétaire d’une part, la crise écologique d’autre part. En joignant ces deux idées l’une à l'autre, on aboutit à l'affirmation suivante : le champ de conscience global est l'instrument qui va permettre de sauver la Terre.

Quel sort est réservé à la pensée dans cette doctrine qui met au premier plan le salut de Gaïa ? Il n’y a plus, pour la pensée humaine, d’autre impératif, d’autre horizon, que cette exigence de survie. Les valeurs vitales se trouvent désormais au sommet de l’échelle des valeurs. « Tout faire pour préserver la vie de Gaïa ! » Certes, en recevant un tel ordre de mission, les « new-agers » éprouvent la satisfaction de savoir qu’ils ne sont pas « jetés-dans-le-monde » sans raison. Leur vie a de nouveau du sens, mais ils ne tarderont pas à sentir combien la plénitude de sens peut être étouffante. Car l’impératif de survie met en place un implacable asservissement de l’esprit. La mission de sauver la Terre constitue une lettre de cadrage qui s’impose rigoureusement à toute réflexion humaine. Dans le monde que dessine l’idéologie du Nouvel Age, la pensée ne reconnaît plus qu’un seul maître : l'instinct vital. La loi suprême de l’esprit, c’est maintenant le primum vivere. La notion même d’humanité ne se trouve-t-elle pas, de ce fait, gravement atteinte ? La loi du primum vivere nous dépouille de notre qualité d’hommes : dans le nouvel ordre biologique, il n’y a plus d’hommes à proprement parler, il n’y a que des humains (le concept d’homme implique l’idée de l’universel, tandis que l'humain est un genre du vivant), c’est-à-dire une espèce luttant, au même titre que les autres, pour survivre. Le totalitarisme du Nouvel Age est un mélange de biologisme et d'antihumanisme.

Dans les années 20, Julien Benda dénonça dans La Trahison des clercs l'attrait des intellectuels pour les valeurs d’action, qu’incarnait alors le fascisme. Les clercs trahissaient l’universel au profit du pragmatisme. Le Nouvel Age ne répète-t-il pas, à sa manière, cette trahison ? Ce n’est plus comme autrefois à la force qu’il soumet la pensée, mais à l’impératif de survie. Toute activité mentale qui n’apporte pas de contribution au salut de Gaïa perd sa raison d’être. Dans ce cortex planétaire, dans ce grand organisme neuroélectronique, il n’y a donc pas de place pour la liberté de l’esprit. Immergé dans le transpersonnel, l’individu n’a pas plus d’indépendance que la cellule nerveuse parmi les dix milliards de neurones de la boîte crânienne. Gaïa indique à ses neurones le contenu de toute pensée possible, et l'injonction s’adresse particulièrement aux hommes de pensée... Aucun philosophe, écrivain, poète, artiste, expert, journaliste, homme de science, intellectuel, ne saurait se dérober à sa responsabilité planétaire. Nul autre objet n’est digne de retenir l’attention. Il est interdit de laisser divaguer sa pensée et son imagination, alors que l’état d’urgence est proclamé dans le village planétaire, interpellant chacun de ses habitants. Dans le champ de conscience global, il n’y a pas de place pour le libre examen, pour l’esprit critique. Aucune petite voix n’a le droit de faire entendre un son discordant dans le grand unisson planétaire. La loi du primum vivere sonne le glas de la pensée solitaire et de l’intelligence contestatrice. Une pensée qui a reçu la mission de gérer le réel peut-elle revendiquer le droit de dire non à ce réel ? Dans le nouvel ordre biologique, il n’est plus permis de s’évader vers l'idéal, de se rebeller au nom d’une utopie quelconque, bref de porter témoignage d’un autre monde, car il n’y a plus que ce monde-ci. Le monde devient unidimensionnel. La pensée est détournée des choses célestes et ramenée inexorablement aux choses terrestres. Il faut qu’elle renonce à ses penchants idéalistes. Elle n’est plus que la servante du réalisme.

Il y a deux mille cinq cents ans, les Grecs inventèrent la skholê, c’est-à-dire le loisir, pour ouvrir à l’esprit l’espace de la morale, du débat politique, de la philosophie, de l'esthétique, de la science désintéressée. Ainsi la pensée occidentale prit-elle son essor. Or le Nouvel Age s’oppose à cette notion de loisir. Il interrompt la tradition de la vita contemplativa. Il ne connaît que la pensée opérationnelle, la pensée gestionnaire, fonctionnarisée, soumise à la loi de l'efficacité. N’est-ce pas d’ailleurs cette suprématie de l’utile qu’exprime le slogan familier du Nouvel Age : « Penser de façon positive » ? La pensée positive est présentée par le Nouvel Age sous un jour flatteur, mais il se pourrait bien que cette positivité soit la négation même de la pensée. Car que reste-t-il de l'essence de la pensée si on lui ôte le loisir, la gratuité, et si on lui demande de rendre compte de ses résultats ? Cette «obligation de résultats» constitue, pensons-nous, un véritable désastre philosophique. Le règne de la liberté de l’esprit, commencé sous le ciel de la Grèce antique, risque de prendre fin dans le cockpit du « vaisseau spatial Terre », avec la conscience humaine asservie aux instruments de bord, branchée sur les mécanismes régulateurs de la Terre et servant de timonier spatial...

