Alexandra David-Néel, ni bouddhiste, ni spirituelle
(mais franc-maçonne*)
(mais franc-maçonne*)
Marion Dapsance et Frédéric Lenoir (un petit "philosophe" qui a profité de la bouddhamania pour vendre beaucoup de livres). Ils ont tous les deux fait leurs doctorats sur le bouddhisme à l'École pratique des hautes études, à Paris.
Bouddha « un anti-Christ »
L’anti spiritualité d’Alexandra David-Néel
Enfant unique d’un couple de commerçants, la jeune Louise David, née à Saint-Mandé (Val-de-Marne) en 1868, cherchait un sens à sa vie qu’elle ne trouva pas dans le catholicisme, la religion de sa mère, même si elle songea un temps au carmel « par idéal romantique », selon Marion Dapsance.
Trahison de la pensée bouddhique
C’est dans ces milieux orientalistes, marqués à la fois par l’ésotérisme et le matérialisme, que Louise David a découvert le bouddhisme à partir de 1890. Et c’est donc à travers ce prisme qu’elle l’analysa. Ce qui fait dire à l’auteure que « Louise David, occultiste athée, a joué un rôle important dans la trahison de la pensée bouddhique qui revendique précisément l’indépendance totale de l’esprit par rapport à la matière – rendant seule possible la transmigration ».
Autre spécificité de Louise David, selon Marion Dapsance : son objectif, à 30 ans, n’était ni l’épanouissement personnel ni le service d’autrui, « mais simplement la survie face à une société conçue comme aliénante ». En ce sens, elle adhéra à un club anarchiste bruxellois et s’engagea dans la rédaction d’écrits politiques et féministes – à une époque où une femme qui ne souhaitait pas se marier n’avait guère d’autre choix que de devenir une « demi-mondaine », tout en poursuivant une carrière de chanteuse sous le pseudonyme d’Alexandra Myrial.
Le panthéisme hindou, "un athéisme mystificateur et cynique"
Après avoir épousé à 36 ans Philippe Néel de Saint-Sauveur, elle continua sa vie d’errance entre capitales européennes, Asie et Afrique du Nord – elle fut un temps directrice artistique du casino de Tunis. Son mari ayant mis sa fortune à sa disposition, même s’ils ne vécurent jamais ensemble après leur mariage, celle qui est désormais connue comme Alexandra David-Néel part pour l’Inde, en 1911, avec l’intention d’écrire sur « Le Vêdanta vivant ». Elle y rencontre quelques brahmanes mais, à aucun moment, ne recherche un guru ou un guide spirituel : à ses yeux, écrit Marion Dapsance, « le panthéisme hindou est un athéisme mystificateur et cynique ».
Avec ce même manque d’estime pour ce qu’elle appelait le « lamaïsme », l’exploratrice rencontre à Kalimpong, près de Darjeeling, le 13e dalaï-lama dont elle parle comme du « pape jaune » ou du « grand manitou ». Et « lorsqu’elle constate la religiosité des peuples de Ceylan, d’Indochine et du Tibet, elle conclut, dénonce Marion Dapsance, que ces gens ne sont pas des bouddhistes authentiques
».
*) Dès 1888, Alexandra David-Néel fréquente la franc-maçonnerie et atteindra le 30ème degré dans le rite écossais ancien et accepté.
de Marion Dapsance
Alexandra David-Neel (1868-1969) est présentée comme une figure spirituelle majeure du XXe siècle. Ses longs voyages en Inde et en Asie, sa connaissance du bouddhisme et des coutumes tibétaines, son intérêt pour les philosophies orientales laissent penser que cette femme de lettres s'est engagée dans une quête mystique et a fini par adopter les croyances de l'Extrême-Orient.
Une lecture attentive de ses écrits montre qu'Alexandra David-Néel était au contraire une matérialiste convaincue, hostile à toute forme de religion.
Ce livre, fondé sur des textes connus, oubliés et inédits, retrace l'itinéraire de cette femme hors du commun. Il montre la manière dont la jeune artiste lyrique Louise David, catholique convertie au protestantisme, à l'ésotérisme fin-de-siècle, puis au nihilisme et à l'anarchisme, s'est inventé un programme de vie hétéroclite qu'elle nomma « modernisme bouddhiste » et qui lui inspira un personnage devenu mythique : Alexandra David-Néel, journaliste-orientaliste, « lampe de sagesse », « femme aux semelles de vent »