Telle est la forme inédite de totalitarisme qu’invente le Nouvel Age.

Michel Lacroix, L'idéologie du New Age.


1) Solipsisme : théorie philosophique selon laquelle le sujet pensant ne peut admettre l'existence d'une autre réalité en dehors de lui-même.


L'idéologie du New Age




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mercredi, octobre 19, 2011

La réincarnation



Vu de l'extérieur, tout système de croyances religieuses est absurde. 

Vous buvez le sang de votre Dieu. Vous pourriez être un moucheron dans votre prochaine vie. Vous ne pouvez manger que des aliments considérés comme « purs ». Les victimes de handicaps et de maladies congénitales sont des pécheurs expiant les fautes commises durant une existence antérieure...

Dans Letting Go of God, un monologue autobiographique sur la religion, Julia Sweeney n'épargne pas le bouddhisme et son dogme de la réincarnation.

Julia Sweeney :

« Je suis allée voir en Thaïlande une femme qui s'occupait d'un petit garçon affreusement difforme. Je lui ai dit « C'est gentil à vous de vous occuper de ce pauvre enfant ». Elle m'a répondu : Ne dites pas pauvre enfant. Il a dû faire quelque chose de très mal dans une vie antérieure pour être né ainsi. »




Letting Go of God sur You Tube 


mardi, octobre 18, 2011

Les Arabes





Les Arabes aiment se concevoir comme un seul et unique « peuple », voire une « race » pure remontant à une seule souche : celle des tribus ayant soumis tout le bassin méditerranéen après avoir reçu la révélation de Mahomet. Les Européens raisonnent souvent de la même façon à leur égard ; mieux, ils ont une propension à considérer comme arabe tout ce qui est musulman, y englobant facilement les Iraniens, les Afghans et de nombreux autres peuples orientaux, sans même parler des Berbères (à l'inverse, ils sont toujours étonnés d’apprendre qu’il existe de fortes minorités d’Arabes non musulmans dans plusieurs pays du Proche et du Moyen-Orient, tant est forte la tentation intellectuelle de dresser une équivalence entre peuple, ethnie, langue et religion).

Pour les uns comme pour les autres, l'arabité serait « de sang ». Tous ceux qui se disent « Arabes » descendraient des mêmes ancêtres venus d’Arabie à l’époque glorieuse de l'expansion. La langue arabe (si importante comme fondement de l’identité) leur aurait été transmise en même temps que le sang des pères et le lait des mères.

Pour l’esprit candide, un mystère se fait jour : comment quelques tribus - si assidus que soient leurs hommes et leurs femmes à leurs devoirs matrimoniaux - ont-elles pu, en un siècle, peupler de leur descendance innombrable un vaste territoire allant de la Syrie à l’Espagne ? Les membres de ces tribus se seraient-ils multipliés par clonage ? À ce mystère s’en ajoute un autre : dans quelle trappe de l'histoire sont passées les populations qui habitaient auparavant ces territoires : laissés-pour-compte de l’Empire romain après sa chute, « barbares » de tout poil, Phéniciens, etc. ? Qu’est-il advenu de la population égyptienne, réputée être une fourmilière humaine ? On connaît, certes, la survivance de minorités rebelles à l'islamisation (juifs, coptes, chrétiens de toutes obédiences). On sait que certains ont fui, comme les zoroastriens de Perse. On sait que certains, comme les Berbères, ont accepté l'islamisation sans l'assimilation. Mais les autres ?

Laissons aux savants compétents le soin de répondre à cette double énigme. Cependant n’est-il pas logique de supposer que les tribus arabes de la conquête se sont considérablement étoffées en « arabisant » une partie des populations conquises ? Dans cette hypothèse, les Arabes le seraient à peu près dans la même mesure où les Français sont des Francs ou les Britanniques des Normands.

Loin d’être une communauté de sang pur, les Arabes pourraient bien être une des variétés humaines les plus métissées du monde méditerranéen. Une telle vue des choses, naturellement, coupe l’herbe sous le pied à un point de vue raciste sur « les Arabes ». Mais elle heurte aussi de plein fouet une des convictions les plus ancrées chez nombre d’entre eux de tenir leur identité ethnique et civilisationnelle de la pureté du sang originel. Conviction fort répandue, et cultivée par de nombreux peuples même quand elle est sans fondements !

Maurice Pergnier, La Désinformation par les mots.


La Désinformation par les mots

La Désinformation par les mots est un réquisitoire aussi cruel que pertinent sur l'usage admis de certains vocables, une fois ces derniers passés à la moulinette du politiquement correct. Aussi Maurice Pergnier s'en prend-il particulièrement à tous les thèmes qui " font problème ", et sur lesquels une position même légèrement dissidente effarouche les tenants de la " pensée unique " : les jeunes, les banlieues, la démocratie, l'islamisme, l'Europe, ou encore le multiethnisme.

Présenté sous la forme d'un dictionnaire alphabétique, La Désinformation par les mots bénéficie en outre d'une entrée en matière qui est un véritable morceau d'anthologie. Livre drôle, percutant et qui s'éloigne résolument des sentiers battus, l'ouvrage est vivement recommandé à tous ceux qui ont su conserver une authentique liberté d'esprit.

lundi, octobre 17, 2011

17 Octobre 1961





Le mardi 17 octobre 1961, à l'appel du FLN, les Algériens de la région parisienne tentent de manifester contre le couvre-feu décrété douze jours plus tôt par le préfet de police, Maurice Papon.

La répression sera atroce : plusieurs dizaines de morts cette nuit-là et les jours suivants... Le communiqué officiel de la préfecture de police ne fera état que de deux morts.

L'une des pages les plus sombres de l'Histoire de France enfin révélée. Inconsciemment occultée de la mémoire collective, volontairement étouffée par les autorités politico-administratives, la sanglante manifestation du 17 octobre 1961 refait surface grâce à cette minutieuse reconstitution des faits.
Par le biais de témoignages des acteurs du drame, d'extraits de presse et de quelques photos, on découvre ainsi avec horreur comment une manifestation d'Algériens venus protester contre l'instauration du couvre-feu a été violemment réprimée par les forces de l'ordre parisiennes dirigées alors par un certain Maurice Papon. Si la version officielle fait toujours état de deux morts côté manifestants et de deux blessés parmi les policiers, les recherches effectuées par Jean-Luc Einaudi montrent qu'au moins deux cents Algériens ont péri après avoir été fusillés, massacrés à coups de crosse ou jetés dans la Seine.

Bien documenté, ce récit chronologique provoque une intense émotion. Il s'apparente à un véritable devoir de mémoire à l'égard des victimes et prouve combien la guerre d'Algérie demeure une plaie à vif dans l'histoire de France. 
Sylvain Lefort

La bataille de Paris
17 octobre 1961


Ce livre raconte l'histoire de ce massacre perpétré en plein de cœur de Paris. Un massacre oublié pendant des décennies, refoulé par la conscience collective, étouffé par le gouvernement...

Le dossier complet de l'une des pages les plus sombres de l'histoire de la Ve République.





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dimanche, octobre 16, 2011

Georges Brassens & le programme Apollo





J'adore faire enrager Brassens. C'est mon vice. Le sien aussi à mon encontre, et il ne s'en prive pas. Certains sujets, autant par sincérité que par jeu, le font littéralement bouillir : l'architecture moderne (les architectes n'y connaissent rien) ; la révolution de la pop-music (Quelle révolution ? Est-ce qu’ils emploient des notes autres que les miennes ? Est-ce qu'ils jouent mieux de la guitare que Django Reinhardt ou Henri Crolla ?) et, sujet suprême, délice des oreilles, damnation d’Albert Ducrocq, la conquête de l'espace...

Un soir, sachant le résultat, j'ai abordé les mérites de la conquête spatiale avec Brassens, au cours d'un autre Campus Spécial (sur Europe 1, la radio périphérique la plus écoutée des années 1970).

- « Je ne suis pas d'accord avec toi, me répondit-il, d'abord calmement. Je considère ce voyage dans la lune comme une vaste foutaise et une rigolade. On nous prend pour des cons car nous avons d'autres problèmes à résoudre. Je ne connais même pas mes voisins et on veut que je délire sur la lune...

Je regrette infiniment de te le dire, mais ça ne m'intéresse pas, poursuivit-il en s’échauffant un peu. Ce qui m'intéresse, c'est ce qui se passe à l'intérieur de ta personne, et je ne le sais même pas. Le voyage sur la lune est une duperie...

Puis, enchaîna-t-il, rien ne te prouve que tout cela arrive vraiment. C'est peut-être du cinéma, tourné en studio. Cela me fait de la peine que tu attaches autant d'importance à ce voyage dans la lune qui n'en a aucune.

D'ailleurs, les Soviets, qui ne sont pas si cons qu'ils en ont l'air, y ont renoncé. Ils savent que ça ne sert à rien. Non, écoute, tant qu'on ne connaîtra pas l'homme, tant qu'on ne connaîtra pas son voisin, tout cela ne servira strictement à rien. »

- Mais cela correspond peut-être, répliquai-je hypocritement, à une sorte d'élévation mystique, à une inspiration quasi métaphysique ?...

Ce fut l'explosion, tant attendue, tant souhaitée :

- « Une élévation, aller dans la lune ? Ce petit satellite de rien du tout ? Peut-être même n'est-ce qu'un ancien morceau de la terre ? Non, mais tu te fous de moi ?

Si, à la rigueur, il s'agissait de Venus! La conquête de la lune, c'est étonnant avec Jules Verne. C'est poétique. Tu peux rêver... Non, laissez ma lune tranquille, messieurs les cosmonautes ! »

Puis il acheva :

- « Le voyage dans la lune, c'est un truc pour duper les gens, pour leur faire oublier le reste et pour leur voler l'argent qu'ils ont dans leurs poches... On leur fait lever la tête, et pendant ce temps-là, on leur vide le portefeuille... »

Nous partîmes tous les deux d’un éclat de rire. Ce fut la fin de cette émission.

Mais plusieurs mois après, je reparlais avec un ami de cette envolée-boutade de Georges. Et lui me répondit, simplement, sans rire :

- « Brassens a raison, Ou sans le savoir, il a eu raison. N'as-tu pas remarqué que le gouvernement américain avait attendu le voyage d'Apollo 14 de février 1971 pour envahir le Laos ? »

Michel Lancelot


Brassens, Ferré, Brel et l'anarchisme




Dessin :

samedi, octobre 15, 2011

Amaroli, le culte du Pipi






« Il existe dans l’univers une force supérieure au monde matériel, une force solaire qui amène l'ordre et l'organisation de la vie à tous les niveaux. Cette force ne connaît pas l’échec. Elle est une sorte d’église sans prêtre, l’église de l’ordre cosmique. La pratique d’Amaroli est un rituel pour se laver soi-même. On met les mains en bas pour recueillir l'urine comme pour un baptême. Dans le désert il n’y avait pas de flacon, on urinait dans le creux de sa main et on offrait Amaroli au soleil avant de le boire. Amaroli est une véritable eucharistie avec soi-même. En le pratiquant on se libère non seulement des maladies physiques mais aussi des formes-pensées négatives qui les ont engendrées.

La mort, très souvent, est un acte suicidaire par lequel on accepte les limites de la tradition sociale. Mais il est possible à chacun d’aller dans son laboratoire secret, au plus profond de lui-même, et de changer ses formules génétiques. A ce moment-là, la mort peut devenir une décision que l’on prend et non plus une fatalité, un aveu d'impuissance. Le stress, à un niveau cellulaire et à un niveau psychique, est dû à l'habitude de se mettre constamment à l'écart de l'onde vibratoire du divin. Amaroli est l'une des clés les plus puissantes pour se remettre en phase avec ce flux de vie et découvrir les forces d'auto-régénération du corps. Les Esséniens avaient constaté que la pratique d’Amaroli ouvrait l’individu à une capacité de pouvoir vibrer et pulser avec l'univers tout entier. Dans la tradition hindoue, le dieu qui correspond à l’urine est Ganesh, qui est relié à l'énergie de la nativité, de l'innocence et de l'enfance. Amaroli est le chariot doré qui permet de repartir vers son enfance originelle. C’est un acte de resacralisation de soi-même, un geste de confiance en la vie et en son immense pouvoir de transformation. » Amaroli, Éditions Vivez Soleil.


Milarepa, le grand yogi du Tibet, a dit :

« Lorsque j'ai soif, je bois de l'eau pure des sources. A d'autres moments, je bois ma propre urine. C'est le flot de la fontaine de la compassion et, en la buvant, je bois le nectar des dieux. »

Selon la revue bouddhiste Samsara (numéro 5, mai/juillet 98), l'urine des femmes enceintes serait une arme contre le sida.

Les pilules de « nectar » des lamas tibétains, le régime alimentaire des aghoris indiens, la coprophagie et le cannibalisme rituels évoquent des formes de schizophrénie. En revanche, l'ingestion de l'urine, préconisée par de nombreux thérapeutes du Nouvel Age, n'est pas l'indice d'un grave déséquilibre psychique. En effet, la croyance dans les vertus thérapeutiques de l'urine est très répandue. Mais la thérapie par l'urine n'est-elle qu'une vieille superstition réhabilitée par des médecins dissidents qui se qualifient de Naturopathes ? Le docteur Christian Tal Schaller est l'un de ses médecins, il écrit :

« Malgré mes "réticences scientifiques" et mon dégoût psychologique pour une thérapie aussi saugrenue, je décidai d’essayer l'urinothérapie sur moi-même. Je fus émerveillé de l'amélioration de ma vitalité et de ma santé globale et ne pus alors que conseiller cette méthode à ceux de mes patients qui semblaient capables d’accepter psychiquement une thérapie aussi peu conforme aux idées reçues.

En effet, en Occident, au XXe siècle, la plupart des gens ont été éduqués à croire aux "prodiges" de la médecine moderne et à attendre de l’industrie pharmaceutique la solution à tous les maux ! Or l'urinothérapie élimine tous les intermédiaires : médecin et pharmacien sont remplacés par "le médecin et le pharmacien biologiques intérieurs" qui vont, avec la sagesse qu’ils ont acquise en quelques millions d’années d’évolution, préparer le remède adéquat," sous forme d’urine fraîche. »

Le docteur Schaller a écrit ces lignes il y a environ vingt ans. Amaroli ou l'urinothérapie, qui était la technique de guérison secrète des yogis et des adeptes du Tantra, est depuis largement connue et pratiquée. « Mais, rétorque Michel Lafosse, si cette thérapie (paraît-il ex-secret d’État) a autant d'adeptes (des millions) à travers le monde, on ne devrait pas tarder en récolter les bienfaits... Ce sera la plus grande révolution des temps modernes : malades et maladies auront fondu comme neige au soleil. Ainsi, chaque ex-malade redevenu enfin souverain de son corps (la souveraineté fait partie de la propagande de ces médecins dissidents en recherche de popularité), des légions de médecins se retrouveront au chômage... Dans le cas contraire, ça voudra peut-être dire que la thérapie par l'urine est une illusion de plus qui repartira aussi vite qu'elle est revenue... »

vendredi, octobre 14, 2011

Human meat





Le végétarien Albert Mosséri (87 ans) a consacré sa vie à l'hygiène alimentaire. Cet auteur de nombreux livres sur l'hygiénisme de Shelton affirme que les êtres humains doivent retrouver les règles alimentaires naturelles pour que les animaux mangeurs d'hommes disposent d'une nourriture saine.

Dans sa revue, « Le bon guide de l'hygiénisme », Albert Mosséri écrit :

Quand nous condamnons la viande, on nous pose la question enfantine suivante :

- Pourquoi les animaux existent-ils ?

On sous-entend par là que si les animaux ne sont pas là pour être mangés, alors pourquoi existent-ils ?

Notre attitude envers tous ce qu’il y a dans la Nature est de penser que tout ce qui existe existe pour l’homme.

J’ai réfléchi à cela longtemps et je suis arrivé au point de vue exactement opposé !

On pensait que les éléphants existent pour que l’homme puisse fabriquer des boules de billard de leurs défenses en ivoire.

On pensait que les loups argentés existent pour que les femmes puissent avoir des fourrures, que les oiseaux existent pour que les dames puissent décorer leurs chapeaux avec des plumages colorés et que plusieurs autres animaux existent pour que l’homme puisse manger leur chair.

Au siècle passé, un médecin enseignait que l'on pouvait manger les vers dans les fruits sans problème. Il pensait sans doute qu’un beau vers nourri d’une pomme était une bonne source de protéine de haute qualité.

Or, la conclusion à laquelle je suis arrivé, après bien de réflexions, est que les animaux existent pour manger l’homme ! ! !

En discutant cela avec un tigre mangeur d’hommes, j'ai été surpris de l'entendre dire :

- Si l’homme n’existait pas pour me fournir des protéines de bonne qualité, pourquoi existerait-il ?

Le tigre et le requin mangeurs d’hommes ne font qu’accomplir leur rôle normal dans la Nature en dévorant l’homme.

Les parasites qui s’attaquent à l’homme ne font que leur devoir normal. L'homme existe ainsi pour être mangé.

Il s’ensuit que si l’homme doit fournir aux animaux dont il est la proie une bonne nourriture, comment doit-il manger ?

Quels sont les aliments qui bâtissent la meilleure chair et la plus savoureuse pour que le tigre, le requin et les moustiques soient bien nourris ?

Certes, notre devoir devrait être de fournir les meilleurs aliments que nous pouvons pour ces animaux. Nous ne devrions jamais nous résoudre à leur fournir des aliments inférieurs.

Nous devrions pouvoir établir un régime presque parfait pour l’homme et par conséquent pour les animaux dont il est la proie, en suivant les règles suivantes :

1) Déterminer la vraie position de l’homme dans la Nature,

2) Examiner soigneusement son passé historique,

3) Étudier les besoins nutritifs de l’homme,

4) Étudier les qualités et la composition des différents aliments...

Les réflexions de Mosséri pourraient donner à J. Martin, le maire UMP de Nogent-sur-Marne, ainsi qu'à tous ceux qui interdisent aux pauvres de chercher de la nourriture dans les poubelles, l'idée d'alimenter sainement les miséreux pour améliorer l'ordinaire des tigres et des requins. L'auteur satirique Jonathan Swift n'avait-il pas suggéré aux indigents de vendre leurs enfants comme nourriture ? ("A Modest Proposal", 1729)


Aghoris, cannibales & coprophages





Les sadhus Aghoris sont le plus souvent nomades et ne restent pas plus de six mois dans le même lieu de crémation. Ils tiennent dans la main gauche leur crâne humain comme le bol du mendiant, et dans la main droite une clochette qu'ils agitent lorsqu'ils chantent « Om Shambhu Bhairo » (Shambhu et Bhairo sont deux des deux mille noms de Shiva). Le sadhu aghori consomme même des corps décomposés, et lorsqu'il mange des matières fécales et boit de l'urine, il mélange souvent les excréments à de l'eau qu'il filtre a l'aide d'un tissu, pour ensuite la boire ; il croit qu'une telle libération des asservissements humains l'aidera à atteindre la grandeur spirituelle. [...]

Diplômé et fils de journaliste, Ram Nath est devenu sadhu aghori après avoir rempli de nombreux emplois. Titulaire d'une licence en sciences économiques, il a débuté sa vie d'adulte comme enseignant dans une école religieuse (où les salaires ne sont jamais payés en temps voulu) dans le Bihar, son État d'origine ; puis il a travaillé comme employé de bureau dans une sucrerie, comme coursier dans un commissariat de police et plus tard dans un tribunal. Las de cette situation professionnelle instable, il a émigré au Jammu où il a trouvé, avec l'aide d'un ami, un emploi de représentant de commerce. Ce travail l'a souvent conduit dans la pittoresque vallée du Cachemire et au Ladakh, berceau des bouddhistes de l'lnde et du culte tantrique, mais comme le climat politique du Cachemire se détériorait, il a ensuite décidé de partir a Ludhiana, la capitale industrielle du Punjab. ll y était employé à des tâches serviles dans un dhaba, une gargote de passage, ou il était payé pour toute sa journée de travail sous forme de trois repas copieux ; mais il pouvait s'acheter sa ration d'herbe (hachisch) grâce aux pourboires de la clientèle. De Ludhiana, il s'est rendu à Haridwar, siège de nombreuses sous-sectes religieuses, et un des hauts lieux de pèlerinage pour les hindous. C'est dans le temple Chandi (dédié à la déesse Chandika), situé sur une petite colline, à l'opposé du Gange, qu'il a rencontré l'homme qui, il l'a su au premier coup d’œil, allait devenir son guru, et qui l'a initié en août 1984 à l'ascétisme éprouvant de l'Aghori

Ram Nath admet que les austérités et sacrifices (tapasya) de l'ascète aghori sont très éprouvants, mais que c'est grâce à cette discipline sévère et grâce aussi à la bénédiction de Dieu qu'il arrive à maîtriser toutes ses facultés sensorielles. Il nous a expliqué que depuis sa longue période de méditation de quatre-vingt-seize jours qui a pris fin le 13 février 1991, il ressentait une grande paix intérieure (shanti), et qu'il avait l'impression d'avoir reçu un grand amour spirituel. Depuis six ans qu'il se soumet à la discipline aghori, il sent de plus en plus qu'une force éclaire son esprit. Il est toujours en quête de l'Absolu, mais son caractère semble avoir beaucoup changé : « J'étais grossier et me mettais facilement en colère. Maintenant je suis calme et posé. » Amusé, il a ajouté : « Je suis devenu un sâdhu gentleman. » Il nous a révélé ce jour-là, en présence de son guru, quelques phénomènes bizarres auxquels il avait été confronté sous l'effet d'une profonde agitation intérieure. Une fois, il lui est arrivé de ne trouver le calme qu'après avoir uriné dans son crâne-bol et en avoir bu le contenu. Un autre jour, alors qu'il était dans un état dépressif, pris par un accès de folie et tenaillé par la faim, il a arraché le pied grillé d'un corps humain qui brûlait sur un bûcher funéraire, et en a mordu trois bouchées avant de retrouver la raison. Une autre fois encore, il s'est révélé encore plus diabolique : il a arraché d'un corps humain une cuisse à demi-cuite dont il a mangé quelques morceaux et dont il a caché les restes dans sa hutte.

Ramesh Bedi




Photo Rajesh Bedi, le sadhu Ram Nath.


jeudi, octobre 13, 2011

Ni Dieu ni maître, le clash entre Léo Ferré et Claude Nougaro





En 1968, Michel Lancelot crée l'émission vedette d'Europe n° 1, Campus, où il a l'occasion d'aborder tous les grands problèmes de notre civilisation.

Au cours d'un Campus spécial intitulé « 30-40-50 » qui réunissait trois générations de chanteurs-auteurs (Bontempelli, Nougaro, Ferré), nous avons abordé le concept de la violence. Nombre de jeunes révolutionnaires ont dû trouver, ce soir-là, l'écho de leurs méditations dans les propos de Léo Ferré :

« Je pense que la violence pour un écrivain est une chose qui va de soi, dit-il en substance. Surtout à l'époque où nous vivons. A partir du moment où l'on n'est pas d'accord sur quelque chose, et qu'on le dit, on est forcément violent.

La violence est une façon de vivre. Elle n'est pas seulement coups de poing, matraques et rafales de mitraillette, bien évidemment. Elle est surtout l'idée qui fait des petits dans la tête des gens qui n'ont pas le temps d'y penser. »

Mais, curieusement, tout comme Brassens, Léo Ferré pense qu'il vaut bien mieux balayer devant sa porte que de passer l'aspirateur dans le monde. « Quand on parle de la guerre des autres, dit-il, il faut partir et aller la faire. Pour cette raison, je n'ai jamais employé le mot Vietnam ou le mot Biafra. Et puis, nous qui chantons, ne sommes-nous pas installés dans notre petite vie bourgeoise, avec nos cigarettes, nos petites femmes, notre réfrigérateur et notre chauffage central ? »

« En fait, ajoutait-il, je n'aime pas les gens qui agitent des idées dans des bureaux, sans être des opérants de ces idées. Un jour, on est venu pour me faire signer le tract des 121. J'aurais été le 122ème mais j'ai refusé. Les idées généreuses autour d'une table ne sont pas aussi généreuses que cela. »

Mais revenons a cette émission « 30-40-50 ». Trois générations d'hommes. Trois générations d'artistes. On peut entendre Léo Ferré y raconter mai 1968 :

« Il y a eu une explosion de romantisme extraordinaire dans les nuits de mai, commença-t-il. On a coupé les ailes à ces jeunes au cours de ces nuits qui n'étaient pas celles de Musset. Mais à présent, regrettait-il, ces jeunes gens s'en vont doucement dans la brume du vieillissement, ils vont entrer dans un bureau, dans un garage. Ils vont faire un métier, se marier, avoir des mômes, avoir besoin d'argent. Alors, je suis tenté de leur tendre la main, au nom du souvenir du romantisme de mai...

Mais il faudrait en sortir de ce romantisme-là. »

Ce romantisme de mal 1968, Nougaro l'ayant lui, au contraire, exalté en ces termes :

« C'était une bouffée vers le ciel, un Besoin d'absolu, une sorte de romantisme métaphysique, disait Claude. Je croyais qu'on allait fabriquer une violence, mais une violence mentale, compte tenu qu'on ne cesse de s'entre-massacrer depuis des siècles. Je croyais que nous allions sortir de cette baignoire de sang... » Et finalement, dans Paris Mai, il n'y a qu'une solitude terrible. Cette chanson ne fait que souligner la pénurie spirituelle qui règne actuellement... « J'espérais que l'on allait se battre enfin avec des mots, de vrais mots, et non pas faire des omelettes à l'intérieur du casque des C.R.S., ce qui, à mon avis, ne marque aucun progrès. Ce fut la pagaille. La cour des miracles qui hélas, n'en furent pas. »

Nougaro avait à peine terminé que débuta la plus belle engueulade radiophonique de ma carrière. Léo commença par affirmer :

- « L'important n'est pas ce que nous pensons de mai 1968. L'important est de savoir que l'on ne peut pas se battre avec un pavé contre une mitrailleuse. Il faut lutter avec une mitrailleuse contre une mitrailleuse. C'est tout.

Les jeunes veulent casser la gueule aux vieux, et ils ont raison. On me dira que je suis vieux. Eh bien, s'ils me cassent la gueule, tant pis !

Et que l'on ne me dise pas que je fais de la politique. C'est un mot, faux. Les politiciens sont des gens malhonnêtes qui essaient, du premier jusqu'au dernier, d'avoir leur « cacheton » à l’Assemblée nationale.

Quant à la gauche, poursuivit Léo Ferré, apostrophant quelque invisible adversaire, la gauche est une bâtarde. Une salle d'attente en attendant d'être à droite.

L'anarchie, voilà ce vers quoi il faut tendre. L'anarchie, ce n’est pas détruire, C'est d'abord la solitude. C'est endosser ses responsabilités. Tout seul. C'est décider une fois pour toutes : quel-que-soit-le-gouvernement-en-place-je-ne-veux- pas-prendre-des-coups-de-pied-dans-le-cul ! C'est ça l'anarchisme. »

« Et pour mettre quoi à la place de l'homme qu'on va détruire ? s'interposa Nougaro, qui, lui aussi, commençait à pâlir. L'homme encore, le même, sous une étiquette différente, avec d'autres idées... Les mêmes finalement. Tout régime fabrique ses C.R.S. et ses FLICS. »

- « Mais ce sont les régimes qu'il faut foutre en l'air ! s'exclama Léo Ferré. Il faut tuer, chaque jour, un chef d’État. Pendant six semaines. Pendant six mois. »

- « Mais, objecta de nouveau Nougaro, dis-moi pourquoi ? Ils vont être remplacés par la même graine. Ce qu'il faut analyser, c'est justement la graine de l'homme. Il faut se pencher sur lui comme un géologue se penche sur une coupe de terrain, avec des épaisseurs de schiste, de calcaire, d'argile, etc. ; comme sur un insecte... »

- « C'est sans doute pour cela que tu as une tête d'entomologiste, répliqua Ferré sèchement. »

Il y a, ce soir-là, « deux têtes de lard » dans le studio. Et, naturellement, la conversation s’envenime :

- « Je suis allé t'entendre chanter à Bobino, reprend alors Nougaro. D'abord Ni Dieu ni Maître, je déteste cette formule. Le grand pari, c'est de prouver que Dieu existe au lieu de lui arracher des poils de barbe ! De plus, eh bien, à mesure que tu chantais, l'atmosphère de la salle devenait rouge. Tu fabriquais du sanglant. Tu fabriques une violence physique qu'un jour tu vas recevoir en boomerang sur la gueule ! Il y a dans ton message un fanatisme, un aveuglement qui pour moi portent les couleurs du sang, et par conséquent de l'horreur ! Et je suis parti furieux, à la fin du spectacle... »

- « Tu exagères, dit Ferré qui a retrouvé son calme. Dans ce tour de chant, je dis des anarchistes qu'ils ont des couteaux pour trancher le pain de l'amitié et des armes rouillées...

Ce que les membres de la Fédération anarchiste m'ont reproché d'ailleurs, parce qu'ils estiment qu'ils n'ont pas que des armes rouillées. Je les crois. Mais qu'ils les sortent !

Ailleurs, je dis Ni Dieu ni Maître, c'est merveilleux. C'est une parole fantastique.

Un peu plus loin, je chante : « Et si vraiment Dieu existait, il faudrait s'en débarrasser! » N 'est-ce pas mieux que de dire comme ça, au flan, « Dieu n'existe pas ». Mais si vraiment il existe, on va lui dire merde. On va le suriner. Et puis après, on meurt. C'est pas merveilleux ?

Cela dit, je fais un tour de chant insurrectionnel. Bon, d'accord. Qui m'aime me suit. Quant à toi, Claude, sors de ton angélisme, sors de ton cocon ! »

Quelques minutes plus tard, l'émission terminée, Nougaro parti, Ferré me parlait de lui avec la plus, grande tendresse. Il avait déjà oublié l'algarade. Aucune amertume, aucune agressivité dissimulée dans ses propos. Pas un brin de rancune. Léo, tout comme Claude, s'était exprimé franchement, sur le coup de la colère. Mais c'était déjà du passé...

A propos de l’Église et de Dieu, Ferré a l'habitude de ne pas être tendre, contrairement à Brassens. Un jour, au Maroc, avec Maurice Frot, son copain, ils ont dit aux musulmans, désignant le muezzin « qui gueulait une prière du haut de sa tour » : « C'est à celui-là qu'il faut casser la gueule ! »

Pour Léo Ferré, un gouvernement tient le peuple par la flicaille dans la rue et par des idées et des injonctions religieuses. Si Léo Ferré éprouve une haine, c'est, autant que j'ai pu en juger, envers tous les clergés du monde.

« La plus grande escroquerie qui ait jamais existé, m’a-t-il affirmé un jour, c'est le Christ. Et le plus grand imprésario, c'est le Vatican. Et le spectacle dure depuis deux mille ans ! »

Je n'ai jamais vu, dans l'univers du show business français, un personnage animé d'une telle fureur de vivre et de parler. Une sorte de fébrilité intérieure, un appétit féroce de ce qui est neuf, de ce qui bouscule, de ce qui dérange. « Je suis de demain matin », dit-il volontiers.

Oscillant entre les névroses issues de son enfance et les ambitions phénoménales d'un adulte de cinquante ans, bourré de contradictions attachantes, Léo s'agite, hurle, insulte, crie, crée des chansons admirables, prend parti pour l'un, attaque l'autre ; fidèle dans ses amitiés (j'ai pu le constater personnellement), il trimballe sa dégaine de vieil adolescent avec insolence.

« On ne choisit pas, dit-il. Il ne faut pas choisir, sinon, on est piégé, on est foutu. Il faut vivre libre de soi et des autres. La liberté, c'est le seul mot digne après le mot amour. Il faut éviter, échapper à la fourmilière qu'on nous prépare, et qui a déjà commencé.

Puisque les maîtres existent, il faut leur cracher à la gueule. Il faut être indiscipliné. Il faut se forcer à être solitaire et digne, quitte à se donner des coups de pied dans le cul ! »

Léo Ferré crie tout cela. Mais il dit aussi des mots tendres. L'amour malheureux, l'amour caché, l'amour volé, l'amour appris, l'amour inventé au coin de la rue, l'amour défendu par des millénaires d'injonctions et d'impératifs moraux, l'amour et la femme, l'amour et la mère. Et nous, qui sommes les enfants. Et cette femme, qui est un être « à la fois extraordinaire et dangereux ». Toutes ces actions interdites et profanées, c'est aussi l'univers de Ferré.

Obsession de l'amour des hommes et des femmes. « Le drame de l'amour, c'est quand on dort, dit-il. Il ne faudrait jamais dormir à côté de celle que l'on aime. Le sommeil est une mort figurée. Pourquoi mourir ensemble ? » Obsession qui, dans ses propos, frôle parfois un délire fascinant. « Quoi de plus extraordinaire que l'amour adultère que l'on châtie depuis des siècles... C'est la plus belle fleur de l'amour, que l'on cherche à tâtons, avec une lanterne... Le péché d’Ève, ce n'est pas une pomme, c'est une pomme cuite... Mais, j'aime les pommes cuites... Je ne trouve rien de plus beau qu'une femme enceinte, plastiquement. Le mariage : abominable; le côté administratif de l'amour, le côté état civil, le côté de l'anthropométrie. On signe et nous voilà parqués. On va chez M. le Maire et M. le Machin après... Et la femme, toute seule, fait son enfant. Et elles nous le font bien savoir... Nous autres, nous ne sommes que des passants. De déplorables passants. »

Ni Dieu, ni Maître, ni Épouse ; il reste aux hommes l'amitié. Demain, avec un peu de chance, ils trouveront la fraternité.

Michel Lancelot, Campus.


Un rabbin affirme que les Juifs sont des extraterrestres venus pour « conquérir » la Terre.

Le rabbin Michael Laitman est l'auteur de "Kabbalah, Science and the Meaning of Life". Le livre retrace les étapes de l'év...